720 [Convention nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. � Wojre n U XI. Le représentant Noël Pointe informe la Convention que les troubles de la Niè¬ vre SONT APAISÉS (1). Suit le texte des pièces envoyées par Noël Pointe d’après les originaux gui existent aux Archives nationales. Lettre n° 1 (2). Au comité de Salut public. « Nevers, 16 frimaire de l’an II de la République française, une et indivi¬ sible. « J’ai reçu, citoyens collègues, votre lettre du 10 avec une vive satisfaction, la confiance que vous me témoignez m’est aussi chère qu’elle m’est nécesssaire pour opérer avec succès. Lorsque je no suis pas en campagne, j’assiste aux délibérations des autorités constituées, je suis le plus souvent au département. Il vous écrivit avant-hier pour solliciter les fonds dus pour l’argenterie. Cet objet excite de vives et justes réclamations, vu que plusieurs sans-culottes se trouvent gênés. Nous sommes fort inquiets ici pour les subsistances, la pénurie des grains est un à tel point qu’on est réduit à la dure nécessité de mettre en question si l’on ne fera pas moudre l’avoine et repasser le son pour en extraire le peu de farine qui y reste. Nous vivons au jour le jour avec du très mauvais pain : cette posi¬ tion est vraiment alarmante. « Je rassure le peuple et il se confie sur la solli¬ citude de la Convention; mais, certes, le cœur m’a saigné, et il est instant de venir au secours jour et nuit, et mettent le plus grand zèle à leur travail. La Convention passe à l’ordre du jour. II. Compte rendu du Journal de Pcrlel. Lecointre (de Versailles ) se plaint de ce qu’il n’a été fait encore aucun rapport sur la conspiration dont Julien (de Toulouse) et Delaunay (d' Angers), sont prévenus d’être les chefs. Moyse Bayle informe la Convention que, jus¬ qu’ici le comité de sûreté générale n’a cessé de s’en occuper; qu’on a fait subir aux détenus plusieurs interrogatoires; mais que le plan déjoué a tant de ramifications, qu’il est impossible de faire, de si tôt, un rapport. On passe à l’ordre du jour. (1) La correspondance de Noël Pointe avec la Convention n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 29 frimaire an II (jeudi 19 décembre 1793); mais il y est fait allusion dans le compte rendu de cette séance publié par V Auditeur natio¬ nal [n° 452 du 30 frimaire an II (vendredi 20 dé¬ cembre 1793), p. 1]. Su’t le compte rendu de ce jour¬ nal : « Dans les environs de Nevers, il s’était manifesté, quelques mouvements suscités par la malveillance, le représentant du peuple Noël Pointe, qui s’y est sur-le-champ transporté, informe la Convention qu’il est parvenu à faire rentrer tout dans l’ordre. » (2) Archives nationales, carton AFn 171, pla¬ quette 1400, pièce 3 d’un département qui, sans contredit, est républicain dans toute la force du terme, et qui périrait plutôt par la disette que de s’é¬ carter du sentier révolutionnaire. « Je vais aujourd’hui visiter les forges et faire expédier les lames qu’il y aura de battues. « Vous n’ignorez pas, chers collègues, que je dois être indisposé; voilà plusieurs jours que je roule autour des marais qui environnent les usines; leurs exhalaisons pestilentielles ne sont pas propres à un Montagnard. Demain, je grim¬ perai la Montagne, c’est-à-dire j’irai à Rocher-la-Montagne, ci-devant Decizo, pour y étouffer quelques crapauds dont le venin ternit le beau nom do cette cité. « Je suis instruit, par une nombreuse dépu¬ tation, que deux partis s’y entre-heurtent; je les ai fait expliquer (sic) à la Société ainsi qu’au département : je suis peu satisfait. « Cette députation, soi-disant, sont des pa¬ triotes proscrits; les délégués de Fouché les accusent d’être des oppresseurs : c’est une bou¬ teille à l’encre. « Dans cet état d’incertitude, et voulant user à propos des pouvoirs qui me sont confiés, j’ai déclaré que je ne voulais rien prononcer, qu’au préalable je n’eus consulté l’opinion géné¬ rale; je veux sonder moi-même cet abîme, et lorsque j’en connaîtrai la profondeur, je prendrai les mesures les plus sages et les plus vigoureuses pour éviter la chute aux sans-culottes et y précipiter les méchants qui l’au¬ raient creusé. Je vous rendrai compte de cette opération. « Salut, union et fraternité. « Noël Pointe. « P. S. Je vous écris des lettres très longues et vos moments sont précieux, mais le temps m’est bien cher aussi, il faut pourtant que je m’explique. » Lettre a0 2 (1). Au comité de Salut public. « Nevers, 21 frimaire de la 2e année de la République. « Comme je vous l’ai marqué, citoyens col¬ lègues, par ma lettre du 16, je me suis trans¬ porté à Decize -le -Rocher, pour éteindre des divisions qui existaient depuis longtemps. Je m’y suis fait accompagner par deux com¬ missaires : D amour, président du département, et Grangier, délégué de Fouché dans ces dis¬ tricts. Nous y arrivâmes le 17 à huit heures du soir, et sur l’instant je fis assembler le peuple pour annoncer l’objet de ma mission et ordon¬ nai de suite à la municipalité de convoquer pour le lendemain matin une assemblée générale, au son de la caisse, ce qui fut exécuté. Nous en avons tenu quatre successivemnt, et le peuple, d’après mon invitation s’étant expliqué libre¬ ment, j’ai prononcé ce que j’ai cru utile et nécessaire. « Les procès-verbaux que j’enverrai inces¬ samment à la Convention ainsi qu’à vous, (1) Archives nationales, carton AFn 171, pla¬ quette 1400, pièce 30. | Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES ] J» frimaire an il 721 (19 décembre 1793 prouveront que je n’ai rien fait que d’après le vœu formel du peuple. « Ces funestes divisions consistaient moins en mauvaises intentions qu’en rivalités de deux partis également patriotes, la preuve en est que je n’ai pas été obligé de prendre des me¬ sures de rigueur, sauf pour la femme d’un émigré qui, quoique divorcée, paraissait être un germe de division : je l’ai consignée chez elle sous la surveillance de la municipalité, gardée par deux gendarmes pour être trans¬ férée à Ne vers. « A mon arrivée de cette mission, je reçois votre dernière par laquelle vous m’accusez la réception de l’état du nombre des ouvriers attachés à la manufacture de Moulins, de mon adresse aux habitants et de l’extrait des regis¬ tres de la Commission des mines de Fins (sic). Vous m’observez que le nombre des ouvriers n’est pas à beaucoup près suffisant (à la manu¬ facture d’armes de Moulins), sans doute, citoyens collègues, et je vous ai fait toutes les observa¬ tions à cet égard. Vous m’invitez d’y faire tra¬ vailler les serruriers et ouvriers en fer, l’arrêté que j’ai pris à ce sujet est tout ce qu’on peut faire pour le moment. J’ai ordonné 50 apprentis (sic), un plus grand nombre avant que ceux-là soient formés absorberaient le peu de maîtres qui s’y trouvent. « Les ouvriers de Moulins ne sont pas ceux de Paris, l’intelligence n’est pas la même, il faut longtemps pour faire des armuriers; en conséquence, puisque l’ouvrage manque aux foreurs do Paris, et que les canons qui sont à Moulins ne peuvent s’employer de sitôt, je vais vous faire expédier ce qui ne sera pas néces¬ saire à cette fabrication. « A l’égard des lames, il en partira souvent maintenant, les martinets de Pont -Saint -Tours (sic) me dédommagent des peines que j’ai prises pour les mettre en activité, son premier envoi part, et les lames sont battues au parfait ; il part fréquemment du charbon, je crois qu’il ne doit pas en manquer, au reste ce n’est pas ces départements-ci qui peuvent en fournir beau¬ coup, mais il passe souvent des bateaux qui viennent de Saint-Rambert. « Je vous observerai, citoyens collègues, que les fers d’échantiJloDS ordonnés par la Commis¬ sion centrale de la fabrication extraordinaire de Paris ne me paraissent pas précisément ce qu’il faut. Il n’est demandé par la lettre circu¬ laire que des fers aux échantillons suivants : « 1 pouce sur 9 lignes ; « 10 lignes carrées; 6 lignes carrées; 5 lignes sur 5 ; 4 lignes carrées. « Ce n’est pas là le complément pour fabriquer un fusil. J’ai ordonné au citoyen Darche d’en faire partir aux échantillons suivants : « 15 lignes sur 5; 27 lignes sur 5; 20 lignes sur 8; 30 lignes sur 8; de ces quatre qualités, prix .............................. 49 . 436 « 20 lignes carrées sur 8, prix ...... 27 . 030 « 28 lignes sur 8, prix ............ 5 . 508 « Vous voyez que je ne néglige rien de tous les objets qui me sont confiés, et je peux vous dire que j’ai fait tout ce qu’il est possible de faire. Néanmoins je ne perds pas un instant, et malgré que je sois très indisposé, je suis presque continuellement en campagne. J’irai voir à Moulins si les mesures que j’ai prises s’exécutent et jevous en rendrai un compte exact. « Salut et fraternité. • Noël Pointe, «« P. S. Au moment que je fermais ma lettre, j’en reçois une du régisseur général des forces nationales de la Chaussade, par laquelle il m’instruit que les forges de Cosne souffriraient par cette réquisition. Darche m’avait mal ins¬ truit, il n’en partira pas une si grande quantité.» Lettre n° 3 (1). Noël Pointe (T Armeviïle, représentant du peuple ■ dans les départements de la Nièvre, de V Allier et du Cher, à ses collègues « Nevers, 24 frimaire de la 2e année répu¬ blicaine une et indivisible. « Vos moments sont précieux, je n’en doute pas, mes braves Montagnards, c’est pourquoi je les économise par mon silence en correspon¬ dant directement avec le comité de Salut pu¬ blic. Je m’abstiendrai toujours, tant que faire possible, de vous distraire de vos importants travaux : j’en connais l’utilité. « Mais l’opération majeure dont je vais vous entretenir un instant, et sur laquelle la Con¬ vention doit prononcer m’impose le devoir de vous écrire la présente, voici le fait : « Une nombreuse députation de Decize-le-Rocher vint m’informer à Nevers qu’il existait des divisions dans cette cité qui pourraient devenir funestes à la tranquillité publique, et par conséquent à la liberté. Je voulus, pour m’as¬ surer de la vérité, la tirer de la source même, je m’y transportai, accompagné de deux com¬ missaires de mon choix : Damour, président du département, et Grangier, délégué de Fouché dans ces districts. « Arrivés à Decize le 17 à huit heures du soir, nous nous rendîmes de suite à la Société popu¬ laire où j’annonçai le sujet de mon transport dans cette cité; j’ordonnai à la municipalité une assemblée générale pour le lendemain matin; quatre s’ensuivirent dans le local le plus vaste. « L’opinion publique se développa par de longues discussions, après quoi le peuple, libre¬ ment et fortement prononcé, me mit à même de prononcer moi-même. Je joins ici les procès-verbaux de mes opérations. « Je n’ignorais pas que j’ai le pouvoir de nommer aux places, mais n’ayant destitué personne, et ayant remarqué qu’il s’agissait de la réunion de plusieurs communes, dont je ne connaissais pas de chacune d’elles les citoyens dignes de la confiance publique, je crus qu’il était de la sagesse et même de la poli¬ tique de laisser au peuple le choix de ses nou¬ veaux magistrats. « Salut, union et fraternité, a Noël Pointe. « P. 8. Vous venez, chers collègues, de me donner une nouvelle marque de confiance en étendant mes pouvoirs dans le département du Cher. Je vous avoue que j’avais déjà assez d’occupations, mais il n’est point d’efforts que je ne fasse pour remplir cette nouvelle mis-(1) Archives nationales, carton AFn 128, pla¬ quette 982, pièce 4. lre série, t. lxxxi 46 722 {Convention nationale.] ARCmtfES 'îàRLEMEMAIRES. { S déS�lîT© sion sans que les autres en souffrent. Je me rendrai à Bourges incessamment, de fortes raisons m’y obligent, je vous les expliquerai quand il sera temps, j’attends le retour d’ua commissaire que j’y ai envoyé. » Procès-verbal (1). Procès-verbal des séances tenues en la ville de Decize -le -Pocher par le représentant du peuple Noël Pointe, dans les départements de la Niè¬ vre, le Cher et V Allier, accompagné de Socrate J Damours et E.L.A. Grangier, président et administrateur du département, en date des dix-huit et dix-neuf frimaire, Van deux de la Pépublique française, une et indivisible Cejourd’hui dix - huit frimaire de l’an deuxième de la République française une et indivisible, au lieu ordinaire des séances de la Société populaire de la commune de Decize-le-Rocher, les citoyens de ladite commune et de celle des sans-culottes d’Arron, ci-devant Saint-Privé, convoquée par le montagnard Noël Pointe, représentant du peuple dans les départements de la Nièvre, l’Ailier et le Cher, dans la séance de la Société populaire du jour d’hier, s’étant constitués en assemblée populaire sur l’invitation du représentant du peuple aux cris répétés de Vive la Pépublique ! vivent l'éga¬ lité et la Montagne ! et après avoir élu à une grande majorité pour président, le citoyen Durand du Montot, pour secrétaires, les citoyens Edmond Decray et Cartier, et pour censeurs les citoyens Gau dry le jeune, Parent l’aîné, Fo¬ restier père et Baron, le représentant du peuple, assisté des sans-culottes Damours et Grangier, commissaires du département, ayant demandé la parole, a dit que d’après la connaissance qu’il avait donnée dans la séance de la Société du jour d’hier de l’objet de son transport dans cette cité, personne n’ignorait qu’il était venu pour prendre auprès du peuple en masse des rensei¬ gnements qui devaient éclairer sa religion sur le jugement qu’il avait à prononcer sur la récla¬ mation de plusieurs citoyens qui, déplacés de leurs fonctions, par le représentant du peuple Fouché, sur une dénonciation qu’ils préten¬ daient dénuée de fondement ; qu’à la suite de ce déplacement, ils avaient été injustement vexés dans leurs personnes et dans leurs biens et pla¬ cés sans raison sur la liste des citoyens douteux ou accusés d’avoir accaparé les fonctions pu¬ bliques; que comme il ne pouvait mieux trou¬ ver des renseignements que dans la bouche des citoyens assemblés, c’était leur vœu seule¬ ment qu’il voulait consulter, soit pour réparer les torts, s’il en avait été fait injustement, soit pour punir les coupables. Cela fait, il a invité le président à ouvrir la discussion sur la ma¬ tière mise à l’ordre du jour. Après ce discours entendu dans le calme et vivement applaudi, et après que le président a eu déclaré que la discussion était ouverte, le citoyen Quesnay le jeune ayant demandé la parole, est monté à la tribune et a dit : qu’il était essentiel pour la chose publique de pro¬ noncer sur la réclamation des fonctionnaires (1) Archives nationales, carton AFn 128, pla¬ quette 982, pièce 5. déplacés, et après avoir cherché à prouver que ces citoyens avaient été calomniés auprès du Représentant Fouché par coux-là mènes ou plusieurs de ceux-là mêmes qui avaient obtenu leurs places, et qu’ils avaient constamment donné d s preuves de civisme d‘puis la nais¬ sance de la révolution et montré une exactitude bien louable dans l’exercice de leurs fonctions, il a réclamé justice pour eux, indulgence poux leurs adversaires, engageant les uns et les autres à prévenir par une réconciliation sincère les mesures de rigueur que la nature de l’affaire pourrait nécessiter, que cependant, leur inno¬ cence reconnue par l’assemblée, il pensait que c’était le cas d’arrêter que le procès-verbal fût imprimé et répandu dans les communes de ce district et envoyé aux Sociétés populaires du département. Le citoyen Trochereau ayant la parole a prononcé un discours dont l’objet était d’éclairer le représentant sur tous les moyens à employer pour asseoir le jugement qu’il devait prononcer. Alors quelques rumeurs s’étant élevées dans 1’assemblée, le citoyen Grangier, l’un des commissaires, s’est levé, a demandé et obtenu ue pour les faire cesser et les prévenir pon¬ ant le reste de cette discussion, il fût arrêté que les noms de ceux qui troubleraient l’ordre de quelque manière que ce fût, seraient inscrits au procès-verbal, et qu’ils y seraient désignés comme perturbateurs. Après cela, l’assemblée ayant repris, au milieu du calme, la discussion, le citoyen Deschamps, dans un discours plein de franchise et d’éner¬ gie, a invité, au milieu des applaudissements les plus vifs, tous les citoyens à l’union et à la concorde, démontrant fort bien qu’une récon¬ ciliation de bonne foi prouverait, mieux que toute autre chose, le patriotisme de tous les partis qui divisaient la cité de Decize-le-Rocher et leur amour pour la République qui ne pouvait se consolider au milieu des dissensions inté¬ rieures. Le citoyen Blondat, ci-devant procureur syndic, lui a succédé à la tribune. Ce citoyen, dans un discours, souvent interrompu par l’approbation de l’assemblée, a cherché à dé¬ montrer que les patriotes déplacés par Fouché, ne l’avaient été que par une surprise faite à la religion de ce représentant par les fonction¬ naires remplaçants, ou du moins par plusieurs d’entre eux et après avoir rapporté, à l’appui de cette proposition plusieurs faits et quelques écrits, il a fini par justifier sa conduite poli¬ tique et celle de ses collègues attaqués à l’absence de tous devant le législateur Fouché. Et après que le citoyen Decray, ci-devant commissaire national près le tribunal, a eu parlé de différentes Vexations que son déplacement lui avait fait éprouver et qu’il s’est plaint entre autres choses de la qualification d’homme douteux, que ses ennemis étaient venus à bout de lui faire donner et de la taxe exorbitante de trois mille livres à laquelle ils l’avaient également fait imposer, le sans-culotte Damours est monté à la tribune et, dans un discours plein de patriotisme et d’éloquence, cet ardent républicain a fait connaître au peuple que la cause de l’agitation à laquelle cette cité est livrée devait être attribuée à l’ambition de quelques intrigants intéressés à le tromper, que pour éviter ces malheurs, il était essentiel qu’il�sût distinguer ses amis de ses ennemis; 724 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j � décemtfre 1793 ce que le citoyen maire a fait de suite et publi¬ quement par le rapport de la présentation des registres de la municipalité, constatant � les livraisons faites par Gaudry en toutes espèces de grains. Et après que ledit Gaudry s’est ainsi justifié, et que le représentant s’est bien convaincu que le vœu du peuple s’était fortement et librement prononcé à la décharge de tous les citoyens déplacés, attendu que sa religion était suffi¬ samment éclairée sur la question soumise à son jugement, il a appelé l’attention de l’assemblée sur un autre objet, et a invité les frères de Decize à se former en Société populaire à l’effet d’opérer la régénération de la Société ainsi qu’il s’était fait dans celle de Nevers derniè¬ rement, pour en éloigner les malveillants ou les froids amis de la République qui auraient pu s’y glisser. En conséquence et d’après les invitations ainsi données par le citoyen D amours, il a été arrêté par la Société populaire que le citoyen Durand Montot, faisant fonctions de président de l’assemblée, indiquerait onze membres de la Société les plus connus par leur patriotisme et leur inviolable attachement aux bons prin¬ cipes depuis le commencement de la Révolution, lesquels avec lui formeraient le noyau de la Société, et le comité de présentation pour tous les autres membres qui devront|| former et composer la Société. Le citoyen Durand, en vertu du pouvoir à lui donné, a indiqué les citoyens Blondat, Lavauge, Prudon, Cartier, Coquille, Gaudry l’aîné, Blondat Libault, Deschamps, Dondau, juge de paix, Terrasson, Lasteur et Chapsal. Les noms de ces citoyens annoncés à l’assem¬ blée, ont été agréés par elle, et le comité a été invité à s’occuper sans délai de la formation de la liste des membres qu’ils jugeraient dignes d’entrer dans la nouvelle Société ; qu’à cet effet le tableau originaire de ladite Société, et ceux faits subséquemment, seront communiqués aux-dits membres du comité pour servir de base à leur travail. Et pour opérer cette régénération, il a été déclaré que dès cet instant la Société populaire était dissoute et qu’elle ne reprendrait son exis¬ tence que dans la forme ci-dessus prescrite. Après quoi le représentant a invité le président à fermer la séance, ce qui a été fait aux cris de Vive la République, la liberté, V égalité! vive la Montagne! Le représentant a annoncé l’assem¬ blée à demain heure de dix du matin. Signé : Noël Pointe, E.-L.-A. Grangier, Socrate Damours, Durand Dumontot, président; Cartier et Decray, secrétaires. Cejourd’hui dix-neuf frimaire de l’an deuxième de la République française, une et indivisible, heure de dix du matin, sur l’invitation du jour d’hier et sur l’appel du peuple au son de la caisse par le préconiseur (sic) de cette commune, comme avant les précédentes séances, quoiqu’il n’y soit pas dit, par omission, l’assemblée popu¬ laire des communes de Decize-le-Rocher, des sans-culottes d’Arron et des communes de Saint-Léger, Brain, Saint-Maurice, Sougy, Ville, Thiauge et la Nocle, s’étant formée comme les jours précédents, le représentant du peuple accompagné des citoyens Damours et Grangier, commissaires, a ouvert la séance par l’hymne des Marseillais, qui a été chanté par tous les citoyens avec une merveilleuse allégresse, et qui a été suivi des cris de Vive la République une et indivisible ! vive la Montagne ! Un des membres de la Commission nommée le jour d’hier pour récompenser la Société popu¬ laire est monté à la tribune, et a fait lecture de la liste des citoyens nommés et adoptés par ladite Commission avec la note de l’éloge ou des reproches plus ou moins graves que chacun d’eux lui avait paru mériter, et chaque citoyen pénétré de la leçon qu’il venait de recevoir et fermement résolu de faire éclater à l’avenir, dans ses paroles comme dans ses actions le civisme le plus pur, a reçu du président de l’assemblée le baiser fraternel. Après cette cérémonie touchante et bien digne de vrais républicains, le membre qui avait fait la lecture a déclaré, au nom de la Commission, qu’il y avait bien d’autres citoyens vertueux qui devraient être admis dans la Société, que le temps n’avait pas permis à la Commission de faire son travail, mais qu’elle le continuerait jusqu’à la fin sans interruption, qu’ainsi nul citoyen ne devait s’alarmer de ne s’être pas entendu nommer. En ce moment, au milieu des acclamations les plus vives et des applaudissements, le citoyen représentant Noël Pointe, les citoyens Socrate Damours et Grangier, commissaires et Noël Pointe fils ont été affiliés à la Société sur la demande qu’ils en ont faite. Après quoi, le citoyen Grangier a prononcé un discours plein d’énergie, dans lequel, remon¬ tant à la source de la désunion qui avait agité cette commune, il a établi que Decize-le-Rocher était environné de trois communes assez peu considérables pour qu’un intrigant habile vînt à bout dans chacune d’elles d’en conduire les citoyens suivant ses vues personnelles et ambi¬ tieuses; que de là pouvait naître des chocs continuels, et en se réalisant (sic) les uns aux autres. Et a proposé, en conséquence, la réu¬ nion des trois communes de Saint -Maurice, Brain et des sans-culottes d’Arron à celle de D ecize -le - Ro cher. Le citoyen Damours lui a succédé, et déve¬ loppant avec cette éloquence qui lui est propre tous les avantages de la réunion proposée, il a démontré que la tranquillité publique, l’abon¬ dance des subsistances, la facilité des approvi¬ sionnements, le soulagement des pauvres et la concorde entre tous les citoyens en seront les heureuses suites. Après quoi, le représentant du peuple a consulté l’assemblée sur cette réunion qui a été votée à l’unanimité. Reprenant ensuite la parole, le représentant a dit qu’en prononçant sur la réunion des quatre communes, il allait prononcer sur le sort des fonctionnaires, déplacés par son prédécesseur, qu’il s’était transporté dans cette commune pour juger de tout par lui-même, qu’il s’était fait accompagner des deux commissaires Da¬ mours et Grangier pour s’aider de leurs lumières, qu’il avait consulté le vœu du peuple, pris tous les renseignements nécessaires, profondément réfléchi sur toutes les circonstances de ces déplacements et mûrement délibéré avec ses commissaires ; qu’il était donc en état de pro¬ noncer en connaissance de cause et avec la prudence requise, et à l’instant même a dicté son arrêté ainsi qu’il suit :