224 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Bar-le-Dac.] et corruptrices, scandale sans doute affreux et dans tous les temps -, mais ce qui inspire plus d’horreur encore, c’est lorsqu’ils se commettent les jours consacrés au Seigneur, ce qui n’est, hélas ! que trop ordinaire. Nous, pasteurs, que des maux si grands touchent d’une manière bien sensible, trop faibles pour les faire cesser, nous nous lassons de ne pouvoir qu’en gémir : nous prions instamment le souverain de faire revivre ses anciennes ordonnances à ce sujet, et d’intimer à la police locale trop indifférente de les faire exécuter dans la plus grande sévérité. La plaie de l’Etat est profonde; nous en jugeons par la peine extrême dont notre auguste monarque est pénétré. Les princes, à son exemple, nous ont donné des marques de leur sensibilité ; ne cherchons point la cause de nos malheurs, nous serions forcés de faire un reproche trop amer à ceux qui s’en sont rendus les auteurs ; tâchons au contraire de trouver les moyens de les éviter à l’avenir. La France n’a eu que trop souvent à gémir sur riulidélitô de ceux qui ont administré les finances. Le digne ministre qui les gouverne, ne doit sa place qu’à son mérite et à la sagesse du Roi, qui voit son choix se justifier dans le cœur des Français. Sous de si heureux auspices, ce vrai patriote ne nous laisse que d’heureuses espérances : mais nous, citoyens instruits par nos malheurs passés, creusons douloureusement dans l’avenir, unissons nos efforts à ceux d’un ministre respectable et équitable pour prévenir ces déprédations désastreuses, ces abus destructeurs qui ont ouvert le précipice. L’expérience nous convainc que l’espérance de l’impunité enhardit le coupable; un ministre ambitieux et prévaricateur se fait de son élévation, de son autorité, de sa puissance, du crédit de ses créatures, un bouclier qui le met à couvert du glaive de la justice ; comme il ne craint plus rien, il ne garde plus de mesures dans ses vexations, il abuse souvent de la confiance de son souverain, s’approprie injustement le bien de l’Etat et croit n’en devoir aucun compte à la nation. Abus terrible! Nous espérons de la justice et autorité de notre monarque qu’il en détruira le principe en livrant le coupable à la sévérité d’une nation dont il aura blessé les droits, abusé de la confiance, et qui a des lois qui doivent faire trembler l’illustre coupable, comme l’obscur criminel. Le moyen d’entretenir l’harmonie dans tous les corps, d’assurer une paix profonde et durable au monarque et à ses sujets, sera de ménager, autant et selon l’exigence des cas, le retour périodique des Etats généraux, rapprochement si utile à l’un et à l’autre. Mais pour prévenir les abus qui pourraient se glisser pendant leur absence, nous estimons nécessaire d’établir dans chaque province un corps représentatif de leur autorité, connu sous le nom d’Etats provinciaux, organisés comme les assemblées provinciales, auxquels on attribuerait les grandes fonctions renvoyées’ jusqu’alors aux chambres des comptes, à la Régie des fermes et aux commissaires départis; mais pour ne pas surcharger ces Etats d’un travail pénible et trop étendu, il sera bon d’établir des bureaux de district, des municipalités dans chaque communauté ; de leur donner toute la force requise, lesquels correspondraient graduellement aux Etats de la province et leur seraient comptables. Ces derniers seraient chargés de la police des lieux. Ces places, revêtues d’un caractère honorable, les ferait rechercher; sans rien offrir à la cupidité, elles ne seront accordées qu’aux plus dignes à la pluralité, des suffrages ; et pour ne point laisser trop longtemps l’autorité dans les mômes mains, ce qui est toujours dangereux, on procédera à une nouvelle élection, chaque deux ou trois ans, comme il serait déterminé par le règlement. Nous demandons en outre que, dans l’administration générale et pour le bien commun, les trois ordres opinent par tête ; mais dès qu’il s’agira des privilèges soit du clergé, ou de la noblesse, ou de l’intérêt d’un ordre isolé, alors les suffrages se prendront par ordre, afin qu’un ou deux autres ordres réunis ne puissent opprimer le troisième. Enfin, pour ne laisser rien à désirer aux députés du second ordre du clergé, nous espérons, d’après les promesses de notre monarque, que nos seigneurs du clergé verront sans peine nos représentants auxEtats généraux former un nombre au moins égal au leur; et pourrait-on avec justice nous refuser ce droit, à nous qui avons les mêmes intérêts à discuter, et la même cause à défendre? Le Roi, que nous chérissons, désire le bien : ne formons qu’un môme vœu avec lui. Fasse le Seigneur, qui veille particulièrement sur la France, qu’il prospère ce bien si nécessaire et si longtemps désiré ! Fait, clos et arrêté en l’assemblée de l’ordre du clergé, aujourd’hui vingtième mars de l’an mil sept cent quatre-vingt neuf. Entendons néanmoins que nos députés aux Etats généraux se modèleront sur les articles contenus au présent cahier, pour remontrer, aviser, consentir pour le bien de l’Etat et la prospérité du royaume. Collationné et copie délivrée conforme à l’original par le prêtre secrétaire de l’ordre du clergé du bailliage du Bassigny séant à la Marche, soussigné. Signé Fouillette, prêtre secrétaire de l’ordre du clergé du bailliage du Bassigny. CAHIER DES REMONTRANCES ET DOLÉANCES DES HABITANTS DE MÉNIL-LA-HORGNE, BAILLIAGE DE COMMERCY, ADRESSÉES A M. LE GARDE DES SCEAUX. 26 avril 1789. Monseigneur, Nous avons recours à votre charité et votre justice pour vous supplier de mettre aux pieds de notre bon Roi nos respectueuses représentations et doléances que nous n’avons pu faire comprendre dans le cahier commun de notre convocation au bailliage de Commercy. Les pauvres communes de la campagne y ont été méprisées; les officiers et praticiens du siège se sont emparés de tout. Nous étions trente-deux communautés de la campagne, et malgré que nous nous étions bien concertées pour profiter d’une circonstance si heureuse et si favorable à la réforme des abus qui portent principalement sur nous, les six députés de la ville font emporté en tout point, pour la rédaction des cahiers, pour être scrutateurs et enfin députés à l’arrondissement de Bar. Malgré la timidité desgens de la campagne, on n’a pu s’empêcher de murmurer; on a dit même hautement qu’il y avait eu cabale, séduction, etc.; l’avocat du Roi, quoiqu’un des députés de la ville, s’est vu dans le cas de joindre sa voix aux plaignants ; mais l’autorité ou du moins l’ascendant ayant prévalu, un conseil- [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Bar-le-Duc.] 225 1er du siège et un avocat-juge, gardedans plusieurs villages, sont restés députés à Bar. La noblesse avait déjà choisi pour son député M. le lieutenant général; ainsi la députation à Bar s’est trouvée composée de trois officiers de judicature. Si cette nomination était l’effet d’un choix parfaitement libre, elle ne serait pas sans inconvénient, mais il n’y aurait rien à dire; il résulte au contraire que les trente-deux communautés delà campagne n’auront point de vrais représentants aux Etats. Et c’est ainsi que les pauvres habitants de la campagne ne peuvent jamais faire parvenir leurs vœux à leur souverain, qui désire leur bien et qui prend tous les moyens pour l’opérer. Les cahiers des doléances de la campagne renfermaient surtout des articles essentiels sur les réformes de la justice, sur les abus qui résultent de son état actuel et qui sont le plus rude impôt sur les campagnes ; ces articles ont été supprimés; on a mis en place sur le cahier commun un éloge long et pompeux du bailliage de Gommercy et un exposé très-détaillé de ses prétentions particulières. Nous, avions demandé qu’on nous rendît du moins nos cahiers, lorsque tout a été fini; on nous les a refusés, et nous savons que par un abus manifeste de confiance, ce dépôt est ouvert à qui veut les examiner, pour nous rendre ainsi les objets de la censure publique. Gomment oser une autre fois exposer sincèrement ce qu’on a à dire? Pour toute satisfaction sur ces différents griefs, on nous a dit qu’il nous était libre de vous adresser à vous, Monseigneur, un mémoire particulier : permettez-nous donc de le faire, et daignez nous accorder, nous vous en supplions, la grâce d’en considérer les motifs et les objets. Jusqu’alors nous n’avons rien perdu, si nous trouvons accès, par votre bienfaisance, près de notre bon Roi, le tendre père de tous ses sujets, dont nous nous faisons gloire d’être les enfants les plus affec * tionnés et les plus soumis. 1° Nous représentons très-respectueusement que pour nous faire partager les heureux effets de l’influence générale qui nous est accordée par les dispositions généreuses de Sa Majesté et par la sagesse de ses ministres, il eût été bien à désirer pour nous que l’on adoptât une forme de convocation où le tiers-état des campagnes ne pût être ainsi subjugué par celui des villes, surtout par les officiers de judicature. Tout inspire à leur égard de la timidité aux habitants des campagnes. Le premier officier du siège président, assisté du procureur du roi et du greffier du bailliage; les autres juges et avocats près d’eux comme députés de la ville, cet appareil ressemble trop à une audience, gêne absolument la liberté des suffrages et inspire autant de crainte que de méfiance aux pauvres villageois, habitués de trembler devant des gens qui disposent de leur fortune presque à leur gré. 2° Pleins de confiance dans la bonté du Roi, nous le supplions de faire procéder à la réforme de la justice, du moins dans les, tribunaux des petits bailliages, où les praticiens sont les véritables sangsues des pauvres gens de la campagne ; nous demandons instamment que ces tribunaux n’aient toujours qu’une médiocre attribution. Il y aurait le plus grajid inconvénient à êtrejugé en dernier ressort par un tribunal trop proche et gui se laisse facilement prévenir. Qu’il soit libre à chacun de plaider sa cause dans ces petits tribunaux : que l’avocat, s’il est employé, soit en même temps leur procureur, qu’il soit libre aux parties d’exposer leur cause par leurs propres écritures, s’il y a lieu ; et qu’en ce cas, les écri-lre Série. T. II. tures et appointements soient défendus de la part des praticiens, sinon de l’aveu formel et sous la signature des parties; que l’on ait désormais plus d’égard au fond de l'affaire qu’à la forme; que celle-ci soit tellement simplifiée que les frais ne puissent passer le tiers de la valeur de la chose, et que les affaires soient jugées au moins dans les six mois à ces tribunaux pour l’être enfin dér fmitivement, en cas d’appel, au tribunal du ressort dans l’année. Les abus énormes et fréquents auxquels on remédierait par là équivalent, surtout pour les campagnes, à un impôt très-considérable. C’est un fait que les frais de justice chaque année se portent dans cette communauté, comme dans bien d’autres à un tiers en sus pour le moins de ce que nous payons pour les impositions ordinaires et accessoires, second objet essentiel de nos doléances, dont nous avions exprimé le vœu dans notre cahier, ainsi que les suivants. 3° Nous supplions Sa Majesté de nous continuer le bienfait de l’administration municipale sous la direction des Etats de la province ou de leur commission intermédiaire; et si l’organisation actuelle est adoptée, nous demandons instamment qu’il soit remédié aux lenteurs qui en résultent pour la décision des affaires, soit par les entraves et les formalités qui la retardaient, soit par le défaut d’une autorité suffisante dans les officiers préposés à l’administration. A ce moyen cet établissement produira le plus grand bien. Nous représentons très-humblement que pour obtenir l’heureux effet d’un régime uniforme, surtout dans les campagnes, il est" bien à désirer que les officiers municipaux soient les seuls établis avec le degré d’autorité convenable pour agir avec succès; qu’ils soient préposés à tout ce qui intéresse le bien commun, l’ordre, la police, la tranquillité publique. . Qu’ils soient déclarés arbitres dans toutes les affaires avant qu’il soit libre aux parties d’y procéder en justice, du moins pour les descentes et vues de lieux si fréquentes par les anticipations, et dont ils peuvent mieux connaître que des étrangers qu’il faut toujours diriger ; lesquelles discussions deviennent par là presque aussi préjudiciables aux demandeurs qu’aux défendeurs et toujours fort dispendieuses par les formalités usitées. Qu’ils soient préposés à l’apposition des scellés, confection d’inventaire etc., lorsqu’il n’y aura lieu à contestation. Que ces officiers municipaux aienf principalement l’administration des bois communaux et la manutention des deniers provenant des ventes des arbres dépérissants, pour satisfaire aux charges de la communauté, avec obligation d’en faire état dans le compte qui se rend chaque année. Les bois étant maintenant en coupe réglée, le ministère des gruyers est une surcharge annuelle, un autre cens trop considérable sur cette portion si chétive et cependant unique de notre patrimoine ; d’ailleurs les bois, seule ressource pour bien des villages, seront mieux ménagés par ceux qui y mettent un intérêt particulier, et qui les surveillent de plus près. Nous ne pouvons nous dispenser d’observer, et c’est le cri général du moins dans les campagnes, que d’après l’administration actuelle des bois, dans peu on n’y trouverait plus rien; presaue plus d’arbres pour les bâtissants, par l’abus de comprendre dans la vente des dépérissants des arbres qui pourraient profiter dans une seconde révolution ; par l’abus du balivage trop facilement 15 226 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Bar-le-Duc.} confié aüx forestiers et singulièrement négligé, et enfin par celui qui résulte des malversations trop fréquentes de ces derniers qui s’entendent avec les adjudicataires au préjudice des communautés et dont les manœuvres échappent presque toujours à la vigilance des officiers actuels. Qu’afin de parer à ces désordres, pour le contentieux des bois, les rapports en délit soient faits au greffe de la municipalité pour être, avec l’avis délibéré et motivé des officiers municipaux, renvoyés dans le mois à la commission intermédiaire des Etats de la province, pour y être fait droit, s’il y a lieu, et jugés, sauf appel à la chambre ou à la cour souveraine et non au bailliage, du moins en dernier ressort. 4° Nous représentons très-respectueusement à Sa Majesté, que notre communauté, ainsi que bien d’autres, a été forcée d’aliéner ses communes dans des temps de calamité, en 1638 et 1729. Nous sommes dépouillés depuis ce temps d’une partie considérable de nos bois : ce qui nous reste est absolument insuffisant. Nous avions réclamé dans le temps le bienfait accordé aux communautés à cet égard par l’édit de 1667, et d’autant mieux que nos bois ôtant domaniaux, ils ont été aliénés sans la permission du souverain. Nos réclamations ont été étouffées par le crédit des acquéreurs, et quoique le procureur général fit cause commune avec nous, nos démarches n’ont abouti à la chambre qu’à des frais très-considérables sans fruit, n’ayant point de facultés pour suivre l’affaire au conseil, où nous avons lieu de croire que notre demande si bien fondée eût ôté accueillie. Nous demandons de la justice et de la bonté du Roi que, dans cette année mémorable. Sa Majesté veuille bien remettre en vigueur l’êdit de 1667, qui autorise les communautés à rentrer sans forme de procès, et en remettant le prix des ventes, dans leurs bois aliénés, comme il est porté par l’édit depuis 1620 jusqu’alors , la prescription ne pouvant avoir lieu contre des mineurs non autorisés et contre les intérêts du souverain. Les bois étant Tunique ressource de notre communauté, nous supplions également Sa Majesté de nous faire rétablir dans l’usage des portions de bois anticipées sur nous il y a quinze ans, par un système particulier, dans la vue d’établir des lignes droites de séparation, ce qui nous prive de plus de 40 arpents, dont la preuve est facile à faire par les anciennes bornes et limites qui existent, objet considérable pour une pauvre communauté, et de nous accorder comme ci-devant la propriété et l’usage d’une grande vallée, principalement pour la vaine pâture, n’avant pas d’autre ressource pour nos bestiaux, pendant tout l’étéj ce qui, depuis les quinze ans qu’un nous en a privé, a porté un grand préjudice à notre agriculture. 5® Nous exposons avec confiance à notre bon Roi le principe de notre misère dans notre communauté ; le village trois fois incendié, dont une en totalité, dans l’espace d’un demi-siècle ; un terrain fort élevé, ingrat et aride qui nous rend à peine le prix des semences et de notre labeur, les droits énormes des accises joints aux contributions ordinaires et accessoires, aux vingtièmes et aux cens de nos bois. Nous demandons du moins que ces droits d’accises, qui nous tenaient lieu de tout impôt envers nos anciens souverains, entrent en considération dans ceux établis ou à établir. Au surplus, que les impôts soient désormais répartis sur tous sans aucune exception et selon les règles de la justice distributive ; qu’ils parviennent dans les coffres du souverain sans les intermédiaires qui les absorbaient ci-devant, bous sommes prêts à donner nos biens et notre vie. s’il le faut, pour la tranquillité de notre bon Roi et le service de la patrie. Que du moins les abus soient réformés et l’ordre rétabli. 6° Un des plus grands abus, qu’il nous soit permis de l’exprimer, c’est celui qui regarde les dîmes. Personne n’ignore que dans leur origine et dans leur institution primitive, elles n’étaient qu’une espèce d’aumône et d’oblation volontaire que le peuple offrait à Dieu dans la personne de ses ministres pour leur subsistance, l’entretien des églises et le soulagement des pauvres. C’est ce qui est parfaitement justifié par tous les monuments de Phistoire,parles saints canons et par les mêmes ordonnances de nos rois qui les ont rendues obligatoires. Hélas ! que nous sommes loin à tous égards de cette fin ! Des étrangers qui ne rendent aucun service dans nos campagnes se sont emparés de tout, et ceux qui y travaillent n’ont presque rien ; les églises aussi, pour la plupart, sont dans l’état le plus déplorable, insuffisantes, ne pouvant contenir qu’une partie des paroissiens, et les pauvres sont encore les plus ma! partagés. Cet abus est trop révoltant. Dans la régénération générale qui va se faire, nous osons espérer des droites intentions du souverain et des lumières réunies de la nation française, que celle-ci, sous la bienfaisance et la direction du père commun rentrant dans ses droits , remettra les choses comme elles doivent être, surtout si les parties intéressées aux abus n’obtiennent pas la prépondérance des suffrages. C’est incontestablement le vœu du tiers-état de toutes les campagnes ; mais peut-il, d’après ce que nous avons éprouvé dans nos élections, se flatter qu’il sera mis au pied du trône ? Quel avantage pour nous si le produit des dîmes ramené à sa destination primitive, était employé comme il devrait l’être! il convient sans doute d’y prélever l’honnête nécessaire d’un zélé pasteur; mais pourquoi n’y prendre qu’une partie de ce qui est nécessaire aussi pour les constructions et entretien des églises et laisser l’autre au compte des habitants assez surchargés d’ailleurs ? Qu’il est à désirer qu’un règlement sage vienne à leur secours ! Que les décimateurs, s’ils sont maintenus dans la perception de la dîme, soient obligés aussi à la construction totale et complète de tout ce qui appartien t à l’édifice et à l’entretien » Que la réédification ait fieu lorsque l’église est insuffisante ou que le service ne peut plus y être fait avec décence, d’après le rapport des experts nommés par l’évêque et par la commission intermédiaire, sans donner lieu désormais aux discussions si préjudiciables aux gens de la campagne, qui savent peu se défendre et qui sont presque toujours opprimés par le crédit et par la puissance. Il conviendrait aussi pour le bien public, lorsque la reconstruction a lieu, de la faire suivant l’ancien usage avec voûte pour prévenir les accidents, surtout celui des incendies, et fournir dans ce cas un asile et une retraite. Enfin, pour la troisième destination de la dîme, que les pauvres du lieu, les vieillards infirmes sans ressources, les veuves, les orphelins hors d’état de subsister de leur travail, puissent se retirer avec confiance prés des décimateurs pour en obtenir les secours nécessaires, au lieu de se répandre dans la province pour y mendier; les dîmes reviendraient ainsi à leur objet, nous y satisferions sans regret et sans murmure. Que du moins, si les abus de ce genre ne peuvent être entièrement corrigés aux prochains Etats gêné- [Étais gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Bar *Ie*Duc.] 227 raux, qu’il y soit défendu que les dîmes soient désormais une occasion de vexations annuelles, lorsque ceux qui s’en disent les propriétaires les amodient à des praticiens du siège qui, se prévalant de leur facilité pour traduire en justice, découragent et abîment le pauvre cultivateur par leurs chicanes perpétuelles. Est-il permis qu’en nous privant ainsi du prix de nos sueurs, pour une destination étrangère, on nous en fasse encore payer si cruellement la façon ! L’objet de la dîme des pommes de terre que l’on plante chaque année dans les versaines depuis quelque temps et dout la grosse dîme s’est emparée ici en présente de nouveaux. Après la récolte, le fermier de la dîme va enlever dans les maisons à sa volonté ce qui lui convient. Pour éviter d’entrer en difliculté avec un procureur du siège fermier du chapitre de Gommercv, déci-mateur, on prend le parti de le laisser décimer comme il veut. Dans cette province, il n’y a rien de fixe sur cette dîme : dans quelques endroits c’est menue dime, ailleurs elle fait partie de la grosse -, là le fermier la perçoit au trentième, ici à l’onzième, dans un autre lieu c’est au champ, dans un autre, on lui abandonne un nombre de verges du terrain pour les arracher lui-même et les emmener. Si cette dîme est réputée légitime dans le haut pays, où ce fruit coûte tant à cultiver, il conviendrait du moins qu’elle fût réglée autrement pour faire cesser les vexations auxquelles elle donne lieu. 7°. Nous représentons respectueusement qu’il serait fort nécessaire, à raison de la pénurie des pâturages dans ce lieu, de faire un règlement sur le droit de vaine pâture que prétend sur notre communauté l’abbaye de Riéval qui est voisine. La crainte d’entrer en procès avec elle sur la discussion d’un droit aussi abusif nous a imposé silence jusqu’alors. Cette abbaye , d’après un principe de commerce qui nous est fort préjudiciable, nourrit un troupeau fort considérable de bêtes à cornes et surtout de bêtes blanches, brebis et moutons. Ces bestiaux parcourent tout notre finage aux dépens d’une grande partie de nos pâturages. C’est un abus de conséquence pour une communauté si misérable à cet égard et qu’il est' de la justice de réprimer, soit en fixant des limites au parcours, soit en déterminant le nombre de, bestiaux, supposé que d’aprèsl’exhibi-tion des titres l’abbaye puisse justifier de son droit. Cette abbaye, également par le même principe, entretient un énorme colombier qui ne fait pas un moindre préjudice à notre agriculture. Gelui-la et ceux des seigneurs voisins sont pour les campagnes üne surcharge considérable : comme il n’y a point de règle à cet égard, chacun augmente son droit à sa volonté par la capacité du colombier et la multitude des pigeons. Nous demandons, sinon la suppression, du moins la réduction de ces colombiers ; que ceux qui sont fondés dans ce droit soient bornés dans l’usage, et que pour prévenir les abus, la visite chaque année en soit faite par les officiers municipaux du ban ; que la capacité de ces colombiers soit déterminée par proportion de celle des voiliers accordés à la plupart des curés de cette province par la déclaration du duc Léopold de 1711. Ceux-ci du moins sont appuyés sur des motifs raisonnables exprimés dans la concession; c’est en faveur de l’hospitalité et du soulagement des paroissiens malades ; ils sont fondés sur le bien public : la capacité du voilier est fixée à 120 bourrés ; il ne peut en résulter grand préjudice ; mais les autres sont ordinairement de 1,000 et de 2,000 et quelquefois plus : c’est un abus répréhensible. 8° Nous supplions Sa Majesté d’accorder la suppression des huissiers priseurs, autres fléaux des campagnes ; et au préalable, de rendre publique l’exception faite depuis l’édit de leur rétablissement, en faveur des fabriques, et déclarer que cet édit de 1771 ne donnant aux nouveaux huissiers que les mêmes attributions dont jouissaient les anciens, comme il est dit par l’édit, ils n’ont pu et ne peuvent s’immiscer dans les adjudications annuelles des revenus des fabriques, en quelque manière que ce puisse être, sans tomber dans des abus condamnables. Cet objet importe surtout aux manœuvres et aux indigents du lieu qui peuvent s’approvisionner à des conditions favorables dans ces ventes des fabriques après les récoltes, ce qui n’aurait plus lieu, si pour, se soustraire au ministère de ces huissiers, les fabriques étaient obligées de faire conduire leurs grains dehors. Celte déclaration préalable que nous sollicitons de la bonté du Roi mettrait fin d’abord aux recherches par lesquelles ces huissiers inquiètent actuellement les fabriques. 9° Nous représentons enfin que le trop grand nombre d’ordres mendiants qui viennent quêter dans cette paroisse est une charge d’une autre espèce qui mériterait d’être modifiée par un règlement sage. Nous ne demandons point leur suppression, puisque leur établissement est formé sous les auspices de la religion, et que de tous les religieux ce sont ceux qui nous paraissent avoir le mieux conservé l’esprit de leur état, et s’être maintenus dans les principes de leurs règles ; mais sans déroger aux motifs de charité dont nous sommes toujours animés envers eux, nous désirerions que le nombre de ceux qui peuvent se répandre dans nos campagnes fût limité et déterminé à ceux qui viennent partager quelquefois avec notre pasteur les services spirituels. Des six différents ordres qui viennent à la quête, que ce droit soit réservé à deux; et que ces deux soient tenus en reconnaissance aux secours du pasteur en cas de maladie, ou d’absence nécessaire et aux époques oü la fréquentation des sacrements le surchargerait trop. Noos avons pensé que ce règlement n’était pas indigne d’être proposé à ia sagesse du gouvernement. Telles sont, Monseigneur, les respectueuses remontrances et doléances que nous, habitants soussignés de la commurtauté de Ménil-la-Horgne, vos très-humbles et très-dévoués serviteurs , avons l’honneur de vous exposer, en vous suppliant très-instamment de les mettre pour nons aux pieds du trône du meilleur et du plus juste des rois, en lui présentant les vœux sincères et ardents que nous, ses fidèles et très-affectionnés sujets, ne cessons de former pour son bonheufj celui de l’Etat, et l’heureux succès des sublimes intentions de son génie bienfaisant. Ménil-la-Horgne, en Lorraine , bailliage de Commercy, arrondissement de Bar, le 26 avril 1789. Signé Dieud. Caussin, maire, Bontemps lieutenant, P. Rigal, élu, Glaude-RénéGouvet, syndic, Marchand, G. Petit, Christophe Huot, C. Marbolte, An. Sarvie, Biaise l’ainé, F. Mezot, Louis Leraux, Joseph Levard, F. Paris, N. Marchand, J. Husson, J. Denaix, G. Paris, Didolo, F. Caussin, J. Lela-boureur, Glande Bouchon, F. Rolin, Etienne Gai-lotel, J. Tessevant, F. Lallemand, Jean Coignard, Claude Ragache, J. -F. ‘Tisserand, B. Bfaise, Joseph Martel, Joseph Allezot, J.-F. Caussin, J. Laboureur, Pierre Drame, J. Alzot, F. Husson, Tagnet, J.-F. Lallemand, D. Didolot.