194 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE fripons. Je ne connais pas de raisonnement plus absurde. Je demande qu’on mette aux voix si Le Cointre, si Rougyff ( 69) seront remplacés. PELET : On vient de dire qu’il n’est pas vrai qu’on ait jeté dans l’assemblée une pomme de discorde. Je crois bien que telle n’a pas été l’intention de ceux qui ont fait la motion; cependant depuis qu’elle a été faite, la discorde règne; on s’occupe des individus. Ne cesserons-nous pas de sacrifier aux passions particulières ? Eh ! qu’importe que Guffroy, que Le Cointre soient au bureau ou n’y soient pas ? mais il importe que personne ne puisse disposer des nominations, qu’on ne puisse dire ici : tel ou tel individu nous déplaît. DUHEM : Il est impossible que de tels hommes restent chargés de fonctions qui exigent la confiance de la Convention. Le Président : Je rappelle Duhem à l’ordre, pour interrompre l’opinant. Plusieurs voix : Aux voix l’ordre du jour ! Bourdon (de l’Oise) demande la parole. La discussion est fermée (70). Après de vifs débats la discussion est fermée; L’Assemblée consultée passe à l’ordre du jour sur la proposition de renouveler Le Cointre. On demande l’appel nominal; mais pendant ce temps, Le Cointre monte à la tribune, et dit qu’ayant montré dans plus d’une occasion qu’il était prêt à donner sa tête pour la République, à plus forte raison se sentait-il capable de quitter, sans regret, la place de secrétaire. Il en donne sa démission. Elle est acceptée. Sur la proposition de renouveler Guffroy, secrétaire, la Convention nationale passe à l’ordre du jour (71). Le président met aux voix l’ordre du jour. L’ordre du jour est adopté. Duhem et plusieurs membres réclament l’appel nominal. Ils descendent pour aller signer au bureau cette demande. L’Assemblée reste un moment dans l’agitation; le président se couvre; le calme se rétablit. On continue de réclamer l’appel nominal. GOUPILLEAU (de Fontenay) : Citoyens, je ne réclamerai pas la rigueur des principes, ils ont été invoqués de part et d’autre dans cette discussion. Je me contenterai d’un seule observation : c’est que si celui qui est la cause de cette motion n’a été réellement qu’égaré, il devrait au moins donner sa démission (72). BOURDON (de l’Oise) : Je serai court. Quand le peuple investit un citoyen du droit de le représenter, sans doute il ne peut être dépouillé de cette mission, exclu du sein de la (69) Rougyff ou Le Franc en Vedette, journal publié à la fin de 1792 par Guffroy (Rougyff est l’anagramme de Guffroy). (70) Moniteur, XXI, 663. Débats, n° 713, p. 287-288. (71) P.V., XLV, 10. M.U., XLIII, 271-272; J. Mont., n° 127; C. Eg., n° 745; Rép., n° 257; F. de la Républ., n° 426; J.S.-Culot-tes, n° 565; Ann. Patr., n° 611; Ann. R.F., n° 274; J. Fr., n° 708; J. Perlet, n° 710; Gazette Fr., n° 976. (72) Moniteur, XXI, 663. Convention, que pour un crime, et d’après un jugement solemnel. Ce principe est incontestable. Mais ce n’est pas la confiance de la nation, c’est celle de la Convention, qui place tel ou tel membre au bureau : et, certes, elle peut lui retirer cette place comme sa confiance. Je le demande, pouvons-nous avec pudeur y laisser un homme dont vous avez décrété l’accusation calomnieuse ? Je prie mes collègues de peser ces observations, et le président de mettre de nouveau la question aux voix, avant de faire l’appel nominal (73). LE COINTRE : Dans plus d’une circonstance je me suis montré capable de donner ma tête pour le bien de mon pays. On m’avertit que ma démission des fonctions de secrétaire mettra fin à ces débats affligeants; je la donne de tout mon cœur. La Convention accepte cette démission, et passe à l’ordre du jour sur le remplacement de Guffroy. Collombel fait la seconde lecture du décret rendu dans la séance du 13. La rédaction est adoptée sans réclamation (74). 40 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Législation, rend les décrets suivants. La Convention nationale, après avoir entendu son comité de Législation, décrète, additionnellement à la loi du 11 ventôse dernier, relative aux scellés apposés sur les effets et les papiers des parents des défenseurs de la patrie : ARTICLE PREMIER. Les dispositions de la loi du 11 ventôse, concernant les défenseurs de la patrie, sont communes aux officiers de santé et tous autres citoyens attachés au service des armées de la République. II. Lorsque les citoyens compris dans l’article premier et dans la loi précitée se trouveront soit en pays ennemi, soit au bivouac, n’ayant point de notaire pour recevoir leurs procurations, ils pourront s’adresser au conseil d’administration du corps auquel ils appartiennent. III. Cette procuration sera signée et certifiée par les membres du conseil; elle sera scellée du sceau de l’administration. IV. Le fondé de pouvoir sera tenu de soumettre à la formalité de l’enregistrement l’acte de procuration qui lui aura été adressé, avant d’en faire usage, à peine de nullité. V. Les procurations données antérieurement à la présente loi, dans la forme prescrite par les articles précédents, sont valables. (73) Débats, n° 713, p. 288. (74) Moniteur, XXI, 663-664. Débats, n° 713, p. 288-289; J. Fr., n° 708; M.U., XLIII, 272; J. Perlet, n° 710; J. Paris, n° 611. SÉANCE DU 16 FRUCTIDOR AN II (2 SEPTEMBRE 1794) - N“ 41-45 195 VI. La présente loi sera insérée au bulletin de correspondance, et envoyée aux armées de la République (75). 41 La Convention nationale, après avoir entendu son comité de Législation sur la pétition du citoyen François Dauvergne, tendante à ce que, vu les certificats délivrés au pétitionnaire par les communes de Brou-chaud, de Saint-Perdoux, de la Boissière, de Montagnac, de Gabillou, qui attestent son républicanisme et sa probité, le jugement du tribunal de cassation du 16 prairial, qui casse celui du tribunal criminel du département de la Dordogne, du 22 ventôse, soit annulé; Considérant que les jugements du siège de la connétablie étaient sujets à l’appel; que le pétitionnaire n’a pu profiter de cette loi, ayant été, à la sollicitation de sa famille, enfermé à Charenton, où il est demeuré trois ans, et d’où il n’est sorti qu’à la faveur de la révolution; Décrète que le jugement du tribunal de cassation, du 16 prairial dernier, est annulé. Le présent décret ne sera pas imprimé (76). 42 La Convention nationale, après avoir entendu son comité de Législation sur la pétition du citoyen Gauthier Coustances. Décrète qu’il est sursis provisoirement à l’exécution de deux jugements rendus contre le pétitionnaire, à la requête et diligence du citoyen Jean Roblin, receveur des droits d’enregistrement et des domaines nationaux à Senlis, en date des 20 novembre 1792 et 27 juillet 1793 (vieux style). Le comité de Législation est autorisé à prendre des renseignements positifs, sur les causes de ces jugements, tant auprès des tribunaux des districts de Senlis et Crepy, qui les ont rendus, qu’auprès des administrations du district de Senlis et du département de l’Oise. Le présent décret ne sera pas imprimé; il sera envoyé manuscrit à la commission des Revenus publics (77). (75) P.-V., XLV, 10-11. Bull., 16 fruct. C 3418, pl. 1282, p. 22, 41, minute signée de Bezard. Décret n°10 692. M.U., XLIII, 283; Rep., n° 258; J. Fr., n° 708; J. Parie, n° 611. (76) P.-V., XLV, 12. C 318, pl. 1282, p. 23, minute signée de Bezard. Décret n° 10 682. (77) P.-V., XLV, 12. C 318, pl. 1282, p. 24, 41, minute signée de Bezard. Décret n° 10 693. 43 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Législation sur la pétition du citoyen Jean-Nicolas Cazin, capitaine de la première compagnie du premier bataillon des compagnies franches, tendante à obtenir l’annulation d’un jugement du tribunal criminel de l’armée de la Moselle, séant à Metz, du 11 messidor, qui le condamne à la peine de six années de fers, comme étant convaincu d’avoir porté sa troupe au-dessus de son nombre effectif, pour se faire délivrer l’étape au-delà du besoin. Considérant que le délit imputé au citoyen Cazin est réputé par les dispositions avoir été commis à la fin de l’année 1792, antérieurement à la loi du 12 mai 1793 (vieux style), qui qualifie le délit et détermine la peine; que, par conséquent, le jugement a violé les principes, en donnant un effet rétroactif à la loi, annule le jugement du tribunal criminel militaire établi près l’armée de la Moselle, du 11 messidor, décrète que le citoyen Jean-Nicolas Cazin sera mis sur-le-champ en liberté; charge le comité de Législation de prendre des renseignements sur la conduite des membres de ce tribunal, et d’en faire un rapport à la Convention nationale. Le présent décret ne sera publié que par la voie du bulletin de correspondance (78). 44 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Législation sur la dénonciation qui lui a été faite par l’accusateur public près le tribunal criminel du département des Côtes-du-Nord, d’un jugement rendu par le juge-de-paix du canton de Lambale, section des campagnes, qui condamne solidairement Louis Couturier et autres à une amende de 150 L, et aux dépens; Considérant que ce jugement, qui porte la date du 3 thermidor, a été rendu à la maison d’arrêt; que les condamnés ne sont point convaincus d’être en contravention avec la loi du 11 septembre dernier sur les subsistances; mais que, suivant le juge-de-paix, ils auraient vraisemblablement commis cette contravention, s’ils n’en avaient été empêchés. Considérant que le juge-de-paix n’a pu transiger avec la loi, et que, s’il y avait lieu à une amende, elle ne pouvait être modifiée à la somme de 150 L, à laquelle il a condamné les pétitionnaires. Déclare illégal et nul le jugement dont il s’agit, et décrète que l’amende et les dépens seront restitués. (78) P.-V., XLV, 13. C 318, pl. 1282, p. 25, minute de la main de Bar. Décret n° 10 687. Moniteur, XXI, 677. Bull. 16 fruct. (suppl.); J.S.-Culottes, n°566; J. Perlet, n°711.