[États gën. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] 5(53 nisfrateur sage et éclairé en a préparé les i moyens ; l’amour du souverain pour son peuple en assure l’exécution ; le bien public est enfin devenu le sentiment général. L’ordre va renaître, le crédit se rétablir, et l’Etat libéré recouvrera toute sa force et toute sa grandeur ; la confiance réciproque du souverain et des sujets en sont garants. Dans cette intime conviction, nous chargeons nos députés aux Etats généraux de déposer aux pieds du trône nos hommages et nos vœux ; ils consentiront d’après ces instructions, en suivant leurs lumières et leur conscience, à tout ce qu’ils jugeront à propos, utile, bon et nécessaire pour la gloire de la religion, la splendeur du trône, les véritables intérêts de la nation et la félicité publique. Et à la minute ont signé : Thaillaud, curé de Riom ; l’abbé Vertamy-Ter-rasse, prieur, commissaire ; l’abbé de Massais, comte de Brioude ; de La Bastide, curé de Pouil-haques; Majeune, curé de Saint-Beausèze, commissaire ; Fayolle , curé de Saint-Bonnet-les-Champs ; Boyer, secrétaire. S’ensuit la protestation de Mgr l’évêque de Clermont : Nous, évêque de Clermont, avons eu représenta-tiondu présent cahier, seulement signé par tioisde MM. les commissaires sur quinze qui avaient été nommés pour rédiger les instructions y contenues et les vœux du clergé de la sénéchaussée d’Auvergne, déclarons que nous ne croyons pouvoir signer que sous les réserves et protestations suivantes : 1° Contre l’article 30, comme absolument contraire au bon ordre, et tendant à faire un corps particulier dans le clergé de la classe de MM. les curés ; 2° Contre la partie de l’article 33, qui porte sur les péages et les leydes, sans demande d’aucune indemnité, ce qui pourrait donner atteinte aux propriétés; 3° Contre l’article 34, en ce qu’il suppose l’abandon des privilèges pécuniaires fait et consommé, tandis que nous pensons que l’ordre ecclésiastique réuni aux Etats généraux, de toutes les parties qui composent le clergé de France, est seul compétent pour prononcer sur un tel abandon, ou même de combiner avec sagesse les intérêts du corps avec la sûreté de l’hypothèque de ses créanciers, préalable que nous regardons comme essentiellement nécessaire dans l’ordre de la procédure et de la justice ; 4° Contre l’article 35, en tant seulement qu’il a relation avec le précédent, et qu’il pourrait donner à penser que l’ordre du clergé cesserait dans l’hypothèse même de la cession des privilèges de s’imposer lui-même ; 5° Contre l’article 39, en tant qu’il ôte aux évêques un droit inhérent à leur juridiction et à leur dignité, s’il n’y a pas d’erreur de copiste dans cette phrase : « Un curé ne puisse être présidé par son évêque ; » et dans le cas de cette erreur qui consisterait dans l’omission du mot : que , nous protestons contre l’exclusion qui se trouverait donnée aux grands-vicaires ; 6° Contre l’article 45, en ce qu’il n’établit pas une réciprocité 4e justice contre les abbés com-mendataires et les religieux, et qu’il est autre qu’il n’avait été arrêté par l’assemblée. Et a signé T. François, évêque de Clermont. Expédié à M. le lieutenant général, président de l’assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d’Auvergne, par moi, secrétaire-greffier de ladite assemblée, le 13 avril 1789. Signé FAUCON. INSTRUCTIONS Pour les députés de la noblesse aux Etats généraux, arrêtées dans l'assemblée de la sénéchaussée d’Auvergne, séant à Riom (1). Un monarque bienfaisant veut régénérer la France : à sa voix, tant d’intérêts divisés, et même en opposition, depuis trop longtemps, vont se réunir au but commun de l’utilité publique ; et le Français se livre à la plus] douce espérance,' celle d’être libre sous un roi. La noblesse d’Auvergne vous charge de la défense et du recouvrement des droits de la nation. En vous confiant ses intérêts les plus chers, elle vous remet ses instructions. Bien convaincus de l’importance de cette commission, vous la remplirez sûrement avec la générosité qui gagne les cœurs et le patriotisme qui les élève. Souvenez-vous que la nature a fait les hommes égaux, et que les distinctions nécessaires entre eux, particulièrement dans une monarchie, sont fondées sur l’utilité générale. Vous regarderez ces deux vérités comme la base de notre constitution ; elles vous rappelleront à la fois ce que vous devez à la dignité d'un peuple libre et à la prééminence des premiers citoyens de l’empire. Que par vos soins la France soit heureuse ! La reconnaissance d’une nation est le plus bel hommage que puisse obtenir un citoyen : tel sera le prix de vos vertus. Après avoir exprimé le vœu que la majesté du trône et la dignité de la famille royale aient tout l’éclat qui leur est dû, et que leur assurent le respect et l’attachement gravés dans le cœur de tous les Français, nous déclarons que nos principes sont : Art. 1er. Que l'assemblée des représentants de la nation française formant les Etats généraux est la seule puissance compétente pour établir les impôts et faire les lois avec la sanction du Roi. En conséquence, le jour de l’ouverture des Etats généraux, les députés déclareront que tout impôt est cessé ; ils pourront néanmoins consentir à la prorogation de l’impôt actuel jusqu’au 1er janvier 1790. Mais lesdits députés ne s’occuperont des subsides nouveaux qu’après avoir statué sur les droits de la nation ; ils ne les établiront que pour deux ans, époque qu’ils fixeront, pour rassembler les Etats généraux, qui en régleront alors le retour fréquent et périodique; et dans les cas de régence à établir, ils statueront que les Etats généraux s’assembleront le plus promptement possible. Aucun impôt ne sera, à l’avenir, mis ou prorogé sans le consentement des Etats généraux du royaume ; toutes impositions mises ou prorogées par le gouvernement, sans cette condition, ou accordées hors des Etats généraux, par une ou plusieurs provinces, une ou plusieurs villes, une ou plusieurs communautés, seront nulles, illégales; et il sera défendu, sous peine de concussion, de les répartir, asseoir et lever. Les députés demanderont que les Etats provinciaux soient établis dans toutes les provinces ; mais qu’à chaque tenue des Etats généraux, la convocation soit faite, suivant les anciens usages, par bailliages, étant la manière la plus usitée pour connaître les vœux de tous les citoyens, à moins que les Etats généraux ne trouvent une forme de convocation plus utile. Art. 2. Que tous les citoyens français, depuis le premier rang jusqu'au dernier, quelque profession (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. K64 [Étals gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] qu’ils exercent , doivent être également soumis aux lois et protégés par elle. Aucun domicilié ne pourra être arrêté sans décret judiciaire, excepté dans le cas de flagrant délit et de désignation d’un coupable par la clameur publique : auquel cas il sera remis, dans les vingt-quatre heures, entre les mains de son juge naturel. La profession la plus ordinaire de la noblesse étant celle des armes, ses députés seront expressément chargés de demander que tout officier soumis à la discipline militaire, ne pouvant être suspendu dans ses fonctions, ne puisse être destitué de sa charge ou emploi militaire par la volonté arbitraire ; et que dans aucun cas il ne lui soit refusé le jugement d’un conseil de guerre. Art. 3. Que le pouvoir législatif ne devant être exercé que par les représentants delanation , avec la sanction du /toi, le gouvernement ni aucune cour judiciaire ne peuvent promulguer ni consentir , même provisoirement , les lois que la nation n’aurait pas faites, ni différer la publication et l'exécution des lois nationales. Nous demandons qu’il soit arrêté de s’occuper sans délai de la confection d’un code national, qui puisse être connu et étudié par toutes les classes des citoyens ; que ce travail soit confié à des magistrats et jurisconsultes éclairés, à des citoyens de tous les ordres et de tous les états, choisis dans toutes les provinces. Ils prépareront pour les prochains Etats généraux la rédaction des lois civiles et criminelles, dont la hase essentielle doit être le principe, aussi ancien que sacré, du jugement, par pairs, tant au civil qu’au criminel. Ils classeront les délits et les peines, de manière qu’il n’y ait rien d’arbitraire et d’équivoque dans la définition du crime et dans l’application de la peine encourue. Il sera provisoirement demandé aux Etats généraux un conseil pour les accusés, et toutes les autres précautions qui peuvent leur assurer les moyens de justification. Art. 4. Que le pouvoir exécutif doit être exercé par le Roi, dont la personne est sacrée, mais dont les représentants individuels ou collectifs , ministres, commandants, gouverneurs et autres, sont responsables et comptables à la nation de tous leurs pouvoirs, et peuvent être dénoncés à ses représentants, et soumis par lesdits représentants au jugement d’un tribunal compétent, pour les abus dont ils se seront rendus coupables , quelque autorisation qu’ils puissent avoir reçue. Art. 5. Qu’aucun agent de l’administration ne peut prononcer en jugement. Toute évocation au conseil doit aussi être supprimée. Art. 6. Que le Roi ne peut départir à ses officiers aucun pouvoir qui ne soit prévu et défini par la loi. Nous demandons qu’il soit laissé un libre cours à la justice dans les tribunaux ordinaires, et que l’on supprime tout droit de c ommittimus au grand et petit sceau, lettres de garde-gardienne, évocations et attributions à tout tribunal quelconque. En sorte que tout justiciable ne puisse être poursuivi, en matière civile ou criminelle, ailleurs que par-devant son juge naturel. Art. 7. Qu'il ne doit y avoir aucune commission des Etals généraux qui puisse exercer , même provisoirement, aucun acte d’administration, ni aucune portion du pouvoir législatif, en matière de lois et d’impôts , lequel appartient exclusivement à l’assemblée générale de tous les représentants delà nation. Art. 8. Que la liberté des opinions faisant partie de la liberté individuelle, puisque l’homme ne peut être libre quand sa pensée est esclave, la liberté de la presse doit être accordée, sauf les précautions qui seront prises par les Etats généraux. Tels sont les droits et règlements qu’il est expressément enjoint aux députés de faire sanctionner avant de s’occuper de toutes autres opérations, sur lesquelles voici nos instructions : SECTION PREMIÈRE. L’ordre de 1a, noblesse, considérant que le gouvernement monarchique est en France essentiellement constitutionnel, que les distinctions nécessaires dans toute monarchie sont fondées sur Futilité générale, et même que tous les Etats bein constitués ont senti le danger de confondre, dans une délibération par tête, les différentes parties de l’assemblée législative, a expressément ordonné à ses députés de ne jamais perdre de vue ces grands et antiques principes, qui sont fondés sur l’intérêt commun de tous les citoyens, autant que sur les droits particuliers de la noblesse ; et dans le cas où la pluralité des voix de la noblesse obligerait les députés de voter par tête, ils ne le feront, même momentanément, qu’après avoir déclaré que le vœu formel de la noblesse d’Auvergne est de ne voter que par ordre, en avoir demandé et obtenu acte.fLes députés n’accéderont à aucune délibération par bailliage, parce que leurs députations étant inégales, l’équilibre n’existerait plus. Le président de l’ordre de la noblesse aux Etats généraux sera élu librement par son ordre et dans son ordre, sans distinction de province ni de rang. Le vœu de la noblesse de cette sénéchaussée est que, dans la salle des Etats généraux, les places soient occupées sans distinction de provinces et de députations, afin d’éviter tout ce qui pourrait laisser présumer quelque prééminence de l’une de ces provinces sur l’autre. SECTION II. Art. 1er. L’impôt doit être proportionné aux vrais besoins dans l’octroi, et aux vraies facultés dans la répartition. En conséquence, l’ordre de la noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne , considérant que les membres qui la composent sont nés citoyens, et voulant donner à ses concitoyens du tiers-état une preuve de l’esprit qui l’anime, et du désir qu’il a de cimenter l’union entre tous les ordres, a fait unanimement le vœu solennel de supporter avec égalité, chacun en proportion de ses facultés, les contributions et impôts qui seront désormais établis par la nation, sous la seule réserve du manoir de chaque gentilhomme , avec sa cour et son jardin, appelé par la coutume le vol du chapon, en fief ou autrement, sous la condition expresse que ce sacrifice de ses privilèges entraîne celui de ces mêmes privilèges pour toutes les villes, communautés, corporations et individus quelconques : « Mais comme Sa Majesté dé-« sire que, dans l’examen des droits et des faveurs « dont jouissent les ordres privilégiés, on montre « des égards pour cette partie-de la noblesse qui « cultive elle-même ses champs, et qui souvent, « après avoir supporté les fatigues de la guerre, « vient encore servir l’Etat, en donnant l’exemple « d’une vie simple et laborieuse, et en honorant, « par ses occupations, les travaux de l’agricul-« ture, » la noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne s’en rapporte à la justice des Etats généraux, pour seconder les intentions paternelles de Sa Majesté. Les surcharges de l’Auvergne lui font espérer que le nouvel impôt, mieux réparti entre les dif- [Sénéchaussée de Riom.| g6g [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. férentes provinces du royaume, nécessitera une diminution pour elle. Les députés seront donc chargés de demander aux Etats généraux la déclaration formelle que les impôts établis par la nation doivent être proportionnellement établis entre les provinces du royaume, suivant leurs vraies facultés. Mais il serait essentiel que l’échelle de proportion fût établie avant que l’impôt fût consenti. Ils déclareront ensuite que larépartition faite par les Etats provinciaux doit être proportionnelle entre les citoyens de tous les ordres. Art. 2. Ils demanderont que l’impôt consenti par les Etats généraux soit simple et uniforme -, qu’il diminue progressivement, à mesure que les dettes de l’Etat s’éteindront ; que la recette de chaque province soit versée directement au trésor national, par les préposés des Etats provinciaux, déduction faite de toutes les charges à payer dans la province, et qui y seront acquittées aux parties prenantes. Il sera remis aux députés des instructions suffisantes sur la contribution actuelle de la province d’Auvergne, pour qu’ils puissent prouver démonstrativement que cette contribution ne peut avoir pour base unique les propriétés foncières ; ils insisteront pour que l’industrie des non propriétaires soit soumise à l’impôt; mais[ils exprimeront leur vœu pour que les pauvres habitants des campagnes soient imposés le moins possible ; il est également essentiel et juste que l’on prenne tous les moyens d’atteindre la fortune des capitalistes. Art. 3. Que toutes les charges et commissions de tiïiances soient supprimées et remboursées. Art. 4. Que les aides et gabelles soient supprimées, sauf aux Etats généraux à pourvoir au remplacement de cet impôt, ainsi qu’à la juste indemnité des provinces rédimées. Art. 5. Que toutes les douanes soient portées aux frontières, et que le commerce intérieur soit parfaitement libre. Art. 6. Que tous les droits de fisc, qui nuisent à l’industrie et au commerce, soient abolis ; que ceux de contrôle soient supprimés, s’il est possible, ou du moins modérés, mieux proportionnés, et expliqués d’une manière claire et précise. Que la connaissance des contestations qui pourront s’élever, au sujet des droits de contrôle, appartiennent aux tribunaux ordinaires. Art. 7. Que tous les offices d’huissiers-jurés-priseurs soient supprimés, comme une atteinte manifeste aux droits de propriété, et un moyen de vexation odieux aux pauvres débiteurs. Art. 8. Que toutes les jurandes, ensemble tous riviléges exclusifs, soient supprimés, même celui e roulage et messagerie , sauf à pourvoir à tout remboursement de droit. Art. 9. Que les semis et plantations nouvelles de bois soient favorisées, et déclarées exemptes de tout impôt, attendu la rareté et destruction des bois de cette province. SECTION III. Art. 1er. Que la composition, le ressort et la compétence de tous les tribunaux existants, leur utilité ou leur inutilité soient soumis à l’examen et à la décision des Etats généraux. La noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne demande expressément la suppression de tous les tribunaux d’exception, et notamment des maîtrises des eaux et forêts, bien entendu que les Etats généraux rembourseront lesdites charges au moment de leur suppression ; elle charge ses députés de demander aussi la créatien d’un parlement dans la province. Art. 2 . Que la vénalité des charges soit abolie dans toutes les professions quelconques, militaire, de jüdicatureet autres; que les officiers de justice soient inamovibles, et ne puissent être destitués que pour forfaiture jugée selon les lois du royaume et par juges compétents. Les Etats généraux décideront de quelle manière seront choisis les juges, et quelles épreuves ils auront à subir pour leur élection. Art. 3. Les députés demanderont la suppression de toutes les places et emplois qui ne sont pas évidemment nécessaires. Tous les traitements n’excèderont jamais 20,000 livres. Ils demanderont aussi que le même individu ne puisse jamais occuper plus d’une place ; qu’il soit établi dans chaque département une fixation des sommes accordées en dons, pensions et gratifications, et un état énonciatif des titres et services qui en seront susceptibles, et que le Roi soit supplié de faire publier tous les ans, par la voie de l’impression, l’état motivé desdites pensions, dons et gratifications : ils pourront aussi demander la réduction de celles déjà existantes. Art. 4. Les foi et hommages se rendent toujours avec empressement; mais il est intéresssant d’en supprimer les frais, ainsi que ceux des aveux et dénombrements. Art. 5. Les bureaux des hypothèques, établis pour la conservation des droits de tous les citoyens, ne remplissent pas leur objet ; les députés demanderont que les abus en soient réformés. Art. 6. Que le choix libre des officiers municipaux soit rendu aux villes. Art. 7. Que l’administration des intendants soit abolie; elle sera plus utilement exercée par les Etats provinciaux. SECTION iv. Art. 1er. Que les dépenses de chaque département soient appréciées et vérifiées dans toutes les parties; que tous les abus reconnus soient supprimés, et qu’il soit assigné des fonds fixes à chaque département, excepté la correspondance secrète des affaires étrangères. Que les comptes de chaque département soient rendus publics dans la même forme, par la voie de l’impression, en montrant l’emploi assigné pour chaque objet. Art. 2. Que les comptes soient rendus par les administrateurs, ordonnateurs et trésoriers, chacun dans ce qui les concerne, et que les dépenses ne leur soient allouées que sur des piècesprobantes. Art. 3. Que la comptabilité illusoire des finances par-devant la chambre des comptes soit anéantie, sauf le remboursement des offices. Qu’à l’avenir les comptes de recette et dépense des provinces soient arrêtés par les commissaires dé chaque Etat provincial, et imprimés; et que les recettes et dépenses du trésor public soient arrêtées par les Etats généraux, ou ceux qui seront par eux commis. Art. 4. Que la dette publique soit vérifiée par les Etats généraux, et fixée d’après les règles exactes de la justice; que tout intérêt au delà de celui fixé par la loi soit réduit à ce taux, sauf les distinctions qui seront jugées rigoureusement équitables. Que les capitaux ne soient remboursés qu’au prix de l’intérêt qu’ils produisent, ou à celui que les propriétaires prouveront avoir acheté leurs contrats, et ce, d’après les réductions qu’ils auront éprouvées. Une manière plus juste encore serait un emprunt fait au nom de la nation (ne pouvant à l’avenir y en avoir d’autre), qui offrît aux créanciers de l’Etat le remboursement de leurs créances ; et cet emprunt serait fait au plus modique intérêt possible. 866 [États gén. 1789* Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] Art. 5. Que les domaines du Roi soient déclarés aliénables à perpétuité, sans faculté de rachat ; qu’à cet effet il soit dérogé aux anciennes ordonnances par une loi conforme au vœu et aux droits de la nation ; pour le prix desdites aliénations être employé au remboursement des dettes les plus onéreuses de l’Etat, et qui seront indiquées par les Etats généraux; et pour rendre lesdites aliénations valables, les ventes seront précédées d’une estimation préalable par experts choisis par les Etats provinciaux; et après ladite estimation sur affiches et publications, il sera procédé judiciairement à la vente, en faveur du plus haut metteur et dernier enchérisseur, à un prix qui ne pourra être moindre que celui de ladite estimation, et ce, en présence du syndic desdits Etats provinciaux ; et à l’égard de ceux précédement engagés, il sera pareillement procédé à la vente définitive et par enchères, aux mêmes conditions et avec les mêmes formalités; et néanmoins, à enchère égale, les possesseurs seront préférés. SECTION V. Art. 1er. Que le clergé soit tenu d’acquitter sa dette dans le délai qui sera fixé par les Etats généraux, qui statueront sur les moyens les plus convenables pour opérer cette libération. Art. 2. Que les annates et toutes expéditions en cour de Rome soient supprimées ; elles font sortir du royaume dos sommes considérables, qui seraient mieux employées à l’acquit des dettes du clergé. Il serait aussi utile qu’intéressant de supprimer les économats. Art. 3. Que les curés et autres ministres de l’Eglise soient susceptibles de récompenses et de dignités ecclésiastiques; et que, dans le cas où les portions congrues seraient augmentées dans la suite, en considération de ce que le casuel serait supprimé, ou autrement, l’augmentation serait prise uniquement sur les biens du bénéfice éteint ou à éteindre, et non sur les dîmes inféodées, qui n’auraient jamais dû. y être assujetties. Que la dîme ecclésiastique soit rendue à son véritable objet : depuis trop longtemps les communes supportent des charges qui furent, en partie, le motif de l’établissement des dîmes. SECTION VI. Art. I81'. Que l’éducation publique soit établie sur des bases propres à former des citoyens utiles ; qu’il soit institué dans chaque paroisse des métiers pour l’un et l’autre sexe. Que les Etats provinciaux soient spécialement chargés d’encourager la vertu, la perfection et l’agriculture , et tous les arts par des prix d’émulation. Art. 2. Que, pour prévenir et abolir la mendicité, il soit établi une loi de secours qui assure à tous les pauvres valides du travail dans le lieu de leur naissance, et des ressources aux invalides. Que cette classe de citoyens profite enfin de la force commune, en recevant de la loi Ge qu’elle ne doit aujourd’hui qu’à l’importunité ou à la commisération de chaque particulier; ce qui avilit la dignité de l’homme. La loi peut ordonner que les Etats provinciaux se fassent rendre compte des fonds de charité, des revenus des hôpitaux, des fondations, et qu’il y soit suppléé, si cela ne suffit pas, par des fonds pris sur les abbayes, et par les contributions volontaires, que les riches de chaque province se feront un devoir de verser entre les mains des Etats provinciaux. Art. 3. Que les prérogatives et possessions légitimes des trois ordres seront inviolables : celui de la noblesse déclarant qu’il sera constamment attaché à soutenir ceux des deux autres ordres. Nulle propriété ne pourra être attaquée, même sous le prétexte du bien public, qu’il n’y ait eu au préalable une estimation faite par des commissaires nommés par les Etats provinciaux, et que l’identité n’en soit fournie sans délai en biens territoriaux ou en argent. Art. 4. Les députés demanderont que l’on s’occupe avec soin de la police intérieure des hôpitaux, d’en retrancher les abus, et les améliorations qui en proviendront seront utilement employées en augmentation de lits. Il serait à désirer que l’on pût établir des chirurgiens et des sages-femmes dans chaque canton. Que les Etats généraux prennent en considération le soin des enfants trouvés, pour en augmenter les établissements, et qu’il soit spécialement ordonné de n’en jamais refuser. Art. 5. Que toutes punitions avilissantes dans l’opinion française, telles que les coups de plat de sabre, dans le militaire, soient abolies. Art. 6. Que les prisons d’Etat soient supprimées; qu’on s’occupe sans délai de la liberté de ceux qui y sont déetnus, et qu’incessamment ils soient élargis ou remis à leurs juges naturels. SECTION VII. Art. 1er. Que le prêt à intérêt, au taux de l’ordonnance, par billets ou obligations, soit permis indéfiniment, et à toutes personnes, sans distinction, comme essentiellement utile, dans nos mœurs actuelles, au commerce, à l’agriculture et à la société en général ; enfin, comme un frein salutaire contre l’usure. Art. 2. Qu’il soit pris par les Etats généraux les précautions les plus sages pour déterminer dans toutes les provinces les points de communication où il serait le plus avantageux d’ouvrir des canaux ou de nouveaux chemins. Art. 3. Que les Etats généraux s’occupent de rechercher les causes qui arrêtent l’extension du commerce et de la navigation nationale, Art. 4. Que les mines, autres que celles d’or et d’argent, soient déclarées appartenir aux propriétaires des fonds dans lesquels elles sont situées; que toutes concessions qui en ont été faites, au nom de Sa Majesté, soient révoquées, et que les Etats provinciaux s’occupent des moyens de venir au secours de ceux qui se trouveraient hors d’état de faire l’exploitation des mines, si elles sont utiles au public. SECTION viii. Art. 1er. Les députés sont chargés de représenter que, si tous les citoyens sont enfants de la patrie, il n’en est point qui aient autant de droits à ses préférences, et aussi peu de part à ses ressources, que la portion la plus pauvre de la noblesse. L’Auvergne, plus qu’aucune autre province, s’honore d’un grand nombre de gentilshommes, auxquels il ne reste que le souvenir de ce que furent leurs pères, et l’inquiétude de ce que deviendront leurs enfants. Etrangers aux abus qui ont trop souvent enrichi leurs égaux, et à l’industrie qui ouvre tant de moyens de fortune aux autres citoyens, ils n’ontde ressources que dans ce modique patrimoine, autrefois exempt, et qu’ils viennent de soumettre à l’impôt. A peine le gouvernement s’est-il occupé de ses devoirs envers eux, que la faveur est venue s’emparer d’établissements que la justice avait consacrés à un plue S67 [États gén, 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Sénéchaussée de Riom.] digne usage. Les députés demanderont que les établissements pour l’un et l’autre sexe soient multipliés, qu’il y ait, dans la province d’Auvergne, des écoles militaires, affectées seulement à cette province�dont les revenus suffisent à l'éducation de la noblesse, ainsi, que des fonds pour soutenir au service, dans les premiers grades, tous ceux qui sortiront de ces écoles ; leur pauvreté bien constatée par les Etats provinciaux, sera le premier titre d’admission. Art. 2. Les ordonnances, pour le port d’armes, ont été souvent publiées, et toujours sans exécution; les députés demanderont que la police fasse cesser cet abus dans les campagnes, surtout pour l’épée, qui fut toujours une prérogative de la noblesse: Art, 3. Le grand abus des anoblissements trop fréquents doit être réprimé ; les députés demanderont qu’à l’avenir la noblesse ne puisse être acquise que par les services militaires, ou dans la magistrature, ou sur les demandes faites par les Etats provinciaux, pour des services importants et pour des actions d’éclat, utiles à la patrie. Les députés s’occuperont plus particulièrement encore de la suppression des charges de secrétaire du Roi, et autres du même genre. Art. 4. Qu’il soit établi une place de cadet gentilhomme par compagnie, qui facilite à tout gentilhomme les moyens de servir sa patrie, et de trouver dans la “seule profession que lui aient transmise ses pères, les moyens de subsistance que la fortune lui refuse. Art. 5. Les députés de la noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne demanderont aux Etats généraux de prendre en considération le sort des cinq maisons religieuses de cette province : Lavène, Blesle, Lavandieu, les Chazes et Courpières; il est à désirer que le gouvernement s’en occupe. Des réunions de bénéfices en faciliteront les moyens. La noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne charge ses députés de porter aux pieds du trône les sentiments de respect et d’amour dont elle est pénétrée pour Sa Majesté; elle a dans tous les temps sacrifié son sang et sa fortune pour ses rois, et renouvelle dans ce moment, avec l’enthousiasme de la reconnaissance, le serment de la fidélité la plus respectueuse pour son auguste monarque, qui, en rendant à la France ses assemblées nationales, sent que sa vraie source est dans le cœur de ses sujets, et que son autorité ne sera jamais plus affermie que quand elle aura pour base une constitution libre. MANDAT De la noblesse de la sénéchaussée d'Auvergne à ses députés. Vous êtes nommés par l’ordre de la noblesse de’ la sénéchaussée d’Auvergne pour être un des représentants de la nation dans les Etats généraux du royaume; elle vous a fait connaître ses principes ; c’ést d’après eux que vous fixerez les bases sur lesquelles reposeront à jamais la vraie grandeur du monarque et le bonheur de tous les citoyens français. Agissez d’après votre conscience ; les instructions qui vous sont remises contiennent nos vœux et vos pouvoirs. Nous sommes certains que vous n’oublierez jamais que le caractère distinctif de la noblesse française fut toujours le patriotisme et l’honneur. La durée de vos pouvoirs est fixée à un an, à compter du jour de l’ouverture des Etats généraux. Il vous est expressément recommandé de faire aptoriser par les Etats généraux une assemblée de la noblesse de cette sénéchaussée par-devant ter quelle vous rendrez compte de l’usage que vous aurez fait des pouvoirs qui vous sont confiés. Cette assemblée aura lieu deux mois après la clôture desdits Etats généraux. Vous aurez soin de faire fixer par les Etats généraux la quotité des représentants que chaque ordre aura désormais dans les assemblées nationales, de manière que cette fixation devienne loi constitutionnelle. Clos et arrêté le 24 mars 1789. Signé Langhac, grand sénéchal ; Laqueville ; Lafayette ; Mascon ; Chabrol ; Cheminade de Lor-met ; Larochette d’Auger ; Begon de la Rozière ; Dupeyroux de Salmagne ; La Rochelambert-Lava-lette ; d’Espinchal ; Montagu de Reaune ; de Bosre-dont de Saint-Avit, commissaires. Molen de Saint-Poncey, secrétaire. Montboissier ; Montagu de Bouzols; Merle; Montagu ; Chabannes de Lapalisse ; Montagnac ; Gauthier de Lamblouët de Laboulaye ; Jouvenceau d’Allagnac ; Laroche-Lambert ; Peydière de Bois-sière ; Molette de Morangier-Dumas ; Duclaux de Lestoille ; Bouillé ; Sedades de Vaeheresses ; Navette de Chassignoles ; Navette, chevalier de Cas-signols ; Provenchères ; Du Crozet de Liât ; Molette de Morangier de Beissac ; Vergezac d’Aurat ; Laroche du Ronzet ; Cassaigne de Lots ; Benoît de Barante; de Saulzet ; chevalier de Saulzet; Gou-zel de Lauriac ; Cheminade ; Laizer de Brion ; Laizerde Montaigu ; La Grange ; Teillard ; Rochette deMalauzat; Ferrand de Fontorte; de Bar-de Bar de Murat ; Grangier de Lamothe ; Laval de Muratelle ; Laval ; Dulac du Cluzel ; Chardon de Nohannent ; Ducroc, chevalier de Brassac ; Rey-naud de Monlozier ; de Goy ; de Falvard de Bon-parent ; de Maumont ; Chalier de Pérignat ; Beau-franchet de Lachapelle; de Prad ; Bonnevie de Poigniat ; Montroignon, alias de Salvert ; Bosre-dont de Ligny ; Bosredont de Vatange ; Soubrany deBonnebaud ; Barbat-Duclozel du Cayre; Depons de Lagrange ; de Champs de Blot ; Peydière de Vèze ; Peydière; Labro de Montagnac; Devaulx-Lespi-nasse ; Rochefort de Pommort ; Pelacost de Peletet ; de Varennes de Boisrigaud ; Debaylle ; Rochelam-bert deChadieu ; chevalier de Pons de Lagrange ; Courtèlhe de Giat ; Lecourt de Saint-Aignes; comte de Tallobre ; Monboissier-Beaufort-Canilliac ; Lau-zanne ; Du Vallier ; Montroignon de Salvert ; Du Crozet; Boissieux de Bois-Noir ; Véalle du Blau ; Vallon du Bûcheron d’Ambrugeac; Ghampflour de la Roche ; Sampigny d’Efhat ; La Bastide ; Cathol du Deffan ; Luchapt Debaylle ; Riberolles du Moulin ; Henrion de Bussy ; Moré de Pont-Gibaux ; Des Aix de Rochegude ; Lomenie du Château ; Dienne de Saint-Kustache ; Dauphin de Leyval ; Chardon de Rochedagoux ; Mayet de la Vilatelle ; Lenormand de Flageat ; Dutour de Salvert; Beaufranchet de Relibost; Sampigny de Bussière ; Peghoux de Mardogne ; Froment ; An-drodias de Murol ; Boinville ; Saint-Giron ; Lastic; Ribeyrolles de Beaucenne; Du Montât; chevalier de Sampigny ; La Colombe de la Chapelle ; Méallet de Fargues; Grangier de Cordés ; Bonneval ; Verdalle ; Duchuy d’Arminières ; Daurelie des Cornais ; Varesnes de Bois-Rigaud ; Servières ; DesEscures ; Barbat du Closel de Quaire ; Montmorin de Saint-Herem; Talhandier de Lamberty; chevalier de Tremeuge; Nicolon de Guerines; La Chassignoles de Combalibœuf; L’Etang de Ghalandrat; Ver-dalle de Taury ; d’Estaing ; de La Roche-Lambert ; D’Alexandre, alias de Rouzat Froment de Champ-dumont ; Reboul du Sauzet ; Teyras de Granval ; Bouchard d’Aubeterre; Talhandier; Villelume; 50g [États gën. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] Meyras de la Grange ; de Combes des Morelles père; Du Crozet de Cumignat; Rodde de Ver-nières ; Matharel du Chcry ; Mourgue de la Fage ; de Frétât ; Aragonnès de Laval ; Aragonnès d’Or-cet ; Du Croc; chevalier Du Croc ; Cordebceuf de Montgon ; Aldebert de Seveyrac ; de Molen de la Vernede au Mas; La Salle ; Gombarel du Gibanel; Mallet de la Vedrines ; Vissac ; Douet ; Bourdeiiles ; Reinaud de Reauregard ; Rollet d’ Avaux ; Chabrol ; d’Aurelle de Champetières ; La Rochette de Roche-gonde ; Veau-Chaussade de Chaumont; La Velle de Maurissac ; Servières du Telliol ; Rourdeilles ; Autier de Ghazeton de Barmontel; Mallet de Ven-dègre; Bosredont-Vilvoisin ; Guérin de Valljeleix; Durant de Pérignat ; Rigaud de Ghapdes-Beaufort ; de Bonnevic de Poignat ; de Combes des Morelles; Rochette ; Des Aix de Veygoux ; de Panneveyre de Ternant ; de Panneveyre de la Jugie ; Forget ; de La Rochette de Sianne ; Sablon du Corail ; Du Saunier de Bansat; deVissaguet; Pradel deTremeuge des Chareyres; Auzerand de Bénistant de Pome-rols ; de Matharel du Chery ; de Benoît de Fonte-nilles ; Chassaignes du Bort deMontvianeix ; Ribe-rolles; Chassaigne de Franc-Séjour; Torrent; Riberolles des Horts ; de Grillon du Plessis ; Du Félix de Laizer ; Barentin de Montchal ; Du Fraisse de Vermines; de Veny d’Arbouze; Le Groing ; Velx, alias de La Roche; de Pouthe; d’Oradour ; Du Peyron de Bonne-Fou ; Du Crozet de Liât ; Du Li-gondès-Château-Bodeau ; Le Normand de Montper-tuy ; de Vertamy ; de Pons de Frugières. DISCOURS Prononcé par M. Malouet, chargé par la ville de Riom de porter ses cahiers à l'assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d'Auvergne, et instructions pour les députés du tiers-état aux Etats généraux, proposées par les députés de la ville de Riom (1). « Messieurs, « Appelé dans cette assemblée par la confiance dont m’honorent mes compatriotes , il m’est doux de reprendre, au milieu de vous, les fonctions de citoyen, qui me seront toujours plus sacrées qu’aucune autre. « Nous voici réunis, pour concourir, par nos instructions et par le choix de nos représentants, à la régénération de l’empire, au rétablissement de l’ordre et de la prospérité publique ..... Affligé par des calamités récentes, le peuple français souffre depuis longtemps des vices et des erreurs d’un gouvernement arbitraire, dans lequel la modération du prince ne suffît pas pour prévenir ni pour empêcher l’influence tyrannique des richesses, celle du crédit et de l’autorité. Tous les fléaux qu’entraînent à leur suite la cupidité, l’ivresse du pouvoir, l’orgueil de l’ignorance, ont accablé la nation sous le poids des impôts et des abus de tout genre ; le mal était au comble, le caractère national s’effacait, les ressources étaient épuisées ; mais il nous restait un Roi généreux, pénétré de l’étendue de ses devoirs, éclairé sur les désordres dont il gémissait. « Sa Majesté a pris le sage parti de nous lesdévoi-ler et d’appeler la nation à l’examen et à l’exercice de ses droits ..... C’est à nous maintenant, c’est à nous, représentants, à en user avec ce courage religieux et cette prudence éclairée qui peuvent seuls en assurer la stabilité. « Ne nous dissimulons pas, Messieurs, que le (1) Nous publions ce discours et le document qui suit d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. peuple a plus besoin d’être gouverné et d’être soumis à une autorité protectrice, qu’il n’a d’aptitude à la diriger. « Sans doute, il ne peut exister de bonheur public que lorsque la justice, les lumières et les succès du gouvernement maintiennent sa supériorité ; lorsqu’il la perd, lorsque des fautes ou des malheurs lui rendent indispensables les conseils et l’appui des peuples, l’intérêt général, le salut de tous nous commandent de nous rallier avec ordre et respect autour des grandes vérités sur lesquelles l’éternelle justice fonda la base de toute société. « La circonstance importante où nous sommes a développé toutes les idées publiques ; une grande masse de lumières s’est élevée autour de nous ; tous les voiles sont déchirés, on remonte à l’origine de toutes les institutions ; et quand on y est parvenu, quand c’est le peuple en corps, ou la partie éclairée de ce peuple, qui découvre et définit les pouvoirs et les distinctions qu’il a créés ou tolérés, l’agitation que produisent dans les esprits ces hautes pensées ne permet pas toujours de s’arrêter à ce qui est juste et utile. Au milieu de cette foule de maux, nés de l’état social, il est peu d’innovations qui ne paraissent être le vœu de la raison ; mais si nous sommes attentifs à sa voix, nous la trouverons toujours sévère, circonspecte et non inconsidérée dans ses mouvements. « C’est, Messieurs, cette raison supérieure à tous les talents, à toutes les séductions des plus nobles passions, qui doit diriger le zèle ardent dont nous sommes animés pour le salut de la patrie, — et le premier commandement que nous en recevons est l’unité de vues, de sentiments et d’intérêts, dans toutes les classes de la nation. — C’est à vous, qui en représentez la partie la plus nombreuse et la plus utile, à manifester les premiers ces sentiments de concorde, de justice et de modération, qui sont les signes les plus imposants de la force et de l’élévation, les précurseurs des bonnes lois et de la liberté légale à laquelle nous devons tendre. « Unissons-nous donc dans cette fin salutaire, unissons-nous donc avec cordialité aux chefs immédiats de nos tribus, au clergé et à la noblesse, dont nous devons croire les dispositions pour le bien général, aussi sincères et aussi pures que les nôtres. Vous venez d’en avoir la preuve par le discours de M. lesénéchal ; ces sentiments patriotiques, qu’il a si noblement exprimés, vous annoncent combien le respect pour les droits du peuple ajoute à l'éclat d’une haute naissance ; le premier officier de son siège vient de vous rappeler, avec autant de sensibilité que d’énergie, vos devoirs et vos droits : tout nous invite, Messieurs, à la réunion de nos vœux, de nos efforts et de notre zèle; tout nous annonce, après de longs malheurs, des jours purs et prospères. « Si la puissance royale est elle-même intéressée à l’extirpation des abus dont nous avons à nous plaindre, si l’inégale répartition des impôts, les privilèges exclusifs, les usurpations du crédit et de la faveur, les écarts de l’autorité, les mesures oppressives du fisc et de ses agents, nuisent de toutes parts à l’aisance, à la liberté, à l’industrie nationale, quel ordre dans le royaume, quel Français oserait, d’une main sacrilège, s’opposer à la réparation de tant de maux? Nous ne devons point le craindre; les fils aînés de la patrie seront sans doute ses plus zélés serviteurs : ou si quelques préjugés, quelques erreurs de principes ré-sisfent à vos justes réclamations, gardons-nous de