438 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 Juillet 1790.] pour rendre compte de l’enlèvement de ses meubles (On observe que c'est à son poste qu'on le rappelle ); il est vrai qu’il a eu tort, très gFand tort de ne pas savoir l’époque de sa guérison; il aurait bien dû en prévenir l’Assemblée. Je vous observerai qu’il est de principe qu’on ne peut obliger un membre à venir» pendre compte de sa conduite que lorsqu’elle présente l’apparence du reproche. Qu’y a-t-il de ténébreux dans ses démarches? N’est-il pas piince de l’Empire, et, en cette qualité, n’a-t-il pas le droit d’assister à la Diète? La France elle-même a maintenu cette prérogative, parce qu’elle y trouvait un grand intérêt. La Diète se tient à Ratisbonne, et M. le cardinal de Rohan est à une lieue de Strasbourg, au delà du Rhin. Certainement s’il veut opter entre son retour à l’Assemblée et son séjour dans son diocèse, il en est bien le maître; pourquoi s’en inquiéter ? 11 est au Milieu de son troupeau. On ne doit pas se prévaloir des bruits publies, qu’il est facile die faire naître et d’exagérer, lorsqu’on veut être des tyrans. Son silence même prouve qu’il est sans reproche. Le comité vous propose, je ne dirai pas un acte de rigueur, mais de malveillance : elle perce à chaque mot de son rapport, et tout honnête homme a dû en être offensé. Ce n’est pas là le caractère d’impartialité qu’il aurait dû suivie, en vous présentante conduite du cardinal de Rohan. Elle ne présente pas même le commencement d’un corps de délit ; il s’est disposé à transporter ses meubles, la municipalité s’y est opposée, et on ne les a point emportés. Si vous avez des raisons particulières pour le rappeler, alors je necombattrai pointvotre vœu ; mais je m’oppoge à un acte qui n’a aucun caractère de justice. M. Itewbell. Le' discours de M. l’abbé Maury prouve qu’il n’a pas fait attention au décret, et qu’il était absent des dernières séances ; il n’a pas entendu la lecture de la pièce sur laquelle l’Assemblée est consultée de ta part du directoire de Strasbourg, pour savoir si M. le cardinal de Rohan peut enlever les meubles de l’évêché. La nation française n’a pas seule des droits sur ces meubles, parce que les habitants au delà du Rhin ont aussi contribué à leur acquisition. J’entends dire qu’il n’y a pas de meubles qui n’appartiennent à ce prélat. J’ai dans mes cahiers la preuve du contraire, puisque je suis chargé de solliciter l’abolition d’un droit, dont le produit est spécialement consacré à cette acquisition. — - Ce n’est pas moi qui parle des bruits répandus contre lui, c’est la ministre des affaires étrangères, qui dit aux membres du comité des recherches qu’il le croyait opposé à la Révolution. Il a demandé un congé pour cause de sa santé; il sait très bien qu’aux termes de vos décrets le temps est absolument limité; et qu’il doit revenir à son poste, dès qu’il est expiré. M. l’abbé d’Eymar. Le préopinant se serait épargné beaucoup de peine et à l’Assemblée beaucoup d’ennui, s’il avait dit la vérité. Il est faux que l’on ait imposé les habitants de ce diocèse pour l’acquisition des meubles de M. le cardinal. Autrefois on a levé un impôt pour la construction et la reconstruction des bâtiments; mais il n’a pas suffi, et il a fallu faire un emprunt dont chaque évêque paye une partie; comme c’était le grand chapitre qui autorisait cet emprunt, il a décidé qu’au moyen d’une somme de 160,000 livres, l'évêque deviendrait propriétaire de ces meubles ; de manière que si M. de Rohan voulait donner 160,000 livres les meubles lui appartiendraient. (On demande à aller qux voix.) M. Ee Déist de Boiidoux. Dès lors que l’on convient que les meubles ne sout pas payés, nous n’en demandons pas davantage/ M. l’abbé d’Eyinar. A-t-on articulé un seul fait contre M. le cardinal de Rohan, excepté le mot de M. de Montmorin, qui a assuré que lui et l’évêque de Spire intriguaient dans l’Empire? Lorsqu’on a dit aussi qu’il avait à ses ordres des envoyés, si c’est de M. de Montmorin qu’on tient ce propos, c’est une preuve d’ignorance qu’il a donnée, après en avoir administré une de légèreté. Tout le monde sait que le prince-évêque de Strasbourg doit avoir des agents, l’un à Vienne et l’autre à Ratisbonne. Avez-vous rendu un décret qui le prive de cette prérogative? Vous le mandez pour rendre compte de sa conduite; il n’a fait que ce qu’il a pu faire ; il y a une forte insurrection dans son diocèse, et sa présence y est encore nécessaire. (La partie gauche applaudit.) Je résume mon opinion, en demandant que la cause de l’évêque de Strasbourg soit réunie à celle des princes étrangers, que vous avez ajournée par votre décret du 22 septembre. (La discussion est fermée.) M. Chasset fait une nouvelle lecture du projet de décret. M. de Cazalès. Il est extraordinaire que le comité ecclésiastique contondant, sans aucune mission, des objets étrangers, vienne vous proposer de mander M. le cardinal de Rohan pour rendre compte de sa conduite; je ne connais pas de pays où Ton puisse rapporter dans une tribune une conversation particulière. Je demande donc la question préalable sur cette partie du décret. La question préalable est rejetée, et le décret adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport du comité écclésiastique, sur les lettres écrites le 26 de ce mois par le directoire du district de Strasbourg à l’Assemblée nationale et au comité ecclésiastique, décrète ce qui suit: « 11 sera incessamment procédé, par Je directoire du district de Strasbourg ou par la municipalité qu’il a commise, conformément à l’article 12 du décret des 14 et 20 avril dernier, à l’inventaire des meubles et effets, titres et papiers de l’évêché et du grand chapitre de ladite ville. « Avant la confection de l’inventaire, il ne pourra être enlevé ni distrait aucun des meubles qui sont actuellement dans la maison épiscopale et dans celles qui dépendent de l’évêché. « Décrète, en outre, que M . le cardinal de Rohan viendra, dans le délai de quinzaine, reprendre sa place dans l’Assemblée nationale, et y rendre compte de sa conduite, s’il y a lieu. » (La séance est levée vers trois heures.)