S90 [Étais gen. 1789. Cahiers.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlons-sur-Marne. PLAINTES, DOLÉANCES Et très-humbles supplications et remontrances du tiers-étât du bailliage de Châlons-sur-Marne , à résenler au Roi à la prochaine assemblée des tats généraux du royaume, du 27 avril 1789, dressées par les commissaires soussignés , nommés en l'assemblée générale des députés dudit iiefs-état , du 12 mars 1789, lues et arrêtées en celle du 23 du même mois (1). Sire, le tiers-état de votre bailliage de Châlons, pénétré de la plus vive Reconnaissance pour le double bienfait que la nation vient de recevoir de Votre Majesté par le rétablissement des Etats généraux et l’égalité de représentation entre les trois ordres de l’Etat, s’empresse de déposer ses très-humbles actions de grâces aüx pieds de Votre Majesté. Pour recueillir le fruit de ce bienfait, et répondre aux vues de sagesse et de bonté de Votre Majesté, le tiers-état de votre bailliage de Châlons a cru devoir moins s’occuper de retracer à Votre Majesté les maux dont son peuple est accablé, et les justes plaintes qu’il pourrait lui en porter, que de lui présenter les moyens qu’il croit propres à y remédier. Votre peuple, Sire, peut-il, en effet, douter que vous ne connaissiez toute l’étendue de ses maux? Pourrait-il douter de la sensibilité de Votre Majesté, après avoir vu tant de fois le doux épanchement de son cœur? Pourrait-il douter de son extrême envie de le soulager, en voyant tous les moyens qu'il prend pour y parvenir? Oui, Sire, notre confiance est sans bornes dans le monarque bienfaisant qui nous retrace la sensibilité et la bienfaisance de nos meilleurs rois; mais elle se fortifie encore quand nous voyons vos dispositions paternelles secondées par un sage qui sembie ne réunir les talents et les vertus des plus grands ministres que pour les faire tourner au bonheur de vos peuples et à la gloire de Votre Majesté. Cet esprit de justice et de sagesse qui, dans cet instant du salut et delà régénération de l’Etat, anime Votre Majesté, nous espérons, Sire, le retrouver dans les deux premiers ordres de la nation, si dignes de vous approcher par leur rang, si dignes de leur rang par leurs vertus. Le clergé et la noblesse, Sire, savent que le tiers-état, la portion la plu# considérable de la nation, ou plutôt qui la compose presque tout entière, gémit sous le poids d’impôts et charges publiques qui lui sont personnelles; il savent que tout ce que le clergé et la noblesse font pour l’Etat, le tiers y concourt avec eux dans la proportion de sa population, quoiqu’il n’y en ait aucune dans leurs possessions respectives ; que, dans tous les genres de services, le tiers-état est au rang le plus pénible; que surtout dans celui des armes, Rassure, par des Rots de son sang, les succès et la gloire dont jouit seule la noblesse. Le clergé et la noblesse savent encore que leurs biens sont immenses et leurs charges presque nulles. Ils nous voient accablés sous le poids des impôts ; ils voient l’Etat dans la détresse par le désordre et le déficit des finances, et ils sentent tout à la fois et la nécessité de venir à-son secours, et l’impossibilité comme l’injustice qu’il y aurait d’augmenter les charges du peuple. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé delà Bibliothèque du Sénat . Ils savent que si leürs biens et leurs facultés étaient assujettis à la contribution des impôts, les impôts s’accroîtraient pour l’Etat et diminueraient pour le peuple. A ces lumières se joignent le sentiment de l’équité et l’impulsion du patriotisme ; et déjà une portion considérable de ces deux ordres a, dans tout le royaume, renoncé à ses privilèges d’exemption. Dévouement bien naturel à un ordre aussi respectable par le ministère de charité et de bienfaisance qu’il exerce, que par les vertus qui J’en rendent digne ! Sacrifice qui consacre à jamais notre vénération pour une noblesse généreuse qui a tant de fois donné l’exemple de ce patriotisme, la vertu la plus digne d’elle, et qui dans les circonstances devient un besoin de l’Etat ! Un si généreux exemple, Sire, sera sans doute généralement suivi par les deux ordres. Gomment d’ailleurs pourraient-ils s’y refuser, puisque votre bonté les y invite, et que votre justice pourrait commandér ? Les grands objets qui, suivant les expressions mêmes de Votre Majesté, doivent occuper les prochains Etats généraux, sont : 1° La restauration des finances. 2° La réformation des abus. 3° L’établissement d'un ordre constant et invariable dans toutes les parties de l'administration qui peuvent intéresser le bonheur de vos sujets et la prospérité de votre royaume. Nous pensons, Sire, que, pour pouvoir traiter avec fruit et remplir avec succès tous ces objets, Votre Majesté doit commencer par donner aux Etats généraux le caractère de la stabilité, et assurer leur retour périodique, pour que la nation ne soit plus exposée à craindre l’abrogation d’un droit si précieux, et qu’elle puisse se rassembler souvent, et remédier plus facilement aux abus qui pourraient naître. Ensuite nous supplierons Votre Majesté d’organiser leur composition de manière que chaque ordre y ait une juste et libre représentation, et qu’ayant autant de voix que de députés (seule manière de jouir de la représentation dans toute son étendue), le tiers-état puisse aussi recueillir le fruit de cette égalité avec les deux autres ordres, que Votre Majesté lui aurait en vain accordé, si les voix se comptaient par ordre et non pas par tête. Enfin, Votre Majesté sera suppliée de déterminer le pouvoir des Etats généraux relativement aux impôts, aux emprunts et aux lois. Ces objets ainsi consentis et arrêtés, les Etats généraux pourront examiner l’Etat des finances, en constater le déficit, vérifier la dette de l’Etat et s’en charger, fixer ses charges et ses dépenses annuelles, réformer les impôts les plus désastreux, en substituer d’autres suffisants, mais plus simples et moins onéreux, et pour l’économie, charger de la répartition et de la perception les Etats provinciaux, qu’ils vous supplieront d’accorder. Ils doivent ensuite remonter aux causes du désordre, les proscrire et réformer les abus ; et pour que ces abus et leurs causes désastreuses ne renaissent pas, ils doivent, de concert avec Votre Majesté, faire des retranchements dans tous les objets de dépenses, y rétablir l’ordre et l’économie, et prendre les précautions nécessaires pour les assurer et les maintenir. , Portant encore leurs regards sur d’autres par� ties importantes de l’administration générale, les Etats généraüx proposeront à Votre Majesté les [États géh. 1789. Catiiérs.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Ghâlotis-süf-Maffle.l g9j réformes et les améliorations convenables dans chaque partie. L’agriculture, cette source première des vraies richesses, désolée parles impôts et par mille abus divers ; Le commerce, qui amène à l’Etat des richesses étrangères et fait valoir les siennes ; Les arts, qui font fleurir le commerce et multiplient les moyens de subsistance, en propageant l’industrie. Dans ces deux parties importantes, i’activité est presque étouffée sous la servitude ruineuse de la fiscalité ; L’administration de lajUstice, si nécessaire pour maintenir l’ordre an dedans, mais si compliquée par la diversité des tribunaux et par la multiplicité des officiers, si accablante par les longueurs, si ruineuse par les frais et par l’éloignement des cours souveraines, d’ailleurs trop Surchargées d’affaires ; Nos lois et notre jurisprudence civiles si défectueuses et si variables ; Notre jurisprudence criminelle assez injuste pour flétrir l’accusé avant de PaVoir condamné, pour ajouter à son Supplice les tourments affreux de la torture, pour le laisser sans secours pendant l’instruction Contre l’appareil imposant de la justice, pour livrer le coupable à des peines disproportionnées avec son crime, pour priver des enfants innocents des biens d’un père coupable; Un préjugé barbare qui enveloppe dans les flétrissures du condamné une famille irréprochable ; Un domaine autrefois la seule richesse du monarque et les seules ressources permanentes de l’Etat, aujourd’hui la proie de la cupidité, le modèle de l’instabilité dans les aliénations, sources trop fécondes de troubles et d’injustices contre les détenteurs ; un domaine immense, enfin, qui ne rapporte presque rien à Votre Majesté, et qui pourrait être employé très-utilement au soulagement de l’Etat ; La violation de la liberté par de trop fréquents abus de l’autorité et les moyens d’éclairer ces abus, de démasquer les vices et de propager la lumière, étouffés sous la gêne de la presse. Un clergé assez opulent pour soulager le peuple en contribuant aux impôts et pour venir au secours de quelques-uns de ses membres les plus intéressants et les plus respectables, et ces dignes pasteurs trop longtemps négligés, trop longtemps victimes de l’inégale et injuste répartition des biens de l’Eglise ; Enfin, en descendant de l’intérêt général de l’Etat à celui de notre province, les Etats généraux verront la Champagne trop surchargée d’impôts, privée d’une cour souveraine, et pressée du besoin de voir ses manufactures encouragées, ses bois ménagés, l’agriculture favorisée, les entraves qui gênent son commerce et son industrie levées. C’est, Sire, sur ces idées et sur ce plan que le tiers-état de votre bailliage de Châlons ose supplier Votre Majesté d’accorder et ordonner aux prochains Etats généraux, comme loi constitutionnelle : Art. 1er. Le rétablissement à perpétuité des Etats généraux. Art. 2. Qu’ils seront à l’avenir convoqués et assemblés périodiquement tous les trois ou cinq ans. Art. 3. Qu’ils ne pourront jamais être composés que des trois ordres : du clergé, de la noblesse et du tiers-état. Art. 4. Que les députés du tiers-état y seront toujours au moins en nombre égal à ceux des deux autres ordres réunis. Art. 5. Que les députés de chaque ordre ne pourront être pris que dans l’ordre même. Art. 6. Que chaque ordre composant lesdits Etats généraux pourra s’assembler séparément, sous la présidence d’un orateur qui ne sera choisi que dans son ordre. Art. 7. Qu’aüxdits Etats généraux les voix seront prises par tête et non par ordre. Art. 8. Qu’à l’avenir toutes les nominations graduelles qui auront lieu poür parvenir à l’élection des députés à envoyer aux Etats généraux, seront faites au scrutin. Art. 9- Qu’aux Etats généraux seuls appartiendra le droit d’accorder les impôts, de consentir aux emprunts, et de Sanctionner les lois. Art. 10. Que les impôts n’y seront jamais Consentis que pour un temps limité. Art. 11. Que pour pouvoir constater le déficit actuel dans les finances, le besoin d’un secours extraordinaire à accorder pour l’instant, et déterminer la quotité de l’impôt à lever par la suite pour subvenir aux charges et dépenses annuelles de l’Etat, il sera représenté aux Etats généraux : 1° Un état exact de la dette nationale ; 2° Un semblable état de toutes les charges et dépenses annuelles de l’Etat; 3° Un autre état du produit des impôts et autres impositions généralement quelconques , actuellement subsistantes. Art. 12. Que la dette ainsi reconnue sera acceptée par les Etats généraux comme dette de la nation, pour être acquittée sur le produit des impôts, dont une partie sera même spécialement affectée à des remboursements annuels. Art. 13. Qu’ayant de déterminer la quotité de l’impôt, et pouf aider à sa diminution, on aura recours à des retranchements et à une sage économie dans toutes les parties de l’administration. Art. 14. Que, pour tous les objets de dépenses de la maison de Votre Majesté, de Celle de la Heine et de la famille royale, Votre Majesté voudra bien accepter une somme annuelle qu’elle déterminera elle-même. Art. 15. Que dans toutes les parties de l’administration il ne subsiste que des emplois indispensables, payés dans une juste proportion avec le travail et l’utilité. Art. 16. Que les pensions et les gratifications dans toutes les parties ne seront accordées à l’avenir qu’aux vrais services rendus à l’Etat ; que la liste en sera annuellement rendue publique par la voie de l’impression, et que les causés qui les auront fait accorder y seront énoncées. Art. 17. Qu’il sera représenté aux prochains Etats généraux un état exact des pensions qui subsistent actuellement, afin qu’elles puissent être modérées ou retranchées sur le degré de services des pensionnaires. Art. 18. Qu’à Uaveoir ii ne sera payé par le trésor royal aucunes sommes pour dépenses étrangères aux affaires de l’Etat. Art. 19. Que le ministre des finances sera tenu de rendre public tous les ans, par la voie de l’impression, le compte de son administration par articles détaillés de recettes et de dépenses. Art. 20. Que tous les comptes seront présentés à chaque assemblée des Etats généraux, et qu’euX seuls pourront les arrêter valablement et en donner une décharge légale au ministre. Art. 21. Qu’il n’y aura aucune commission intermédiaire dans Uintervalle des assemblées des Etats généraux, et que tous îes pouvoirs que l’on pourrait donner à une telle commission sêrôiît 592 i Étas gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Chàlons-sur-Marne.] réservés aux Etats provinciaux, qui seront établis dans chaque province. IMPOTS A RÉFORMER ET A REMPLACER. Art. 1er. Qu’il plaise à Votre Majesté supprimer les tailles, taillons, accessoires de la taille, l’im-pôt représentatif de la corvée, les vingtièmes et les aides, et ordonner le remplacement de tous ces impôts : 1° Par un impôt territorial qui se percevra en nature sur les fruits des terres, prés et vignes, savoir : pour les terres et prés, sur la place même, et pour les vignes, ainsi qu’il sera expliqué à l’article 3 ci-après ; 2° Par un impôt qui se percevra en argent sur les autres espèces de biens, comme bois, rivières, étangs, prés et marais en pâture, maisons, parcs, jardins, vergers, moulins, bâtiments, forges, verreries et autres usines généralement quelconques ; comme aussi sur le produit des biens incorporels, tels que rentes foncières, féodales et autres profits de fiefs annuels ; 3° Par une capitation qui se percevra sur tous les sujets de Votre Majesté indistinctement, à l’exception des laboureurs et des vignerons ; 4° Par une industrie sur les banquiers, commerçants, artisans, et généralement sur toutes les personnes qui y ont été assujetties jusqu’à présent, à l’exception néanmoins des manouvriers des campagnes et journaliers des villes qui n’auraient d’autres ressources que leurs bras, et qui seraient, ou chargés de six enfants en bas âge, ou infirmes, ou âgés de soixante ans, le tout d’après l’avis des municipalités ; 5° Par un droit, une fois perçu, sur tous brevets de pensions et provisions d’offices, dignités et emplois. ♦ Art. 2. Que l’impôt territorial sur les terres et prés sera perçu avant toute espèce de dîmes et terrages. Art. 3. Quant aux vignes, qu’il sera perçu sur les vins dans les celliers, immédiatement après les vendanges, et aussi avant toute espèce de dîmes. Art. 4. Qu’à l’instant où l’impôt territorial commencera à être perçu, les propriétaires des biens affermés seront tenus d’indemniser leurs fermiers, si mieux n’aiment ces derniers résilier leurs “baux. Art. 5. Que les débiteurs de rentes retiendront annuellement à leurs créanciers le dixième de la rente. Art. 6. Qu’il plaise également à Votre Majesté supprimer les gabelles et traites de l’intérieur, et ordonner le remplacement de ces impôts : 1° Par des traites qui seront reportées aux frontières, et qui consisteront en des droits modérés sur les objets d’importation ou d’exportation, droits qui seront réglés sur la balance du commerce, et le plus ou moins d’intérêt qu’aura la nation à les hausser et baisser, plutôt pour l’avantage de son propre commerce que pour l’intérêt du fisc. 2° Par un impôt sur le sel, qui se percevra dans les salines, et qui sera tel, que le prix de la livre de sel, qui sera rendu marcliand, ne pourra excéder six ou sept sols aux plus grandes distances, lequel sel ne pourra être tiré des magasins qu’a-près y être resté le temps prescrit par les règlements, et sera soumis à l’avenir à l’inspection des juges des lieux pour en prévenir l’altération. Art. 7. Que les droits sur les huiles, savons, cuirs, cartons, papiers, amidons, et sur les fers, seront supprimés, et trouveront leur remplacement dans l’industrie sur les fabricants et commerçants. Art. 8. Que tous les impôts ci-dessus seront communs à toutes les provinces du royaume, nonobstant tous privilèges, qui demeureront supprimés. Art. 9. Que les trois ordres du clergé, de la noblesse et du tiers-état seront également assujettis à l’impôt territorial en nature et argent, à la capitation, dont il ne sera fait qu’un seul et même rôle pour les trois ordres, et que tous privilèges pécuniaires, de quelque nature qu’ils soient, relativement à l’exemption des impositions et charges publiques, à quelques provinces, ordres,. villes, corps ou particuliers qu’ils appartiennent, seront irrévocablement supprimés. Art. 10. Que le gouvernement ne pourra à l’avenir mettre aucun des impôts ci-dessus en fermes ou régies, et qu’il ne pourra être fait, pour aucun desdits impôts, aucuu abonnement général par le gouvernement à aucune province, ni par aucune province à aucune ville, bourg, village, ordre, corps ou particuliers. Art. 11. Que toutes les charges et dépenses de l’Etat, soit générales, comme les corvées, soit particulières à des provinces, villes ou cantons, comme ponts, casernes, hôpitaux, édifices publics, dans le cas où le gouvernement vient à leur secours, seront acquittées avec les impôts ci-dessus, sans qu’on puisse jamais en lever de particuliers pour ces objets. Art. 12. Que les droits de francs-fiefs et nouveaux acquêts du centième denier en collatérale seront supprimés. Art. 13. Qu’il sera dressé dans chaque bailliage un état exact du domaine réel de Votre Majesté; qu’il sera déclaré par Votre Majesté et les Etats généraux aliénable, et comme tel, vendu, et le prix employé au payement des dettes de l’Etat; et qu’au cas où il ne plairait pas à Votre Majesté d’en ordonner ainsi, qu’à l’avenir il n’en sera fait aucune vente ou échange sans le consentement des Etats généraux. Art. 14. Qu’il sera accordé aux Etats généraux la faculté de reviser les anciennes aliénations par voie de vente, échange ou autrement, pour pourvoir à la lésion qui aurait pu en résulter. Art. 15. Qu’il sera accordé à vos sujets la faculté de racheter, à tel denier qu’il plaira à Votre Majesté de déterminer, les droits de stellage, minage, mesurage, portage, halage, péage, et tous autres de pareille nature, ensemble les mainmortes, les banalités, les corvées réelles, personnelles et mixtes, à tels seigneurs que ces droits puissent appartenir, même à Votre Majesté, ainsi que les censives, les carilés non seigneuriales , dues tant à Votre Majesté, qu’aux corps et communautés ecclésiastiques , fabriques, hôpitaux et autres gens de mainmorte. Art. 16. Que toutes les loteries généralement quelconques seront abolies, comme ruineuses pour votre peuple. ADMINISTRATION DE LA IUSTICE, LOIS CIVILES ET CRIMINELLES, LIBERTÉ DES CITOYENS ET DE LA PRESSE. Art. 1er. Qu’il sera établi dans chaque province une cour souveraine dans le chef-lieu de la généralité. Art. 2. Que l’administration de la justice dans tout le royaume sera remise entre les mains de Votre Majesté, par la suppression des justices seigneuriales et des justices ecclésiastiques, tant en matière civile que criminelle, même entre ecclésiastiques, sauf l’indemnité des seigneurs, s’il y a lieu. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlons-sur-Marne.] 593 Art. 3. Que tous les tribunaux d’exception et d’attribution, tant en première instance qu’en dernier ressort, en matière civile, Criminelle ou d’impôts, seront supprimés, et les finances remboursées par l’Etat. Art. 4. Qu’il sera établi, dans chaque ville et bourg considérable, un seul et unique tribunal, auquel on circonscrira un arrondissement, et qui connaîtra en première instance, et sauf l’appel à la cour souveraine, de toute matières, même de celles d’impôts, excepté celles du commerce, et qu’il sera composé d'un nombre de juges proportionné à l’étendue de son arrondissement. „ Art. 5. Que toute espèce de committimus, lettres de garde gardienne et autres privilèges attributifs de juridiction seront supprimés à tels corps, tribunaux ou particuliers qu’ils puissent appartenir, même celui du scel au Châtelet et de toutes les universités. Art. 6. Qu’il n’v aura dans chaque village de l’arrondissement qu’un commissaire pour les matières de police et de délits, dont il dressera de simples procès-verbaux qu’il renverra sur-le-champ au tribunal du ressort pour y être pourvu, qui recevra le serment des gardes messiers, apposera les scellés, fera les créations de tutelle, curatelle, avis de parents, et autres actes d’hôtel. Art. 7. Que la vénalité des charges de judicature sera abolie, et que la finance des charges supprimées sera remboursée par l’Etat. Art. 8. Que les juges, tant des cours souveraines que des tribunaux inférieurs, seront honorablement gagés ; en conséquence, que leurs fonctions seront gratuites et leurs offices néanmoins inamovibles. Art. 9. Que le droit de choisir les membres de ces tribunaux appartiendra à Votre Majesté, sur la présentation qui lui sera faite par les communes de trois sujets pris parmi les avocats qui-auront exercé près d’un tribunal pendant un temps déterminé, et recommandables par leur savoir et leur intrégritê. Art. 10. Que les cours souveraines ne pourront être composées que d’anciens magistrats tirés des tribunaux inférieurs, sur la présentation que les Etats de la province feront à Votre Majesté de trois sujets, parmi lesquels elle choisira. Art. 11. Que toutes les charges de judicature et de finance, même celles de chancelleries donnant la noblesse, seront supprimées. Art. 12. Que le nombre des notaires, procureurs et huissiers sera réduit dans la proportion des besoins de leurs arrondissements, réduction qui ne s’opérera néanmoins que par le décès du titulaire, aux héritiers duquel la finance de l’office supprimé sera remboursée par l’Etat. Art. 13. Que dès à présent les receveurs des consignations, les commissaires auxsaisies réelles, les huissiers-priseurs, les greffiers des experts seront supprimés, et qu’en conséquence les dépôts des deniers de justice seront faits entre les mains des notaires ou greffiers, sans frais ; que les ventes de meubles seront exemptes de tous droits, et que les experts pourront rédiger eux-mêmes leurs procès-verbaux, qu’ils seront tenus de déposer au greffe du tribunal qui les aura commis. Art. 14. Qu’il sera fait un règlement pour prévenir les frais et la longueur des procédures ; en conséquence, que tous les droits de scel, présentation, contrôle, droits réservés et autres généralement quelconques, qui se perçoivent sur les actes de justice contentieuse, seront supprimés, et que tout procès sera terminé dans l’année. Art. 15. Qu’il sera dressé un nouveau tarif pour lre Série, T. II. Jes droits de contrôle, centième denier et insinuation, dans lequel les citoyens et les contrats seront classés de manière à ne plus prêter à l’arbitraire. Que ce tarif sera déterminé sur les sommes et qualités. Que toute interprétation en sera défendue. Que toute recherche ultérieure sera interdite, sous quelque prétexte que ce soit, après que l’acte aura été contrôlé. Art. 16. Que la connaissance de l’exécution de ce tarif sera attribuée aux juges ordinaires, lesquels jugeront sur simple mémoire, sans frais ni amende, sauf l’appel à la cour souveraine, où l’instruction se fera aussi sans frais ni amende. Art. 17. Que, pour remédier à la confusion de nos lois civiles, il sera dressé une loi générale ui sera le véritable droit commun du royaume, roit auquel les coutumes et la jurisprudence particulières à chaque pays feront seules exception. Art. 18. Que ces coutumes et cette jurisprudence seront enfin recueillies et confirmées d’une manière aussi authentique qu’invariable. Art. 19. Que notre jurisprudence criminelle sera réformée, et notamment que l’usage de la sellette et de la question sera aboli ; qu’il sera donné un conseil aux accusés après le premier interrogatoire ; que le surplus de l’instruction sera fait sous l’assistance et en présence du conseil de l’accusé ; que les peines seront mitigées et les confiscations abolies. Art. 20. Qu’il sera pourvu, par les moyens les plus convenables, à détruire l’injuste préjugé qui fait rejaillir sur une famille entière la flétrissure d’un de ses membres. Art. 21. Que la liberté individuelle de chaque citoyen sera rendue sacrée et inviolable par l’abolition des lettres de cachet. Art. 22. Que la liberté de la presse sera accordée. j CLERGÉ. Art 1er. Qu’il sera pourvu à l’acquit des dettes du clergé, tant en principal que rentes. Art. 2. Que pour les rentes, elles soient acquittées concurremment avec la dette nationale et sur les impôts publics, si le clergé consent à contribuer avec le tiers-état aux impôts quelconques sur ses biens et facultés, sans distinction ni privilège, et pour le remboursement des capitaux par les moyens et ainsi qu’il suit. Art. 3. Que, pour faciliter ces remboursements, tous les bénéfices simples à la nomination du Roi, d’un revenu de deux mille livres et au-dessus, déterminé d’après les derniers baux, seront mis pendant trois ans en économat à chaque vacance. Art. 4. Que les annates des bénéfices qui v sont sujets ne seront plus payées à la cour de Rome, et qu’elles seront employées au même objet. Art. 5. Que l’on s’occupera des moyens d’empêcher de sortir du royaume les sommes qui se versent annuellement à la cour de Rome, pour provisions, dispenses, . etc., et qu’elles seront aussi employées au même objet. Art. 6. Qu’après l’extinction des dettes du clergé, le produit des annates, provisions, dispenses, etc., sera versé au trésor royal pour les besoins de l’Etat. Art. 7. Qu’il sera permis aux gens de mainmorte de placer leurs fonds à constitution sur les particuliers, pour l’utilité du commerce. Art; 8. Que la retenue du dixième, qui se fait ordinairement sur les ventes des bois appartenant aux communautés d’habitants en faveur 38 594 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlons-sur-Marne. des pau vres communautés religieuses, n’aura plus Jteii. Art. 9. Que, pour régler tout ce qui a rapport à la discipline ecclésiastique, il sera ordonné un concile national, dont le retour sera périodique. Art. 10. Qu’il sera pourvu à la réduction du trop grand nombre de fêtes et jours fériés comme nuisibles surtout à la classe la plus indigente du peuple. Art, U. Que les canons et règlements qui prescrivent la résidence des bénéficiers, et défendent la pluralité des bénéfices, seront ponctuellement exécutés. Art-12. Que les petits bénéfices simples, comme chapelles et prébendes collégiales, seront conservés comme étant des ressources pour les familles. Art. 13. Que, pour posséderun canonieat, il faudra ayoir exercé pendant quinzeans dans le ministère. Art. 14. Qu’il sera donné aux curés et vicaires des revenus suffisants et relatifs à la population de leurs paroisses, et qu’il y sera pourvu par la réunion des biens des bénéficiers autres que ceux énoncés en l’article 12 ci-dessus, au moyen de quoi le casuel sera supprimé, et il sera interdit aux curés de faire aucun commerce ni de prendre aucune ferme, même celle des dîmes. Art. 15. Que chaque annexe et succursale aura son titulaire particulier lorsque les habitants le demanderont, et que les Etats provinciaux l’auront approuvé. Art. 16. Que k construction et l’entretien des presbytères seront à la charge du clergé. Art. 17. Que l’émission des vœux en religion, pour l’un et l’autre sexe, ne pourra se faire avant l’âge de vingt-cinq ans. Art. 18. Que toutes les maisons religieuses de l’un et de l’autre sexe, où il n’y aura pas dix sujets, seront supprimées, et leurs biens mis en économat pour l’acquit des dettes du clergé, dotation des curés et vicaires, construction et entretien des presbytères, etc., à l’exception néanmoins des maisons religieuses qui se trouveront seules dans les petites villes et gros bourgs, à la charge par les religieux, comme condition expresse de leur conservation, d’ouvrir un cours gratuit d’études et d’instruction. Art. 19. Que les bénéficiers seront tenus d’entretenir les baux faits par leurs prédécesseurs, au moins pour la récolte des terres que le fermier actuel aurait labourées ou ensemencées. NOBLESSE ET SERVICE MILITAIRE. Art. 1er. Que la noblesse continuera de jouir de toutes les distinctions honorifiques qui lui sont propres, à l’exception des privilèges pécunaires auxquels une partie considérable de cet ordre a déjà renoncé par cet esprit de générosité qui lui est si naturel. Art. 2. Que, pour en assurer et en conserver l’éclat, elle ne sera plus le prix de la vénalité, mais celui des vrais services rendus à l’Etat dans la profession des armes, la magistrature, dans le commerce, les sciences et les beaux-arts. Art. 3. Que néanmoins l’injuste et humiliante distinction qui éloigne le tiers-état des grades militaires disparaîtra à jamais devant le mérite et les vrais services ; en conséquence, que la déclaration de 1784 soit révoquée, et celle de 1750 rétablie. ADMINISTRATION PARTICULIÈRE A LA CHAMPAGNE. Le tiers-état de votre bailliage de Ghâlons supplie Votre Majesté de prendre en considération que la province de Champagne est de toutes les provinces du royaume la plus surchargée d’impôts , proportionnellement à sa population et au produit de son sol, étant démontré que la somme de ses impôts excède celle de son produit ; d’où suit la nécessité, quelque parti que Votre Majesté prenne sur les impôts, de lui accorder une juste diminution. Pour que cette province puisse faire elle-même la répartition de ses impôts avec justice, et la perception avec le moins de frais possible, et que Votre Majesté puisse y voir, comme elle le désire, augmenter la population et l’aisance de ses habitants, en favorisant l’agriculture, le commerce et les arts, le tiers-état supplie Votre Majesté d’accorder et ordonner : Art. 1er. Que la province de Champagne sera érigée en Etats provinciaux organisés comme ceux du Dauphiné, et avec les mêmes pouvoirs pour la répartition et la perception des impôts. Art. 2. Qu’il n’y aura qu’un seul receveur des impositions dans chaque chef-lieu de département, et que celui qui sera établi près les Etats provinciaux sera en même temps le receveur général de la province, et versera directement au trésor royal. Art. 3. Que la cour souveraine, dont on a demandé l’établissement pour chaque province, aura son siège à Ghâlons, centre de la province et chef-lieu de la généralité. Art. 4. Que les entrées et octrois dans les villes seront supprimés, ou au moins modifiés et simplifiés, et que les municipalités ne pourront en obtenir sans le vœu des communes assemblées et autorisées par les Etats provinciaux. Art. 5. Que les comptes de tous les établissements publics seront chaque année rendus publics par la voie de l’impression ; qu’il ne sera fait aucune levée de deniers pour le secours des établissements de charité, qu’elle n’ait été accordée par les commuues. Art. 6. Que dans chaque ville considérable de la. province, if y aura des greniers publics toujours remplis et fournis au compte de sa municipalité. Art. 7. Que le régime des eaux et forêts sera mis sous l’administration des Etats provinciaux, le contentieux réservé aux juges ordinaires; que le nombre des usines à feu sera diminué à cause de la rareté extrême des bois dans cette province, et que la plantation en sera encouragée. Art. 8. Que le génie des ponts et chaussées ne sera plus employé dans cette province, et que les Etats provinciaux seront autorisés à supprimer les grandes routes qu’ils jugeront inutiles, et à en former d’autres qu’ils jugeront nécessaires. Art. 9. Que les privilèges exclusifs des messageries seront révoqués et supprimés, comme nuisibles à la liberté des citoyens et à la facilité du commerce. Art. 10. Que le tirage de la milice sera fait au moins de frais possible, et que tous les domestiques, même ceux des ecclésiastiques et des nobles, y seront assujettis, à la réserve d’un domestique par chaque ecclésiastique attaché au ministère, par chaque gentilhomme un domestique par chaque charrue, et un domestique vigneron, à raison de dix arpents de vignes; si mieux n’aiment les garçons sujets au sort fournir à leurs frais des hommes au Roi : Art. 11. Qu’il n’y ait aucune exemption pour le logement des gens de guerre, même pour le clergé et la noblesse, si ce n’est pour les ecclésiastiques, curés, vicaires, militaires en activité, et les femmes veuves et les filles tenant seules leur ménage. [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlons-sur-Marne.] 59£> Art. 12. Que les règlements sur la mendicité 5 seront strictement exécutés; que les pauvres seront nourris par leurs communautés, et que dans les cas où ils mendieront hors de leurs communautés, ils seront arrêtés’ et enfermés dans les maisons de force. Art. 13. Que, pour l’encouragement dp l’agriculture en Champagne, les haras seront supprimés dans la province. Art. 14. Que, pour la conservation des fruits de la terre, il sera pourvu, par des règlements, à la trop grande multiplication du gibier et animaux nuisibles aux empouilles» Qu’en conséquence toutes garennes sans titres seront détruites ; que les seigneurs qui auront le droit d’en conserver, seront tenus de dédommager les cultivateurs des dégâts que les lapins. auront pu causer, et qui pourront être constatés par une simple visite faite avant les moissons, à l’effet de quoi les arrêts des 21 juillet 1778 et 15 mai 1779 seront révoqués. Que, pourempêcherlamultiplication despigeons et les inconvénients qui en résultent, les Etats provinciaux seront autorisés à déterminer la quantité d’arpents de terre nécessaires pour avoir une volière, relativement à la qualité du sol de chaque pays. Art. 15. Que, pour favoriser le commerce en Champagne, il sera pourvu aux moyens les plus propres à faciliter la navigation sur les rivières qui traversent cette province, et particulièrement sur la rivière de Marne* Art. 16. Que tous droits de rivières, péages et autres de pareille nature seront supprimés, sauf l’indemnité en faveur des seigneurs. Art. 17. Qu’il sera accordé à cette province la liberté indéfinie du commerce et de l’exercice des arts et métiers. Art, 18. Que les manufactures seront encouragées, et que l’on ne choisira pour les inspecter que des fabricants intelligents et honnêtes. Art. 19. Qu’il sera établi, dans chaque ville considérable de la province, une caisse pour faciliter le commerce et détruire l’usure. Art. 20. Que les poids et mesures seront uniformes dans tout le royaume, au moins dans chaque province. Art, 21. Que la compétence des juridictions consulaires soit établie dans l’état’ où elle était avant la déclaration du 17 avril 1759, et même augmentée, s’il se peut, à raison de l’augmentation de la valeur du numéraire. Art. 22. Que l’on n’accorde aucun arrêt de surséance ni lettres de répit en matière de commerce. Art. 23. Que les règlements concernant les charlatans et les empiriques seront renouvelés et suivis. Art. 24. Qu’il ne sera permis à aucun chirurgien de s’établir dans les campagnes qu’après un examen fait par ceux qui doivent y procéder aux termes des règlements, et en présence du procureur du Roi du siège du ressort, et sur un certificat des examinateurs et du magistrat. Telles sont, Sire, les plaintes et doléances et et les très-humbles Supplications et remontrances que le tiers-état de votre bailliage de Ghâlons a l’honneur de présentera Votre Majesté et auxquelles il vous supplie d’avoir égard et faire droit suivant les vues de votre sagesse et les sentiments de votre bonté paternelle. Fait et rédigé par nous , commissaires soussignés , 4n la Salle d’audience du bailliage royal de Châlons, en seize vacations , les 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20 et 21 mars 1789 ; sur les cahiers des plaintes et doléances des communautés dudit bailliage , réunis par leurs députés composant l’assemblée géneraleduâit bailliage dudit jour 12 mars ; signé en fin . Thomas , Billy, Gharlier, Folias, Pïcart, Hachetté, Coque-taux, Barbat, Gamiat, Savetier, Gobillart, Marguet, A.-L. Grojean, Joly, de Beaumont, Ghoizy, Sab-hathier, de La Cour, Huguet, P. Loehet, Cellier, Lalire, Degaulle, Prieur, Martin, procureur du Roi, et Bremont, lieutenant-général, Présentées , lues et arrêtées en l’assemblée générale du tiers-état du bailliage de Châlons, tenue en l’église du collège , le lundi 23 mars 1789, par nous , Charles-Jean-Bremont, conseiller du Roi, lieutenant général au bailliage et siège présidial de Châlons , président , en présence du procureur du Roi audit siège , suivant le procès-verbal dudit jour , et ont les députés , composant ladite assemblée , signé en grand nombre , les signatures desquels députés se trouvent en fin au nombre de 246, Pour copie collationnée et délivrée conforme à l’original des présentes par moi, greffier en chef au bailliage et siège présidial de Châlons-sur-Marne, soussigné. Signé SOULLIÉ. CAHIER ' Des plaintes et doléances du tiers-état dé lâ ville de Châlons, remis à MM> Pierre-François Richard et Jean-Baptiste Jourdain, élus députés aux prochains Etats généraux pat l’ordre du tiers-état du bailliage royal , le 10 mars 1789 (1). Le tiers-état de la ville de Châlons ne séparera pas, dans ses doléances, sa cause d’avec celle du reste du tiers-état du royaume ; l’intérêt général de l’Etat étant son objet le plus cher , il désire ardemment que tous les intérêts particuliers s’y réunissent et s y Confondent. Habitant d’une ville franche et conséquemment privilégiée, le premier acte de patriotisme dont le tiers-état de cette ville pourrait offrir l’hommage à l’intérêt public, serait le sacrifice de ses privilèges, s’il pouvait être de quelque utilité générale, et de demander à contribuer aux impôts et charges publiques dans la plus parfaite égalité avec le reste du tiers-état, ou plutôt avec tous les ordres de l’Etat, relativement à ses propriétés, ses facultés, son commerce et son industrie. Il se contentera seulement d’observer, pour l’intérêt particulier des citoyens de cette ville, qu’outre les charges communes avec le tiers-état, ils sont encore grevés en particulier de l’entretien des murs, fossés, ponts, portes et pavés de la ville, d’une garnison qui n’est pas casernée , et d’une foule de passages de troupes» Que les deniers patrimoniaux de la ville n’étant pas suffisants pour toutes ces charges, elle est obligée de recourir à des octrois considérables aux entrées, aux passages, au détail, lesquels enchérissent les denrées de consommation, nuisent à la circulation générale des objets de commerce, et détruisent pour la ville eh particulier tous les genres de ressources. Que plusieurs seigneurs jouissent dans cette ville de droits extrêmement nuisibles au commerce des grains en particulier , tels que celui d’instituer des mesures au porteur aux bateaux et autres, dont Userait avantageux que la commune pùt être autorisée à faire le rachat. Qu’enfinla police est tellement divisée en cette (1) Nous publions te tahier d’après un imprimé de la . Bibliothèque du Corps législatif .