676 [Assemblée nationale.] semblée à persévérer avec le même courage pour consommer la régénération. Autre., du conseil général de la commune de la ville du Mur-de-Barrès, qui renouvelle son adhésion aux décrets de l'Assemblée, proteste qu’il n’a jamais été ébranlé par les clameurs de l’aristocratie, et jure qu'au péril même de la vie il rendra impuissants tous les efforts réunis des passions et des intérêts particuliers qui veulent inculper les décrets de l’Assemblée nationale. Autre, de la commune de Saint-Hilaire, près de Saint-Marcellin en Dauphiné, qui depuis longtemps asservie sous le joug de la féodalité, et libre enfin par la sagesse des décrets de l’Assemblée, exprime avec énergie sa reconnaissance et son adhésion. Autre, de la commune de Lons-le-Saunier, qui improuve avec la plus grande force la déclaration d’une partie de l’Assemblée nationale, et la délibération de quelques citoyens de Nîmes ; et qui, protestant de son respect pour la religion catholique, apostolique et romaine, déclare qu’elle forme des vœux pour qu’elle n’ait dans la suite que des ministres utiles dont le zèle ne soit ni affaibli ni éteint par l’amour et le soin des choses temporelles. Autre, ne la ville de Clermont-Ferrand, qui porte à dix millions la soumission par elle déjà faite de cinq millions pour l’achat de domaines nationaux. Autre, du conseil général de la commune d’Amiens, portant soumission d’acquérir pour seize millions au moins de domaines nationaux. M. le marquis Lezay dé If arnezia, député d’Aval en Franche-Comté, donne sa démissioû et écrit, en même temps, que M. de Maitly de Châteaurenard, son suppléant, ne tardera pas à le remplac er à l’Assemblée. La démisssion de M. Lezay de Marnézia est acceptée. M. le Président fait lecture de deux lettres de M. de la Tour-du-Pin : par la première, le ministre rend compte à l’Assemblée des ordres que le roi l’a chargé de faire passer aux officiers municipaux de la vi le d’Haguenau, qui, après avoir fait emprisonner M. Hœner, ont employé la force pour supposer à sou élargissement ordonné par le conseil général d’Alsace. A la seconde, sont jointes les copies de deux lettres de la municipalité de Lyon et une réponse de M. de la Tour-du-Pin. Un détachement du régiment de Royal-Guienne avait reçu ordre du ministre pour quitter la ville de Lyon ; il devait être remplacé par un détachement de pareille force du régiment de Penthièvre, dragons. La municipalité, inquiète des dispositions du peuple et craignant que ce mouvement de troupes n’occasionnât quelque désordre, a requis le commandant du régiment de Penthièvre, qui était alors en route, de retourner à Vienne d’où il soriait. M. d’Avéjan, commandant du détachement de Royal-Guienne, est venu, par pure déférence, a-t-il dit, prévenir la municipalité des ordres qu’il avait reçus du roi et annoncer qu’il les exécuterait. La municipalité a écrit au ministre pour se plaindre du refus que fait M. d’Avéjan de céder à sa réquisition. Le roi a ordonné à M. de la Tour-du-Pin de répondre que Sa Majesté ne désapprouve pas la conduite de M. d’Avéjan, et que d’après les principes de la Constitution les municipalités peuvent seulement requérir la force armée en cas de trouble et de désordre. [26 mai 1790.[ L’Assemblée, n’étant saisie d’aucune pétition sur ces affaires, décide qu’il n’y a pas lieu à en délibérer. M. Bailly, maire de Paris , membre de V Assemblée nationale, demande la parole et dit : Je vais vous rendre compte des mesures que M. le commandant générai et moi avons prises pour assurer la tranquillité publique. Nous nous sommes aperçus, depuis huit ou dix jours, qu’il régnait dans*ia ville une grande fermentation. Des vagabonds étrangers s’y sont ramassés et cherchent à y semer le désordre; ils excitent le peuple : on assure même qu’il a été répandu de l’argent. Samedi, des mesures prises ont été efficaces. Vous savez les malheurs de lundi : les victimes avaient été trouvées saisies d’argenterie volée; et, s’il est permis de parler ainsi, le désordre s’est passé avec ordre, puisque, après l’exécution, on s’est retiré très tranquillement. Hier encore on a voulu pendre un homme; M. le commandant général est arrivé à temps pour le sauver. Un homme du peuple ayant dit qu’il fallait le reprendre, M. de Lafayette a arrêté cet homme de sa main et l’a conduit au Châtelet. Il a prouvé par là que la main-forte prêtée à la loi est une fonction très honorable. Aussitôt on a crié : Bravo! vive Lafayette! On nous annonce encore du trouble; nous avons déployé une grande force : tuut paraît cependant tranquille. Le peuple est rassemblé dans quelques endroits, mais en petit nombre et sans tumulte. Les officiers municipaux ont fait afficher une proclamation qui va être proclamée dans les carrefours ; elle est conçue en ces termes : Proclamation deM. le maire et de MM. les officiers municipaux de la ville de Paris du 26 mai. « L’administration municipale n’a pu apprendre sans la plus vive douleur ce qui s’est passé les deux jours derniers Elle ne veut point caractériser ces événements funestes ; elle craindrait de laisser un monument honteux pour ce peuple, dont les motifs f-ont purs lors même que ses actions sont criminelles : un faux zèle pour la justice l’égare. Il ignore sans doute ce qu’il y a d’odieux à se rendre à la fois partie, juge et exécuteur. Ce peuple qui a conquis la liberté voudrait-il donc exercer la plus violente tyrannie? Ce peuple bon et sensibœ veut-il ramener des jours de meurtre et desang, souiller les regards de l’Assemblée nationale, ceux du roi et de son auguste famille, de spectacles atroces et de scènes révoltantes? Ne voit-il pas que ces violences, ces assassinats, déguisés sous le nom de justice, ne peuvent qu’effrayer les bons citoyens, les forcer à fuir le séjour de la capitale, détruire entièrement ses ressources et son commerce, et priver toutes les classes industrieuses des moyens de subsistances que leur offrent les dépenses et les consommations des hommes riches qui cherchent la tranquillité et la paix? Ne voit-il pas qu’il sert, par de pareils excès, les ennemis de la Révolution, qui ne peuvent manquer de contempler avec plaisir les désordres qui la feraient haïr de ceux qui confondent la licence, dont elle est quelquefois le prétexte, avec la liberté qu’elle doit nous assurer pour jamais? Non, l’administration ne peut croire que ce soient les habitants de Paris, les véritables citoyens, qui se portent volontairement à des violences aussi coupables. Une foule d’étrangers et de vagabonds infestent la capitale. Ils sont payés pour nuire, pour troubler tout. L’adminis-ARCH1VES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [â6 mai 1790.) tration est instruite que l’argent a été répandu dans le dessein d’entretenir une dangereuse fermentation ; et sans la continuelle vigilance, les efforts soutenus de la garde nationale et son infatigable patr iotisme, l’or prodigué à des hommes sans principes, sans patrie, sans autre ressource que le crime, eût peut-être déjà renversé la Constitution qui s’élève. Voilà ce dont le bon peuple de la capitale doit être averti. Qu’il se sépare donc de ces hommes pervers qu’il est temps de punir et qui seront punis s’ils osent tenter quelques entreprises criminelles; qu’il se lie à la loi et qu’il lui laisse le soin de juger ceux qui oseraient l’enfreindre : si, depuis quelque temps, elle a paru dormir, si les vols et les brigandages ont été pluseommuns, c’est l'effet descirconstance', d’une législation nouvelle, peut-être moins réorimant -, mais plus humaine et par là plus assortie à une Constitution libre; législation qui, d’ailleurs, n’a pu encore recevoir toute sa perfection. Cependant des mesures vont être prises pour orotéger plus efficacement les propriétés des citoyens, éloigner delà capitale les brigands qui les menacent sans cesse ; assurer aux jugements une prompte exécution et par là rétablir la paix, la tranquillité, le travail et i’abonnance. Mais c’est à la puissance publique à prendre c* s me-ures; c’est à elle seule à agir. Que les citoyens ne l’oublient jamais; qu’ils sachent que rendre, sans pouvoir, unjugementde mqr(, est un crime, et l’exécuter un opprobre. Fait en l’hôtel-de-ville le 26 mai 1790. « Signé: Bailly, maire ; Duport Dutertre, lieutenant de maire ; Cahier de Gerville, procureur-syndic-adjoint de la commune .» (Cette lecture est très applaudie.) M. Duquesnoy, Je propose à l’Assemblée de rendre un décret par lequel elle approuvera les mesures prises par MM. les ofticiers municipaux. M Devillas, député de Saint-Flour. On se plaint par touiela ville de ce que les prisonniers sont relâchés 24 heures après leur détention. M. l’abbé Gouttes. On est venu chez moi m’avertir que non seulement ces brigands sortaient de prison, mais encore qu’ils en sortaient avec de l’argent. JA. Devillas. Je me suis approché par curiosité d’un groupe de personnes qui causaient au milieu de la rue, et j’y ai entendu dire qu’outre ces brigands, il y avait encore des mendiants payés à 20 sous par jour pour mendier. M. Bailly. J’apprends que le lieutenant civil doit se rendre à l’Assemblée et répondre à ce que l’on avance. J’ai entendu dire aussi que l’ondon-nait de l’argent aux prisonniers en les élargissant. Un des trois qui ont été pendus l’a dit publiquement; mais il est aisé de voir qu’il est arrêté entre eux de tenir ce langage. Ce que je puis assurer c’est que pour détruire ces soupçons, le Châtelet à pris le parti d’admettre des adjoints lors de l’élargissement des prisonniers. M. l’abbé Gouttes. Le commandant du district Saint-André-des-Arts m’a assuré qu’en huit jours il avait pris deux fois le même homme. Un autre officier m’a dit la même chose. Il faut que 1er coupables soient punis, s’il y en a. M. le duc de Liancourt. Je désirerais qu’on s’occupât de faire droit sur la demande de la 677 commune relativement à la mendicité, c’est le meilleur moyen d’arrêter tous ces désordres. M. Prieur. Le comité de mendicité s’est occupé de cette pétition pendant plusieurs séances. On avait dit que les mendiants et vagabonds étaient au nombre de 20,000; des vérifications faites par les districts font penser que ce nombre n’est que de 15 à 1,800. M. Voidel. Il convient à tout bon citoyen de dire ce qu’il a appris, quand il peut être utile à la chose publique de le faire connaître. Je sais qu’il y a au comité des recherches des lettres de Turin et de Nice, qui annoncent que beaucoup de mendiants de ces villes ont été envoyés à Paris. M. Fréteau. Il serait peut-être convenable de renouvelerl *s mesures déjà prises au mois d’août. On pourrait ordonner que sur les ponts des grandes routes qui conduisent à Paris, par exemple sur ceux de Pontoise, etc., un officier municipal, accompagné, d’une ga�de imposante, exigeât des passeports des vovaaeurs suspects et en dounât à ceux qui n’en auraient oas. Ces passeports seraient ensuite visés aux barrières. M. Talon, lieutenant civil au Châtelet , membre de l'Assemblée nationale (1). Messieurs, il n’est aucun de nous, il n’est aucun bon citoyen qui ne soit vivement affecté des événements dont M. le maire de Paris vient de vous rendre compte. Mais le peuple, dont la conduite annonce toujours un principe de justice, s’égare souvent dans l’application de ce principe; le peuple, qui ne se trompe jamais dans le sentiment de ses maux, se trompe souvent lorsqu’il désigne ceux à qui il croit devoir les imputer. Ou a répandu que le Châtelet ne jugeait pas les coupables, et que les voleurs, presque aussitôt relâchés qu’arrêtés, recevaient même de l’argent pour recommencer leurs brigandages. Il est de ces imputations dont ou n’a pas besoin de démontrer la fausseté; mais je dois, comme membre du Châtelet, justifier ce tribunal des lenteurs qu’on lui reproche. Le nombre habituel des prisonniers du Châtelet n’avait jamais été que d’environ 350 accusés; il est aujourd’hui de p„lus de 800. Il est tel, que les prisons de ce tribunal ne suffisent plus pour les contenir. On a été forcé de transférer 260 prisonniers à l’hôtel de la Force, et M. le procureur du roi, obligé de pourvoir non seulement à la sûreté, mais encore à la santé des prisonniers, dont il est le conservateur et le gardien avant que d’en être le juge, est convenu, avec M. le maire d’un nouvel emplacement au dépôt de Saint-Denis. Plusieurs causes ont contribué à l’augmentation des prisonniers. Je ne parle pas de la misère publique, car jamais le peuple de Paris, qui voit poser les bases de son bonheur à venir, ne l’a plus courageusement supportée; mais ou transfère aujourd’hui dans les prisons du Châtelet une foule d’accusés que la police jugeait autrefois, et que l’on se contentait d’enfermer pour quelque temps à Bicêtre, à l’hôtel de la Force, ou dans toute autre maison de correction. Ces jugements arbitraires n’existent plus ; et un peuple juste, un peuple pour qui vous avez fait tant de sages (1) Le discours de M. Talon est incomplet au Moniteur.