SÉANCE DU 24 MESSIDOR AN II (12 JUILLET 1794) - Nos 15-17 93 Le peuple français a la foudre en main, et il va la lancer sur tous les oppresseurs du monde. S. et F. ». Garnier (de Saintes). 15 Le citoyen Monnot, député, donne lecture d’une lettre de son fils, datée du camp d’Ins-heim, du 17 messidor, où il annonce qu’un jeune volontaire ayant fixé les regards de ses camarades par son courage, par sa douceur, son exactitude et son zèle pour le service, par la finesse de sa taille, la clarté, la flexibilité de son organe, avoit fait naître des soupçons qui s’étoient réalisés le même jour; que sous les habits d’un volontaire, on a trouvé une jeune fille charmante, et que le héros a fait place à l’héroïne. [Applaudissements]. Mention honorable, insertion au bulletin (l) [Au camp d’Insheim, 17 mess. uni). Je t’ai écrit mon cher père le 15 du courant et dans ma lettre je t’ai fait donné les détails d’une affaire que nous avions eu le 14, et je te faisais part d’un trait à qui elle avoit donné lieu et que tu ne manquera pas d’admirer, de concert avec tous les bons Républicains; mais par une suite naturelle de mon étourderie, j’ai oublié l’enveloppe : et le nom de la rue ni le n° de l’hotel ou tu loge n’étant sur l’adresse, j’ignore si elle te parviendra. Je présumé cependant que le facteur sera asses intelligent pour la remettre au bureau de la Convention et que de la elle te passera facilement. Un trait non moins héroique que celui dont je te faisais part dans cette lettre, et que jusqu’ici l’on n’avoit cru possible que dans les romans est venu frapper nos yeux ce même jour et doit attirer l’admiration de tous les bons françois. Un jeune volontaire par son courage dans la chaleur des combats, fixe les regards de ses camarades par son courage : ce jeune homme servoit dans notre bataillon depuis 2 ans pendant lesquelles sa douceur, son exactitude, et son zèle pour le service lui avoient attirés l’estime et l’amitié de tous ses frères d’arme, et de ses supérieurs. Son organe clair et flexible, sa taille fine et élancée avoient déjà fait naittre quelques soupçons que l’on avoit toujours rejettés comme mal fondés. Les soupçons à son grand regret et par un événement des plus singuliers se sont réalisés le même jour, et sous les habits grossiers d’un volontaire, l’on a trouvé une jeune fille charmante et le héros a fait place à l’heroïne. Te dire comment on s’en est apperçu tu le comprends facilement : les besoins urgents de la nature l’ont forcée à les satisfaire, et malgré les plus grandes précautions de sa part, une maladie commune à son sêxe à découvert à tous les yeux dans un instant (1) P.V., XLI, 197. Bin, 28 mess. ; Mon., XXI, 203. (2) C 310, pl. 1209, p. 30 ; J. Lois, n° 652 ; J. Matin, n° 716 ; C. Univ., n° 924 ; Audit, nat., n° 657 ; Ann. patr., n° DLVIII ; J. Sablier, n° 1432 ; Rép., n° 205 ; Mess. Soir, n° 692 ; C. Eg., n° 693 ; J. Fr., n° 656. ce qu’elle avoit eu l’adresse de leur cacher pendant 2 années entières. Ce trait est d’autant plus frappant que cette femme reunit la vertu la plus rare au courage le plus héroïque. Depuis 2 ans elle vit avec des hommes, elle couche avec eux sous la tente, dans les cantonnements, dans les corps de garde, sans jamais avoir laissé appercevoir le moindre désir lascif; et elle s’est conduit avec tant de prudence et de précautions que jamais aucun d’eux n’a pu former le moindre doute fondé. Simple volontaire elle a souffert les exercices les plus durs, résistée aux temps les plus rigoureux, aux fatigues de tous les genres; fait les corvées les plus fortes, et toujours sage, patiente, aucune plainte ne lui est échappée, elle trouvoit encore le moment d’aider ses camarades, de les consoler, de les encourager. Une telle conduite méritoit une récompense; son capitaine après vérification l’a menée vers le général : le general a donné les plus grands éloges à sa bravoure et lui a promi[s] de lui obtenir une pension. Ce n’est que parmi les françois qu’on trouvera des exemples d’un si rare courage. Cet événement à tellement frappé d’admiration le sergent-major de sa compagnie qui est un jeune homme riche qu’il à sur le champ déposé sa fortune à ses pieds en la priant en grâce de ne pas le refuser : il l’épouse demain et cette Républicaine après avoir servi sa patrie les armes à la main va la servir de nouveau d’une manière plus utile encore en procurant dans la disette générale à ses braves freres d’armes les besoins de la vie les plus nécessaires. Elle a été nommée cantinière de la demie brigade (la vertu n’est jamais sans récompense). Ce trait mérite d’être connu de toute la République. Si tu peus le faire insérer au bulletin tu rendra justice au mérité de cette femme j’ose dire l’unique de son espèce. Ton fils Monnot. Mon adresse toujours la même. Réponse je t’en prie. 16 Un secrétaire donne lecture des procès-verbaux des 17 et 19 messidor; ils sont adoptés (l). 17 Un des secrétaires de la Convention annonce qu’un citoyen, qui veut rester inconnu, a fait déposer sur le bureau une médaille d’argent, représentant d’un côté la statue de la Liberté, et de l’autre la figure du ci-devant tyran qu’il a mutilée. La Convention décrète la mention honorable et l’insertion au bulletin (2). (l) P.V., XLI, 198. (2) P.V., XLI, 198 et 335. SÉANCE DU 24 MESSIDOR AN II (12 JUILLET 1794) - Nos 15-17 93 Le peuple français a la foudre en main, et il va la lancer sur tous les oppresseurs du monde. S. et F. ». Garnier (de Saintes). 15 Le citoyen Monnot, député, donne lecture d’une lettre de son fils, datée du camp d’Ins-heim, du 17 messidor, où il annonce qu’un jeune volontaire ayant fixé les regards de ses camarades par son courage, par sa douceur, son exactitude et son zèle pour le service, par la finesse de sa taille, la clarté, la flexibilité de son organe, avoit fait naître des soupçons qui s’étoient réalisés le même jour; que sous les habits d’un volontaire, on a trouvé une jeune fille charmante, et que le héros a fait place à l’héroïne. [Applaudissements]. Mention honorable, insertion au bulletin (l) [Au camp d’Insheim, 17 mess. uni). Je t’ai écrit mon cher père le 15 du courant et dans ma lettre je t’ai fait donné les détails d’une affaire que nous avions eu le 14, et je te faisais part d’un trait à qui elle avoit donné lieu et que tu ne manquera pas d’admirer, de concert avec tous les bons Républicains; mais par une suite naturelle de mon étourderie, j’ai oublié l’enveloppe : et le nom de la rue ni le n° de l’hotel ou tu loge n’étant sur l’adresse, j’ignore si elle te parviendra. Je présumé cependant que le facteur sera asses intelligent pour la remettre au bureau de la Convention et que de la elle te passera facilement. Un trait non moins héroique que celui dont je te faisais part dans cette lettre, et que jusqu’ici l’on n’avoit cru possible que dans les romans est venu frapper nos yeux ce même jour et doit attirer l’admiration de tous les bons françois. Un jeune volontaire par son courage dans la chaleur des combats, fixe les regards de ses camarades par son courage : ce jeune homme servoit dans notre bataillon depuis 2 ans pendant lesquelles sa douceur, son exactitude, et son zèle pour le service lui avoient attirés l’estime et l’amitié de tous ses frères d’arme, et de ses supérieurs. Son organe clair et flexible, sa taille fine et élancée avoient déjà fait naittre quelques soupçons que l’on avoit toujours rejettés comme mal fondés. Les soupçons à son grand regret et par un événement des plus singuliers se sont réalisés le même jour, et sous les habits grossiers d’un volontaire, l’on a trouvé une jeune fille charmante et le héros a fait place à l’heroïne. Te dire comment on s’en est apperçu tu le comprends facilement : les besoins urgents de la nature l’ont forcée à les satisfaire, et malgré les plus grandes précautions de sa part, une maladie commune à son sêxe à découvert à tous les yeux dans un instant (1) P.V., XLI, 197. Bin, 28 mess. ; Mon., XXI, 203. (2) C 310, pl. 1209, p. 30 ; J. Lois, n° 652 ; J. Matin, n° 716 ; C. Univ., n° 924 ; Audit, nat., n° 657 ; Ann. patr., n° DLVIII ; J. Sablier, n° 1432 ; Rép., n° 205 ; Mess. Soir, n° 692 ; C. Eg., n° 693 ; J. Fr., n° 656. ce qu’elle avoit eu l’adresse de leur cacher pendant 2 années entières. Ce trait est d’autant plus frappant que cette femme reunit la vertu la plus rare au courage le plus héroïque. Depuis 2 ans elle vit avec des hommes, elle couche avec eux sous la tente, dans les cantonnements, dans les corps de garde, sans jamais avoir laissé appercevoir le moindre désir lascif; et elle s’est conduit avec tant de prudence et de précautions que jamais aucun d’eux n’a pu former le moindre doute fondé. Simple volontaire elle a souffert les exercices les plus durs, résistée aux temps les plus rigoureux, aux fatigues de tous les genres; fait les corvées les plus fortes, et toujours sage, patiente, aucune plainte ne lui est échappée, elle trouvoit encore le moment d’aider ses camarades, de les consoler, de les encourager. Une telle conduite méritoit une récompense; son capitaine après vérification l’a menée vers le général : le general a donné les plus grands éloges à sa bravoure et lui a promi[s] de lui obtenir une pension. Ce n’est que parmi les françois qu’on trouvera des exemples d’un si rare courage. Cet événement à tellement frappé d’admiration le sergent-major de sa compagnie qui est un jeune homme riche qu’il à sur le champ déposé sa fortune à ses pieds en la priant en grâce de ne pas le refuser : il l’épouse demain et cette Républicaine après avoir servi sa patrie les armes à la main va la servir de nouveau d’une manière plus utile encore en procurant dans la disette générale à ses braves freres d’armes les besoins de la vie les plus nécessaires. Elle a été nommée cantinière de la demie brigade (la vertu n’est jamais sans récompense). Ce trait mérite d’être connu de toute la République. Si tu peus le faire insérer au bulletin tu rendra justice au mérité de cette femme j’ose dire l’unique de son espèce. Ton fils Monnot. Mon adresse toujours la même. Réponse je t’en prie. 16 Un secrétaire donne lecture des procès-verbaux des 17 et 19 messidor; ils sont adoptés (l). 17 Un des secrétaires de la Convention annonce qu’un citoyen, qui veut rester inconnu, a fait déposer sur le bureau une médaille d’argent, représentant d’un côté la statue de la Liberté, et de l’autre la figure du ci-devant tyran qu’il a mutilée. La Convention décrète la mention honorable et l’insertion au bulletin (2). (l) P.V., XLI, 198. (2) P.V., XLI, 198 et 335.