112 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 mai 1191.] A cette proposition en succéda une autre : ce fut celle de laisser aux assemblées électorales la liberté de porter aux législatures suivantes quelques membres de la précédente, si elles le jugeaient à propos. Nous étions alors tous au-dessus de toute vue ambitieuse... {Murmures.) (La très grande majorité de l’Assemblée se lève à deux reprises différentes et demande à grands .cris à aller aux voix sur la proposition de M. Robespierre.) Un membre : Je demande l’appel nominal ; on connaîtra ainsi ceux qui veulent être réélus. M. Thouret, rapporteur. Je supplie l’Assemblée de vouloir bien écouter cette observation : qu’elle commence la discussion d’une très importante partie de notre travail et qu’il est nécessaire de bien établir l’état et les moyens de la question, afin que l’Assemblée sache positivement ce qu’elle veut adopter. M. Pétîon de 'Villeneuve. Il ne s’agit pas .de savoir si les membres d’une législature pourront être réélus à la suivante. Cette question est décidée ; mais il s’agit de savoir si les membres de l’Assemblée actuelle, si les membres du corps constituant {A droite : Pas de distinction.].... .pourront être nommés à la prochaine législature. Il ne s’agit maintenant que d’une question d’ordre; mais il faut que l’Assemblée délibère sur un point fixe et constant; et comme dans cette Assemblée je sais qu’il y a beaucoup de membres qui pensent que les membres qui composent l’Assemblée nationale actuelle, ne pourront être réélus; mais que, d’un autre côté, beaucoup d'autres pensent que les membres d’une législature pourront être nommés à une autre législature ; il ne faut pas confondre ces deux questions. {Murmures ; applaudissements à gauche et dans les tribunes.) Voici la motion dans les termes les plus simples, et qui mettra l’Assemblée à portée de juger en connaissance de cause: «Les membres del’As-jsemblée actuelle ne pourront être réélus à la législature prochaine. » {Aux voix ! aux voix >) M. Boutteville-Dumetï. Monsieur le Président, on ne se joue pas ainsi de la liberté d’une grande nation, tenez bon. M. Thouret, rapporteur (1). Monsieur le Président, je demande la parole. {Murmures prolongés.) Il est infiniment essentiel que l’Assemblée ne décrète dans cette matière qu’avec cette maturité qui lui a tant de fois fait honneur. G’est ici un objet constitutionnel sous deux faces, et voici la série des idées qu’elle ne peut pas perdre de vue. Nous lui présentons l’organisation des Corps législatifs futurs, garantie permanente de la liberté de la nation. Nous lui avons proposé cette question qui concerne les Corps législatifs futurs : « Les membres d’une législature pourront-ils être réélus ? » Nous avons cependant bien présumé que cette question ne pouvait pas être accompagnée de celle-ci : « Les membres du corps constituant actuel pourront-ils être nommés à la première législature '/ » Mais nous avons pensé que celte question ne se discuterait pas seulement pour les législatures futures. On élève la question de la rééligibilité des membres de l’Assemblée actuelle pour la prochaine législature; nous avons réuni sur ces deux points notre travail, et comme sur ces matières tenant à la Constitution, vous avez désiré que les matériaux fussent préparés par une méditation précédente faite dans vos comités, nous nous y sommes livrés. Nous n’avons pas divisé la question que nous nous sommes proposé de vous présenter; mais si l’Assemblée veut décréter, sur ces points, d’une manière véritablement digne d’elle, d’une manière qui assure la confiance au décret qu’elle va rendre, je la supplie d’entendre la discussion. S’il ne s’agissait que de nos idées personnelles, particulières et individuelles, je n’aurais pas la présomption de les opposer au mouvement qu’elle vient de manifester. Cependant l’Assemblée ne tardera pas à sentir que ce n’est pas ainsi qu’elle doit porter un décret sur une question qui divise les opinions, qui divise de très bons esprits. {Non ! non !). M. Durget. Est-ce que vous voulez nous donner une cour plénière? M. Prieur, s'adressant à la droite. Ne gâtez pas cette cause-là. M. Thouret, rapporteur. Je prie l’Assemblée de faire attention que je ne m’oppose pas du tout à la motion de M. Robespierre, en tant qu’elle tend à faire décréter préalablement, et dès aujourd’hui, la question qu’il propose ; au contraire, je lui donne adhésion sur ce point, et cela ne dérange en aucune manière l’ordre du travail que je m’étais proposé ; car je savais parfaitement bien qu’il fallait que cette question fût entendue et qu’elle fût décrétée. Je ne me doutais toutefois pas de la motion incidente que l’on vient de faire ; je ne m’oppose point à ce qu’on la décrète ; mais je m’oppose, autant qu’il est en mon faible pouvoir, à ce que l’Assemblée décrète sans .avoir entendu le comité de Constitution. Je m’oppose à ce que l’Assemblée rende le décret, sans que plusieurs faits soient éclaircis, sans que l’erreur impardonnable de M. Carat soit anéantie, et par quoi? par la lecture du procès-verbal tout simplement. {Rires.) Je m'oppose à ce que les raisons qui n’ont pas été suffisamment éclaircies jusqu’à présent ne le soient pas avant que le décret soit rendu. Je demande de mettre à la discussion les deux premiers articles, dont l’un concerne la rééligibilité des membres d’une législature à l’autre ; et le second la question de savoir si les membres de l’Assemblée actuelle pourront être réélus à la prochaine Assemblée législative; et j’insiste pour que l’Assemblée veuille entendre son comité. M. Rewbell. Moi, je crois très positivement que l’on ne doit point faire la distinction des membres actuels d’avec les membres de3 législatures suivantes. M. Thouret, rapporteur. Ce que vient de dire le préopinant montre de plus en plus la nécessité d’éclairer et d’assurer toutes les idées sur l’ensemble de la matière que nous allons agiter. L’Assemblée ne peut pas refuser, je pense, de vouloir bien entendre le travail sur le plan qui nous a paru le meilleur. {Oui! oui! Parlez ! parlez !) Je traiterai d’abord ce qui concerne les législatures futures et ensuite, par exception, ce qui concerne l’Assemblée actuelle. {Mouvement d'aU iention.) (1) Ce discours est tçès incomplet au Moniteur.