ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] 329 [États gén. 1789. Cahiers.] pouvons pas arracher de nos grains les herbes parasites qui croissent toujours à leur détriment dans les temps propres à le faire; et que, par suite du même motif destructeur, nous avons, tous les ans, la douleur de voir perdre nos récoltes de prairie artificielle, faute d’avoir la permission de les couper dans les temps convenables. Et, par surcroît d’infortune, nous sommes encore écrasés par un impôt désastreux, sous la dénomination de droits rétablis, comme étant dans la banlieue de Paris. Ce droit, que nous croyons indûment perçu sur nous, s’étend sur tous les objets de consommation et de première nécessité, tels que sur le bois que brûle le pauvre, qui lui revient plus cher qu’aux plus grands seigneurs, que sur les échalas qu’emploie 'le malheureux vigneron, qui est obligé de payer jusqu’à 36 livres pour cent bottes : droit d’autant plus révoltant, que le prix des échalas rondins en châtaignier, ne coûtait, il y a quatre ans, que 40 livres le cent, et que l’impôt mon taitp resque au prix de la chose : hélas ! cette chose de première nécessité pour la culture de la vigne, de cette plante précieuse dont la liqueur salutaire paye tant de droits de toute nature, qu'elle ne laisse à son infatigable cultivateur que la douleur de s’en voir privé de la dernière goutte, quelque temps après sa récolte, pour payer son loyer, sa taille, sa capitation, son industrie, sa corvée, ses droits de gros et d’aides, sa dîme, enfin. Eh bien! sa culture est encore sujette, dans la banlieue, à l’impôt exorbitant dont nous venons de tracer le tableau. Aussi, ne pouvons-nous croire qu’un si bon Roi, que le ciel nous a donné dans sa miséricorde, ait la moindre connaissance de ces concussions qui s’étendent, en outre, sur l’avoine, l’orge, la volaille, les toiles, le sucre, le café, la chandelle, la pierre, le plâtre, la tuile, etc. Nous espérons, avec la plus grande confiance, que si nos représentations parviennent jusqu’aux pieds du trône, nous serons pour jamais délivrés de ces impôts qui nous ôtent la faculté de faire aucune espèce de commerce, et nous rendent les sujets les plus à plaindre du meilleur des rois. Toujours aux prises avec ce qui peut rendre notre situation la plus digne d’attention et de pitié, nous sommes encore ravagés par le nombre excessif des moutons des bouchers de Paris, répandus dans une infinité de bergeries sur toute la banlieue, nombre que la cupidité spéculative de ces bouchers fait monter à des milliers sur un arrondissement de deux ou trois paroisses, même dans la saison où ils ne peuvent absolument exister qu’aux dépens de nos récoltes, en les ravageant le long des voies, toujours trop étroites, malgré leur largeur immense, pour faire pâturer des troupeaux de douze à quinze cents bêtes, et trois à quatre chèvres, qui broutent, à volonté, au milieu de tous les grains, et à la suite du troupeau conduit, le plus souvent, par un berger et deux chiens. Cette charge, qui aggrave nos maux depuis si longtemps, ne nous a été imposée primitivement que pour faire rafraîchir, pendant quelques jours, les moutons arrivant des marchés pour l’approvisionnement de la capitale, mais non pas pour couvrir la surface de nos champs de nombreux troupeaux qui les dévastent annuellement et qui ravagent nos vignes. Nous avions jadis, pour nous dédommager de la privation de nos pâturages, la faculté d’aller prendre, comme à nous de droit, pour toute la banlieue, les boues de Paris dans les voiries, pour l’engrais de nos terres. Mais, par suite des malheurs qui semblent se succéder pour accabler l'habitant de la banlieue de toutes les manières, on nous les fait payer fort cher, puisque nous avons été taxés à quinze sous par cheval, ce qui fait 2 livres 15 sous par voiture. Incapables, par notre défaut de lumières, de pouvoir faire, dans cette doléance, le tableau frappant de ce qui nous arrache journellement tout le fruit de nos sueurs et de nos veilles, nous avons, néanmoins, tâché d’en crayonner l’esquissé. Nous croyons qu’on n’exigera pas de nous des phrases éloquentes, et que la vérité, sans ornement, sera accueillie par les hommes sages que la prudence des députés jugera dignes de leur confiance; que ces vérités, exposées par eux aux’Etats généraux, y seront vues par l’œil sage du régénérateur de la patrie. Enhardis par les bontés du prince, qui ne veut nous gouverner que par la justice, et qui a tant à cœur la réforme des abus, nous ne craindrons pas d’exposer à l’auguste assemblée des Etats généraux les idées que nous ont fait naître la prospérité de l’Etat et le bonheur de nos semblables. Art. 1er. Nous désirons un seul impôt sur toutes les propriétés indistinctement. Art. 2. La suppression totale -des capitaineries, et par provision, la plus entière liberté pour l’épluchage des grains et la fauche de nos foins. Art. 3. Môme poids et même mesure dans tout le royaume. Art. 4. La suppression des milices, attendu qu’elles sont destructives des campagnes. Art. 5. L’abolition de tous les privilèges pécuniaires. Art. 6. La suppression des justices seigneuriales ; et pour ôter à tous les malheureux habitants de la campagne la funeste possibilité de se ruiner en procès, créer, dans chaque village, en raison de sa population, deux, trois ou quatre vieillards, qualifiés de pacificateurs ou juges de paix, qui, avec le curé de la paroisse, connaîtront tous les différents locaux, et sans frais; ordonner, en outre, qu’aucuns habitants des campagnes ne seront admis à se pourvoir en justice réglée, que, préalablement, ils n’aient passé par l’avis des juges ci-dessus désirés. Art. 7. La suppression des aides et gabelles. Quant aux surplus des vœux que nous pour-rioos faire pour le salut de l’Etat et la prospérité du royaume, nous nous en rapportons à la sagesse au Roi et aux lumières des Etats généraux. Fait à Bagneux, ce 13 avril 1789, en présence et de l’avis des habitants présents à l’assemblée générale convoquée par nous, syndic, et qui ont signé avec nous, et approuvé les ratures. Signé Allietle, syndic municipal; F. -H. Garnier, laboureur; Lardeaux, plâtrier; J.-F. Lar-dot, vigneron; Pierre Moreau, vigneron; Meslin; Maugarny, laboureur, épicier; Pluiset; Bioret, vigneron; Laboureur, maître maçon; Champou-dry, carrier; Robquin, charron; D. Bancelin ; Chaillou de la Salle; L.-B. Drezet; Doury; Rege-rau , et Lachral, procureur fiscal. CAHIER Des plaintes et doléances de la paroisse de Bagnolet (1). L’amour du Roi pour son peuple, son désir de (1) Nous publions ce cahier, d’après un manuscrit ik-s Archives de l’Empire. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mnr#.] 330 [États gén. 1789. Cahiers.] le rendre heureux, et sa sollicitude paternelle pour rétablir l’ordre dans les finances, et réformer les énormes abus sous lesquels ses sujets sont opprimés, sont les motifs principaux de la convocation des Etats généraux du royaume. Mais, c’est surtout sur les habitants des campagnes, et sur le tiers-état plus généralement opprimé par les vexations linancières et les abus des impositions arbitraires, que Sa Majesté doit laisser tomber ses regards bienfaisants, persuadée que cette partie la plus nombreuse de son peuple, qui soutient et vivifie l’Etat, doit éprouver plus directement encore les effets salutaires de sa protection et de son appui. C’est dans ces vues que le Roi demande à chaque classe de son peuple de l’éclairer de ses conseils.de lui faire connaître les excès, les abus, les vexations dont elle a à se plaindre, et de lui proposer les moyens de réformation les plus avantageux à l’Etat. C’est dans ces vues que les syndics, habitants et communauté de la paroisse de” Bagnolet, pleins de respect pour Sa Majesté, pleins d’amour pour sa personne sacrée, et bien que persuadés que la constitution de l’Etat est le gouvernement monarchique, c’est-à-dire le gouvernement du prince, réglé par les lois constitutionnelles auxquelles il s’est soumis comme ses sujets, vont, sans se livrer à aucun écart d’imagination, proposer ce qui’leur paraît plus sage, et ce qui les affecte plus particulièrement ; Pénétrés de ces principes, et guidés par les vues bienfaisantes de Sa Majesté, l’assemblée des syndics, habitants et communauté de la paroisse de Bagnolet, ont ordonné et indiqué à leurs députés de déclarer et demander ce qui suit : Art. 1er. Les syndics, habitants et communauté de la paroisse de Bagnolet donnent à leurs députés et à ceux qui les représenteront aux Etats généraux, à la prudence et à la conscience desquels ils déclarent s’en rapporter, les pouvoirs les plus illimités pouf s’occuper des affaires générales du royaume, accorder les subsides nécessaires, en déterminer la nature, en fixer la quotité et la durée, faire tous emprunts, en assigner et régler l’emploi, concourir à la formation et promulgation des lois utiles au bien de la nation dans les circonstances présentes; consentir à tout ce qui sera nécessaire et avantageux à la gloire et à la prospérité du royaume, au bonheur du souverain et des peuples; lesquels néanmoins ne seront valables que pour une année, à compter du jour de l’ouverture des Etats généraux. Art. 2. A la nation seule assemblée appartient le droit d’établir les impôts nécessaires, et d’en régler la perception, de manière qu’il ne puisse être levé aucun subside, sous quelque dénomination quelconque, qu’il n’eût été arrêté et ordonné préalablement par les Etats généraux ; pourquoi il doit être déclaré que tous les impôts, actuellement existants, sous quelques dénominations qu’ils soient connus, seront et demeureront abrogés de droit, comme illégaux et établis sans le vœu de la nation; que le remplacement en sera fait et ordonné, par les Etats, en d’autres subsides d’une perception pins facile et moins onéreuse aux peuples, surtout aux habitants des campagnes, et eu égard aux différentes localités; comme aussi que tous lesdits nouveaux subsides à imposer seront supportés également par tous les sujets de l’Etat, sans distinction d’ordres, de rangs, et de personnes, et chacun, eu égard à ses propriétés, possessions et industrie. Et cependant, pour le bien public, que la perception des impôts actuellement subsistants continuera d’être faite, sans exaction, pendant la tenue des Etats généraux seulement, et jusqu’à ce qu’il ait été pourvu par d’autres subsides au remplacement desdits impôts. Art. 3. Aucun nouveau subside ne pourra être établi que pour un temps fixe et limité ; et les agents, chargés delà perception, qui la continueraient au delà du terme prescrit, seront déclarés concussionnaires, punis corporellement, et condamnés à la restitution du double des sommes qu’ils auront exigées indûment. Art. 4. Le retour périodique des Etats généraux sera fixé à cinq ans. Art. 5. La liberté individuelle sera assurée à chaque citoyen. Art. 6. La propriété sera pareillement assurée à tous, et de telle manière que nul ne puisse jamais en être privé si ce n’est de son consentement, et pour l’usage public, auquel cas l’indemnité sera fixée au plus haut prix, et payée comptant, avant qu’il puisse être fait aucuns travaux ou entreprises sur ladite propriété. Art. 7. Lesdits députés et représentants demanderont et feront tous leurs efforts pour obtenir qu’à Rassemblée des Etats généraux on délibérera, et que les voix seront comptées par tête ; et que, dans le cas où il sera arrêté que chaque ordre délibérera séparément dans sa chambre, néanmoins sur chaque proposition qui sera faite, eu égard au nombre de chaque opinant dans les différentes chambres, on comptera les voix par tête. Art. 8. Sanctionner la dette publique, après en avoir fixé la quotité. Art. 9. Demander qu’aucun emprunt, au nom du Roi, et à la charge de l’Etat, ne soit valable à l’avenir, sous quelque dénomination qu’il soit formé, qu’autant qu’il aura été reconnu nécessaire, et autorisé par la. nation assemblée, sans, cependant, entendre empêcher Sa Majesté de faire tels emprunts qu’elle jugera à propos, mais qui lui seront personnels, et qui ne pourront jamais obliger la nation, ni être considérés comme dette nationale. Art. 10. Demander l’établissement d’Etats provinciaux, composés de membres librement élus suivant des formes constantes ; lesquels Etats provinciaux dureront pendant l’intervalle des tenues des Etats généraux, et connaîtront de la répartition à faire, dans chaque district, des impôts et subsides qui seront établis par les Etats généraux. Qu’ensuite, chaque district, composé des représentants des paroisses, procédera à une répartition qui fixera ce que chaque paroisse devra supporter ; et qu’enfm, chaque paroisse, par des commissaires pris et choisis sur les lieux, répartira sa quote-part entre tous les habitants, eu égard à leurs propriétés et possessions locales, commerce et industrie. Art. 11. Gomme tous les Français naissent nobles ou roturiers, et que c’est, par choix, que l’on se fait ou ecclésiastique, ou militaire, ou magistrat, ou négociant, ou agriculteur, ou qu’on prend tout autre état qui ne forme point un ordre dans l’Etat, de même, l’état ecclésiastique ne doit pas faire un ordre séparé. En conséquence, les députés et représentants demanderont la suppression de l’ordre du clergé, et la répartition de cet ordre dans les deux autres, chacun suivantsa naissance, en sorte qu'il n’y ait plus, à l'avenir, que deux ordres dans le royaume, savoir la noblesse et la roture ou non noble. Art. 12. Dans la formation des Etats provin- 331 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mnrs.] ciaux, le nombre de l’ordre de la roture ou non noble sera égal à celui de la noblesse. Art. 13. Demander la suppression des capitaineries qui sont le fléau des campagnes, sauf, néanmoins, celles nécessaires aux plaisirs du souverain, et lixécs à quatre lieues de l’arrondissement de son séjour ; et, encore, en indemnisant les cultivateurs qui se trouveraient exposés au dégât du gibier. Art. 14. Demander la destruction des lapins, excepté en garenne close de murs, avec liberté entière aux particuliers de détruire ceux qu’iis trouveront sur leurs terrains. Art. 15. Demander qu’il soit défendu aux seigneurs, dans l’étendue de leurs fiefs et seigneuries, de chasser dans les clos dans aucun temps, et jamais dans les terres ensemencées et dans les vignes, depuis le 15 avril jusqu’à la moisson et aux vendanges. Art. 16. Demander la démolition des colombiers, sauf ceux des seigneurs fondés en titre, mais dont il ne pourra y en avoir qu’un au principal manoir du fief ou seigneurie, et à la charge encore de tenir les colombiers fermés pendant le temps des semences et de la moisson. Art. 17.v Demander la suppression de tous privilèges pécuniaires, tant des nobles que du clergé, et des bourgeois de Paris, pour leurs maisons, jardins, clos et terres. Art. 18. Demander l’abolition de tous les privilèges exclusifs, qui gênent l’agriculture, les arts, le commerce et l’industrie. Art. 19. Qu’à l’avenir, les impôts seront supportés et payés également par tous les sujets de l’Etat, sans aucune distinction quelconque, ni privilège, entre le noble, la roture et le clergé, rangs ni qualités ; en sorte que tous contribuent, chacun en raison de ses propriétés, possessions, commerce, arts et industrie. Art. 20. Demander la suppression des droits de franc-fief, dont la perception gêne l’aliénation des biens nobles, et en diminue le prix, et donne lieu à des vexations et à des procès injustes, de la part des traitants, contre les cultivateurs, souvent sous le frivole prétexte qu’un héritage acquis en roture, et chargédecens annuel, emporte le droit de lods et ventes sous le domaine d’un fief en l’air. Art. 21. Demander la suppression de la milice par la, voie du sort, et du logement gratuit des troupes. Remplacer la milice par des enrôlements volontaires de soldats nationaux, auxquels, après un temps déterminé de service, et une attestation de valeur et de bonne conduite, qui sera donnée, par les officiers du corps, on accordera des distinctions personnelles ou des récompenses pécuniaires. Art. 22. Demander que tout citoyen puisse prétendre à toutes les places et dignités ecclésiastiques, civiles et militaires, qui doivent être le prix et la récompense de la vertu et du mérite, et non le patrmioined’uneclasse privilégiée; que le défaut de naissance illustre ne soit plus un obstacle, ni la qualité de roturier un empêchement pour être promu aux grades civils et militaires, en réservant toutefois, à mérite égal, la préférence à la noblesse. Art. 23. Demander la suppression des retraits féodaux, censuels et lignagers, comme gênant absolument la liberté pour les ventes et acquisitions des immeubles. Art. 24. Demander la suppression de toutes les charges, places, emplois et commissions de finance, dont l’existence sera reconnue onéreuse à l’Etat. Art. 25. Demander la réformation des lois civiles et criminelles, la diminution des frais et longueurs des procès, la suppression de la vénalité des charges de magistrature et judicature,du droit de centième denier des épices et vacations des juges, en remplacement desquels il sera fixé une indemnité, et la suppression totale et absolue des secrétaires des rapporteurs. Que, dans les affaires criminelles, les accusés puissent avoir un conseil qui, avant le jugement, pourra prendre communication entre les mains du greffier, et sans déplacer, des charges et informations, et proposer la justification de l’accusé ; que la formalité du serment, que l’on fait prêter à l’accusé, avant et après les interrogatoires et confrontations , soit également supprimé, l'expérience ayant appris que ces serments sont absolument inutiles et n’occasionnent souvent que des parjures; que la sellette soit également supprimée. Etablir l’égalité des peines pour tous, sans distinction d’ordres, de rangs, de qualités ni de personnes, ne pouvant y avoir de déshonneur que le vice et le crime. Enfin, demander une loi pour que la punition des coupables ne puisse entacher leurs familles, attendu que les délits et les crimes étant personnels, le déshonneur doit se concentrer absolument sur la tête du coupable. Art. 26. Tenir la main à l’exécution des règlements déjà existants, et qui seront renouvelés, pour la taxation, par les officiers de police des lieux, du pain et de la viande, à un prix modéré et proportionné à l’abondance ou à la rareté des récoltes, bestiaux et fourrages ; et qn’en conséquence, l’exportation des grains à l’étranger ne puisse avoir lieu qu’aprés qu’il aura été bien reconnu et constaté que, dans chaque province, il y a des grains plus que suffisants pour deux années, auquel cas l’exportation seulement du surplus pourra être permise, et en prenant toutes les précautions que la sagesse et la prudence peuvent suggérer pour éviter les fraudes; et punir corporellement les fraudeurs. Art. 27. Demander la suppression du dépôt de mendicité établi à Saint-Denis, ou au moins, une meilleure administration, afin que le pauvre ne puisse y être confondu avec les scélérats, vagabonds et gens sans aveu ; qu’en conséquence, ce dépôt ne sera vraiment que pour la mendicité, et que les pauvres y puisent le travail, la nourriture et les secours en cas de maladie et d’infirmités ; le tout sous l’inspection des juges ordinaires des lieux, sans que la police de Paris, ni M. l’intendant de la généralité, en puissent prendre connaissance. Art. 28. Demander la suppression des loteries, comme tendantes à pervertir les mœurs, à ruiner les familles, et devenant souvent le principe des crimes et des délits. Art. 29. Demander la suppression de la taille et de ses accessoires , ainsi [que des droits de banlieue, plat pays, aides sur le vin, le bois et autres denrées ; dans le cas même où les droits aux entrées de Paris seraient conservés, attendu que c’est indûment et par vexation et exaction que les financiers et traitants ont étendu à la banlieue ces droits, qui n’ont été, dans l’origine, établis que pour la ville de Paris seulement; sauf à faire payer également à chaque habitant de la banlieue les subsides qui seront arrêtés et ordonnés par les Etats généraux, chacun eu égard à sa propriété, possession, son commerce et son industrie, par une taxe sur les biens-fonds, à l’égard des propriétaires, et par une capitation personnelle à l’égard des autres, et à raison de leurs facultés respectives. 332 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Art. 30. Demander la suppression des corvées et des services personnels, qui seront convertis eD prestations pécuniaires, qui feront partie de l’impôt, tant réel que personnel, que les Etats généraux adopteront : laquelle prestation sera répartie sur tous également. Gomme aussi demander que l’entretien des routes et chemins de communication soit fait aux dépens du trésor public, sous l’inspection des administrations provinciales, au moyen de quoi les ponts et chaussées seront supprimés. Art. 31. Dans le cas oùles droits établis sur les vins, aux entrées de Paris, seraient conservés, demander que la fixation de ces droits soit réformée, de manière que les vins d’une qualité ordinaire et inférieure ne payent pas autant que les vins d’une qualité supérieure : ce qui cause un préjudice considérable aux habitants des environs de Paris, dont les vins, à raison de la cherté des entrées, ne peuvent se vendre à Paris, et surtout maintenant où le reculement des barrières de la capitale a encore fait perdre aux habitants des environs de Paris la ressource qu’ils avaient pour la vente de leurs vins aux approches des anciennes barrières. Que, pour remédier à cet abus, il serait fait un nouveau tarif des droits d’entrée du vin dans Paris, à raison des qualités généralement reconnues, des différentes espèces de vin du royaume, et venant de l’étranger. Et pour qu’il puisse y avoir le moins de fraude possible auxdits droits d’entrée, il sera ordonné que chaque tonneau, pipe, barrique, ou panier, contenant les vins à entrer à Paris, seront roannés ou empreints d’une marque propre et particulière à chaque lieu d’où lesdits vins seront tirés, et accompagnés d’un acte d’attestation des officiers municipaux des lieux. Art. 32. Demander la suppression des droits d’entrée aux barrières de Paris sur toute espèce de raisins, sauf, en cas de conversion desdits raisins en vin en fraude, dans l’intérieur des murs de Paris, à punir corporellement les fraudeurs, participes et adhérents. Gomme aussi demander, dans le cas où lesdits droits d’entrée sur les raisins seraient conservés, que chaque artiéulier, conduisant à Paris du raisin, sera lire d’y faire entrer un panier de douze livres de poids, sans payer aucun droit, et ne pourra être arrêté, soit avant, soit après la barrière, à moins qu'il ne soit trouvé occupé à convertir lesdits raisins en vin dans l’intérieur des barrières. En outre, que les droits, qui pourront être perçus sur des paniers de raisin au-dessus de douze livres de poids, soient fixés à une modique taxe. Art. 33. Si les droits de contrôle et insinuation sont conservés, demander un nouveau tarif, clair et précis, qui mette lé public à l’abri des vexations et des exactions. Art. 34. Autrefois, et il n’y a pas plus de dix à douze ans, on obligeait les habitants des environs de Paris à venir prendre, mais gratis, aux dépôts des immondices de la capitale, les fumiers nécessaires aux engrais de leurs héritages. Depuis, sans aucune autorisation légale et d’autorité privée, on exige de chaque habitant 3 sous par chaque bête de somme, et 10 sous par chaque cheval attelé à la voiture qui vient, charger à ce dépôt. Comme cette exaction est une injustice, et contraire à l’agriculture, demander la suppression de cette taxe imposée, sans droit, par les suppôts de la police de Pans, et en conséquence, que chaque habitant aura la liberté d’enlever, sans rien payer, telle quantité desdites [Paris hors les murs.] boues et immondices qu’il jugera à propos, à peine de concussion contre les exacteurs d’une pareille taxe. Art. 35. Demander que les Etats généraux prennent, le plus promptement possible, en considération la cherté actuelle et excessive des grains et autres denrées de première nécessité; et qu’ils avisent aux moyens qu’ils croiront les plus convenables pour ramener l’abondance, et faire en sorte que les denrées soient toujours proportionnées aux ressources des différentes provinces du royaume. Art. 36. Gomme les dîmes et autres biens dont jouissent les curés des paroisses ont été abandonnés et offerts par les fidèles pour l'acquit du service divin dans toutes ses parties, demander qu’il soit défendu aux curés et autres de rien exiger pour les baptêmes, mariages et sépultures, sauf les droits fixés par les règlements pour les honoraires des messes, lorsqu’elles seront demandées, et la fourniture du luminaire. Art. 37. Le Roi et les Etats généraux seront suppliés de ne permettre dans aucun temps, ni pour quelque cause que ce soif, l’exercice d’aucun culte, autre que celui de la religion catholique, apostolique et romaine, dans laquelle lesdits syndic et habitants de Bagnolet déclarent vouloir vivre et mourir. Fait et arrêté en l’assemblée générale des syndics, habitants et communauté de la paroisse de Bagnolet, tenue en l’église dudit lieu, en la forme ordinaire et prescrite par les lettres de convocation et règlement de Sa Majesté; à Bagnolet, ce 17 avril 1789, en présence de nous, César Chaillou, avocat au parlement, et prévôt juge civil et criminel, et de police de la prévôté de Bagnolet; de nous, Philibert Turpin, procureur fiscal, et de nous Pierre Bouveau, greffier de ladite prévôté. Signé Grain dorge, Souchet, P. Boudin, L.-B. Boudin, Poulet, Pierre Souchet, Boudin, Lezier, Biau-ry, G. -P. Vassou, Souchet, Joseph Gheral, Doucet, Lorhet, Hébert, Dubut, Gateconier, Alexis Boucot, Souchet, Dargens, Chevreau, Marandot, Buisson, Verret, Boucot, Maurice, Boucot, Bachelet, Faucheur, Glavost, Souchet, Maurice, Boucot, Vassou, Boucher, Dépars, Colignot, Chevreau, Louis Bon-nenil, Delaborde, Souchet, Boudin, L. Souchet, Jean Vassou, Tulpin, Rouveau, Faucheur, Hâtez et Chaillou. CAHIER Des doléances de la paroisse de Baillet, en France (1). Nous, soussignés, Joseph lsoré, syndic municipal; Joseph-François Guillaume, greffier, et autres habitants : Nicolas Lépine , laboureur ; Louis Dupuis; Boncharles, meunier; Nicolas Pillot; André Boucher, assemblés à la manière accoutumée, en conséquence des lettres du Roi, en date du 24 janvier dernier, pour la convocation et tenue des Etats généraux de ce royaume, des règlements y joints, et de l’ordonnance de M. le prévôt de Paris, ou de M. son lieutenant civil, rendue en conséquence le 4 du présent mois, avons procédé à la rédaction du cahier de doléances, et à la nomination des députés aux Etats généraux. Art. 1er. Notre vœu est d’avoir, avant tout, un bon établissement de gouvernement, qui (1) Nous publions ce cahier, d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.