460 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES S 9 nivôse an II \ 29 décembre 1793 gion de vos commissaires Saint-Just et Lebas; s’ils ne peuvent jouir pour cette fois du spec¬ tacle touchant de l’allégresse publique, qu’il leur soit au moins permis d’offrir leur tribut aux mânes des défenseurs de la liberté. Rece¬ vez, citoyens représentants, une somme de trois cents livres pour les familles de ceux qui ont péri devant Toulon. ÜABOCET; BiLLECARD; IlARLAUT; Rol-lin l’aîné; Rollin le jeune; L. Saul-nier; Mouret; C.-F. Sonnint; Renard. Compte rendu du Moniteur universel (1). Mallarmé-Saint-Just et Lebas, représentants du peuple, commissaires dans le département du Bas-Rhin, ont envoyé à la maison de la Force à Paris, les administrateurs des directoires de la Meurthe, pour répondre de leur adminis¬ tration au comité de sûreté générale. Ces admi¬ nistrateurs sans-culottes, choisis et nommés par Soubrany et Milhaud, ont été dénoncés par les administrateurs des subsistances, qui, crai¬ gnant de l’être eux-mêmes, devancèrent les effets de l’opinion que l’on avait d’eux. A peine les patriotes, pour qui je vous parle, furent-ils informés du mandat d’arrêt lancé contre eux, que, forts de leur innocence, ils se rendirent à Paris au comité de sûreté générale; de là, ils allèrent se constituer prisonniers à la Force. Ils languissent depuis dans les fers, leur arresta¬ tion date de la fin de brumaire. Je vous affirme, citoyens, que les adminis¬ trateurs de la Meurthe sont de bons patriotes, qu’ils se sont toujours bien conduits. Je suis certain que la religion de Saint-Just et Lebas a été surprise. Je ne viens point vous demander ici l’élargissement provisoire de ces détenus; dès qu’ils sont administrateurs et soupçonnés, il faut que leur conduite soit scrupuleusement examinée. Je vous propose, en conséquence, de décréter que le comité de sûreté générale fera, sous huitaine, un rapport sur cette affaire. Un autre objet m’a fait prendre la parole. Les administrateurs de la Meurthe, que leur détention ne rend point indifférents aux succès des armes de la République, ont formé entre eux, en apprenant les nouvelles de Toulon, une somme de 300 livres qu’ils m’ont chargé de vous offrir; ils la destinent aux femmes et aux enfants des vainqueurs de Toulon, qui n’ont pas survécu à leur triomphe. Philibert Simond. Des dénonciations men¬ songères ont également surpris nos collègues sur les administrateurs de Strasbourg qui ont été incarcérés, et qui cependant avaient été épurés par des représentants du peuple. J’en connais dans le nombre qui sont aussi purs que qui que ce soit. Un surtout pouvait si peu être regardé comme un ami des Autrichiens, qu’au moment de sa destitution, l’ennemi assassinait ses parents sur la frontière. J’appelle encore l’attention de la Convention nationale sur ce fait. Mallarmé. Je tire la preuve de ce que j’ai avancé d’une lettre écrite aux administrateurs de la Meurthe par le comité de Salut public. (1) Moniteur universel [n° 100 du 10 nivôse an II (lundi 30 décembre 1793), p. 404, col. 1.] Mallarmé lit cette lettre. Elle porte que les derniers arrêtés révolutionnaires, pris par le département de la Meurthe, ne peuvent qu’être très utiles, par la sévérité des mesures qu’ils contiennent, pour intimider les ennemis de la liberté. La Convention renvoie ces deux objets aux comités de Salut public et de sûreté générale. Elle accepte l’offrande des administrateurs de la Meurthe, et en ordonne la mention hono¬ rable au procès-verbal. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités de législation et des finances [Merlin (de Douai), rapporteur (1)] sur la dénonciation qui lui a été faite, le 4 bru¬ maire dernier : « 1° D’un jugement du tribunal de cassation, du 17 août 1793, par lequel avait été annulé un jugement du tribunal criminel du départe¬ ment de Paris, du 15 juin précédent, portant condamnation à huit années de fers contre Antoine Maurel, commissaire des guerres, accusé d’avoir, à l’aide d’un faux mandat, volé une somme de 600,000 livres à la trésorerie nationale, le 4 avril dernier; « 2° D’un jugement du tribunal criminel du département de Seine-et-Oise, qui, en consé¬ quence du renvoi prononcé par le tribunal de cassation, a acquitté l’accusé; « Considérant que, d’après la loi, en forme d’instruction, du 29 septembre 1791, le tribunal de cassation n’aurait pu légitimement annuler le jugement du tribunal criminel du départe¬ ment de Paris, que dans le cas où il se fût trouvé, soit fausse application de la loi dans ce jugement, soit violation ou omission de formes prescrites à peine de nullité dans la procédure; et que, dans le fait, le jugement du tribunal criminel du département de Paris n’a été argué par Antoine Maurel, ni de fausse application de la loi, ni de violation ou omission de formes prescrites à peine de nullité, mais seulement de contraven¬ tion aux articles 1er et 4 du titre 12 de la seconde partie de la loi du 16 septembre 1791, qui ne prononcent pas cette peine; « Considérant que déjà plusieurs fois la Con¬ vention nationale a proclamé l’obligation qui lui est imposée de réprimer les écarts du tribunal de cassation, et notamment de réformer ceux de ses juge mente qui, en matière criminelle, blessent le principe sacré qu’aucun jugement, soit de condamnation, soit d’absolution, ne peut être cassé que pour causes expressément déterminées par la loi; « Décrète que le jugement du tribunal de cas¬ sation, du 17 août 1793 dont il s’agit, est nul et de nul effet, ainsi que tout ce qui s’en est ensuivi; et qu’en conséquence, le ministre de la justice sera tenu de donner, sans délai, les ordres néces¬ saires pour faire mettre à exécution lé jugement du tribunal criminel du département de Paris, du 15 juin 1793, ci-dessus mentionné. « Le présent décret ne sera point imprimé. Le ministre de la justice en adressera des expéditions (1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 287, dossier 851. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ! nivôse an II 461 î 29 décembre i/93 manuscrites, tant aux tribunaux criminels des départements de Paris, de Seine-et-Oise, qu’au tribunal de cassation (1). » Suit une lettre du citoyen Maurel (2). Antoine Maurel, ancien commissaire des guerres employé dans l'armée de V Intérieur, aux repré¬ sentants composant les comités de législation et de finance réunis. « Législateurs, « Un décret de la Convention nationale a renvoyé aux comités réunis de législation et de finances la connaissance d’une affaire jugée en ma faveur, par le tribunal criminel du dépar¬ tement de Seine-et-Oise, sur la déclaration una¬ nime du jury. « Je n’examinerai point si cette démarche est parfaitement conforme à nos lois et à nos prin¬ cipes; si elle n’a rien qui blesse la plus sainte, la plus sacrée, la plus sublime de nos institutions : celle des jurés. « Je n’examinerai point si la Convention elle-même n’a pas constamment reconnu et con¬ sacré la souveraineté de ces jugements en pas¬ sant à l’ordre du jour, ainsi motivé, toutes les fois que des demandes contraires à ce principe lui ont été faites et même pour des causes bien autrement importantes que celle-ci. « Citoyens, appelés à assurer le bonheur des Français, leur liberté, o’est à vous à peser dans votre sagesse la conséquence d’une démarche qu’on pourrait peut-être regarder comme une infraction à la loi. « Pour moi, plus jaloux de mériter l’estime dès représentants du peuple que d’invoquer les droits que la loi me garantit, je m’estime trop heureux, après avoir gémi pendant sept mois, sous le poids accablant d’une injuste accu¬ sation, de pouvoir prouver à nos dignes légis¬ lateurs combien on a surpris leur religion, abusé leur bonne foi et jusqu’à quel point on les a trompés sur le compte d’un fonctionnaire public évidemment calomnié, puisque sa vie entière, si elle ne fut pas toujours exempte des faiblesses attachées à notre pauvre espèce, fut du moins toujours irréprochable et sans tache du côté de l’honneur et de la probité. Je puis en appeler avec confiance à mes concitoyens. L’attestation qu’ils m’ont envoyée en dernier lieu, et dont je joins ici une copie, ne vous laissera, je l’espère, aucun doute à cet égard. « Je vous demande donc, citoyens représen¬ tants, de vouloir bien m’accorder ma liberté provisoire sous le cautionnement et la respon¬ sabilité de mon père, et de plus sous la garde de deux gendarmes, à l’effet que je puisse me justi¬ fier en personne aux yeux du comité, en éclai¬ rant votre justice par tous les moyens qui sont en moi. Cette faveur que vous avez si souvent accordée à des prévenus, la refuseriez-vous aujourd’hui à un citoyen acquitté, lorsque son civisme et ses principes révolutionnaires ne peuvent rien laisser à désirer! Non, je ne dois pas le craindre, les vrais républicains sont essen¬ tiellement justes, et ma demande est trop bien marquée au coin de l’équité pour n’être pas accueillie. « Salut, fraternité, « Maurel. » Certificat (1) Commune de Porrières, chef-lieu de canton, district de Saint-Maximin, département du Var. Nous maire et officiers municipaux de la com¬ mune de Porrières, district de Saint-Maximin, département du Var, certifions et attestons à tous qu’il appartiendra que le citoyen Antoine Maurel est l’un des plus riches propriétaires du canton, qu’il possède des immeubles considé¬ rables en fabriques d’eau-de-vie, moulins] à huile, maisons et fonds de terre; qu’il joint à cela un commerce très étendu, que depuis trente ans et plus, on l’a vu successivement dans des entreprises d’une haute importance; que, récemment encore, il a été chargé d’une fourniture de mulets pour les armées de la République dont il était d’autant plus capable de s’acquitter, que pareille opération lui avait été confiée dans les guerres de 1762 et 1763; qu’il a toujours joui d’un grand crédit et de la meilleure réputation, et qu’enfin il a toujours su, ainsi que son fils unique résident à Aix à l’époque de notre mémorable révolution, oh il reçut Mirabeau l’aîné qu’il suivit à Paris, se concilier l’estime et la considération publiques; qu’ils ont toujours été regardés constamment l’un et l’autre comme gens de bien, d’honneur et de probité. Nous attestons en outre que ledit citoyen a parfaitement rempli tous les devoirs, sans excep¬ tion, d’un bon patriote. En foi de quoi nous avons délivré le présent pour servir et valoir à ce que de raison, lequel nous avons signé et fait contresigner par notre secrétaire et fait apposer le sceau de la com¬ mune. A Porrières, dans la salle de la maison com¬ mune, le sept octobre mil sept cent quatre vingt-treize, l’an deuxième de la République française, une et indivisible. Signé les maire et officiers municipaux. Vu par le comité de surveillance de ce lieu de Porrières, le 7 octobre 1793, l’an II de la Répu¬ blique une et indivisible. Signé Ourière, prési¬ dent; Allard, Guillaussier, Vitalis. Vu par nous administrateurs du district de Saint-Maximin, le 7 octobre 1793, l’an II de la République une et indivisible. Signé, Julien, Vachen et Berne, procureur syndic. Pour copie conforme à l’original ; Maurel. Jugement du tribunal de cassation (2). Au nom de la République française, à tous présents et à venir, salut. Le tribunal de oassation a rendu le jugement fl) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 164. (2) Archives nationales, carton D in 282. (1) Archives nationales, carton Dm 282. (2) Archives nationales, carton Dm 282.