237 [Assemblée naîioaale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 mal 179JL] Art. 1er. « Que les 4 paroisses de la ville de Vendôme, actuellement subsistâmes, sont et demeureront supprimées, et qu’il en sera établi une dans l’église de l’ancienne abbaye, sous l’invocation de la Sainte-Trinité; qu’il sera, en outre, établi une succursale dans l’église de la Madeleine, et deux oratoires; l’un dans la chapelle du grand cimetière, l’autre dans l’ancienne collégiale de Saint-Georges. Art. 2. « Que les 2 paroisses de Montoire sont et demeureront supprimées, et qu’il en sera établi une seule sous l’invocation de Saint-Laurent, dans celle des églises de Montoire qui sera jugée la plus convenable. » (Ce décret est adopté.) M. le Président. L’ordre du jour est un rapport du comité ecclésiastique sur les actes et registres qui doivent constater l'état civil des personnes (1). M. T’reillsard, au nom du comité ecclésiastique. La pétition qui vous a été présentée par les individus composant la municipalité de Paris a pour objet de demander une loi qui assure par des formes civiles la notoriété des mariages, des baptêmes et des sépultures des catholiques ou non-catholiques, sans aucune distinction de religion ni de sexe. Tous les citoyens sont égaux devant la loi : elle ne connaît’ point la différence de leur culte, et comme elle les prend tous également sous sa protection, et qu’elle leur garantit à tous la possession paisible de leur état civil, elle doit exiger pour tous les mêmes formalités. Je pense donc que les actes de baptême, de mariage et de sépulture doivent être reçus par des officiers civils, et qu’on doit leur donner le plus grand caractère d’authenticité. Tous les citoyens seront d’ailleurs libres d’ajouter à l’acte civil quelque cérémonie religieuse que ce soit. M. Rewbell. Je prie l’Assemblée nationale d’être bien persuadée, que depuis que je sais penser, jamais une idée fanatique n’est entrée ni dans mon esprit ni dans mon cœur. Mais je crois devoir l’engager à réfléchir à la position où se trouve la France. D’où vous vient la pétition qui vous occupe? Quels sont ces pétitionnaires? Sont-ce des juifs? Sont-ce des chrétiens? ( Murmures : Ce sont des citoyens, ce sont des hommes)... Je ne le sais pas. Seraient-ce des non-conformistes? Je ne sais trop quel nom leur donner. M. Lavie. Les administrateurs du départe-du Haut-Rhin m’ont chargé de vous faire une demande dont l’objet est absolument conforme à celui de la pétition qui vous occupe. M. Rewbell. Je vous somme de montrer cette pétition. J’en ai un double; elle n’est relative qu’aux droits de citoyen actif, et non au mode de constatation de l’état civil. Je suis donc fondé à croire que les individus pour lesquels on vous a fait une pétition, sont des non-conformistes qui ne veulent pas reconnaître les fonctionnaires publics. Or, jene pense pas qu’un non-conformiste (1) Voy. ei-dessus séance du 17 mai 1791, pages 166 et suiv., le rapport et le projet de décret du comité ecclésiastique sur cet objet. puisse se plaindre de l’état actuel des choses. Il ne le gêne pas davantage que les protestants ou les luthériens. Nous avons dans notre département, en Alsace, plusieurs villes où le culte de la religion catholique est le seul public, tandis que la majeure partie des citoyens est luthérienne. Qui est-ce qui baptise? qui est-ce qui enterre? Ce sont les curés catholiques, parce qu’à cet égard ils font la fonction de fonctionnaires publics. Les luthériens n’y ont aucune répugnance par une raison toute simple, c’estqu’ils trouvent le baptême aussi bon, fait par un curé, que par un juge ou un notaire. Il en est de même de l’enterrement : le curé délivre un simple certificat d’inhumation. Ce n’est pas que je veuille contester les principes posés par M. Treilhard et je vais faire à ce sujet une profession de foi qui paraîtra sans doute bien étrange : je vous dirai que ces principes sont sages, mais je les soutiens prématurés. (. Applaudissements .) Pourquoi donner de la consistance à la secte qui veut s’élever ? Attendez, Messieurs, que l’état de vos fonctionnaires publics soit consolidé avant que de leur ravir des fonctions qui, aux yeux du public, leur avaient toujours été jusqu’à présent attribuées. Attendez que cette secte, qui veut naître, s’éteigne d’elle-même sous le poids du ridicule ( Rires à droite; applaudissements à gauche.) parce qu’ils font tant de folies qu’ils ne peuvent pas finir autrement que par s’attirer le mépris public. Mais si, au contraire, vous vous laissez entraîner parque ques pétitionnaires qui veulent, je ne sais pas pourquoi, vendre quelques églises à des non-conformistes, vous leur donnez une existence qu’ils n’auraient jamais sans un ridicule décret. Quand ces prêtres réfractaires.... M. le Président. Mo isieur l’opinant, je vous prie de vous renfermer dans la question. (Non! non! il est dans la question! ) M. Rewbell. Je prie les bons citoyens de cette Assemblée de vouloir bien avoir quelque indulgence pour moi, parce que je ne parle que pour eux. Quand une fois ces gens égarés se seront ravisés, et ils s’en ravisent tous les jours,. .. . (A droite : Au contraire) alors, Messieurs, il n'y aura rien de plus facile que de faire une loi générale, parce qu’alors vous n’aurez plus à craindre qu’on vous reproche de vouloir établir différents partis de la même religion. L’ancien évêque de Langres a fait imprimer un livre quia été dénoncé, dans lequel il espère, pour toute ressource, qu’on prendra le parti qu’on vous propose aujourd’hui. Je pense que M. Treilhard n’a certainement pas concerté ce parti avec lui ; mais moi, qui, malgré ce qu’aient pu dire certaines gens, ai toujours aimé par-dessus tout l’ordre et la tranquillité publique, qui ai toujours détesté les opinions même justes qui pourraient tendre à s’altérer et qui pourraient servir les factieux, je déclare que je regarde comme la perte de la France une discussion pareille à celle qu’on veut établir et je suis persuadé qu’en ce moment une semblable discussion causerait de très grands malheurs. Je demande donc l’ajournement. (Vifs applaudissements.) Plusieurs membres : — Aux voix, l’ajournement ! M. Legrand. Eo ajournant le projet de décret qu’on vous propose, vous écartez les questions 238 [Assemblée nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 mai 1791.] les plus importantes. C’en est une très nécessaire, très urgente, que de fixer d’une manière stable, d’une manière certaine, la manière de constater l’état civil des citoyens. ( Murmures : Elle existe cette loi! ). ... 11 n’est pas possible d’ajourner une loi qui doit fixer, non le sort d’une portion de Français, non le sort des catholiques, mais celui de tous les Français. M. de Tracy. Je demande la question préalable sur l’ajournement. La raison veut que l’état civil soit constaté pas les officiers civils; cela n’empêche par chacun de remplir ses devoirs religieux et même cela lui en laisse toute la faculté suivant les mouvements vrais de sa conscience, chose que l’oppression n’a jamais donnée. 11 faut ou renoncer aux principes de la Constilution ou en admettre cette conséquence essentielle. Je dis plus : il est pressant de l’admettre, parce qu’en attendant, il meurt, il naît des personnes, et que tous les jours l’état des personnes souffre, il y a periculum in morâ. On souffre tous les jours du retardement et il n’y a pas contre le projet que l’on vous propose une seule objection valable. Le principe est la copie fidèle de votre déclaration et la conséquence suivie de votre décret du 7 de ce mois. Je conclus donc à la question préalable sur l’ajournement. ( Applaudissements .) M. Dupont. Lorsque vous n’avez pas laissé les biens de votre ancien clergé à voire nouveau clergé, vous ne pouvez pas davantage lui donner les usurpations de votre ancien clergé. Votre ancien clergé avait usurpé des fonctions civiles; cela est évident... (Bruit.) . M. Gombert. On ne doit pas traiter une question si importante aussi cavalièrement. Gomme homme de la campagne, j’aperçois dans le décret des abus considérables; je demande que la question soit ajournée après la Constitution; et alors nous verrons comme les choses iront, et alors nous pourrons discuter cette affaire en connaissance de cause, parce que, si vous entassez abus sur abus, vous ferez une contre-révolution : c’est moi qui vous le prédis. M. Grelet de Beauregard appuie la demande de question préalable sur l’ajournement. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer sur l’ajournement.) M. Lanjuinais. Je demande la parole sur l’ajournement. (Non! non! — Bruit prolongé.) (L’Assemblée, consultée, prononce l’ajournement.) L’ordre du jour est un rapport du comité des monnaies sur l'organisation des Monnaies. M. de 'Virieu, au nom du comité des monnaies (1). Messieurs, depuis longtemps votre comité des monnaies vous a pressés d’adopter des mesures solides pour le rétablissement de l’ordre dans votre système monétaire, et vous a soumis de vastes travaux longtemps et profondément discutés avec tous les hommes les plus éclairés et les plus environnés par l’estime publique qu’il y ait en France. Une des branches les plus importantes de ce (l) Ce rapport u’est pas inséré au Moniteur. système est sans contredit l’organisation complète de toule administration des Monnaies, et elle est aujourd’hui dans le dernier délabrement. En effet, vos décrets sur la suppression de la vénalité des offices et sur la Constitution du nouvel ordre judiciaire, ont détruit toutes les bases de l’ancien système de surveillance et d’organisation des Monnaies. La cour des Monnaies connaissait privative-ment à toutes autres cours ou à tous autres juges de l’enregistrement des lois et règlements sur le fait des monnaies, et de leur exécution, circonstances et dépendances ; de la fabrication, du poids et du titre de toutes les espèces qui se fabriquaient aux coins et armes du roi ; des délits de tout genre, relatifs à la fabrication des monnaies, ou au crime de faux-monnayage; des vols commis dans l’intérieur des hôtels, des abus et malversations commis, tant par les officiers des Monnaies que par les artistes et ouvriers qui emploient les matières d’or et d’argent, et d’au très objets relatifs aux statuts des communautés de ces artistes; enfin des appellations, des jugements rendus, tant en matière civile que criminelle par Jes commissaires de la cour, les commissaires du roi en l’hôtel des Monnaies, le prévôt général, les juges-gardes, etc... Des juges établis sous les noms de général provincial, de juges-gardes et contrôleurs-contre-gardes avec un substitut du procureur général, un grefffier et di s huissiers, avaient la juridiction des monnaies et connaissaient en première instance de tous les délits concernant la fabrication, l’aliération et la distribution des monnaies fausses ou décriées, l’achat, la vente et l’emploi des matières d’or et d’argent. Ces mêmes juges et contrôleurs-contre-gardes, avec d’autres officiers appelés essayeurs et graveurs, étaient chargés des détails relatifs à la police de la fabrication. Les juges-gardes etcontrôleurs-contre-gardes devaient veiller sur toutes les opérations relatives à la fabrication des espèces, et la comptabilité des directeurs des monnaies. Les juges-gardes répondaient du poids des espèces, parce quelles ne pouvaient être délivrées au public, que lorsqu’ils les auraient vérifiées, et ils étaient garantis de leurs défectuosités. Les contrôleurs-contre-gardes étaient particulièrement chargés de tout ce qui concernait la forme, la tenue et l’inspection des registres prescrits par les règlements, tant pour la recette que pour l’emploi ues matières et des espèces, et ils suppléaient les juges-gardes, lorsqu’ils se trouvaient dans l’impossibilité de remplir leurs fonctions. Ces divers offices étant vénaux, on a vu souvent les directeurs des Monnaies les acheter sous main et en revêtir leurs affidés, ce qui anéantissait la surveillance en les mettant dans leur dépendance, et facilitant les moyens de les associer aux plus scandaleux bénéfices des plus coupables opérations. Faiblesse de poids dans les espèces, fabrications dérobées à la connaissance de l’administration, et dès lors vol fait à la nation des bénéfices du seigneuriage ; tous ces inconvénients tenaient à cet ordre vicieux de choses; et plus d’une fortune immense autant que scandaleuse, y a trouvé son principe et son aliment. A ces officiers qui réunissaient ainsi des fonctions administratives aux fonctions judiciaires, et qui, parla vénalité de leurs chargés, devenus indépendants de l’administration, qui ne pouvait exercer sur eux une police assez ferme, n’étaient que trop souvent les instruments des directeurs