[Convention nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j m" 441 fusils envoyés de Caen par les représentants du peuple, partira au plus tôt pour se réunir, sous la direction de notre collègue, à Granville ou à Avranches, aux troupes déjà mises en mou¬ vement contre les rebelles. Art. 2. Attendu que sur les 1,500 fusils envoyés de Caen à Coutances, il en reste encore un certain nombre après l’armement dudit contingent, les administrateurs du département de la Manche sont chargés de convoquer, par la voie la plus prompte, les citoyens de la réquisition du 23 août dans l’étendue du district de Coutances, et d’en former provisoirement un bataillon pro¬ portionné à la quantité des armes restantes, à leurs ressources en casernes et à leurs facultés en subsistances. Art. 3. Ce bataillon réuni, organisé et armé avec toute la célérité possible, remplacera à Coutan¬ ces le bataillon du contingent dont nous ordon¬ nons le départ en l’article 1er. Art. 4. Les administrateurs du département sont in¬ vités à ajouter un nouveau degré à leur zèle pour suffire à tous leurs besoins en subsistances et casernement, et pour concourir, avec les re¬ présentants du peuple, au salut public. Art. 5. Si le danger augmente, le département de la Manche se lèvera tout entier. Valognes, le 4e jour du 2e mois, l’an II de la République. Signé : Le Carpentier. Certifié conforme : Le Carpentier. XI. Garnier de Saintes, représentant du peuple, près l’armée des côtes de Cherbourg, au comité de Salut public (I). « Granville, le 4 du 2e mois de l’an II de la République. « Vous n’ignorez pas, citoyens mes collègues, les progrès que font les brigarfds dans le dépar¬ tement de la Mayenne, ils menacent celui de la Manche, et Vitré est peut-être en ce moment en leur pouvoir. Les secours que j’attendais de Caen ne nous viennent pas et je vous avoue qu’un tel retard nous donne cruellement d’hu¬ meur. « Je vais me rendre demain matin à Avran-(1) Archives du ministère de la guerre, armée des Côtes de Cherbourg, carton 5 /1 7, liasse 2. ches, et là, avec le général Peyre, nous concer¬ terons la marche que nous devrons tenir, je le suivrai dans les différents points où elle devra se porter aussitôt que mes approvisionnements en subsistances et en munitions seront parvenus à Avranches. « Rennes demande nos forces, nous sommes bien disposés à les lui donner, mais nous sommes fort embarrassés de savoir de quel côté nous devons diriger notre marche, celle de l’ennemi ne nous étant pas plus connue que ses projets. « S’il perce dans le département de la Manche, s’il s’assure de plusieurs ports, il peut ménager une descente facile aux Anglais. « On ne sait point encore quelles sont les forces réelles des rebelles, mais ils parcourent des pays où ils ont beaucoup de partisans, et plus ils y stationneront, plus le nombre s’en accroîtra. Il faut donc les serrer de près si vous voulez qu’ils ne puissent ni se grossir, ni multiplier leurs ravages. Le moyen sûr de les exterminer est de faire avancer des forces du côté du Midi et de l’Est. Notre armée victorieuse doit les suivre de près et si elle s’avance vers eux, que du côté de la Sarthe et d’Eure-et-Loir il se forme aussi un noyau de forces, alors ils doivent être pres¬ sés en tous sens, et leur destruction ne sera pas longue. Mais si vous nous abandonnez à nos seuls moyens, nous seroùs incapables de résister, et une seule défaite, en annihilant nos forces, peut à la fois éteindre le courage de nos troupes et briser la digue qui peut les retenir. « Donnez donc les ordres les plus rapides pour qu’il nous arrive des secours tels, qu’en cas d’é¬ chec, une perte puisse être facilement réparée et empêche le succès de l’ennemi de devenir con¬ séquent. Je ne puis pas dire notre détresse à tout le monde, mais elle est extrême en armes, en munitions et en subsistances. Voyez donc ce que vous pouvez faire, mais que votre action soit prompte, car les triomphes tiennent sou¬ vent à la rapidité des mesures. « Je vous fais passer la proclamation que j’ai cru devoir faire pour obtenir à la fois des sub¬ sistances et des chevaux, mais les marchés, mal¬ gré les réquisitions, se garnissent si mal que Granville était sans pain aujourd’hui. « Un bâtiment chargé de grains a été retenu dans notre havre. Le dénuement absolu de l’armée, et la crainte de la voir manquer nous ont réduit à retenir cette cargaison. « Ce bâtiment était chargé pour Brest. J’ai senti tout ce qui pouvait résulter d’inconvé¬ nients d’arrêter cet envoi, d’après la persuasion où je suis que vous avez conçu un vaste système dont il serait dangereux d’entraver l’exécution. Mais entrevoir une armée prête à manquer, ou contrarier des vues politiques et combinées, le choix n’est pas difficile. « Cependant, comme le ministre de la marine demande à cette ville de lui fabriquer du bis¬ cuit et que nous n’avons pas un boisseau de grains pour cet usage, la cargaison va être ainsi convertie, on ne touchera à ce biscuit qu’à la der¬ nière extrémité, et s’il ne devient pas absolument urgent, il sera toujours à la disposition du mi¬ nistre. « On m’a remis la note d’un citoyen, inven¬ teur d’un cheval de frise dont on pourrait tirer le plus grand avantage, si l’exécution répond à ce projet, je vous fais passer le nom et la de¬ meure de ce particulier. .« Salut et fraternité, « Garnier de Saintes. » 442 [Convention nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j « I>u 5 an matin. « P. -S. Il est bien étonnant que Laval pris depuis plusieurs jours ne nous ait encore donné aucun signe de vie. Les districts environnants sont aussi insouciants : que pouvons-nous donc attendre du patriotisme d’un pareil pays. « La Sarthe ne paraît pas s’ébranler, j’ignore quelles sont les forces du département d’Ille-et-Vilaine. Dans ce moment, le département de la Manche me marque que Caen ne nous a fait passer encore aucune arme, malgré deux cour¬ riers extraordinaires que j’ai envoyés à mes col¬ lègues, et l’annonce qu’ils m’ont fait d’un faible renfort de 1,500 fusils, lorsque le désarmement aurait dû en produire 10,000. Avec aussi peu d’ensemble et d’énergie, que pouvons-nous donc faire de rapide et d’heureux? « Annoncez-moi donc des secours par le pre¬ mier courrier, ou des mesures qui me promettent Un peu que nous serons dans le cas d’empêcher ces brigands de se cantonner eet hiver dans le pays et les bois qu’ils occupent. « Je vous fais passer les observations que m’a transmis 1e, département de la Manche. » XII. Extrait de la lettre des représentants Lindet et Oudot, datée de Caen, le 4 du 2e mois (I). Oudot et Lindet, représentants du peuple près l’armée des côtes de Cherbourg, transmettent au comité de Salut public copie de la dépêche qu’ils ont reçue de leur collègue Garnier de Saintes par laquelle il annonce que les brigands se sont emparés de Laval et qu’on demande des secours de toutes parts. Ils vont se concerter avec ce général (sic) sur l’objet de sa pétition, il demande sur-le-champ 3,000 fusils et 4 ca¬ nons. XIII. Le Tourneur, représentant du peuple, dans le dé¬ partement de F Orne, a sres eoUègues, membres du comité de Salut public (2). « Alençon, 5e jour de la lre décade du 2e mois de l’an II de la République fran¬ çaise, une et indivisible. « Citoyens collègues, « J’apprends par voie indirecte que mon col¬ lègue Thirion, représentant du peuple dans le département de la Mayenne, a fait des mer¬ veilles à Forcé, près Laval. Je lui envoie un courrier par Le Mans, qui instruira notre col¬ lègue Guimberteau et lui fera passer la présente avec copie de deux lettres, l’une de Le Carpen¬ tier, l’autre de Oudot, à Caen. a Nota, Le district de Mayenne est en fuite, sans doute à Laval, excepté le procureur syndic, la citoyen Potier, qui n’a pas quitté son poste; toute la municipalité est en fuite, (1) Archives nationales, carton AFn 268, pla¬ quette 2257, pièce 27. (2) Archives nationales, carton AFn 170, pla¬ quette 1393, pièce 41. 43 brumaire an H 3 novembre 1793 « J’ai fait évacuer les maisons d’arrêt sur Chartres. 89 prêtres réfractaires, destinés pour ici, partis de Laval, ont été interrompus dans leur marche par le district de Mayenne, qui nous a renvoyé les forces que nous lui avions fait passer, et a fait conduire à Lassay les réfrac¬ taires. Les femmes de Lassay se sont jetées à leurs genoux, leur ont demandé des bénédictions, se sont portées aux prisons, les ont ouvertes à tous les brigands, ont voulu massacrer le rece¬ veur du district, piller l’administration qui a eu toutes les peines a échapper à leur fureur. Enfin les braves sans-culottes, en petit nombre, ont fait repartir les prêtres dans la nuit. Ils ont été conduits à Argentan, demain ils arriveront, et je les ferai conduire à Chartres avec 60 que j’y ai déjà fait conduire, et entre autres 3 hommes et femmes suspects. « Nous avons découvert cette semaine 11 prê¬ tres cachés entre des planches doubles, ayant des vivres, des bijoux et de l’or. « Le procureur syndic du district de Mayenne est le seul qui soit resté à son poste. « J’ai envoyé un courrier à Rouen; demain il m’arrive un millier de poudre. Caen envoie des fusils et des canons dans le département de la Manche. Les tombeaux me feront des balles. 2,000 hommes armés sont déjà à Mayenne. Tout le district de Domfront, d’un bon esprit, est levé, armé de fourches, piques, brocs (sic) et deux pièces de canon. « Avec les mesures prises par nos collègues Poeholle, Le Carpentier, Oudot et Lindet, nous parviendrons à exterminer cette race infernale, fanatisée par des monstres dont nous aurons bientôt purgé le sol de la liberté. « Salut et fraternité. « Le Tourneur. « Je vous renvoie la suite de la déclaration du citoyen Tissol, pris à Mayenne (1), avec une autre déclaration qui m’a été faite ce matin par le citoyen Gareau ( sic ) qui a fait prendre et a conduit à Saumur le général Sorinière. « 10 heures du matin, 6e jour. « Je ne saurais me procurer de généraux pro¬ pres à commander. Faute de grain, l’on m’a amené de Mortagne, pour l’armée, 8,000 livres de pain. Je ne suis pas secondé encore de ce côté, mais je mets tout en œuvre. J’aurais bien besoin de 2 ou 4 pièces de canon avec leurs caissons, car je ne vois pas que l’ennemi puisse se porter par ailleurs que par ici. Envoyez-moi tout ce que vous pourrez, surtout un collègue, je ne puis plus m’en passer. « Le Tourneur. » Note sur les brigands (2). Les brigands mis en déroute par l’armée do Mayenne ont forcé le poste de Varade et passé la Loire au nombre de plus de 20,000 hommes avec une trentaine de pièces d’artillerie, les troupes de la République en ont recouvré dans la Vendée et la partie de l’Anjou qu’avait en-(1) Cette pièce n’est pas jointe. (2) Archives nationales, carton AFn, 170, pla quette 1393, pièce 44.