354 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. que lesdits fonds diminuent chaque année graduellement, sans que, sous aucun prétexte, il y ait lieu au remplacement d’aucune des personnes qui auront été employées dans les deuxième et troisième liste. » Art. 16. « Les quatre listes seront rendues publiques par la voie de l’impression, avec l’exposé sommaire des motifs pour lesquels chacun de ceux qui s’y trouveront dénommés y aura été compris. « Art. 17. « Les pensions accordées commenceront à courir du 1er janvier 1790; mais sur les arrérages qui reviendront à chacun pour l’année 1790, il sera fait imputation de ce qu’on aurait reçu pour ladite année, en exécution du décret du 16 de ce mois. « M. Camus, rapporteur. 11 ne nous reste plus qu’à vous présenter quelques articles sur des observations qui ont été faites et des exceptions qui ont été demandées. Nous vous proposons de faire connaître vos intentions par le décret suivant : « L’Assemblée a délibéré, au surplus, de maintenir les exceptions qu’elle avait déjà provisoirement votées en faveur des pensions accordées aux familles d’Assas et de Chambor, ainsi que pour la pension du général Lukner, et en outre de renvoyer aux trois comités, soit la demande de la veuve et des enfants du feu maréchal de Lowendal, soit les exceptions réclamées par les officiers étrangers. « (Adopté.) Les cent vingt citoyens , députés par la commune de Paris , pour le pacte fédératif présentent une pétition par laquelle ils proposent à V Assemblée d’assurer la mémoire de la journée du 14 juillet dernier , en éternisant, autant qu’il sera en elle, le monument admirable qui a reçu dans son sein les enfants de la patrie, les premiers nés à la liberté. L'Assemblée renvoie au comité de Constitution cette pétition qui est ainsi conçue : « Messieurs, les 120 députés des 60 districts de la capitale, chargés de l’exécution du pacte fédératif, après avoir achevé la mission honorable qui leur a été confiée, viennent soumettre à vos lumières le vœu qu’ils ont unanimement formé, pour immortaliser l’acte auguste et solennel qui a fixé à jamais les devoirs et garanti le bonheur de tous les citoyens de cet Empire. Le projet heureux et vaste de la confédération générale des Français, conçu parla commune de Paris, accueilli par vous avec empressement, vient enfin de se réaliser sous vos auspices et avec le concours d’un roi citoyen. La France a vu dans une seule journée, dans une seule enceinte toute sa famille unie par les douces étreintes de la fraternité, jurer, sous la voûte du ciel, autour de l’autel de la patrie, attachement inviolable à la Constitution qui est votre ouvrage, soumission à la loi et fidélité au roi. Ainsi s’est accomplie la touchante commémoration de l’époque du 14 juillet, de ce jour où vingt-cinq millions d’hommes ont recouvré leurs droits et leur liberté. 11 est juste, il est nécessaire que vous assuriez la mémoire de cette grande journée en éternisant, autant qu’il est en vous, le monument admirable qui a reçu dans son sein les enfants de la patrie, les premiers nés de la liberté. Que ce cirque immense, formé en trois jours par les mains d’un peuple de frères, soit conservé pour nos neveux, et que la matière en soit, [26 juillet 1790.] s’il se peut, aussi durable que le souvenir de l’objet pour lequel il a été construit. Que le marbre transmette à nos descendants l’autel majestueux sur lequel le dieu des nations a été pour la première fois invoqué au nom de la liberté et de l’égalité.' Qu’au même lieu et sur le même sol où le premier roi d’un peuple libre a juré de maintenir la Constitution et de gouverner par la loi, soit placée une table d’airain, sur laquelle ce serment gravé devienne le type impérissable des devoirs de ses successeurs. Que le Champ-de-Mars enfin soit dédié à notre postérité sous le nom de champ de la fédération; que ce champ soit à l’avenir le lieu où nos rois seront investis du pouvoir qui leur est délégué par la Constitution, et où ils jureront de n’en jamais franchir les limites. Telle est, Messieurs, la pétition de la ville de Paris, interprète des vœux de toute la France : il est digne de vous de l’adopter et de la consacrer par vos décrets. Vous verrez tous les citoyens de toutes les parties du royaume s’empresser de souscrire pour l’édification de ce monument, de ce palladium, auquel sera désormais attachée la fortune publique; et cet empressement sera un nouvel hommage rendu à votre sagesse et à votre patriotisme. Les cent vingt citoyens députés par la commune de Paris pour le pacte fédératif. Ciiaron, président. » M. d’AIlarde fait un rapport sur la proposition faite par M. de Vismes, fondé de la procuration des Génois , de prêter à la nation soixante-dix millions, tant en espèces qu' intérêts échus et créances exigibles , remboursables en annuités de dix années , à compter de 1790 (1). Messieurs, lorsqu’en vertu de vos décrets, la municipalité de Paris était autorisée à emprunter, pour garantir l’acquisition qu’elle avait proposé de faire de biens nationaux, le sieur de Yismes se présenta et offrit de prêter jusqu’à concurrence de 70 millions, conformément à votre décret du 9 avril, sanctionné par le roi. Les offres consistaient à fournir ces 70 millions, savoir, un quart comptant; les trois autres quarts en arrérages échus et autres créances liquidées, le tout à l’intérêt de 5 0/0, remboursable, par égale portion, en dix années, dont le premier remboursement ne devait avoir lieu que deux ans après le dépôt. Sur cette proposition, M. le maire de Paris et M. de La Rochefoucauld, président du comité de l’aliénation des biens nationaux, à qui elle fut communiquée, observèrent qu’aucun projet d’avances ni d’emprunts ne pouvait être agréé ni proposé qu’autant que le sieur de Vismes rapporterait une soumission régulière, signée de capitalistes accrédités. D’après cette instruction, le sieur de Vismes est parti pour Gênes le 9 mai ; il y a opéré avec succès, et a rapporté une soumission signée des premières et des plus opulentes maisons de Gênes, qui sont comptées parmi les plus riches de l’Europe. Cette soumission est conforme au projet du sieur de Vismes; elle renferme l’obligation : 1° de fournir dix-sept millions cinq cent mille livres , argent comptant, et cinquante-deux millions cinq cent mille livres , tant en quittances (1) Lo Moniteur ne donne qu’une analyse de ce rapport. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 juillet 1790.] 355 d’intérêts ou arrérages échus depuis 1788 et à échoir jusqu’au 1er janvier 1791, qu’en capitaux ou effets sur les fonds publics de France portant intérêt à 5 0/0, desquels arrérages échus les intérêts courront à compter du 1er octobre prochain; et de ceux à échoir à la fin de 1790, les intérêts courront à compter du 1er janvier 1791 ; 2° d’attendre deux ans pour le commencement du remboursement, qui aura ensuite lieu en dix années, et do toucher les intérêts par semestre, sur le pied de 5 0/0 l’année. Pendant le voyage du sieur de Vismes, qui n’a duré que cinq semaines, vous avez, Messieurs, rendu un nouveau décret, qui dispense les municipalités de tout cautionnement, et qui conséquemment rend inutile l’emprunt projeté par la ville de Paris. Le sieur de Vismes, avant de rendre aux Génois le titre qui les engage, persuadé que cette opération peut être utile à vos finances, a désiré qu’elle fût mise sous vos yeux; et le comité des finances, sans émettre aucun vœu à ce sujet, a cru ne pouvoir se dispenser de vous exposer le fait qui montre au moins la confiance que de riches et habiles étrangers mettent dans la solidité de vos finances, fondée sur celle de votre Constitution. G’est une belle réponse aux ennemis de la grande Révolution, opérée par votre courage, que la démarche d’une puissance étrangère, d’une maison libre, depuis longtemps, qui s’empresse de seconder vos généreux efforts, par l’offre d'une partie de son numéraire, et qui, voulant encore participer aux arrangements que vous avez adoptés pour le rétablissement des finances, yous propose aussi de reconstituer une dette exigible à des époques rapprochées, par des annuités à de plus longs termes, mode que vous vous proposez d’employer pour opérer la libération successive de l’Etat. Get emprunt, Messieurs, que l’on est prêt à réaliser, mérite, ce me semble, surtout dans les circonstances où nous sommes, toute l’attention de l’Assemblée nationale; il vous est offert à un taux d’intérêt au-dessous de ceux consentis depuis longtemps, et à la mesure de celui que vous avez décrété pour l’emprunt national. Les époques de remboursement ne seront point onéreuses, aux moyens de vos finances. Les remboursements ne commenceront qu’à un terme où vous êtes sûrs d’avoir surmonté toutes les difficultés, et de ne plus éprouver aucun embarras pour effectuer les payements. En consentant cet emprunt, vous attirez de l’étranger un nouveau numéraire de 17,500,000 livres, dans un temps où la pénurie des espèces yous force à des sacrifices énormes, et qui, par l’entremise même de la caisse d’escompte, indépendamment des intérêts, vous ont coûté jusqu’à présent 4 à 5 0/0. Yous épargnez la sortie de plusieurs millions, qui sont dus aux Génois pour les intérêts échus quant à présent, et pour ceux qui doivent échoir jusqu’au 1er novembre 1791. Vous anéantissez les remboursements que vous aviez à effectuer d’ici en 1793, et qui forment un objet de plus de 10 millions, dont il faudrait que le numéraire passât à l’étranger. Yous prolongez les remboursements de partie des emprunts à termes fixes, et vous vous rédigez des primes et des accroissements périodiques de ces emprunts, tels que les loteries de 1780, d avril et octobre 1783, l’emprunt de 125 millions et celui de 80 millions. Vous diminuez la masse des rentes viagères, dont les intérêts énormes coûtent à l’Etat le triple des capitaux empruntés à termes fixes, et remboursables par annuités, avec les intérêts. Vous rendez à la patrie un service signalé, en rétablissant l’équilibre des changes, depuis longtemps si défavorables à toutes nos opérations commerciales. Rétablir l’équilibre des changes, c’est nous assurer aujourd’hui de vendre sur le pied de 8 à 10 0/0 plus cher toutes nos marchandises à l’étranger, de payer 8 à 10 0/0 de moins toutes nos marchandises étrangères dont nous ne pouvons nous passer. Vous donnerez à tous les étrangers, propriétaires de capitaux dans nos emprunts, un exemple qu’ils ne tarderont pas à suivre. Bientôt la reconstitution de la dette en annuités sera provoquée, et vous ne devez pas douter de l’empressement général de tous les citoyens français à se conformer à un plan aussi utile à leurs intérêts qu’intéressant pour le salut de l’Etat. Enfin, dans l’appareil de guerre dont nos ennemis nous menacent, l’Assemblée ne voudra pas repousser vers ces puissances ennemies les capitaux que l’on cherche à placer et qu’elles pourraient employer contre nous, et ne manquera pas de sentir combien il est heureux de pouvoir prouver à l’Europe qu’il existe encore des nations assez sages pour nous aidera nous défendre contre les tentatives de puissances mal intentionnées. Telles sont, Messieurs, les considérations que j’ai dû vous présenter, sur la proposition du sieur de Vismes, comme fondé de la procuration des Génois, et je conclus à ce que le projet de décret (dont je vous donnerai lecture si vous l’ordonnez) soit envoyé pour l’examen, à vos comités des finances et de l’aliénation des domaines nationaux, pour, sur leurs prompts rapports, être par vous ordonné et décrété ce qu’il appartiendra. PROJET DE DÉCRET. L’Assemblée nationale, vu les propositions faites par un nombre de capitalistes génois; considérant Futilité d’attirer en France du numéraire effectif, et d’éloigner les remboursements qui nécessitent une extraction de numéraire, jusqu’à concurrence des intérêts et des capitaux à termes fixes, dus à l’étranger : Considérant qu’il est intéressant de convertir en annuités les remboursements qu’exigent plusieurs emprunts à termes fixes, auxquels sont attachés des primes et des accroissements de capitaux, a décrété et décrète ce qui suit : Art. 1er. La municipalité de Paris est autorisée à passer, au nom de la nation, une constitution de 70 millions de capital aux capitalistes génois, dont la soumission lui a été présentée et a leur fondé de procuration. Art. 2. Le capital de 70 millions sera fourni, un quart en espèces ou matières d’or et d'argent, et trois quarts, tant en lettres de change et intérêts échus et à échoir jusqu’au 1er janvier 1791, qu’en capitaux de créances sur l’Etat liquidées et produisant intérêt au denier vingt, et en capitaux des emprunts effectués, sous la condition de remboursements à termes fixes et constitués dans les emprunts de Gênes. Art. 3. La constitution de 70 millions ci-dessus sera stipulée remboursable pour les principaux en 24 payements, de six mois en six mois, dont