126 . [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j f Membre «93 nous été plus économes, mais le lendemain même a été oublié. Nous n’avons vu que les be¬ soins de la patrie, persuadés que nos sacrifices seront appréciés par elle, et qu’elle n’abandon¬ nera pas une portion de ses enfants à la famine. « Les rebelles, instruits de ce mouvement énergique et simultané, ont senti que leur perte était certaine : ils ont fui. « Voilà ce que nous avons fait, citoyens; que pouvions -nous de plus? « Letourneur, tu étais là, c’est à toi de rendre témoignage aux républicains de l’Orne; c’est à toi de dire : « Ils ont marché d’un pas ferme dans le chemin de l’honneur, ils ont bien mérité de la patrie ». Ce seul mot confondra le procureur général syndic du département de la Manche et fera rejaillir sur lui la honte d’une dénoncia¬ tion calomnieuse. « Blin, président ; Bornier, secrétaire. » Les citoyens Bro et Marbu (1), curés, font hommage de 50 livres, à prendre sur leur tri¬ mestre, tant que durera la guerre (2). Suit la lettre des citoyens Ora et Maffrau (3) : Au citoyen Président de la Convention nationale. « Vallavoire (Valavoire), le 15 octobre 1793, l’an II de la République française une et indivisible. « Citoyen Président, « Le citoyen Gabriel Gra, curé de Vallavoire, et le citoyen Jean-Baptiste Maffrau, curé de Clamensane, tous les deux dans le district de Sisteron, désirant venir au secours de la patrie en danger par la guerre que nous avons à soute¬ nir contre les tyrans de l’Europe, ont offert chacun la somme de 50 livres à prendre sur leur traitement du trimestre d’ayril, et pareille somme à la même époque toutes les années par autant que la guerre durera. Ils voudraient pouvoir mieux si ces coquins d’agioteurs, accapareurs n’avaient réduit leur revenu jus¬ qu’à présent très modique. Vous avez déjoué leur intrigue en fixant le maximum des denrées de première nécessité; malgré tout événement, nous sommes décidés à tout sacrifier pour une cause aussi importante, nous volerions même aux frontières si les infirmités de l’un et la faible santé de l’autre ne s’opposaient à notre bonne volonté; tenez-nous-en compte, notre poste d’ailleurs est sacré, nous ne le quitterons point et ne cesserons de donner à tous nos concitoyens l’émulation que nous pourrons afin de les engager à mourir plutôt que de céder aux ennemis de la République. « Dans ce sentiment, je suis en particulier, citoyen président, tout dévoué à la République française. « Gra, curé de Vallavoire . a P. -S. Copie de la lettre du procureur syndic (1) Gra et Malbro, d’après le Bulletin; Gra et Maffrau, d’après le document des Archives. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 191. - (3) Archives nationales, carton G 278, dossier .741. « Sisteron, le 15 mai 1793, l’an II de la République française. « Citoyens patriotes et vrais républicains, « Je ne doutais nullement de votre civisme ni de votre bonne volonté à venir au secours de la patrie en danger, en faisant des sacri¬ fices pour les frais de la guerre. Votre lettre ne fait que me le confirmer, et me raffermir dans mon opinion sur votre compte. J’en ai fait part à mes collègues, qui se joignent à moi pour vous dire, au nom de la chose publique, que vous avez bien mérité de la patrie, et que l’offrande généreuse de 50 livres chacun par autant que la guerre durera est tout ce que la patrie pouvait attendre de votre générosité et de votre amour pour elle. Continuez, braves pasteurs, à con¬ courir avec vos municipalités à maintenir le bon ordre et la tranquillité, à faire respecter les personnes et les propriétés, car ce ne sera qù’ autant que ces principes seront gravés dans tous les cœurs que chacun, s’en pénétrant, les pratiquera, que nous parviendrons à déjouer les complots des malveillants, à faire triom¬ pher la République et à jouir du bonheur par¬ ticulier. « Aux curés de Vallavoire et Clamensane. « Par copie : H « Le procureur syndic du district de Sisteron, « Borelly. » Le citoyen Robert Quillet, curé des communes d’Athis-Mons et Ablons-sur-Seine, dépose sur le bureau ses lettres de prêtrise et les provisions de sa cure, ne voulant plus se souiller par un minis¬ tère de jongleries et d’impostures (1). Suit la lettre du citoyen Robert Quillet (2). « Paris, 21 brumaire, 2e année de la Ré¬ publique française, une et indivisible. « Citoyen Président, « Je me suis présenté hier matin à la barre de la Convention nationale. Je n’ai pu y être admis. Ce matin, je m’y suis présenté une seconde fois. Les deux jours j’ai écrit au ci¬ toyen président pour le prévenir que je désirais remettre à la Convention mes lettres de prê¬ trise et les provisions de la commune d’Athis-Mons et Ablon, département de Seine-et-Oise. Je n’ai pu être admis aujourd’hui ni hier. Je prends le parti de remettre aux mains du ci¬ toyen Président, ce que j’aurais désiré remettre en personne à la barre. « J. -R. Quillet. » Jean-Robert Quillet, curé des communes et muni¬ cipalités dü Athis-Mons et Ablon-sur-Seine, département de Seine-et-Oise, aux citoyens représentants du peuple (3). « Ce 20 brumaire de la 2e année de la Ré¬ publique, une et indivisible. « Citoyens, « Destiné dès mes premières années à l’état ecclésiastique, je n’ai rien négligé pour y rem-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 191. (2) Archives nationales, carton C 280, dossier 770, (3) Archives nationales, carton C 280, dossier 770. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. » brumaire an I! 127 > J ) 13 nnvAmhrA A 7Q3 * “ plir mes devoirs en homme de bien et en fidèle observateur des lois. La Révolution régénéra¬ trice qui fait le bonheur du peuple français et qui en fait aussi le premier peuple de l’uni¬ vers est enfin arrivée, et j’ai fait alors le ser¬ ment que prescrivaient les nouvelles lois. Les événements des 31 mai et jours suivants ont sauvé la République, et j’y ai applaudi avec transports. Une nouvelle constitution plus sage a été décrétée, et je me. suis empressé de l’accepter dans l’assemblée primaire de mon canton. Comme vrai républicain il ne me reste plus qu’à vous offrir mes lettres de prêtrise et les provisions de ma cure. Je viens les dépo¬ ser sur votre bureau. « Citoyens représentants, je n’avais pour subsister que le traitement attaché à mes fonctions curiales, j’ai 60 ans et plusieurs diffé¬ rentes infirmités graves. Je laisse à votre sa¬ gesse, à votre humanité de prononcer sur mon sort dans un âge qui aggrave et multiplie encore les infirmités et les besoins. « J. -R. Quillet. » Une députation de la commune d’Orgeville, district d’Évreux, se présente à la barre, et s’ex¬ prime en ces termes : « Eeprésentans, « Et nous aussi, je voulons bien mériter de la patrie; c’est lui rendre service que de la purger des mauvaises bêtes qui l’empoisonnent. J’en avons une dans not’ commune d’une espèce bien dangereuse; ça vous tourmente le pauvre monde de toutes les manières; ça fait enrager les vivans, ça s’acharne jusques sur leurs cadavres. Si y a des diables dans l’enfer, comme je le croyons bien, c’ tila s’en est échappé pour notre malheur à tertous; il a pourtant face humaine, mais le cœur d’un vrai démon, et l’âme aussi noire que sa souguenille : c’t animal-là s’appelle un curai, ou bien M. Flichy. Eh bien! je vous déclarons que je ne voulons pas de ce M. Flichy, ni de son eau bénite; il y a trop long-temps qu’il nous fait croire que des vessies sont des lanternes; qu’il aille conter à d’autres ses fariboles, et qu’il nous tourne les talons grand train. Mais comme il ne veut pas nous croire, je vous prions, législateurs, de vouloir bien li signifier ça de notre part, par un petit bout de décret; ça fait douze bons cents francs dont je faisons cadeau à la République, et c’est douze cent mille fois plus qu’il ne vaut. Je vous enverrions bien le calice et le ciboire; mais excusez, c’est que depuis qu’il est dans not’ commune, ça nous a été volé. Adieu nos braves législateurs : tenez ferme, vous y faites merveilles; je vous soutiendrons, et ça ira, ou le diable nous emportera tous. » Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit l’adresse de la commune d’Orgeville (2) : La commune d’Orgeville, canton de Pacy, dis¬ trict d’Evreux, département de l’Eure, à la Convention nationale. « Représentants, « Et nous aussi, je voulons bien mériter de la patrie; c’est lui rendre service que de la purger (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 191. (2) • Archives nationales, carton G 279, dossier 753; des mauvaises bêtes qui l’empoisonnent. J’en ayons une dans not’ commune' d’une espèce bien dangereuse; ça vous tourmente le pauvre monde de toutes les manières; ça fait enrager les vivans, ça s’acharne jusques sur leurs cadavres. Si y a des diables dans l’enfer, comme je le croyons bien, c’tila s’en est échappé pour notre malheur à tertous; il a pourtant face humaine, mais le cœur d’un vrai démon, et l’âme aussi noire que sa souguenille : c’t’ animal-là s’appelle un curai, ou bien M. Flichy. Eh bien ! je vous déclarons que je ne voulons pas de ce M. Flichy, ni de son eau bénite ; il y a trop long-temps qu’il nous fait croire que des vessies sont des lanternes; qu’il aille conter à d’autres ses fariboles, et qu’il nous tourne les talons grand train. Mais comme il ne veut pas nous croire, je vous prions, législateurs, de vouloir bien li signifier ça de notre part, par un petit bout de décret ; ça fait douze bons cents francs dont je faisons cadeau à la République, .et c’est douze cent mille fois plus qu’il ne vaut. Je vous en¬ verrions bien le calice et le ciboire ; mais excusez, c’est que depuis qu’il est dans not’commune ça nous a été volé. Adieu nos braves législateurs : tenez ferme, vous y faites merveilles; je vous soutiendrons, et ça ira, ou le diable nous em¬ portera tous. « Salut et fraternité. » (Suivent 18 signatures.) Extrait des délibérations de la commune d’Orgeville (1). Du onzième jour de novembre mil sept cent quatre-vingt-treize, et le deuxième de la Ré¬ publique une et indivisible. Nous, maire, officiers municipaux et notables, composant le conseil général, et les habitants de la commune d’Orgeville assemblés. Le Procureur de la commune a dit : « Citoyens, « Les mauvais procédés, les noirceurs et les méchancetés du sieur Flichy, notre curé, nous ont déterminés à le dénoncer dans une adresse à la Convention nationale en date du 8 septembre dernier, et à demander son remplacement par un homme plus vertueux. « Nous voyons malheureusement qu’il n’existe pas de prêtres vertueux, et quoique nous n’ayons pas à craindre d’en trouver un aussi méchant que le sieur Flichy, nous pourrions cependant n’en pas rencontrer un aussi bon que nous le désirons. « Pour ne pas tomber dans de nouveaux inconvénients, je crois que nous ferons mieux de nous en passer tout à fait. Ceux qui voudront aller à l’office divin pourront y aller s’ils le veulent dans les communes voisines. « Je demande donc que l’assemblée veuille bien délibérer sur cet objet. Bulletin de la Convention du 3e jour de la 3e décade du 2e mois de l’an II (mercredi 13 novembre 1793); Moniteur universel [n° 55 du 25 brumaire an II (vendredi 15 novembre 1793), p. 223, col. 2]; Jour¬ nal de la Montagne [n° 1 du 24e jour du 2e mois de l’an II (jeudi 14 novembre 1793), p. 6, col. 2] ; Mercure universel [25 brumaire an II (vendredi 15 novembre 1793), p. 229, col. 2], (1) Archives nationales, carton G 279, dossier 753.