40 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE qu’il retombe dans l’esclavage : ferme dans ses principes, elle n’abandonnera jamais sa cause, qui est celle de la vérité et de la justice. Debout contre toute espèce d’oppression et de tirannie, le peuple y est aussi pour soutenir ses glorieux travaux. Représentants soÿez toujours inébranlables ; le peuple, la terreur des traîtres, ne vous abandonnera pas et il ne s’asoira que lors qu’ils seront anéantis. La justice, citoyens représentants, est ce que nous voulons, il n’est pas nécessaire de vous dire que c’est par elle que les républiques se soutiennent ; tous ce que vous faites justifie que vous êtes pénétrés de ce grand principe sans lequel il ni a ni liberté ni patrie. Périssent tous ceux qui veulent s’élever audessus de vous. Souvenez-vous que vous représentés le peuple souverain d’une grande république, et que tous ceux qui cherchent à rivaliser l’autorité légitime sont des contre-révolutionnaires. Citoyens représentants, nos principes sont les vôtres, nous resterons debout pour les déf-fendre, et la représentation nationale. Nos corps seront vos remparts et nous jurons que la mort seule pourra nous séparer de vous. Salut et fraternité et soumission à la loy. Nimure, président, Lefebvre, Bruchet, secrétaires. 19 Le conseil-général de la commune du Mans, département de la Sarthe, réclame la solution d’une difficulté qui a retardé jusqu’ici le paiement des indemnités qui doivent être accordées à cette commune ou à celles environnantes pour les pertes et dommages que les habitans y ont éprouvés par le passage et le pillage des brigands, et qui tient à l’organisation non encore effectuée de la commission qui doit être nommée pour constater le civisme des citoyens qui prétendent à ces indemnités. Renvoi au comité des Secours, pour en faire un prompt rapport (21). 20 La société des Vertus républicaines, séante rue des Postes, section de l'Observatoire [Paris], exprime avec énergie ses sentimens contre les meneurs et les factieux qui s’agitent en vain pour perpétuer les désordres et éloigner le terme qui doit fixer le bonheur du peuple : la Convention les terrassera comme elle a abattu les infâmes triumvirs. La réunion universelle de tous les bons citoyens à la Convention nationale est aujourd’hui l’évangile de la (21) P.-V., XL VII, 84. raison; elle prie la Convention nationale de fixer ses regards sur l’abus des réquisitions et de délivrer le peuple de ses infâmes oppresseurs, des membres gangrenés des anciens comités révolutionnaires. Mention honorable, insertion au bulletin, renvoi aux comités de Sûreté générale et de Commerce et approvisionnemens de la République (22). La société des Vertus Républicaines, séante rue des Postes, section de l’Observatoire, invite la Convention à abattre avec sa massue redoutable les audacieux tyrans et les misérables pygmées qui ont voulu rivaliser d’autorité avec elle, et à purger la République des fripons, des scélérats et des factieux qui la désolent par leurs brigandages (23). 21 Les citoyens qui ont essuyé des pertes dans l’incendie qui a consumé la bibliothèque de la ci-devant abbaye de Saint-Germain-des-Prés réclament les secours que la Convention nationale a décrétés en leur faveur. Ils exposent aussi que leurs pertes ont été estimées au rabais dans la section, et ils prient la Convention nationale de prendre cet objet en considération. Renvoi au comité des Secours publics pour en faire un rapport sous trois jours (24). 22 Le conseil-général de la commune de Vannes [Morbihan] invite la Convention nationale à se servir de toute l’énergie de la puissance qui lui a été confiée pour frapper les complices des tyrans qu’elle a terrifiés, et à poursuivre sans relâche les factieux et les fripons qui cherchent encore à éloigner le règne de la justice qui les épouvante. Mention honorable, insertion au bulletin (25). [Le conseil général de la commune de Vannes à la Convention nationale, le 9 vendémiaire an III] (26) Liberté Egalité Fraternité (22) P.-V., XLVII, 84-85. Ann. Patr., n” 658. (23) Bull., 27 vend, (suppl.). (24) P.-V., XLVII, 85. J. Paris, n 20; J. Fr., n" 745; J. Perlet, n“ 747; Mess. Soir, n” 783; M.U., XLIV, 299. (25) P.-V., XLVII, 85. Bull., 27 vend, (suppl.). (26) C 321, pl. 1346, p. 4. Bull., 27 vend, (suppl.). SÉANCE DU 19 VENDÉMIAIRE AN III (10 OCTOBRE 1794) - Nos 23-24 41 Courage, citoyens représentants, courage, nos enfans aux frontières vous en donnent l’exemple. Courage, car une cruelle expérience nous a convaincus qu’un tyran trouve bientôt des complices, que le foible devient facilement injuste, qu’une société qui permetrait à ses chefs l’iniquité, seroit visiblement en délire et deviendrait coupable de sa propre ruine. Courage, fondateurs de la République, sans le règne de la justice, la liberté et l’égalité sont une chimère et la propriété devient le patrimoine éphémère du fort ou du méchant. Mais, sauveurs de la patrie, votre énergie a fait ses preuves, vous avez reconnu qu’il n’y a pas deux morales pour des hommes libres, vous avez senti dernièrement avec les braves parisiens que le règne de la terreur ne peut être durable, car toute violence, comme toute folie finit toujours par se détruire elle même ; que la justice est le sel de la vie, qu’elle seule conserve tout, et garantit tout de la corruption, que nul pouvoir sur la terre n’a le droit d’être injuste, qu’enfin gouverner les hommes, c’est se soumettre aux règles de la justice, Tunique soutien du monde. Continuez donc, braves représentants, à mériter nos bénédictions, continuez à démasquer avec nous et même à frapper du glaive de la loi, quiconque n’est pas né pour être libre, les aristocrates, les fangeux, les avares, les factieux et les fripons, même ces petits héros pantins qui voudraient remplacer les nobles et commander au civil. Continuez, fidèles mandataires du peuple; votre auguste mission, restez en permanence à la Convention, Tunique sanctuaire des élus, c’est là qu’est votre poste, c’est là qu’est notre amour, notre espoir et notre confiance et au vaisseau de l’Etat, s’il faut plusieurs voilles, est-il besoin de deux gouvemailles. Vive la Convention, le sein de la patrie. Kriche aîné, agent nat. et treize autres signatures. 23 La société des Amis de Jean-Jacques Rousseau [Paris] offre, par une députation à la Convention nationale, l’hommage de son entier dévouement, et lui témoigne en même temps la ferme résolution où elle est de combattre sous ses auspices les conspirateurs, les intrigans et les traîtres. Après avoir fait l’éloge de Jean-Jacques Rousseau, l’apôtre, l’ami et le défenseur de la vérité, de cet homme qui a préparé par ses immortels écrits notre révolution à jamais mémorable dans les fastes de l’histoire, elle demande que la Convention lui accorde une place à la fête qui sera célébrée demain à son honneur. Mention honorable, insertion au bulletin (27). (27) P.-V., XLVII, 85. Bull., 27 vend, (suppl.); Ann. Pair., n 658; C. Eg., n° 783; Gazette Fr., n° 1013; J. Perlet, n° 747. [La société des Amis de Jean-Jacques Rousseau, séante rue de la Huchette, n° 36, à la Convention nationale, s. d.] (28) Citoyens représentans, La société des Amis de J. -J. Rousseau nous députe vers vous, pour vous informer de la tenue et du lieu de ses séances, et vous offrir l’hommage de son entier dévouement, la ferme résolution où elle est de combattre sous vos auspices, sous ceux de l’éternel vérité des principes et de Jean-Jacques, les conspirateurs, les intrigans, les hypocrites et les traîtres qui s’opposent à l’achèvement de la Révolution et à la prospérité de la République françoise. Citoyens représentans, Jean-Jacques fut l’homme de la nature, il en fut l’apôtre, le défenseur et l’ami. La vérité fut son idole, il en fut l’interprète, le héros et le martir. Son siècle ne vit en lui qu’un censeur atrabilaire, un prédicateur importun, un cerveau plein de chimère, un législateur platonique, un instituteur timide, un immoral romancier... Et vous, citoyens représentans, vous l’avez jugé ce qu’il est, le plus beau génie du 18e siècle, le philosophe le plus hardi, le plus sensible et le plus sage. La Révolution est son ouvrage; vous lui en avez renvoyé toute la gloire; son immortel Contrat Social est devenu votre code ; vous y avez puisé les bases d’une constitution la plus sublime, la plus populaire qui fut jamais. Jean-Jacques proclama l’égalité dans un tems où les lois, les nobles et les prêtres écra-soient l’espèce humaine. Dans les vertueux élans de son âme brûlante, il fit des voeux pour qu’elle s’établit enfin sur la terre, cette douce et sainte égalité. Vous les avez rempli, citoyens représentans. L’ombre fortuné du citoyen de Genève applaudit à vos succès. Ses écrits, son nom et sa mémoire sont maintenant inséparables de vos glorieux travaux. En lui décernant les honneurs du Panthéon, vous marchez d’un pas égal à l’immortalité. Souffrez, citoyens représentans, que la société des Amis de Jean-Jacques Rousseau, vous demande une place à la fête qui aura lieu demain. Vive la Convention! Vive la République Tardieu, président, Eton (?) vice-président, Lebois, secrétaire et une page de signatures. 24 Pelet fait la lecture du procès-verbal des séances de la Convention nationale, matin et soir du 11 vendémiaire (29). (28) C 322, pl. 1353, p. 2. (29) P.-V., XLVII, 85.