634 rConvention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ! « lliv5?D 1 J ( 3 janvier 1 (94 IY. Deux lettres du général Dugommier, COMMANDANT EN CHEF DE L’ARMÉE D’ITALIE ET DE CELLE DE TOULON, L’UNE AU COMITÉ de Salut public, l’autre au ministre de LA GUERRE (1). Suit le texte de la lettre adressée au comité de Salut public d’après l’original qui existe aux Archines du ministère de la guerre (2). A. Le général en chef de l’armée d’Italie et de celle de Toulon au comité de Salut public. « Du quartier général de Toulon, le 4 ni¬ vôse an II de la République. « Citoyens représentants, « Je travaille sans relâche aux mouvements convenables pour cantonner tous les bataillons qui ont servi à la réduction de Toulon; je ne garderai ici que ceux qui 'sont nécessaires à sa conservation. Je renvoie à l’armée d’Italie les forces qu’elle avait fournies dès le commen¬ cement du siège, je dispose toutes les autres à filer, quand vous l’ordonnerez, vers la même armée ou celle des Pyrénées-Orientales, ou celle des Alpes. Dans trois jours au plus tard notre camp sera parfaitement déblayé et chacun sera en route ou rendu à sa destination. J’ai pris également les mesures qu’exigeaient l’artille¬ rie, les batteries et forts nouvellement repris, l’arsenal, le port et ses magasins. Chaque jour, nous découvrons quelques nouveaux dépôts utiles à la République. « J’ai remis aux représentants du peuple la clef du trésor des coalisés, qu’ils n’ont pas eu le temps d’emporter, ce qui prouve que leur dé¬ route a été complète. Une foule de cadavres, que la mer rend au rivage, attestent encore la précipitation avec laquelle ils ont fui les armes républicaines; enfin, tout ce que nous décou¬ vrons de leur retraite porte le caractère de la terreur la plus panique. Permettez que je ne vous répète point quelques détails que vous trou¬ verez dans ma dépêche au ministre de la guerre. « Citoyens représentants, j’ai demandé à la Convention un successeur à l’armée d’Italie; je vous prie d’appuyer ma demande et de m’envoyer mon congé par premier courrier. Quand je serai auprès de vous, je vous exposerai les raisons qui m’y déterminent; je ne cherche point le repos, mais j’aime mieux travailler dans une place où je n’aurai à répondre que de ma personne. « Salut et fraternité. « Dugommier. » (1) Les deux lettres du général Dugommier ne sont pas mentionnées au procès-verbal de la séance du 14 nivôse, mais on trouve un extrait de celle adressée au comité de Salut public dans le Bulletin de la Convention de cette séance et dans le compte rendu de cette séance publié par le Moniteur uni¬ versel [n° 105 du 15 nivôse (samedi 4 janvier 1794), p. 427, col. 3]. (2) Archives du ministère de la guerre : Armée de¬ vant Toulon. B. Le général en chef de l’armée d’Italie, chargé de la direction du siège de Toulon, au ministre de la guerre (1). Quartier général de Toulon, le 4 nivôse, 2e année républicaine. « Citoyen ministre, « Je m’occupe dans ce moment à déblayer le camp devant Toulon; déjà treize bataillons sont en marche pour leurs divers cantonnements, et dans trois ou quatre jours nous n’aurons plus ici que les forces nécessaires à la conservation de notre conquête. J’ai renvoyé à l’armée d’Ita¬ lie les troupes qu’on en avait tirées dès le com¬ mencement du siège. J’ai rendu tous les chevaux qui étaient en réquisition pour l’artillerie; j’ai fait désenclouer les canons et réparer les batte¬ ries; j’ai établi dans le port et ses magasins la-plus exacte surveillance, et j’ai la satisfaction de voir que tout va bien. « Nous découvrons chaque jour quelques nou¬ veaux avantages pour la République, soit en subsistances, soit en d’autres objets qui sont de la plus grande utilité. Je fais tracer un tableau de la situation générale des choses et je te le ferai passer. Il entre chaque jour dans notre port des bâti¬ ments que l’erreur y amène; ils croient trouver encore l’infâme coalition et ils nous apportent bonnement des munitions de guerre et de bouche « Je demande à la Convention un successeur dans l’armée d’Italie; lorsque je serai auprès de toi, je te ferai connaître tous les motifs qui m’y déterminent. En attendant, je te dis fran¬ chement qu’un général en chef ne peut pas faire tout le bien qu’il voudrait lorsqu’il est sans cesse dévié par des circonstances forcées. J’avais établi, en entrant dans Toulon, des mesures de police, elles ont été contrariées, et leur inexé¬ cution a entraîné des désordres inséparables de l’anarchie. Enfin, à l’aide d’un arrêté sévère que j’ai provoqué des représentants et de quelques autres mesures vigoureuses et républi¬ caines, j’espère parvenir à rétablir; le bon ordre. Le pillage n’étant jamais qu’un profit partiel, et toujours mal réparti, j’avais engagé l’armée à faire un dépôt général de tout cé qui pouvait être son butin; en conséquence, j’avais appelé des commissaires de chaque corps pour en surveil 1er la vente, mais cette mesure entraînant néces¬ sairement des lenteurs et plusieurs autres incon¬ vénients, j’ai invité les représentants à accorder une fois pour toutes une indemnité de cent livres par volontaire, et de faire rentrer dans les ma¬ gasins de la nation tous les objets respectifs qui pouvaient composer la masse entière du butin. « Je t’ai adressé dernièrement un mémoire d’avancement pour plusieurs citoyens; si tu ne juges pas à propos d’en avancer un si grand nombre pour le moment, je te prie de me donner le temps de te faire connaître particulièrement ceux qui l’ont mérité le plus : je crois même que cela conviendrait. Je te prie néanmoins de bien accueillir un supplément de quelques braves frères d’armes, de la conduite desquels on ne m’avait pas encore fait le rapport. Souffre que ( 1 ) Archives du ministère de la guerre : Armée devant Toulon.