136 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ™maire «» « rait être résolu de plusieurs manières, et il s’est déterminé à vous présenter un nouveau plan. » (Suit la reproduction textuelle de V exposé des motifs du plan de Bouquier jusqu'aux mots : « Contentons-nous d’y ajouter le peu qui manque pour compléter l'instruction publique. ») Le plan dirigé d’après ces réflexions sera discuté demain si, comme il est vraisemblable, il obtient la priorité. (Suit le texte du plan de Bouquier, d'après le document imprimé (l).j Rapport et projet de décret formant UN PLAN GÉNÉRAL D’INSTRUCTION PUBLIQUE, par G. Bouquier, membre de la Conven¬ tion NATIONALE ET DU COMITÉ D’iNSTRUC-tion. (Imprimé par ordre du comité.) Citoyens, vous avez chargé votre comité d’instruction de reviser le décret relatif à l’or¬ ganisation des premières écoles ; il a rempli cette tâche; mais en s’en acquittant il a vu que le grand problème de l’organisation de l’instruction publique pouvait être résolu de plusieurs manières; et il s’est déterminé à vous présenter un nouveau plan... un plan simple, naturel, facile à exécuter ; un plan qui proscrivît à jamais toute idée de corps académique, de société scientifique, d’hiérarchie pédagogique; un plan enfin dont les bases fussent les mêmes que celles de la Constitution : la liberté, l’égalité, la brièveté. Le premier de tous les arts utiles qu’un gou¬ vernement républicain doit honorer, est celui de l’agriculture; et les citoyens qui l’exercent sont, en tout temps, ceux qui les premiers ont bien mérité de la patrie. Les nations libres n’ont pas besoin d’une caste de savants spéculatifs, dont l’esprit voyage constamment, par des sentiers perdus, dans la région des songes et des chimères. Les sciences de pure spéculation détachent de la société les individus qui les cultivent et deviennent à la longue un poison qui mine, énerve et détruit les Républiques. Au peuple qui a conquis la liberté, il ne faut que des hommes agissants, vigoureux, robustes, laborieux; des hommes éclairés sur leurs droits, sur leurs devoirs. On parvient à former de tels hommes en exer¬ çant la jeunesse à des travaux, à des arts dont l’exécution, en développant les forces, donne de la souplesse, de la dextérité, et en mettant sous les yeux des lois simples et sages, de grands exemples à suivre, de grands modèles à imiter. Le muscadin crève dans une première oam-pagne, ou au premier coup de fusil, crie, en fuyant : « Sauve qui peut ! » tandis que le jeune homme exercé dès l’enfance à des travaux pé¬ nibles, étayant son courage de la force, devient bientôt un excellent soldat. Sa vigueur brave les fatigues de la guerre; son courage affronte les (1) Bibliothèque nationale : 14 pages in-8° Le38, n° 600. Bibliothèque de la Chambre des députés : Collection Portiez (de P Oise), t. 93, n° 58 et 438, n° 7. périls. Il repousse l’ennemi, il garantit sa patrie du joug de toute domination, et devient par sa valeur, sa confiance, sa fermeté, son dévouement, le modèle du vrai républicain. C’est donc à former de tels hommes que nous devons nous attacher. Et la Révolution ne nous a-t-elle pas déjà merveilleusement servi à cet égard? Jetons un coup d’œil rapide sur la nation française... Voyons ce qu’elle était avant la Révolution, voyons ce qu’elle est aujourd’hui... Indolente, apathique, insouciante à l’excès, les sciences futiles, les arts frivoles lui tenaient lieu de tout. Elle portait les fers de la tyrannie, sans, pour ainsi dire, en sentir le poids ; à peine connaissait -elle le nom de liberté...; il a fallu que les tyrans anthropophages qui la mutilaient depuis tant de siècles l’aient arrachée, à force d’excès, de cruautés et de noirceurs, des bras du sommeil léthargique où le despotisme l’avait insensiblement plongée. Mais l’heure du réveil arrive; le tocsin de la liberté retentit au loin; la nation se lève, reprend sa puissance, et, dans un clin d’œil, un peuple d’esclaves devient un peuple de héros. Les bastilles sont renversées, les satrapes tremblent, la nation organise son pouvoir, les Sociétés populaires sont formées, la voix de la raison se fait entendre, chaque ci¬ toyen devient soldat, l’amour de. la liberté s’empare de tous les cœurs, et les conduit d’un pas rapide à la hauteur du républicanisme. Tels sont les effets miraculeux qu’a produits notre Révolution; tels sont les moyens dont elle a fait usage. Qu’avons-nous donc besoin d’aller chercher loin de nous ce que nous avons sous nos yeux ! Citoyens !...les plus belles écoles, les plus utiles, les plus simples, où la jeunesse puisse prendre une éducation vraiment républicaine sont, n’en doutez pas, les séances publiques des dépar¬ tements, des districts, des municipalités, des tribunaux, et surtout des Sociétés populaires. C’est dans ces sources pures que les jeunes gens puiseront la connaissance de leurs droits, de leurs devoirs, des lois et de la morale républi¬ caine; c’est en maniant les armes, c’est en se livrant aux exercices de la garde nationale, c’est en s’accoutumant au travail, en exerçant un art ou métier pénible, que leurs membres de¬ viendront souples, que leurs forces se dévelop¬ peront, qu’ils perfectionneront leurs facultés physiques. Tout leur présentera des moyens d’instruction : ils en trouveront au sein de leurs familles, ils en trouveront dans les livres élé¬ mentaires que vous allez publier; ils en trou¬ veront enfin dans les fêtes nationales que vous allez instituer. D’après cet exposé rapide, on doit voir clai¬ rement que la Révolution a, pour ainsi dire, d’elle-même organisé l’éducation publique et placé partout des sources inépuisables d’instruc¬ tion. N’allons donc pas substituer à oette organi¬ sation simple et sublime comme le peuple qui l’a créée une organisation factice et calquée sur des statuts académiques qui ne doivent plus infecter une nation régénérée. Conservons pré¬ cieusement ce qu’ont fait le peuple et la Révo¬ lution;... contentons-nous d’y ajouter le peu qui y manque pour compléter l’instruction pu¬ blique. Ce complément doit être simple comme l’ouvrage créé par le génie de la Révolution... Nous allons vous en présenter le projet.