364 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [Julien de Carentan, détenu depuis 11 mois, et accusé d’avoir distrait une somme de 138 000 L. appartenant à la République, lorsqu’il était employé par le comité de Salut public, demande que Bourdon (de l’Oise), qui s’est chargé de l’affaire, fasse incessamment son rapport, afin qu’il soit puni s’il est coupable, et mis en liberté s’il est innocent. LE COINTRE (de Versailles) : Effectivement, Julien est accusé du vol dont il s’agit, et c’est aux tribunaux à en connoître. Je demande, en conséquence, que le comité de Sûreté générale fasse passer les pièces au tribunal criminel.] (92) 32 La Convention nationale rend les décrets suivans (93) : a La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [MENIJAU au nom de] son comité des Secours publics sur la pétition de Jean-Baptiste Bonbergue, jardinier, demeurant à Favemey, district de Vesoul, département de la Haute-Saône, dont la femme vient d’accoucher de trois enfans, décrète que la Trésorerie nationale fera passer sans délai à l’agent national provisoire du district de Vesoul la somme de 300 L, pour être donnée, à titre de secours, au citoyen Jean-Baptiste Bonbergue (94). b SAINT-MARTIN, au nom du comité des Secours publics, après avoir examiné avec la plus sévère attention la question de savoir si la loi du 13 prairial pourrait être applicable à la citoyenne Supplis, veuve Desruelles, a unanimement voté pour la négative. Il a considéré qu’il est dans la lettre et dans l’esprit de cette loi de n’accorder des pensions et des secours qu’aux veuves et aux familles des citoyens qui sont morts en défendant la patrie, ou en faisant un service requis ou commandé; Que le citoyen Desruelles ne se trouve ni dans l’un, ni dans l’autre de ces cas. Il n’est pas mort en défendant la patrie, nul doute à ce sujet ; il n’est pas mort, non plus en faisant un service requis ou commandé; il était bien en réquisition pour travailler à la manufacture nationale d’armes établie aux ci-devant Cordeliers, mais on ne peut pas présumer qu’il soit mort dans l’exercice de ses fonctions, ou de la (92) Mess. Soir, n° 825. (93) P.-V., XLIX, 264. (94) P.-V., XLIX, 264. Bull., 28 brum. (suppl.). Rapporteur Menuau selon C* II, 21. suite des fatigues de ces mêmes fonctions, puisqu’il a été trouvé noyé dans la Seine. A-t-il été assassiné? a-t-il été tué dans une rixe, ou bien s’est-il noyé par accident, ou volontairement? C’est ce qu’on ignore ; mais, je le répète, le genre de sa mort écarte toute présomption qu’elle soit la suite de son service de maître forgeron à la manufacture d’armes. Ce serait ouvrir une trop large porte aux abus, ce serait constituer la République en des dépenses au-dessus de ses forces, que d’étendre les dispositions de la loi du 13 prairial aux familles de tous les citoyens employés par la nation, qui meurent accidentellement, ou de maladie naturelle, hors de l’exercice de leurs fonctions. Cette loi est juste, bienfaisante, digne de la munificence d’une grande nation ; jamais, chez aucun peuple, la patrie ne donna des secours si abondants aux familles indigentes des citoyens qui meurent à son service ; mais il faut prendre garde de ne pas la rendre inexécutable en lui donnant une extension qui épuiserait le Trésor public. Ce sont ces considérations qui ont déterminé votre comité à arrêter que la veuve Desruelles n’avait point droit à la pension. Mais, comme cette veuve, chargée de trois enfants en bas âge, est dans l’indigence, comme elle a été attirée à Paris par la réquisition de son mari, comme ce voyage lui a occasionné des pertes, et qu’elle est sans moyens pour regagner ses foyers, le comité m’a chargé de vous proposer de lui accorder un nouveau secours de la somme de 400 livres, une fois payée ; je vous propose le décret suivant (95) : La Convention nationale, après avoir entendu [SAINT-MARTIN au nom de] son comité des Secours publics, sur la pétition de la citoyenne Supplis, veuve d’Etienne Desruelles, maître forgeron, travaillant à l’atelier d’armes établi aux ci-devant Cordeliers de Paris, décrète que, sur le vu du présent décret, la Trésorerie nationale paiera à ladite veuve Desruelles la somme de 400 L, à titre de secours et indemnité, pour l’aider à retourner avec ses enfans au lieu de son domicile. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (96). 33 [Carrier, représentant du peuple au président de la Convention nationale, Paris le 28 brumaire an III\ (97) (95) Moniteur, XXII, 538-539. (96) P.-V., XLIX, 265. Moniteur, XXII, 539 ; Bull., 28 brum. (suppl.). Rapporteur Saint-Martin selon C* II, 21. (97) C 323, pl. 1383, p. 17. Moniteur, XXII, 535. Débats, n° 786, 818; J. Paris, n° 59; Rép., n° 59; J. Fr., n° 784; Ann. R. F., n° 58; Gazette Fr., n° 1051; Ann. Patr., n° 687; J. Perlet, n° 786. SÉANCE DU 28 BRUMAIRE AN III (18 NOVEMBRE 1794) - N08 34-35 365 Citoyen, J’apprends qu’on a distribué hier toutes les pièces relatives a mon affaire avec le raport fait a la Convention nationale par la commission des 21. Je n’ai point encore reçu le raport, il faut pourtant que j’y réponde dans l’ordre que les faits y sont présentés, il faut que je réponde a toutes les pièces dont la rage aristocratique a cherché a grossir le nombre, ma défense sera nécessairement longue, ma santé déjà altérée ne me permet pas d’y employer tout le repos de la nuit, elle seroit dans le meilleur état qu’il me seroit impossible de terminer mon travail primidi prochain, je t’invite donc au nom de la justice a démander a la Convention nationale, 1° le délai d’une décade pour travailler a ma défense. 2° Qu’elle me fasse distribuer un exemplaire du raport. 3° Qu’elle ordonne a l’accusateur public prés le tribunal révolutionnaire de me renvoyer dans le jour en originaux ou en copies certifiées de lui les deux lettres que phi-lippe Tronjoly m’a adressé de Nantes et que j’ai remises dans les tems a l’accusateur public suivant son reçu dont je suis nanti. Ces lettres sont nécessaires a ma défense. Salut et fraternité. Carrier. [On invoque l’ordre du jour, motivé sur ce que Carrier a reçu de la commission des 21 communication de toutes les pièces à sa charge. Un membre observe que la lettre renferme plusieurs demandes, et propose de les diviser pour qu’il soit statué sur chacunes d’entre elles en particulier. La division est ordonnée, et la Convention, en accédant aux deux dernières demandes relatives à la communication du rapport de la commission et de deux lettres de Tronjoly, passe à l’ordre du jour sur celle d’un délai d’une décade pour l’ouverture de la commission.] (98) La Convention nationale, après avoir entendu lecture d’une lettre du représentant du peuple Carrier, passe à l’ordre du jour sur la demande tendante à obtenir le délai d’une décade, pour travailler à sa défense. Sur le surplus des demandes, décrète, 1° qu’il sera remis au représentant du peuple Carrier un exemplaire du rapport fait sur son affaire par la commission des Vingt-Un, 2° que l’accusateur public près le tribunal révolutionnaire enverra dans le jour au représentant du peuple Carrier, des copies certifiées des deux lettres adressées par Philippe Tron-jolly à ce représentant et remises par celui-ci à l’accusateur public, suivant son récépissé (99). (98) Rép., n° 59. (99) P.-V., XLIX, 265. Moniteur, XXII, 535; Débats, n° 786, 828 ; C. Eg., n° 822 ; Mess. Soir, n° 823 ; J. Perlet, n° 786. Rapporteur Crassous selon C* II, 21. 34 GUYTON-MORVEAU, au nom du comité de Salut public, fait un rapport sur la pétition présentée hier par les ouvriers de l’atelier d’armes de l’île de la Fraternité. Sur la demande de ces citoyens à la journée de n’entrer qu’à sept heures dans leur atelier, le comité a pris un arrêté qui acquiescera à cette demande. Sur leurs plaintes, relativement à une administration qui les vexe, le comité a vu en effet que cette administration était mauvaise, puisqu’elle était dirigée par des hommes placés par les triumvirs. Il propose à ce sujet de décréter que l’atelier de l’île de la Fraternité sera mis sous l’inspection de la commission des poudres et salpêtres. Une troisième réclamation de ces ouvriers était une augmentation de paye. Le rapporteur observe que cette réclamation ne peut regarder les ouvriers à la journée, dont le moindre, fût-ce un enfant de quatorze ans, reçoit jusqu’à 4 livres par jour. Il considère que les victoires de la République étant aussi considérables, il n’est pas essentiel que le gouvernement continue à faire des dépenses aussi énormes que celles qu’il a faites; que si plusieurs ouvriers de cet atelier, amenés des armées pour ce travail, ne peuvent se borner au prix qui leur est donné par journée, il leur est libre de retourner à leur bataillon, avec lequel ils étaient si généreusement partis pour la défense de la patrie. Le rapporteur conclut en demandant qu’il soit décrété qu’il n’y aura pas lieu à délibérer sur la demande en augmentation de paye. Toutes ces propositions sont adoptées (100). La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [GUYTON-MORVEAU au nom de] son comité de Salut public sur la pétition des ouvriers de l’atelier de l’Isle de la Fraternité [Paris], décrète : le comité de Salut public prendra incessamment des mesures pour mettre la manufacture d’armes de Paris sous la direction immédiate de la commission des Armes et poudres. Sur la demande en augmentation de prix, il n’y a lieu quant à présent à délibérer (101). 35 La Convention accorde un congé de cinq décades au représentant du peuple Ferroux, pour rétablir sa santé (102). (100) Moniteur, XXII, 538. Débats, n° 786, 819; J. Paris, n° 59. Voir Arch. Pari., 27 brum., n° 19. (101) P.-V., XLIX, 265-266. Moniteur, XXII, 538; Débats, n° 786, 819; Bull., 28 brum. Rapporteur Guyton [-Morveau] selon C* II, 21. (102) P.-V., XLEX, 266. Rapporteur Guimberteau selon C*II, 21.