18 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 33 La Convention nationale a prononcé dans la séance de ce jour les décrets suivans. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [ROGER-DUCOS, au nom de] son comité des secours publics sur la pétition du citoyen Philippe Cornu, capitaine au 3e bataillon de la Nièvre, qui a eu un bras fracturé d’un coup de feu à la bataille de Torfou, le 19 septembre 1793 (vieux style), dont le père, âgé de plus de 60 ans, a été le remplacer au service de la République, et qui demeure chargé de sa mère, infirme, et d’un enfant en bas âge, décrète ce qui suit : « La trésorerie nationale paiera, sur la présentation du présent décret, audit Philippe Cornu, une somme de 6001. à titre de secours provisoire; et renvoie la pétition au comité de liquidation pour le règlement de la pension. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (l). 34 [Chasseneuil, 14 mess. Il] (2) « Frères et amis, Je vous fais passer une pétition de la commune de Chasseneuil tendante à obtenir quelques secours en faveur d’une malheureuse veuve dont le mari mis en réquisition pour tirer des pierres a la réparation des grandes routes, vient d’être écrasé misérablement dans la carrière ! Je vous invite à présenter vous-même cette pétition, et à l’appuyer de tout le zèle dont je vous connais pour le malheureux. S. et F. ». Pépin (off. mun). [Chasseneuil, s.d.] « Représentans du peuple, « Toutes les vertus mis à l’ordre du jour sont pour nous un présage assuré que vous n’apprendrez pas sans une juste sensibilité le malheureux accident dont nous venons d’être les tristes témoins. Le citoïen Fiacre Samuseau journallier âgé de 48 ans, domicilié en notre commune aiant été requis d’après une délibération du Directoire du District d’Argenton pour tirer des carrières la pierre nécessaire à la réparation des grandes routes a eu le malheur étant a son travail d’être ensevelis sous son ouvrage. Plus de 20 charois de pierre et de terres ayant croulés sur luy, ne luy ont pas laissé un seul de ses os dans son entier; quel qu’ait été à le secourir l’empressement des citoïens qui travaillaient avec cet infortuné il n’ont pu lui sauver la vie. Ce n’a été qu’après un pénible travail qu’ils sont parvenus à découvrir ce malheureux et à tirer de dessous tant de débris un corps tellement rompus qu’il n’avait plus figure humaine. Quel triste et affligeant spectacle ! (l) P.V., XLI, 120. Minute de la main de Roger-Ducos, Décret n° 9836. reproduit dans Bm, 24 mess, (suppl1). Débats, n° 657 ; Mentionné par J. Sablier, n° 1427. (2) C 308, pl. 1199, p. 32 à 34. L’infortuné citoïen qui vient de périr si douloureusement a laissé en mourant une épouse chargé de 4 enfans dont 3 filles et 1 garçon mais ce dernier loin d’être pour la mère l’espoir de quelque soulagement est pour elle au contraire une charge considérable par la faiblesse de son esprit qui le met absolument hors d’état de travailler et de pourvoir à sa subsistance. C’est d’après ce triste et court exposé que le conseil général de la commune de Chasseneuil plain de confiance dans vos sentiments de justice et d’humanité solicite quelque secours en faveur d’une famille indigente et proffondément affligée. En répondant à ses vœux, vous ajouterez un nouveau bienfait à ceux qui signalent déjà votre existance et dont nous nous empresserons de transmettre le souvenir à nos descendants. Représentans du peuple ce que vous avez fait en moins de deux ans pour le triomphe de la Raison et le bonheur de l’humanité est au-dessus de tous éloges. Continuéz donc vos glorieux travaux, restés à votre poste jusqu’à ce que le vesseau de la Révolution qui porte le bonheur publique répose heureusement dans un port calme et tranquil. Pour nous fidels à nos serments nous ne cesseront d’instruire nos concitoïens du bonheur que leur prépare la sagesse de vos lois, nous ne cesserons de les munir contre toutes les perfides insinuations des ennemis de notre sainte Révolution, et de les maintenir toujours dans ces genereux sentimens ou doit être tout français, de s’ensevelir plutôt sous les ruines de la patrie que de jamais transiger avec les tyrans. Pépin (off. mun.), Denard [et 4 signatures illisibles, dont celle du maire.] [Extrait du registre des actes de décès de la comm. de Tendu, distr. d’Argenton, 5 mess. II]. Aujourd’hui 26 prairial, l’An II de la République française, une et indivisible, à 2 heures du soir, par devant moi Jean Peyrot, membre du conseil général de la commune de Tendu, élu le 24 germinal dernier pour dresser les actes destinés a constater les naissances, mariages et décès des citoïens, est comparus en la maison commune René Touziau, journalier, âgé de 30 ans et Fiacre Samuzeau, journalier âgé de 25 ans, domiciliés commune de Chasseneuil, département de l’Indre, lesquels, assistés de Marcel Brissaud, juge de paix du canton de Cote franche y demeurant aussy département de l’Indre, lequel a déclaré à moi Jean Peyrot qu’ayant été instruit que Fiacre Samuzeau âgé de 48 ans aussi journalier domicilié au Bourgt de Chasseneuil avoit été écrasé hier à 3 heures du soir par un décombrement considérable d’une carrière appelé au moraux commune de Tendu où il avoit été requis de travailler pour tirer de la pierre pour l’entretien de la route de Paris à Toulouse, il s’étoit transporté sur le lieu et y avoit apposé le sceau de son cachoit et en avoit dressé procès-verbal duquel j’en ai pris lecture ainsi que les dits témoins qui ont déclaré être conforme a la vérité et la représentation qui m’a été faite du mort qui y est dessignée. Je me suis assuré du décès dudit Fiacre Samuzeau et j’ai rédigé en vertus des pouvoirs qui me sont délégué le présent acte que Marcel Brissaud et René Touziau ont signé avec moi, Fiacre Samuzeau, son cousin, ayant déclaré ne scavoir. 18 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 33 La Convention nationale a prononcé dans la séance de ce jour les décrets suivans. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [ROGER-DUCOS, au nom de] son comité des secours publics sur la pétition du citoyen Philippe Cornu, capitaine au 3e bataillon de la Nièvre, qui a eu un bras fracturé d’un coup de feu à la bataille de Torfou, le 19 septembre 1793 (vieux style), dont le père, âgé de plus de 60 ans, a été le remplacer au service de la République, et qui demeure chargé de sa mère, infirme, et d’un enfant en bas âge, décrète ce qui suit : « La trésorerie nationale paiera, sur la présentation du présent décret, audit Philippe Cornu, une somme de 6001. à titre de secours provisoire; et renvoie la pétition au comité de liquidation pour le règlement de la pension. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (l). 34 [Chasseneuil, 14 mess. Il] (2) « Frères et amis, Je vous fais passer une pétition de la commune de Chasseneuil tendante à obtenir quelques secours en faveur d’une malheureuse veuve dont le mari mis en réquisition pour tirer des pierres a la réparation des grandes routes, vient d’être écrasé misérablement dans la carrière ! Je vous invite à présenter vous-même cette pétition, et à l’appuyer de tout le zèle dont je vous connais pour le malheureux. S. et F. ». Pépin (off. mun). [Chasseneuil, s.d.] « Représentans du peuple, « Toutes les vertus mis à l’ordre du jour sont pour nous un présage assuré que vous n’apprendrez pas sans une juste sensibilité le malheureux accident dont nous venons d’être les tristes témoins. Le citoïen Fiacre Samuseau journallier âgé de 48 ans, domicilié en notre commune aiant été requis d’après une délibération du Directoire du District d’Argenton pour tirer des carrières la pierre nécessaire à la réparation des grandes routes a eu le malheur étant a son travail d’être ensevelis sous son ouvrage. Plus de 20 charois de pierre et de terres ayant croulés sur luy, ne luy ont pas laissé un seul de ses os dans son entier; quel qu’ait été à le secourir l’empressement des citoïens qui travaillaient avec cet infortuné il n’ont pu lui sauver la vie. Ce n’a été qu’après un pénible travail qu’ils sont parvenus à découvrir ce malheureux et à tirer de dessous tant de débris un corps tellement rompus qu’il n’avait plus figure humaine. Quel triste et affligeant spectacle ! (l) P.V., XLI, 120. Minute de la main de Roger-Ducos, Décret n° 9836. reproduit dans Bm, 24 mess, (suppl1). Débats, n° 657 ; Mentionné par J. Sablier, n° 1427. (2) C 308, pl. 1199, p. 32 à 34. L’infortuné citoïen qui vient de périr si douloureusement a laissé en mourant une épouse chargé de 4 enfans dont 3 filles et 1 garçon mais ce dernier loin d’être pour la mère l’espoir de quelque soulagement est pour elle au contraire une charge considérable par la faiblesse de son esprit qui le met absolument hors d’état de travailler et de pourvoir à sa subsistance. C’est d’après ce triste et court exposé que le conseil général de la commune de Chasseneuil plain de confiance dans vos sentiments de justice et d’humanité solicite quelque secours en faveur d’une famille indigente et proffondément affligée. En répondant à ses vœux, vous ajouterez un nouveau bienfait à ceux qui signalent déjà votre existance et dont nous nous empresserons de transmettre le souvenir à nos descendants. Représentans du peuple ce que vous avez fait en moins de deux ans pour le triomphe de la Raison et le bonheur de l’humanité est au-dessus de tous éloges. Continuéz donc vos glorieux travaux, restés à votre poste jusqu’à ce que le vesseau de la Révolution qui porte le bonheur publique répose heureusement dans un port calme et tranquil. Pour nous fidels à nos serments nous ne cesseront d’instruire nos concitoïens du bonheur que leur prépare la sagesse de vos lois, nous ne cesserons de les munir contre toutes les perfides insinuations des ennemis de notre sainte Révolution, et de les maintenir toujours dans ces genereux sentimens ou doit être tout français, de s’ensevelir plutôt sous les ruines de la patrie que de jamais transiger avec les tyrans. Pépin (off. mun.), Denard [et 4 signatures illisibles, dont celle du maire.] [Extrait du registre des actes de décès de la comm. de Tendu, distr. d’Argenton, 5 mess. II]. Aujourd’hui 26 prairial, l’An II de la République française, une et indivisible, à 2 heures du soir, par devant moi Jean Peyrot, membre du conseil général de la commune de Tendu, élu le 24 germinal dernier pour dresser les actes destinés a constater les naissances, mariages et décès des citoïens, est comparus en la maison commune René Touziau, journalier, âgé de 30 ans et Fiacre Samuzeau, journalier âgé de 25 ans, domiciliés commune de Chasseneuil, département de l’Indre, lesquels, assistés de Marcel Brissaud, juge de paix du canton de Cote franche y demeurant aussy département de l’Indre, lequel a déclaré à moi Jean Peyrot qu’ayant été instruit que Fiacre Samuzeau âgé de 48 ans aussi journalier domicilié au Bourgt de Chasseneuil avoit été écrasé hier à 3 heures du soir par un décombrement considérable d’une carrière appelé au moraux commune de Tendu où il avoit été requis de travailler pour tirer de la pierre pour l’entretien de la route de Paris à Toulouse, il s’étoit transporté sur le lieu et y avoit apposé le sceau de son cachoit et en avoit dressé procès-verbal duquel j’en ai pris lecture ainsi que les dits témoins qui ont déclaré être conforme a la vérité et la représentation qui m’a été faite du mort qui y est dessignée. Je me suis assuré du décès dudit Fiacre Samuzeau et j’ai rédigé en vertus des pouvoirs qui me sont délégué le présent acte que Marcel Brissaud et René Touziau ont signé avec moi, Fiacre Samuzeau, son cousin, ayant déclaré ne scavoir. SÉANCE DU 21 MESSIDOR AN II (9 JUILLET 1794) - N° 35 19 Fait en la maison commune, les jours et ans que dessus, signé Marcel Brissaud, René Touziau, et Peyrot, off. public. P.c.c. J. Peyrot (off. public et secrét.) Vu au Directoire du district d’Argenton par les administrateurs, à Argenton, le 12 mess. II. [2 signatures illisibles.] « Sur la proposition d’un membre, qui convertit en motion la pétition de la commune de Chasseneuil, district d’Argenton, département de l’Indre, la Convention nationale décrète : « Art. I. - La trésorerie nationale versera dans la caisse du receveur du district d’Argenton, département de l’Indre, la somme de 150 1., pour être payée, sur le vu du présent décret, et à titre de secours provisoire, à la veuve de Fiacre Samuseau, qui a péri dans une carrière où il travailloit en vertu de réquisition et pour ouvrages publics. « Art. II. - Renvoie la pétition au comité de liquidation pour le réglement de la pension demandée pour ladite veuve et ses enfans. « Art. III. - Le présent décret ne sera pas imprimé; son insertion au bulletin tiendra lieu de promulgation » (l). 35 VADIER : Je vous demande la parole au nom du comité de sûreté générale, pour deux objets très intéressants. Il y a quelques jours que vous renvoyâtes aux comités réunis à vous proposer un moyen de rendre à l’agriculture les hommes que des mesures générales ont enveloppés et qu’elles ont déterminé à faire mettre en état d’arrestation. Cette mesure ne peut avoir d’inconvénient. Il s’agit ici d’hommes qui pratiquent les vertus républicaines, la frugalité, la tempérance, l’amour du travail, et qui, lorsqu’ils sont trompés, le sont par des voies indirectes, par des aristocrates, des fanatiques et des chercheurs de places; car le peuple est toujours bon. Nous vous proposons donc de mettre en liberté provisoirement les cultivateurs. Nous n’entendons pas par là les cultivateurs portant l’épée; c’est des laboureurs qu’il s’agit ici, des manouvriers, de ceux qui portent sur leurs mains l’empreinte du travail, qui cultivent eux-mêmes la terre et nous ouvrent ses trésors ; de ceux enfin pour qui nous sommes déterminés à verser jusqu’à la dernière goutte de notre sang, pour assurer leur bonheur. (On applaudit.) Nous avons pensé que vous voudriez cependant excepter de cette mesure favorable ceux qui se seraient rendus coupables de haute trahison, soit en favorisant des émigrations, l’invasion du territoire français, la livraison des places, etc. ; cela s’entend (l) P.V., XLI, 121. Minute de la main de Pépin. Décret n°9837. Reproduit dans Bin, 24 mess, (suppl1). Débats, n° 657 ; J. Sablier, n° 1429; J. Fr., n° 654. naturellement; ainsi nous ne vous parlerons que de ceux qui, influencés par un ennemi du bien public, un curé ou vicaire, par exemple, pour une messe, auraient été mis en prison. Les travaux de l’agriculture en souffrent sans doute, mais l’humanité en souffre encore plus. Le second objet que je suis obligé de vous soumettre se rapporte à la loi du 22 prairial. Il y est dit qu’aucune autorité ne pourra traduire un individu devant le tribunal révolutionnaire sans l’attache des comités de salut public et de sûreté générale. Cette disposition est infiniment sage, et vous en allez juger. Un de ces derniers jours, on nous amena du district des Andelys 16 sans-culottes, prévenus des plus grands crimes, et que votre loi prévoyante nous a donné la douce jouissance de remettre en liberté. Dans un procès-verbal, très-artificieusement dressé, signé, ne varietur, et orné d’un très-beau cachet, ils étaient accusés de trois crimes qu’on avait pris soin de présenter avec un grand appareil. Le premier était d’avoir lié une botte de foin avec des brins de seigle qui eussent facilement tenu dans ma main ; le second, d’avoir laissé une gerbe de lentilles imparfaitement battues, de sorte qu’il en restait à peu près un demi-litron ; le troisième d’avoir laissé, dans une poignée de paille, du grain qui aurait bien suffi à nourrir un oiseau pendant deux jours. (On rit.) Vous sentez combien cette cumulation était concluante. Voici la malice du scélérat qui poursuivait ces malheureux. Il avait fait mettre les scellés sur le grenier où étaient renfermées les preuves des délits. Il les y avait laissés pendant six semaines, de sorte que la moisissure s’en était emparée, et il disait ; Vous voyez que ce sont des avarieurs, des dilapida-teurs de substances, des ennemis du peuple. La police correctionnelle, devant qui il avait eu l’impudence de les citer, ne vit aucun délit, et renvoya les accusés. La scélératesse de l’agent ne s’en tint pas là; il dénonce à l’administration du district ceux qu’il persécute; il cite la loi, et colore sa dénonciation des meilleures intentions. Le district, qui ne connaît que la loi, renvoie les prévenus devant le tribunal révolutionnaire. Heureusement nous avons eu à inspecter ce renvoi. Il nous a fait connaître les plus honnêtes indigents. Nous les avons renvoyés; ce n’est pas tout, nous avons fait arrêter le coquin... (On applaudit à plusieurs reprises.) Nous lui avons dit : Puisque tu es un oppresseur du peuple, un ennemi public, tu es une bête fauve, sur qui l’on pourrait tirer; la justice nationale doit prononcer sur ton sort. Voilà ce qui est arrivé; et cependant, si ces malheureux eussent paru devant le tribunal révolutionnaire, le fait eût été reconnu constant, et la loi appliquée avec toute sa rigueur par le jury et les juges, qui ne connaissent d’autre règle de leurs actions que la loi écrite (l). L’agent que nous avons arrêté n’est pas encore envoyé devant le tribunal, parce qu’il n’est pas douteux qu’il ne soit coupable d’autres crimes qu’il est important de découvrir. (l) Voir séance du 26 mess. n° 66. (Réclamation de Vadier sur ce passage). SÉANCE DU 21 MESSIDOR AN II (9 JUILLET 1794) - N° 35 19 Fait en la maison commune, les jours et ans que dessus, signé Marcel Brissaud, René Touziau, et Peyrot, off. public. P.c.c. J. Peyrot (off. public et secrét.) Vu au Directoire du district d’Argenton par les administrateurs, à Argenton, le 12 mess. II. [2 signatures illisibles.] « Sur la proposition d’un membre, qui convertit en motion la pétition de la commune de Chasseneuil, district d’Argenton, département de l’Indre, la Convention nationale décrète : « Art. I. - La trésorerie nationale versera dans la caisse du receveur du district d’Argenton, département de l’Indre, la somme de 150 1., pour être payée, sur le vu du présent décret, et à titre de secours provisoire, à la veuve de Fiacre Samuseau, qui a péri dans une carrière où il travailloit en vertu de réquisition et pour ouvrages publics. « Art. II. - Renvoie la pétition au comité de liquidation pour le réglement de la pension demandée pour ladite veuve et ses enfans. « Art. III. - Le présent décret ne sera pas imprimé; son insertion au bulletin tiendra lieu de promulgation » (l). 35 VADIER : Je vous demande la parole au nom du comité de sûreté générale, pour deux objets très intéressants. Il y a quelques jours que vous renvoyâtes aux comités réunis à vous proposer un moyen de rendre à l’agriculture les hommes que des mesures générales ont enveloppés et qu’elles ont déterminé à faire mettre en état d’arrestation. Cette mesure ne peut avoir d’inconvénient. Il s’agit ici d’hommes qui pratiquent les vertus républicaines, la frugalité, la tempérance, l’amour du travail, et qui, lorsqu’ils sont trompés, le sont par des voies indirectes, par des aristocrates, des fanatiques et des chercheurs de places; car le peuple est toujours bon. Nous vous proposons donc de mettre en liberté provisoirement les cultivateurs. Nous n’entendons pas par là les cultivateurs portant l’épée; c’est des laboureurs qu’il s’agit ici, des manouvriers, de ceux qui portent sur leurs mains l’empreinte du travail, qui cultivent eux-mêmes la terre et nous ouvrent ses trésors ; de ceux enfin pour qui nous sommes déterminés à verser jusqu’à la dernière goutte de notre sang, pour assurer leur bonheur. (On applaudit.) Nous avons pensé que vous voudriez cependant excepter de cette mesure favorable ceux qui se seraient rendus coupables de haute trahison, soit en favorisant des émigrations, l’invasion du territoire français, la livraison des places, etc. ; cela s’entend (l) P.V., XLI, 121. Minute de la main de Pépin. Décret n°9837. Reproduit dans Bin, 24 mess, (suppl1). Débats, n° 657 ; J. Sablier, n° 1429; J. Fr., n° 654. naturellement; ainsi nous ne vous parlerons que de ceux qui, influencés par un ennemi du bien public, un curé ou vicaire, par exemple, pour une messe, auraient été mis en prison. Les travaux de l’agriculture en souffrent sans doute, mais l’humanité en souffre encore plus. Le second objet que je suis obligé de vous soumettre se rapporte à la loi du 22 prairial. Il y est dit qu’aucune autorité ne pourra traduire un individu devant le tribunal révolutionnaire sans l’attache des comités de salut public et de sûreté générale. Cette disposition est infiniment sage, et vous en allez juger. Un de ces derniers jours, on nous amena du district des Andelys 16 sans-culottes, prévenus des plus grands crimes, et que votre loi prévoyante nous a donné la douce jouissance de remettre en liberté. Dans un procès-verbal, très-artificieusement dressé, signé, ne varietur, et orné d’un très-beau cachet, ils étaient accusés de trois crimes qu’on avait pris soin de présenter avec un grand appareil. Le premier était d’avoir lié une botte de foin avec des brins de seigle qui eussent facilement tenu dans ma main ; le second, d’avoir laissé une gerbe de lentilles imparfaitement battues, de sorte qu’il en restait à peu près un demi-litron ; le troisième d’avoir laissé, dans une poignée de paille, du grain qui aurait bien suffi à nourrir un oiseau pendant deux jours. (On rit.) Vous sentez combien cette cumulation était concluante. Voici la malice du scélérat qui poursuivait ces malheureux. Il avait fait mettre les scellés sur le grenier où étaient renfermées les preuves des délits. Il les y avait laissés pendant six semaines, de sorte que la moisissure s’en était emparée, et il disait ; Vous voyez que ce sont des avarieurs, des dilapida-teurs de substances, des ennemis du peuple. La police correctionnelle, devant qui il avait eu l’impudence de les citer, ne vit aucun délit, et renvoya les accusés. La scélératesse de l’agent ne s’en tint pas là; il dénonce à l’administration du district ceux qu’il persécute; il cite la loi, et colore sa dénonciation des meilleures intentions. Le district, qui ne connaît que la loi, renvoie les prévenus devant le tribunal révolutionnaire. Heureusement nous avons eu à inspecter ce renvoi. Il nous a fait connaître les plus honnêtes indigents. Nous les avons renvoyés; ce n’est pas tout, nous avons fait arrêter le coquin... (On applaudit à plusieurs reprises.) Nous lui avons dit : Puisque tu es un oppresseur du peuple, un ennemi public, tu es une bête fauve, sur qui l’on pourrait tirer; la justice nationale doit prononcer sur ton sort. Voilà ce qui est arrivé; et cependant, si ces malheureux eussent paru devant le tribunal révolutionnaire, le fait eût été reconnu constant, et la loi appliquée avec toute sa rigueur par le jury et les juges, qui ne connaissent d’autre règle de leurs actions que la loi écrite (l). L’agent que nous avons arrêté n’est pas encore envoyé devant le tribunal, parce qu’il n’est pas douteux qu’il ne soit coupable d’autres crimes qu’il est important de découvrir. (l) Voir séance du 26 mess. n° 66. (Réclamation de Vadier sur ce passage).