178 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE et sur les moyens d’assurer les droits des femmes, des enfans et des créanciers. Elle renvoie au comité la proposition faite par un autre membre que la confiscation ne puisse avoir d’effet quand la teneur du jugement sera reconnue manifeste.] (74) 29 Après avoir entendu la lecture de la lettre du représentant du peuple Lacrampe, le décret suivant est rendu : La Convention nationale, après avoir entendu la lecture de la lettre de J. Lacrampe, représentant du peuple, par laquelle il annonce qu’il est trop foible encore pour se rendre dans le sein de la Convention, accorde une prolongation de congé de six décades au représentant du peuple J. Lacrampe, pour rétablir sa santé (75). [Le représentant du peuple Lacrampe, député du département des Hautes-Pyrénées, au président de la Convention nationale, Tarbes, le 29 vendémiaire an III ] (76) Citoyen Président Le congé que j’ai obtenu de la justice de la Convention nationale me rappelle à la vie. Trop faible encore pour me rendre dans son sein et forcé de faire deux cent lieües à petites journées, je lui demande instemment de m’accorder six décades. La députation est instruite de ma situation, elle l’attestera. Salut et fraternité. J. Lacrampe, député du département des Hautes-Pyrénées. 30 GRÉGOIRE, au nom du comité d’instruction publique (77) : Citoyens, vous avez mis sous la sauvegarde de la loi tous les monuments des sciences et des arts. Beaucoup de districts se sont empressés de concourir à l’exécution des mesures que vous avez prises pour arrêter les destructions; mais dans d’autres, nous venons vous le dire avec douleur, les destructions continuent. (74) Débats, n° 766, 551. (75) P.-V., XLVIII, 99. C 325, pl. 1365, p. 25, minute de la main de Goujon. Boissy, rapporteur selon C* II 21, p. 19. (76) C 323, pl. 1382, p. 23. (77) Moniteur, XXII, 379-382. Débats, n° 766, 551-558; J. Paris, n° 39; J. Mont., n° 16; Rép., n° 39; Bull., 11 brum (suppl.) et 12 brum. ; Ann. Patr., n° 667 ; Ann. R. F., n° 38 ; C. Eg., n° 802; J. Perlet, n° 766; J. Fr., n° 764; Mess. Soir, n° 803; F. de la Républ., n° 39; Gazette Fr., n° 1031; M. U., XLV, 138. Tandis que la sagesse de vos décrets atteste la sollicitude des législateurs pour étouffer l’ignorance et faire triompher les lumières ; tandis qu’à votre voix les hommes à talents sortent des cachots, et que le génie relève sa tête humiliée, la barbarie et l’esprit contre-révolutionnaire tiennent sans cesse le poignard levé pour assassiner les arts. Une horde de scélérats veut par ces moyens faire haïr la liberté, qu’en dépit de leurs efforts le peuple français ne cessera d’aimer qu’en cessant d’exister. La correspondance du comité d’instruction publique et de la commission temporaire des arts nous a fait connaître de nouvelles dégradations. Nous avons pensé qu’il fallait leur donner de la publicité, afin de signaler les coupables, de placarder l’opprobre sur leurs fronts, et de prémunir sans cesse les bons citoyens contre les erreurs de l’ignorance et les insinuations de la perfidie. A Ussel, à Saumur, à Lons-le-Saulnier, les livres, les tableaux et d’autres objets rares ont été vendus à très vil prix. A Mont-de-Marsan, deux belles statues par Mazetti ont été mutilées; d’autres ont failli subir le même sort. A Reims, on a mutilé un tombeau d’un beau travail, et précipité d’une hauteur de vingt pieds un tableau de Thadée Zucchero; le cadre a été brisé, la toile dégradée a été trouvée dernièrement sur les marches d’un escalier. A Melun, une belle statue de marbre blanc a été cassée. A Fontainebleau, un tableau magnifique est en cendres, et l’on a brisé une statue de Fleuve en bronze, qui avait été exécutée sous la direction de Léonard de Vinci. Au muséum des Plantes, on a outragé le buste de Linnée. A Bayeux, des commissaires instruits et patriotes ont sauvé la fameuse tapisserie dont la broderie, attribuée à Mathilde, femme de Guillaume-le-Bâtard, représente les expéditions de son mari dans la grande et la petite Bretagne. Pour la seconde fois ce monument échappe à la destruction ; car il faillit périr une première fois en 1562, dans le temps de guerres civiles, une seconde fois dans l’irruption vandalique qui vient d’avoir lieu; mais plusieurs statues d’un bon style et la presque totalité des tableaux qui se trouvaient à la cathédrale et dans les autres églises de Bayeux sont anéanties. A Douai, on avait donné l’ordre de brûler tous les livres concernant le culte, ce qui pouvait anéantir la moitié des bibliothèques; car la limite à cet égard n’étant pas tracée, à quel terme pouvait s’arrêter la fureur? A Étain, depuis les anciens inventaires, on a volé dans les bibliothèques des ci-devant Capucins et de la ci-devant abbaye de Châtillon. A Saint-Serge, près d’Angers, l’église des ci-devant Bénédictins contenait des groupes précieux; on les a brisés. Deux belles statues, le saint Jérôme et le saint Sébastien, avaient échappé à cette rage dévastatrice; elles viennent d’être détruites, et plus de cent beaux orangers ont péri faute de soins.