[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j |,b™“bîè 179311 34 II. Compte rendu de Y Auditeur national (1). Un secrétaire instruit la Convention que la tranquillité publique a été troublée hier à Paris. Des citoyennes, coiffées d’un bonnet rouge, ont traversé la Halle et ont voulu obliger les autres femmes à prendre la même coiffure. Le comité de Sûreté générale a été informé de ce désordre, continue le même membre, et il se propose de vous présenter un rapport sur cet objet séance tenante. Il donne ensuite lecture d’une lettre par la¬ quelle un grand nombre de citoyennes se plai¬ gnent de cet événement et demandent à être admises à la barre pour présenter leurs justes réclamations â cet égard. Ces citoyennes ont été admises et, de suite, ont obtenu les honneurs de la séance. Fabre d’Églantine. Nul ne nous n’ignore que la parure a toujours été un des premiers soins des femmes. Laissons-les se complaire dans leurs ajustements. Mais j’ai remarqué, con¬ tinue le même membre, que les citoyennes qui sont à la tête de ces institutions ou coalitions, connues sous le nom de sociétés populaires de femmes, ne sont pas des mères de famille, mais des grenadiers femelles, des chevaliers errants, des filles émancipées. Ces mêmes femmes, qui ont voulu obliger hier les autres citoyennes à pren¬ dre le bonnet rouge, demanderont bientôt qu’elles portent le pistolet à la ceinture. Il est infiniment dangereux de mettre des armes dans les mains des femmes qui ne savent pas s’en servir, et dont les malveillants seuls profiteraient. Je demande, ajoute l’opinant, que vous décré¬ tiez : 1° que nulles personnes de l’un et l’autre sexe ne pourront forcer aucun citoyen . ni ci¬ toyenne, à peine d’être regardées comme pertur¬ bateurs, à se vêtir d’une manière différente de celle qu’ils ont coutume; 2° que la Conven¬ tion n’entend pas déroger à ses précédents décrets sur le ruban tricolore, l’habillement des prêtres et le travestissement, et aux autres dé¬ crets rendus sur cet objet. Ces deux propositions ont été adoptées. Une citoyenne a demandé la parole; elle est passée à la barre et a dit : Je demande l'abolition de toutes les sociétés de femmes qui s’assembleilt en club, parce que c’est une femme qui a fait le malheur de la France. Cette pétition a été envoyée au comité de Sûreté générale. III. Compte rendu des Annales 'patriotiques et littéraires (2). Louis annonce que quelques citoyennes, se disant révolutionnaires, ont troublé hier la tran¬ quillité dans Paris. Coiffées d’un bonnet rouge, (1) Auditeur national [n° 403 du 9e jour du 2e mois de l’an II (mercredi 30 octobre 1793), p. 2]. (2) Annales patriotiques et littéraires [n° 302 du 9 brumaire n° II (mercredi 30 octobre 1793), p. 1406, col. 1]. elles ont parcouru la Halle et ont voulu forcer les autres femmes à prendre la même coiffure. Le comité de Sûreté générale a été informé de ce désordre. loi, lecture est faite d’une lettre signée par plusieurs citoyennes qui réclament contre cette innovation et demandent à paraître à la barre. Un moment après, elles y seront admises. Ces citoyennes exposent qu’aucune loi ne les assu¬ jettissant à prendre ce costume, elles n’ont pas cru devoir s’en décorer. Fabre d’Églantine. On a tenté d’exciter des troubles dans Paris sous le prétexte des cocardes; on tente d’en exciter aujourd’hui sous celui des bonnets rouges. Si vous décrétiez que les femmes seront assujetties à cette coiffure, bientôt vous seriez obligés de leur donner des ceintures et des pistolets. Sur la proposition de l’opinant, la Convention a porté le décret qui suit. (Suit un résumé ' du décret que nous avons inséré au cours de la séance d’après le procès-ver¬ bal.) Une des citoyennes pétitionnaires demande la parole. L’Assemblée la lui accorde; elle descend à la barre. Je demande, dit-elle* que toutes les Sociétés populaires de femmes soient abolies. Renvoyé au comité de Sûreté générale. IV. Compte rendu du Journal de Perlet (1). Louis. La tranquillité publique a été troublée dans la ville de Paris par des femmes se disant jacobines, qui ont voulu forcer des citoyennes à porter le bonnet rouge. Voici une pétition dans laquelle une nombreuse députation vous demande la liberté des costumes et des coiffures. La députation est introduite et admise aux honneurs de la séance. On allait renvoyer la pétition au comité de Sûreté générale qui a des renseignements à ce sujet : Fabre d’Églantine obtient la parole. On a voulu, dit-il, tirer parti de votre condescendance pour le fait de la cocarde. On a cru, en suscitant des querelles qui troublent l’ordre public, vous faire décréter que les citoyennes indistinctement seraient tenues de porter le bonnet rouge. Ce n’est pas tout; on vous aurait ensuite demandé la ceinture, et puis les deux pistolets h là cein¬ ture. Ceci coïncide parfaitement avec la ma¬ nœuvre sur le pain; et vous eussiez vu bientôt une file de femmes aller au pain comme on va à la tranchée. Il est très intéressant, très utile pour nos en¬ nemis d’attaquer la passion la plus chère aux femmes, celle de leur ajustement ; de leur mettre à la main des armes dont elles ne savent pas se servir et dont les mauvais sujets se serviraient fort bien. Ce n’est pas le seul germe de division qui tienne à ce sexe : il se forme des coalitions, (1) Journal de Perlet [n° 403 du 9 brumaire an II (mercredi 30 octobre 1793), p. 234].