[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 juin 1791.] venons vous dire : Les couronnes qui vous sont destinée*, ne se flétriront pas; elles vivent, elles vivront dans nos cœuns. Amis de l’ordre et des loi*, nous déposons dans vos mains le serment solennel (et il ne sera pas violé, celui-là!) de ne vivre que pour mourir, s’il le faut, en défendant votre ouvrage. {Applaudissements .) « Signé : Cvrille Rigaud, Teissèdre, Bou-labert aîné, Sour an, Bassaget, Etienne Mejan, Jeàn-Bapti*te Desmazis fils, B. B izille, Jean Lacroix, Servet, Jean Boulab'-rt fils, J. -F. Serane, de Sette, Soubéeran, Jean Boulabert, Gevaudan, Migniot, Teisserène, Hugnaceux, Philippe Rigaud, Jean Bigal, Rigal cadet. M. le Président répond : « Messieurs, « De toutes parts pous avons des preuves du zèle de tous les citoyens pour la défense commune, pour le maintien de la Constitution ; et l’événement sur lequel nos ennemis fondaient lems espérances, n’a servi qn’à augmen er les nôtres. Citoyens, amis de la liberté, nous recevons vos hommages avec enthousiasme ; nous les recevons avec confiance, et ce ne peut être qu’avec un zèle infatigable que nous pouvons continuer notre ouvrage, puisque nous lui voyons de tels défenseurs. L’Assemblée satisfaite vous invite à assister à sa séance. » {Applaudissements.) (L’ Assemblée ordonne l’impression et l’insertion dans le procès-verbal, du discours de fa députation, ainsi que de la réponse du président.) M. d’Elbhecq. Messieurs, aussitôt que le directoire du département du Nord a été informé de fa fuite du roi par le courrier que vous lui avez dépêché, il a pris un arrêté par lequel il invite les citoyens à se tenir sur leurs gardes et à la soumission la plus stricte des pouvoirs cops-titués. Cet airêté est une preuve de son patriotisme, le voici : Arrêté du directoire du département du Nord. « Les administrateurs du directoire du département du Nord, informés de l’enlèvement du roi et de la famille royale, se sont empressés de prendre, près les districts, les municipalités, les tribunaux, les gardes et gendarmeries nationales et les troupes de ligne, toutes les précautions nécessaires, tant pour découvrir ceux qui ont coopéré à ce crime, soit directement, soit indirectement, que po m assurer le calme et la tranquillité publique. Ils déc'arent que les amis de la patrie et de la Constitution ne peuvent mieux manifester leurs sentiments dans ce moment difficile, que par la plus stricte obéissance à la loi, la soumission la plus entière aux pouvoirs constitués, et le soin le plus constant à maintenir de tout leur pouvoir la paix intérieure et la sûreté des frontières; ils déclarent que la moindre démarche tendant à exciter le trouble, inquiéter les esprits, alarmer les citoyens, est, dans ce moment, non seulement dangereuse, mais coupable. « Et voulant réunir tous les bons citoyens autour do la chose publique, et les éclairer sur la confiance qu’ils peuvent avoir dans ces précautions que leur zèle leur a suggérées, ils ont m arrêté que les présentes seront imprimées et affichées partout où besoin sera. « Fait à Douai , en la séance du directoire , « Présents : MM. Coppens, président ; d’Es-quelbecq, Gossuin, Trocmé, Rivière. Descamps neveu , administrateurs ; L. de Waranghien, procureur général syndic , et Lagarde, secrétaire général. « Le 22 juin 1791. » « Signé : Lagarde, secrétaire général . » (L’Assemblée ordonne l’insertion de cet arrêté dans son procès-verbal.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une pétition présentée par un grand nombre de citoyens de la capitale qui prient l’Assemblée de différer de prendre un parti sur l’événement actuel et d’attendre que les 83 départements en aient pesé toutes les conséquences. {Murmures.) M. le Président. Voici une lettre des administrateurs du district, officiers municipaux et officiers de la garde nationale de Sentis; elle est datée de trois heures du matin : « Monsieur le Président, « Glermorit-en-Beauvoisis, nous mandait à l’instant que les ennemis étaient entrés en France, et il demandait des secours pour envoyer à Soisjj sons et à Laon. Une demi-heure après, un autre courrier, dépêché par la même ville, nuus apprend nue, sur P i vis de Montdidier, les secours deviennent inutiles et que le roi est en sûreté accompagné de 15,000 hommes de garde nationale. « Cette bonne nouvelle ne nous empêche pas de nous tenir sur nos gardes..., » (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette lettre au comité militaire.) M. Merlin. Je reçois une lettre particulière d’un des officiers municipaux de Lille à laquelle est jointe l’extrait d’une lettre de Tournai, arrivée à Lille, le 23 juin, qui est ainsi conçu : « Madame de Provence, belle-sœur du roi, est arrivée avant-hier à Tournai avec plusieurs femmes de la cour, dans une mauvaise chaise. Elles ont couché à l’auberge ayant pour enseigne l’Impératrice. Elles ont été à l’abbaye de Saint-Martin, hier (c’est-à-dire le 22), vers les 11 heures; beaucoup de seigneurs et d’officiers, la cocarde blanche au chapeau, ont été les saluer et sont parti* à 5 heures pour Bruxelles, escortés par un escadron de dragons autrichiens. « Il est arrivé hier 22, de Mons, un exprès pour annoncer que Monsieur y était, qu’il logeait à la Couronne, et qu’il allait partir pour Bruxelles, où le prince et la princesse de Saxe-Te*cben se sont réunis. L’objet de la réunion à Bruxelles est d’y tenir un congrès. » Je demande à l’Assemblée la permission de lui lire quelques parties de la lettre que j’ai reçue de Lille. {Oui! oui!) « Lille, le 23 juin 1791. « La nouvelle de l’enlèvement ou de l’évasion du roi nous a été annoncée hier, vers les 6 heures du soir, par un courrer de la municipalité de Valenciennes. La dépêche ne nous annonçait cette nouvelle que comme un bruit; un courrier du département du Nord et plusieurs lettres arrivées de Paris nous l’ont confirmé. « Nous avons pris sur-le-champ toutes les pré- m 125 juin 1791. J [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. cautions que les circonstances exigent. Notre garnison est bonne; on peut compter sur la garde nationale; personne ne peut sortir de Lille sans s’être présenté à la municipalité qui donne des billets de sortie; les ponts sont levés; on a fait placer des gardes aux avancés; les postes sont doublés. « La société des amis de la Constitution, vraie senti, elle du peuple, a tous ses membres en activité : ceux d’entre eux qui ont des connaissances dans l’artillerie et les fortifications, tels que M. Vantouront, courent les remparts, glacis et autres ouvrages, accompagnés de canonniers, membres de la même société; ils vont faire former les plates-formes et disposer 1< s places contre toutes attaques; les batteries déjà placées sont augmentées ; on en a placé de nouvelles, et on peut compter sur toutes les précautions possibles : je sens augmenter mon courage dans ces instants de détresse , et les facultés de mon esprit n'ont jamais été mieux disposées, » (Ap plaudissements.) (La séance est suspendue à 11 heures du matin * elle est reprise à 1 heure après-midi.) M. Dauchy, ex-président , occupe le fauteuil. M. Millet de Murean, au nom du comité des monnaies. Messieurs, conformément au décret que vous avez rendu hier, je me suis transporté le soir au comité des monnaies, et j’ai soumis à la discussion de ce comité le décret dont je suis porteur. Après quelques légères corrections, il m’a chargé de vous le présenter. M. Millet de Mureau, rapporteur, donne lecture de son projet de décret qui, après une longue discussion et l’adoption de quelques amendements, est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les cloches des églises supprimées dans le département de Paris seront fondues et coulées en monnaies, au type décrété par l’Assemblée nationale le 9 avril dernier, et à raison de 24 pièces d’un sol à la livre et de 48 demi-sols. Art. 2. « Le poids de sol sera de 23 à 24 pièces à la livre, et de 46 à 48 pour les demi-sols. Art. 3. « Dans la totalité de la fabrication, il y aura les deux tiers de la valeur en pièces d’un sol, et l’autre tiers eu demi-sols. Art. 4. « Les entrepreneurs seront tenus, dans quinzaine du jour de leur adjudication, de remettre en dépôt à l’hôtel des monnaies, au moins la somme de 40,000 livres, en monnaie fabriquée, et d’en remettre pareille somme à la fin de chacune des semaines qui suivront, jusqu’à l’entière fabrication du métal qui leur aura été délivré. Art. 5. « Le pouvoir exécutif pourra adjuger cette fabrication à un ou à plusieurs entrepreneurs, en prenant les précautions nécessaires àl’uniformitô dans les empreintes. Art. 6. « Les pièces servant à former les matrices seront en cuivre rouge, frappées à la monnaie en quantité suffisante pour bâter l’opération du moulage, et elles seront échantillonnées de manière à ce que, par leur épaisseur, elles puissent produire 24 (décès d’un sol à la livre, et 48 demi-sols, sauf le remède de poids. Art. 7. « Il sera tenu compte aux entrepreneurs de 5 0/0 du déchet dans la fabrication, et le poids de la matière sera constaté par la commission des monnaies. Art. 8. « Le pouvoir exécutif pourvoira aux mesures à prendre pour faire, aux meilleures conditions possibles, la descente et le transport du métal au lieu de la fabrication, et les frais seront pris sur la dépouille des cloches. Art. 9. « Il sera désigné aux entrepreneurs un lieu enclos, convenable, dans lequel ils puissent faire, sur-le-champ, à leurs frais, l’établissement de la fabrication. Art. 10. « L’Assemblée nationale renvoie au pouvoir exécutif tous les autres détails, ainsi que le choix à faire des entrepreneurs, lequel aura lieu d’après l’aucienneté, le mérite, l’avantage et la sûreté de leurs propositions; à l’effet de quoi, les copies collationnées de tous les mémoires relatifs présentés au comité des monnaies seront envoyées au ministre des contributions publiques. Art. 11. <« Aussitôt que le pouvoir exécutif aura fait choix de quelques entrepreneurs et aura passé des traités avec eux, il en instruira l’Assemblée nationale, à laquelle il rendra compte ensuite, tous les quinze jours, des progrès et des frais de fabrication. Art. 12. « L’Assemblée nationale charge son comité des monnaies de lui présenter incessamment les moyens de faire exécuter la même fabrication dans les autres départements du royaume. Art. 13. « L’Assemblée nationale autorise son comité à suivre, conjointement avec la commission des monnaies, les expériences nécessaires pour le départ de la matière des cloches, et d’en rendre le résultat public par la voie de l’impression. » (Ce décret est adopté.) Un membre : J’observe à l’Assemblée qu’il est est essentiel de continuer la fabrication de la monnaie de cuivre, jusqu’à ce que les dispositions adoptées pour obtenir la monnaie du métal des cloches coulées aient pu être mises à exécution. Cette fabrication ne pouvant être en activité avant 15 jours, une interruption priverait d’une matière d’échange nécessaire au moment de l’émission des assignats de 5 livres. Un membre : La fabrication de monnaie de cuivre aux hôtels des monnaies a été ordonnée par un décret et elle n’a été suspendue par aucun autre décret subséquent : il n’y a donc pas lieu de prendre en considération l’observation du préopinant.