136 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. « Art. 16. Ne sont compris dans la somme de 10 millions affectée aux pensions, les fonds destinés aux Invalides, aux soldes et demi-soldes, tant de terre que de mer, sur la fixation et distribution desquels fonds l'Assemblée se réserve de statuer, ni les pensions des ecclésiastiques, qui continueront d’être payées sur les fonds qui y seront affectés. » « Art. 17. Aucun citoyen, hors le cas de blessures reçues ou d’infîrmités contractées dans l’exercice* de fonctions publiques, et qui le mette hors d’état de les continuer, ne pourra obtenir de pensions qu’il n’ait 30 ans de service effectif, et ne soit âgé de 50 ans, le tout sans préjudice de ce qui sera statué sur les décrets particuliers relatifs aux pensions de la marine et de la guerre. « « Art. 18. Il ne sera jamais accordé de pension au delà de ce dont on jouissait à titre de traitement ou appointements, dans le grade qu’on occupait. Pour obtenir la retraite d’un grade, il faudra y avoir passé le temps qui sera déterminé parles décrets relatifs à chaque nature de service. Mais quel que fût le montant de ces traitements et appointements, la pension, dans aucun cas, sous aucun prétexte, et quels que puissent être le grade où les fonctions du pensionné, ne pourrajamais excéderla sommede 10,000 livres. » « Art. 19. La pension accordée à 30 ans de service sera du quart du traitement, sans toutefois qu’elle puisse être moindre de 150 livres. » « Art. 20. Chaque année de service, ajoutée à ces 30 ans, produira une augmentation progressive du vingtième des trois quarts restants de ses appointements et traitements; de manière qu’après 50 ans de service, le montant de la pension sera de la totalité des appointements et traitements, sans que néanmoins, comme on l’a dit ci-devant, celte pension puisse jamais excéder la somme de 10,000 livres. *» « Art. 21. Le fonctionnaire public, ou tout autre citoyen au service de l’Etat, que ses blessures ou ses infirmités obligeront de quitter son service ou ses fonctions avant les 30 années expliquées ci-dessus, recevra une pension déterminée par la nature et la durée de ses services, le genre de ses blessures et l’état de ses infirmités. » M. Palasne, rapporteur. L’article 22 est ainsi conçu : « Art. 22. Les pensions ne seront accordées que sur la recommandation et l’aitestation des directoires de �départements et de districts, des officiers généraux et autres agents des pouvoirs exécutif, administratif et judiciaire. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angely) . Je demande que le mot recommandation soit retranché de l’article et qu’on y substitue celui d'avis. M. de Flrien. Il serait peut-être mieux de mettre le mot demande à la place de ceux de recommandation et d'attestation. M. Barnave. Je crois qu’il y â lieu de supprimer tous ces termes et de laisser le Corps législatif libre d’accorder des pensions, sans la permission des corps administratifs et autres agents rappelés dans l’article. M. Prieur. J’appuie les observations du préopinant. D’après les règles fondamentales sur la résidence et sur la limite des pouvoirs, l'instruc-[16 juillet 1790.] tion faite par les assemblées administratives suffit pour fixer l’Assemblée. L’article 22 est décrété en ces termes : «Art. 22. Les pensions ne seront accordées que d’après les instructions fournies par les directoires de département et de district, et sur l’attestation des officiers généraux et autres agents du pouvoir exécutif et judiciaire, chacun dans la partie qui les concerne. » M. Palasne, rapporteur , lit l’article 23 ainsi conçu : « Art. 23. A chaque législature, le roi formera la liste des pensions à accorder aux différentes personnes qui, d’après les règles ci-dessus, seront dans le cas d’y prétendre. A cette liste sera jointe celle des pensionnaires décédés et des pensionnaires existants. Ces deux listes seront, par Sa Majesté, remises à la législature, qui rendra un décret approbalif des pensions qu’elle croira devoir être accordées et conservées. Le roi sanctionnera le décret, et les pensions, accordées dans cette forme, seront les seules exigibles et les seules payables par le Trésor public. » M. de Folleville. Cet article me paraît rendre l’état des pensionnaires très précaire puisqu’il les soumet à une révision bisannuelle du titre sur lequel leur pension a été concédée, tandis que l’Assemblée a toujours entendu créer un état stable sur cette matière. M. Camus. L’intention du comité a été de s’assurer, tous les ans, si le même pensionnaire ne se trouve pas dans un des cas qui ont déterminé la suppression de la pension. Plusieurs membres demandent la question préalable sur l’article. M. Robespierre. Une pension n’est que le prix d’un service rendu à la nation ; par conséquent, il ne peut être accordé que par la volonté nationale. Or, la disposition de la volonté nationale appartient aux représentants de la nation ; donc l’Assemblée nationale doit revoir sans cesse si elle n’a point commis d’erreur dans les dons qu’elle a faits M. Fréteau propose une nouvelle rédaction de l’article 23. Elle est adoptée en ces termes : « Art. 23. A chaque session du Corps législatif, le roi lui fera remettre la liste des pensions à accorder aux différentes personnes qui, d’après les règles ci-dessus, sont dans le cas d’y prétendre. A cette liste sera jointe celle des pensionnaires décédés et des pensionnaires existants. Sur ces deux listes envoyées par le roi à la législature, elle rendra un décret approbatif des nouvelles pensions qu’elle croira devoir être accordées ; et lorsque le roi aura sanctionné le décret, les pensions accordées dans cette forme seront les seules exigibles et les seules payables par le Trésor public. » Les articles 24, 25, 26 et 27 sont ensuite décrétés sans discussion dans les termes ci-dessous rapportés. « Art. 24. Les gratifications seront accordées d’après les mêmes instructions et attestations portées dans l’article 22: chaque gratification ne sera donnée que pour une fois seulement; et s’il en est accordé une seconde à la même personne, elle ne pourra l’être que par une nouvelle décision et pour cause de nouveaux services. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 juillet 1790.) 137 Dans tous les cas, les gratifications seront déterminées par la nature des services rendus, des pertes souffertes, et d’après les besoins de ceux auxquels elles sont accordées. » « Art. 25. A chaque session, il sera présenté un état des gratifications à accorder et des motifs qui doivent en déterminer la concession et le montant; l’état de celles qui seront jugées devoir être accordées sera pareillement décrété par l’Assemblée législative. Après que le roi aura sanctionné ce décret, les gratifications accordées dans cette forme seront aussi les seules payables par le Trésor public. » « Art. 26. Néanmoins dans les cas urgents, le roi pourra accorder provisoirement des gratifications: elles seront comprises dans l’état qui sera présenté à la législature ; et si elle les juge accordées sans motifs ou contre les principes décrétés, le ministre qui aura contresigné les décisions, sera tenu d’en verser le montant au Trésor public. » « Art. 27. L’état des pensions, tel qu’il aura été arrêté par l’Assemblée nationale, sera rendu public. Il sera imprimé en entier tous les dix ans ; et tous les ans, dans le mois de janvier, l’état des changements survenus dans le cours des années précédentes ou des concessions de nouvelles pensions et gratifications sera pareillement livré à l’impression. » M. le Président. L’Assemblée vient de terminer la discussion du décret qui était joint au rapport du comité des pensions. M. Camus, président du comité des pensions. Le comité dont je suis l’organe, me charge de vous demander de passer tout de suite à l'examen du projet de décret qu'il vous a soumis à la suite de son troisième rapport ( 1). (Cette proposition est adoptée.) M. Camus donne lecture de l’article 1er ainsi conçu : « Art. 1er. Toute pension, don, traitement ou appointement conservés, récompense, gratification annuelle, engagement consenti pour payement de dettes, assurance de dot ou de douaire, concessions gratuites de domaines, existants au 1er janvier 1790, ou accordés depuis cette époque, sous quelque dénomination que ce puisse être, sur quelque caisse que ce soit, étant directement ou indirectement à la charge du Trésor public, sont et demeurent supprimés. Tout ordonnateur qui en autoriserait le payement, et tout caissier qui l’effectuerait, en sera responsable en son propre nom. » M. de Sinéty. Messieurs, vous voulez porter l’économie dans toutes les dépenses de l’Etat et c’est pour atteindre ce but que le comité des pensions vous présente en ce moment de grandes réformes dans cette partie de la dette publique. Quel que soit votre désir d’économie, il faut cependant examiner si elles sont justes et c’est ce que je vais faire brièvement. D’abord, je suis effrayé de la grande étendue non moins que de la complication du travail à faire, que vous propose le comité de supprimer dès à présent toutes les pensions, sauf à les recréer (1) Voyez le troisième rapport du comité des pensions, séance du 2 juillet 1790. — Archives parlementaires, t. XVI, p. 672. ensuite, après avoir examiné les titres. J’observe qu’il y a là des difficultés inextricables pour ceux qui auraient à s’en occuper. A un autre point de vue les ministres seraient encore les courtiers perpétuels des sollicitations motivées qu’on ne cessera de leur faire et deviendraient les plastrons de tous les refus. (L’orateur insiste surtout en faveur des militaires ; il dit qu’on peut arriver au soulagement des peuples sans commettre les injustices qui résulteraient du plan du comité. — Son discours reçoit de fréquents applaudissements .) L’orateur termine par la motion suivante : Je conclurai donc, sans mettre aucune opposition aux autres articles de ce projet de décret, en rejetant seulement les premier, sixième, septième et huitième, à ce que l’Assemblée nationale décrète : 1° Que votre comité des pensions fixera, d’après les calculs les plus justes, qu’il fera de concert avec le comité des finances, la somme totale qui pourra être déterminée pour le payement des pensions qui doivent être continuées aux anciens pensionnaires; 2° Que, sous aucun prétexte, cette somme ne pourra être excédée; 3° Que votre comité remettra incessamment à l’Assemblée nationale le tableau de toutes les pensions, qui lui auront paru rigoureusement avoir été obtenues sans titres ni motifs de services réels pour être supprimées par elle; 4° Qu’il proposera également un tableau des réductions qu’il croira justes de faire sur les pensions exagérées; 5° Qu’il fixera un maximum pour les pensions d’après les calculs les plus justes possibles, lequel ne pourra être excédé; 6° Que toutes les pensions conservées et celles même réduites à ce maximum , qui aura été déterminé, supporteront une retenue au marc la livre, qui sera calculée et proposée d’après une règle générale de proportion, de manière que le total des pensions conservées, ainsi réduites, n’excèdera pas la somme totale que l’Assemblée nationale jugera nécessaire de fixer pour toutes les grâces pécuniaires conservées; 7° Enfin, que le règlement, fait pour la répartition à l’avenir des grâces pécuniaires, n’aura point d’effet rétroactif contre les pensionnaires actuellement en jouissance , sauf les réductions indiquées par les six articles précédents. M. de Murinais. Je demande l’impression du discours de M. de Sinéty, afin d’attester que les militaires ont trouvé des défenseurs dans l’Assemblée nationale. M. de Delley d’Agier. Je réclame contre le motif allégué par le préopinant, attendu que l’Assemblée n’a besoin d’aucune considération pour s’intéresser au sort des militaires. (La demande d’impression n’a pas de suite.) M. deWimpffen. Je ne monte à la tribune que pour m’acquitter d’un devoir envers l’Assemblée nationale, dont plusieurs membres peuvent ignorer que la plupart des pensions des gens de l’armée de terre et de l’armée de mer étant tarifées par les ordonnances, ne doivent pas être confondues dans la proscription générale qu’on vous propose. J’appelle ceux-ci les justes, et vous savez qu’avant que Dieu lançât le feu du ciel sur Sodôme et Go-morrhe, il en fit sortir les justes. Je demande donc l’exception honorable en faveur de ceux des gens