672 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j *1 janvfer T794 Compte rendu du Moniteur universel (1). Oossuin, au nom, du comité de la guerre. Depuis longtemps on sollicite un décret qui fixe le trai¬ tement des commandants temporaires des places et postes militaires où les circonstances de la guerre ont nécessité d’en établir; votre comité de la guerre a senti qu’il était aussi instant que juste de venir au secours de ces militaires qui ont sacrifié leur santé, leurs veilles, et le peu de moyens pécuniaires qu’ils ont, à la dé¬ fense de la République. Une loi a donné jusqu’à présent la faculté aux généraux des armées d’établir des commandants amovibles dans les endroits où ils le jugeraient convenable. L’expérience ne nous a que trop avertis que les choix n’ont pas été partout éga¬ lement bons; quelques-uns de ces commandants ont trahi la patrie, ils n’ont pas échappé au glaive de la loi; tous ne sont pas coupables, occupons-nous de leur sort, et confions les nominations à des fonctions aussi importantes au comité de Salut public, sur une liste que lui présentera le conseil exécutif provisoire. Vous savez, ci¬ toyens, que le succès de nos armées dépend es¬ sentiellement de la loyauté, du courage, de l’expérience et des talents de ces militaires; un poste bien défendu vaut le gain d’une bataille; Landau vient de vous en donner l’exemple. Il faut choisir ces commandants parmi les capitaines les plus expérimentés, et mieux les payer pour leur ôter toute idée de suggestions. Le comité de la guerre a mûri cette question, il a pensé que les traitements devaient être proportionnés à la force des garnisons des places mises sur pied de guerre; il a annexé au projet de décret qui va vous être proposé, un tableau qui classe, sur trois colonnes, les 161 places et postes militaires conservés par la loi du 10 juillet 1791; mais n’exigez pas de votre comité une déclaration authentique de la force de la gar¬ nison de ces places ou postes, c’est le secret indispensable d’une bonne diplomatie; le comité de Salut public en a le détail. Nous avons cru, citoyens, qu’un traitement de 4,800 livres pour les commandants de la première classe, au nombre de 17 ; 4,000 livres pour ceux de la se¬ conde au nombre de 28 ; et 3,300 livres pour ceux de la troisième classe, au nombre de 116, étaient suffisant; bien entendu que ces commandants se logeront à leurs frais, à défaut de bâtiments militaires, et que ces traitements leur seront précomptés sur ceux dont ils jouissaient à leurs eorps respectifs. Vous voyez que ce calcul n’a rien d’onéreux pour la République, puisqu’il est bien constant que les appointements d’un capi¬ taine se montent, en temps de guerre, à près de 3,000 livres et que c’est seulement parmi les capitaines que vous ferez choix des comman¬ dants temporaires. D’ailleurs, citoyens, cette dépense a heu à présent, mais elle est mal or¬ donnée, et cehe que l’on vous propose de décré¬ ter ne sera que momentanée, car à la paix vous aurez moins de postes à garder. Voici le projet de décret. (Suit le texte du décret que nous avons inséré ci-dessus d’après le procès-verbal.) (1) Moniteur universel [n° 106 du 16 nivôse an II (dimanche 5 janvier 1794) p. 428, col. 2.] « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu son comité de la guerre [Gossuin, rappor-teur] (1), décrète : Art. 1er. « Tous militaires, tous conseils d’administra¬ tion de bataillons, ont le droit d’adresser des péti¬ tions et des réclamations, soit individuelles, soit pour affaires des corps, à la Convention nationale, aux représentants du peuple auprès des armées, au conseil exécutif provisoire, et partout ailleurs. Art. 2. « Il est défendu aux bataillons et autres corps de troupes à la solde de la République, d’envoyer des députations, soit à la Convention nationale, soit auprès du conseil exécutif, pour affaires de leurs corps. Art. 3. « Les officiers qui se chargeraient à l’avenir de pareilles députations, les commandants des corps, commissaires des guerres ou autres qui délivreraient ou viseraient des Commissions ou passeports à cet effet, seront destitués de leur emploi (2). » « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu son comité de la guerre [Gossuin, rappor¬ teur (3)], décrète que les quatre brigades de gen¬ darmerie nationale qui excèdent, dans le dépar¬ tement du Mont-Terrible, le nombre fixé par la loi du 16 brumaire, y sont provisoirement conservées (4). » « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu son comité de la guerre [Gossuin, rap¬ porteur (5)] sur l’observation faite par le citoyen Ruffray, que les titres de sa ci-devant décoration militaire lui ayant été enlevés à sa demeure, pen¬ dant qu’il combattait en qualité de soldat les rebelles de la Vendée, il lui était impossible de satisfaire à la foi du 25 frimaire, passe à l’ordre du jour, et décrète que la déclaration que ce mili¬ taire en a faite par écrit au ministre de la guerre sera déposée au comité des décrets. » (6). » Suit la déclaration du citoyen Ruffray (7). Citoyens représentants. J’ai heu de présumer que le tourment le plus cruel pour un répubhcain est de se trouver en contravention avec la loi. J’ai parcouru, dès ma plus tendre jeunesse, la carrière militaire, mais n’étant point né dans la caste privilégiée de la noblesse, j’ai éprouvé dans l’ancien régime toutes les humiliations, tous les passe-droits imaginables, quand le ministre crut adoucir l’amertume de mes récri-(1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales carton C 287, dossier 853. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 300. (3) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 287, dossier 853. (4) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 301. (5) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 287, dossier 853. (6) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 301. (7) Archives nationales, carton G 287, dossier 869, pièce 10. 673 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j n*vôse an II L ' (4 janvier 1794 minutions en m’associant au ci-devant ordre de Saint-Louis. Par un acte déposé au bureau de la guerre, voici comment j’ai protesté contre cet ordre : « Je soussigné, Etienne-Pierre Buffray, fils d’un maître de forges de la ci-devant province d’Angoumois, atteste la présence de l’Etre su¬ prême et sous l’égide de la loi qu’ après vingt-huit années de services militaires, dont quinze comme soldat, j’ai reçu la qualité de lieutenant en second au bataillon des garnisons du Perche la ci-devant décoration militaire le premier jan¬ vier 1789, de la main de Soubreuü (sic), alors gouverneur des Invalides; « Qu’ayant depuis quelque temps égaré un portefeuille qui renfermait les lettres qu’il m’avait remises, il n’y a point de recherches que je n’aie faites pour les recouvrer inutilement; « Que j’ai lieu de présumer que le larcin m’a été fait par des gardiens infidèles qui ont déserté ma maison pendant une campagne de trois mois que j’ai faite contre les rebelles de la Vendée comme soldat; que j’avais imaginé que la déco¬ ration militaire avait eu le même sort, quand je l’ai retrouvée, que je l’ai déposée à la municipa¬ lité de Veigné, canton de Montbazon, district de Tours, département d’Indre-et-Loire, lieu de mon domicile, où j’ai fait déclaration du tout, et protestations contre le serment d’esclavage involontairement consenti, et m’en tenir à ceux de l’égalité et de la liberté. « Et comme je préférerais mille fois mieux su¬ bir la mort que de laisser le moindre louche sur mon civisme et ma soumission à la loi, je pro¬ teste de rechef contre les serments qui m’ont été arrachés sous les glaives du despotisme, no¬ tamment celui de fidélité au roi; je les abdique comme ayant été prononcés contre le vœu de ma conscience et de mon opinion, comme attentatoires à la souveraineté du peuple, qui est la seule que je reconnaisse et la seule qu’il soit dans mon cœur de regarder comme légitime. En conséquence j’offre sur l’autel de la patrie deux cent quarante livres pour les frais de la guerre, et le reste de ma vie pour défendre la liberté, l’égalité de mes compatriotes, pour les¬ quels les tyrans, les despotes et les rois sont devenus des objets d’horreur et d’exécration par les barbaries qu’ils ont exercées sur nous pen¬ dant treize siècles. « A Paris, le 2e frimaire de la seconde année de la Eépublique française et la première de la mort du tyran, signé Buffray. « Pour copie conforme aux pièces déposées aux bureaux de la guerre de la sixième division, signé Sijas, et à côté signé, Prat Desprez et revêtu du cachet du département de la guerre. » « Euffray. » Quelque puissant que devienne pour vous, citoyens législateurs, cet axiome imprescrip¬ tible : Nemo dat quod non habet, vu qu’aucune autre autorité que la vôtre n’a la faculté d’inter¬ prétation, je vous prie de considérer que cette protestation frappe très énergiquement l’esprit de la loi; qu’une remise materielle des parche¬ mins proscrits par elle peut être aux yeux des rois interprétée une soumission de circons¬ tance, tandis que ma protestation me classe absolument sous l’étendard de la Eévolution tandis qu’elle est faite pour m’attirer toute leur haine et que plus on se rend odieux aux gou¬ vernements despotiques, plus on a des droits aux égards d’un gouvernement philanthropique. Je demande donc que la Convention nationale, devant laquelle je renouvelle ma protestation, comme représentant l’Assemblée auguste du peuple entier, décrète qu’elle est censée rem* placer la remise des titres primitifs. A Paris, le 20 frimaire an II de la Eépublique une et indivisible. Euffray. Compte rendu du Moniteur universel (1). Un ci-devant chevalier de Saint-Louis, qui a perdu son brevet, a fait à la municipalité de son domicile sa déclaration, qu’il ne peut satis¬ faire à la loi qui ordonne le dépôt des différents brevets, attendu que le sien lui a été volé. Le rapporteur du comité de la guerre propose de décréter que cette déclaration tiendra lieu de dépôt. Après une courte discussion, l’Assemblée passé à Tordre du jour et ordonne que la déclaration soit déposée au comité des décrets. Sur la proposition d’un membre [Clauzbl, rap¬ porteur (2)], le décret suivant est rendu. La Convention nationale, ouï son comité de la surveillance des marchés, habillement et équi¬ pement de l’armée, décrète que les citoyens Azéma (de l’Aude), et Genin (du Mont-Blanc), deux de ses membres, surveilleront la levée des scellés et l’inventaire des papiers des administra¬ teurs de l’habillement et équipement des trou¬ pes (3). » « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu son comité de sûreté générale [Elie La¬ coste (4)], décrète que les citoyens Frédéric Bonnaire, Henri Fagniot, Meurice père, Chris¬ tophe Mortier, Boumiers, Crapet et sa famille, et la veuve Mathon, déportés dans la ville de Sôissons, à la même époque, et par Bar, représen¬ tant du peuple, dont la bonne foi avait été sur¬ prise, sont également rappelés parmi leurs conci¬ toyens, et que le décret rendu le 24 frimaire der¬ nier, en faveur des officiers municipaux et mem¬ bres du conseil général de la commune de Lan-drecies, est commun aux citoyens et citoyennes susnommés (5). » « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de sûreté géné¬ rale [Voulu and, rapporteur (6)] et l’arrêté dudit comité, qui dénonce à l’accusateur public près le tribunal révolutionnaire de Paris le nommé Durand, ex-maire de Montpellier, dont suit la teneur, approuve ledit arrêté dans tout son con¬ tenu. « Vu le décret de la Convention nationale, en (1) Moniteur universel [n° 107 du 17 nivôse an II (lundi 6 janvier 1794), p. 430, col. 3.]. (2) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 287, dossier 853. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 302. (4) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 287, dossier 853. (5) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 302. (6) D’après la minute du décret qui existe au procès-verbal, carton G 287, dossier n° 853. lr* SÉRIE, T. LXXXII. 43