454 {Convention ntfionaM ARCHIVES PARLEMENTAIRES. îîrdSX�i793 en fouie, il faudrait quadrupler la fabrication des assignats ; ce qui est une chose impossible et un inconvénient auquel n’ont pas songé ceux qui ont arrêté des échanges partiels. Il nous a paru que quelques exceptions étaient indispensables, et nous les avons pla¬ cées sur les objets qui sont d’un usage commun, et, pour ainsi dire, indispensable dans la société. Nous excepterons de la déclaration les bijoux d’or qui ne pèsent pas deux onces, et qui servent à presque tous les citoyens. Nous avons excepté encore tous les bijoux d’argent qui pèsent moins de deux mares, comme couverts, anneaux, croix, claviers; la déclaration de; ces objets n’est pas même obligée. Nous ne voulons atteindre que les grands objets de luxe. Je passe à la comptabilité que nous établis¬ sons pour les dons qu’on vous fait journelle¬ ment. Le mode suivi jusqu’à ce jour a des incon¬ vénients. Nous vous proposons de décréter que toutes les offrandes seront portées à une caisse générale établie auprès de la Monnaie de Paris. (la viendra ensuite vous faire hommage de la quittance à votre barre; elle serait conçue en ces termes : valeur pour don à la nation. Les citoyens pourraient encore porter à la Monnaie l’or et l’argent dont ils voudraient se défaire, et ils en retireraient une quittance qui serait valable pour payer à la nation les impôts ou le prix de ses domaines; ainsi on n’augmen¬ terait pas la masse du papier en circulation; ainsi l’or et l’argent recevraient non de l’aeti-vité, mais un écoulement facile; ainsi tout l’excédent viendrait naturellement et sans effort à la caisse nationale, et l’on aviserait ensuite aux opérations à faire sur ces matières quand elle en renfermerait une certaine quantité. En attendant, nous pouvons déclarer que si des diverses parties de l’Europe on nous porte des objets de première nécessité, au cas que nos moyens d’échange industriels ne suffisent pas à la balance, nous solderons en or et en argent; par ce moyen, nous donnons une grande entrée à ceux dont l’ excédent nous serait nécessaire; par la concurrence que nous établissons entre le marchand étranger et le marchand intérieur, nous bouleversons complètement le système des accapareurs, nous offrons eneore un appât et un encouragement à l’industrie nationale; enfin, nous vivifions les marchés de la République dans les objets de première nécessité pour notre usage. Ces bases étant adoptées, la valeur monétaire de l’or et de l’argent étant détruite, ces métaux seront fondus en lingots ; et en dernière analyse ces mesures peuvent nous conduire à établir, sans effort, le commerce par échange pur et simple, ce qui bannirait à jamais l’agiotage; Nous nous sommes enfin occupés de mettre de l’ordre dans la fonte et dans la comptabilité, afin que rien n’échappât à la République. Les comptes seront imprimés et distribués aux membres de la Convention, Toutes ces mesures tiennent à des vues poli¬ tiques et commerciales. Nous pouvons nous tromper ; nous pouvons avoir été {égarés par quelques idées qui nous aient séduits’ an premier aspect; mais ce qu’il est surtout important de ne pas laisser subsister, c’est l’abus que je vous ai dénoncé en commençant ; il faut de l’unifor¬ mité dans la législation. Je vous demande de décréter en principe que tous les arrêtés partiels qui ont été pris pour ordonner l’échange des matières d’or et d’argent, sont nuis, à casser, et n’ont force de loi nulle part, Cette proposition est décrétée. Cambon veut lire son projet de loi (1). Plusieurs membres demandent qu’il soit préa¬ lablement imprimé. Danton. Camfeen nous a fait la déclaration solennelle, et qu’il faut répéter ; c’est que nous avons au Trésor public de l’or, de quoi acquérir du pain et des armes, autant que le commercé neutre pourra nous en fournir; d’après cela, nous ne devons rien faire précipitamment en matière de finances. C’est toujours avee circonspection que nous devons toucher à ce qui a sauvé la République. Quelque intérêt qu’eussent tous nos ennemis à faire tomber l’assignat, il est resté, parce que sa valeur a pour base le sol entier de la République. Nous pourrons examiner à loisir, et méditer mûrement la théorie du comité. J’en ai raisonné avec Cambon. Je lui ai déve¬ loppé des inconvénients graves dont il est con¬ venu avec moi. N’oublions jamais qn’en pareille matière, des résultats faux compromettraient la liberté. Cambon nous a apporté des faits. Des repré¬ sentants du peuple ont rendu des lois de mort pour de l’argent. Nous ne saurions nons montrer assez sévères sur de pareilles mesures, et surtout à l’égard de nos collègues. Maintenant que le fédéralisme est brisé, les mesures révolution¬ naires doivent être une conséquence nécessaire de nos lois positives. La Convention a senti l’uti¬ lité d’un supplément de mesures révolution¬ naires; elle l’a décrété : dès ce moment, tout homme qui se fait ultra -révolutionnaire donnera. des résultats aussi dangereux que pourrait le faire le contre-révolutionnaire décidé. Je dis donc que nous devons manifester la plus vive indignation pour tout ce qui excédera les bornes que je viens d’établir. Déclarons que nul n’a le droit de faire arbi¬ trairement la loi à un citoyen ; défendons contre toute atteinte ce principe : que la loi n’émane que de la Convention, qui seule a reçu du peuple la faculté législative ; rappelons ceux d’entre nos commissaires qui, avec de bonnes intentions sans doute, ont pris les mesures qu’on nous a rapportées, et que nul représentant du peuple ne prenne désormais d’arrêtés qu’en concordance avee nos décrets révolutionnaires, avec les prin¬ cipes de la liberté, et d’après les instructions qui lui seront transmises par le comité de Salut public. Rappelons-nous que si c’est avee la pique que l’on renverse, c’est avec le compas de la raison et du génie qu’on peut élever et consoli¬ der l’édifice de la société. Le peuple nous féli¬ cite chaque jour sur nos travaux; il nous a signifié de rester à notre poste : c’est parce que vous avons fait notre devoir. R-endons-nous de plus en plus dignes de la confiance dont il s’em¬ presse de nous investir; faisons seuls la loi, et que nul ne nous la donne. J’insiste sur le rappel et l’improbation des commissaires qui ont pris l’arrêté qui vous a été dénoncé. Enfin je demande que le comité de Salut public soit chargé de notifier à tous les repré-(1) Voy. ci-après, p. 455. le projet de décret pré¬ senté par Cambon.