SÉANCE DU 26 MESSIDOR AN II (14 JUILLET 1794) - Nos 48-51 155 48 50 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [POTTIER, au nom de] son comité de liquidation, décrète : « Art. I. Tous les pensionnaires des communes de la République, à quelque titre que ce soit, qui prétendront à la conservation ou au rétablissement de leurs pensions, seront tenus, s’ils ne l’ont déjà fait, pour parvenir à leur liquidation, de justifier de leur résidence sur le territoire français depuis le 9 mai 1792 sqns interruption, par un certificat délivré par les conseils généraux des communes de leur résidence. « Art. II. Le certificat sera déposé dans les bureaux de la direction générale de la liquidation d’ici au 1er nivôse de l’an troisième, sous peine de déchéance (l). 49 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyens Jean Beau, François Labrosse, Louis Danger, François Cu-perly, Marie-Anne Marchandon, Marguerite Perrot et Marguerite Dardan, tous domiciliés dans la commune du Blanc, département de l’Indre, acquittés, après 5 mois de détention, par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 17 prairial dernier, qui, néanmoins, a ordonné que ces citoyens resteraient détenus dans les maisons d’arrêt jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné, lesquels citoyens ont depuis été mis en liberté par arrêté du comité de sûreté générale, du 15 messidor présent mois; « Considérant que dans les circonstances particulières les pétitionnaires ne peuvent prétendre à l’indemnité accordée aux citoyens acquittés par le tribunal révolutionnaire; mais qu’à raison de leur indigence et de l’éloignement de leur domicile, il est juste de leur accorder des secours, « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à chacun des citoyens Beau, Labrosse, Danger, Cuperly, Marchandon, Perrot et Dardan, la somme de 200 liv., à titre de secours, et pour les aider à retourner dans leur domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé » (2). (l) P.V., XLI, 243. Minute de la main de Pottier. Décret n° 9924. J. S. Culottes, n°516; J. Perlet, n°661; J. Sablier, n° 1438; J. Fr., n°658; M.U., XLI, 443. (2) P.V., XLI, 244. Minute de la main de Briez. Décret n°9925. Reproduit dans B1", 28 mess. (ler suppl1). « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité dé liquidation, décrète : « En conformité des articles VI et X du titre II de la loi du 22 août 1790, il sera payé par la trésorerie nationale, à titre de gratification annuelle et viagère, au citoyen Jean-Baptiste Du-rat-Lasalle, officier de santé, la somme de 500 liv., à compter du 1er Janvier 1791, sous la déduction de ce qu’il peut avoir reçu sur l’ancienne pension dont il jouissoit, et en se conformant à toutes les lois rendues pour les-dits pensionnaires de l’état. « Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de correspondance »(l). 51 OUDOT, au nom des comités de sûreté générale et de législation : Le tribunal d’appel de la police du département de Paris demande à la Convention « si les comités révolutionnaires sont compétents pour saisir chez les citoyens des comestibles ou d’autres marchandises à vendre ». Cette question importante a été examinée avec attention par vos comités de sûreté générale et de législation, et c’est en leur nom que je viens vous faire un rapport sur le référé du tribunal d’appel de Paris. Les raisons que ce tribunal a de douter de la compétence des comités révolutionnaires pour ces sortes de saisies sont qu’il y a des commissaires nommés ad hoc, et qui sont spécialement chargés de surveiller la déclaration des marchandises, par la loi du 12 germinal; Que par leur institution les comités révolutionnaires ont plutôt la surveillance des personnes et des opinions que celle des choses; et que d’ailleurs la loi du 14 frimaire défend à tous les fonctionnaires publics d’étendre leurs fonctions, et leur ordonne de se conformer strictement à ce que prescrivent les lois pour les limites de leur compétence. Le tribunal de police a communiqué deux procédures qui ont eu lieu d’après les saisies faites par des comités révolutionnaires, qui, parmi plusieurs autres de ce genre, peuvent faire connaître les abus qui résultent de cette extension d’autorité. L’une de ces deux procédures les manifestera surtout d’une manière évidente. Le 27 pluviôse, le comité révolutionnaire de la section de Bon-Conseil a dressé un procès-verbal chez une marchande, parce que l’on a trouvé chez elle de l’eau-de-vie qui n’avait que 15 à 16 degrés. Le scellé a été mis sur une tonne de 500 pintes, et il a été établi un gardien dans le domicile de cette femme. (l) P.V., XLI, 244. Minute de la main de Pottier. Décret n° 9926. Reproduit dansB'", 28 mess. (ler suppl1). SÉANCE DU 26 MESSIDOR AN II (14 JUILLET 1794) - Nos 48-51 155 48 50 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [POTTIER, au nom de] son comité de liquidation, décrète : « Art. I. Tous les pensionnaires des communes de la République, à quelque titre que ce soit, qui prétendront à la conservation ou au rétablissement de leurs pensions, seront tenus, s’ils ne l’ont déjà fait, pour parvenir à leur liquidation, de justifier de leur résidence sur le territoire français depuis le 9 mai 1792 sqns interruption, par un certificat délivré par les conseils généraux des communes de leur résidence. « Art. II. Le certificat sera déposé dans les bureaux de la direction générale de la liquidation d’ici au 1er nivôse de l’an troisième, sous peine de déchéance (l). 49 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyens Jean Beau, François Labrosse, Louis Danger, François Cu-perly, Marie-Anne Marchandon, Marguerite Perrot et Marguerite Dardan, tous domiciliés dans la commune du Blanc, département de l’Indre, acquittés, après 5 mois de détention, par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 17 prairial dernier, qui, néanmoins, a ordonné que ces citoyens resteraient détenus dans les maisons d’arrêt jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné, lesquels citoyens ont depuis été mis en liberté par arrêté du comité de sûreté générale, du 15 messidor présent mois; « Considérant que dans les circonstances particulières les pétitionnaires ne peuvent prétendre à l’indemnité accordée aux citoyens acquittés par le tribunal révolutionnaire; mais qu’à raison de leur indigence et de l’éloignement de leur domicile, il est juste de leur accorder des secours, « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à chacun des citoyens Beau, Labrosse, Danger, Cuperly, Marchandon, Perrot et Dardan, la somme de 200 liv., à titre de secours, et pour les aider à retourner dans leur domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé » (2). (l) P.V., XLI, 243. Minute de la main de Pottier. Décret n° 9924. J. S. Culottes, n°516; J. Perlet, n°661; J. Sablier, n° 1438; J. Fr., n°658; M.U., XLI, 443. (2) P.V., XLI, 244. Minute de la main de Briez. Décret n°9925. Reproduit dans B1", 28 mess. (ler suppl1). « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité dé liquidation, décrète : « En conformité des articles VI et X du titre II de la loi du 22 août 1790, il sera payé par la trésorerie nationale, à titre de gratification annuelle et viagère, au citoyen Jean-Baptiste Du-rat-Lasalle, officier de santé, la somme de 500 liv., à compter du 1er Janvier 1791, sous la déduction de ce qu’il peut avoir reçu sur l’ancienne pension dont il jouissoit, et en se conformant à toutes les lois rendues pour les-dits pensionnaires de l’état. « Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de correspondance »(l). 51 OUDOT, au nom des comités de sûreté générale et de législation : Le tribunal d’appel de la police du département de Paris demande à la Convention « si les comités révolutionnaires sont compétents pour saisir chez les citoyens des comestibles ou d’autres marchandises à vendre ». Cette question importante a été examinée avec attention par vos comités de sûreté générale et de législation, et c’est en leur nom que je viens vous faire un rapport sur le référé du tribunal d’appel de Paris. Les raisons que ce tribunal a de douter de la compétence des comités révolutionnaires pour ces sortes de saisies sont qu’il y a des commissaires nommés ad hoc, et qui sont spécialement chargés de surveiller la déclaration des marchandises, par la loi du 12 germinal; Que par leur institution les comités révolutionnaires ont plutôt la surveillance des personnes et des opinions que celle des choses; et que d’ailleurs la loi du 14 frimaire défend à tous les fonctionnaires publics d’étendre leurs fonctions, et leur ordonne de se conformer strictement à ce que prescrivent les lois pour les limites de leur compétence. Le tribunal de police a communiqué deux procédures qui ont eu lieu d’après les saisies faites par des comités révolutionnaires, qui, parmi plusieurs autres de ce genre, peuvent faire connaître les abus qui résultent de cette extension d’autorité. L’une de ces deux procédures les manifestera surtout d’une manière évidente. Le 27 pluviôse, le comité révolutionnaire de la section de Bon-Conseil a dressé un procès-verbal chez une marchande, parce que l’on a trouvé chez elle de l’eau-de-vie qui n’avait que 15 à 16 degrés. Le scellé a été mis sur une tonne de 500 pintes, et il a été établi un gardien dans le domicile de cette femme. (l) P.V., XLI, 244. Minute de la main de Pottier. Décret n° 9926. Reproduit dansB'", 28 mess. (ler suppl1). 156 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Cette visite a été faite sur la dénonciation d’un citoyen; mais il n’est pas dit s’il avait acheté de cette liqueur, et si ce citoyen l’avait payée au-dessus du maximum. Je dois ajouter néanmoins que, par un arrêté du corps municipal, l’eau de vie fixée au maximum devait avoir dix-huit degrés. Ce procès-verbal porté à la police municipale, cette femme a été condamnée à 50 liv. d’amende et à la confiscation de son eau-de-vie. Je suis porté à croire qu’il y avait de fortes raisons de soupçonner que cette femme vendait au moins le prix du maximum cette eau-de-vie, qui n’était pas au degré prescrit par la loi, ce qui était par conséquent un délit ; mais il n’était prouvé nulle part qu’elle en eût effectivement vendu au maximum, et qu’elle ne la donnait pas à un prix inférieur, comme marchandise de moindre qualité. Au surplus, il n’est pas question d’examiner le fond; c’est la compétence de l’autorité qui a fait la saisie qui doit seule nous occuper. Nous nous contenterons d’observer : 1° Que cette procédure, irrégulière dans son origine par l’autorité qui l’avait commencée, il ne paraît pas qu’il soit sorti des preuves suffisantes pour condamner la femme chez laquelle on a saisi l’eau-de-vie, à moins qu’elle n’ait fait d’ailleurs des aveux qui ne soient pas venus à notre connaissance ; 2° Qu’on a établi un gardien chez cette femme, pour la sûreté d’une tonne d’eau-de-vie, sur laquelle on avait mis les scellés et qu’on pouvait déplacer, et que ce gardien a coûté, pendant moins d’un mois, 168 liv., ce qui est une autre espèce d’abus qu’il n’est pas inutile de faire connaître. Que les autorités constituées redoublent de zèle et de sévérité pour seconder le gouvernement révolutionnaire; mais il ne faut pas que cette sévérité induise à condamner sans preuve et à vexer par des frais inutiles. Quoi qu’il en soit, la seconde procédure présente des inconvénients bien plus considérables, et vous verrez que leurs effets pourraient avoir coïncidé avec les projets des ennemis de la patrie, et notamment celui d’affamer Paris, qu’avaient les Hébert, les Chaumette et leurs complices. Le 7 ventôse, le citoyen Marcou-Bourgeon, marchand coquetier de Noisy, département du Loiret, amena des comestibles à Paris, et y arriva à 8 heures du soir. Il déposa ses marchandises chez son beau-frère, qui demeure dans l’enclos du Temple; mais ces marchandises furent saisies à 11 heures du même jour par le comité révolutionnaire de la section du Temple, sous le prétexte qu’il n’y avait point eu de déclaration de ces objets. Le procès-verbal fut commencé le 7, à 11 heures du soir, et continué le lendemain 8, et Marcou-Bourgeon et son beau-frère furent interrogés. Il résulte de cet acte que Bourgeon est marchand coquetier; qu’il est dans l’usage de faire des tournées dans les départements voisins de celui de Paris, pour y apporter des comestibles; qu’il avait sur sa voiture 500 douzaines d’œufs, 200 livres de beurre, 27 poules, du sucre, et plusieurs autres denrées; qu’il comptait faire sa déclaration, mais cependant qu’il ne savait pas qu’il y fût obligé. (Et en effet, je ne vois pas que les marchands forains, ceux qui apportent des denrées, soient astreints à faire des déclarations dans les lieux où ils vont colporter leurs marchandises). Il résulte encore du procès-verbal qu’il vendait son beurre à des fruitiers; enfin, il paraît que son beau-frère est convenu, dans ses réponses, qu’il recevait habituellement ses marchandises, et que Bourgeon en avait vendu quelquefois chez lui. Sur ce procès-verbal est intervenu, le 18 ventôse, à la police municipale de Paris, un jugement qui a déclaré les comestibles et denrées confisqués, en a ordonné la vente, et a condamné le marchand a 300 liv. d’amende. Il n’est pas difficile de sentir que, si la police municipale avait rendu fréquemment de semblables décisions, elle n’aurait pas tardé à établir la famine la plus affreuse au milieu de l’immense population de Paris. Et n’est-ce pas à de semblables jugements qu’on a dû la disette réelle que nous avons éprouvée des denrées de première nécessité pendant tout le printemps ? Observez combien est injuste ce jugement, et combien la saisie était vexatoire. Marcou-Bourgeon arrive le 7 ventôse, à 8 heures du soir; il est saisi à 11 heures. Il est saisi sous prétexte de n’avoir pas fait de déclaration, et cependant les marchands forains n’en doivent pas. Ce prétexte n’existant plus, on en imagine un autre : on prétend qu’il a vendu ailleurs que sur la place; cependant il n’y a aucune preuve qu’il ait vendu autre part qu’au marché; et on se sert, pour le condamner, de ce qui est dit dans les réponses de son beau-frère, en parlant des marchandises qu’il déposait habituellement dans sa maison, qu’il en avait chez lui. Ce qui ne pouvait s’entendre que de celles qu’il avait amenées précédemment; car il ne pouvait être alors question de celles arrivées à huit heures et saisies à onze heures de la même soirée. D’un autre côté, Bourgeon n’est nullement convenu de ce fait. Ainsi, il avait été saisi pour défaut de déclaration, et il est puni de la confiscation de toutes ses marchandises, et de l’amende de 300 liv., sous le prétexte qu’il avait vendu précédemment d’autres marchandises ailleurs qu’au marché, et ce fait n’est pas prouvé. C’est, il n’en faut pas douter, à de semblables persécutions que nous devons la pénurie qui a eu lieu dans cette grande commune, les inquiétudes et les malheurs du peuple. Une pareille vexation, à l’époque où Chaumette et Hébert étaient encore en place, et où ils cherchaient à agiter les esprits, est évidemment une nouvelle preuve contre eux du projet qu’ils avaient d’affamer Paris. Je suis loin de vouloir inculper les comités révolutionnaires qui ont, par un zèle peu éclairé, favorisé de telles vues; mais il résulte bien clairement des faits que je vous ai cités qu’il est extrêmement facile d’abuser les fonctionnaires peu instruits, et que les ennemis de la chose publique les induisent à faire tourner contre le peuple les lois bienfaisantes que vous faites pour le garantir de la disette, de l’accaparement, et de tous les fléaux par lesquels les contre-révolutionnaires s’attachent à le tourmenter. Enfin, la conséquence qu’en ont tirée vos comités de législation et de sûreté générale est que rien 156 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Cette visite a été faite sur la dénonciation d’un citoyen; mais il n’est pas dit s’il avait acheté de cette liqueur, et si ce citoyen l’avait payée au-dessus du maximum. Je dois ajouter néanmoins que, par un arrêté du corps municipal, l’eau de vie fixée au maximum devait avoir dix-huit degrés. Ce procès-verbal porté à la police municipale, cette femme a été condamnée à 50 liv. d’amende et à la confiscation de son eau-de-vie. Je suis porté à croire qu’il y avait de fortes raisons de soupçonner que cette femme vendait au moins le prix du maximum cette eau-de-vie, qui n’était pas au degré prescrit par la loi, ce qui était par conséquent un délit ; mais il n’était prouvé nulle part qu’elle en eût effectivement vendu au maximum, et qu’elle ne la donnait pas à un prix inférieur, comme marchandise de moindre qualité. Au surplus, il n’est pas question d’examiner le fond; c’est la compétence de l’autorité qui a fait la saisie qui doit seule nous occuper. Nous nous contenterons d’observer : 1° Que cette procédure, irrégulière dans son origine par l’autorité qui l’avait commencée, il ne paraît pas qu’il soit sorti des preuves suffisantes pour condamner la femme chez laquelle on a saisi l’eau-de-vie, à moins qu’elle n’ait fait d’ailleurs des aveux qui ne soient pas venus à notre connaissance ; 2° Qu’on a établi un gardien chez cette femme, pour la sûreté d’une tonne d’eau-de-vie, sur laquelle on avait mis les scellés et qu’on pouvait déplacer, et que ce gardien a coûté, pendant moins d’un mois, 168 liv., ce qui est une autre espèce d’abus qu’il n’est pas inutile de faire connaître. Que les autorités constituées redoublent de zèle et de sévérité pour seconder le gouvernement révolutionnaire; mais il ne faut pas que cette sévérité induise à condamner sans preuve et à vexer par des frais inutiles. Quoi qu’il en soit, la seconde procédure présente des inconvénients bien plus considérables, et vous verrez que leurs effets pourraient avoir coïncidé avec les projets des ennemis de la patrie, et notamment celui d’affamer Paris, qu’avaient les Hébert, les Chaumette et leurs complices. Le 7 ventôse, le citoyen Marcou-Bourgeon, marchand coquetier de Noisy, département du Loiret, amena des comestibles à Paris, et y arriva à 8 heures du soir. Il déposa ses marchandises chez son beau-frère, qui demeure dans l’enclos du Temple; mais ces marchandises furent saisies à 11 heures du même jour par le comité révolutionnaire de la section du Temple, sous le prétexte qu’il n’y avait point eu de déclaration de ces objets. Le procès-verbal fut commencé le 7, à 11 heures du soir, et continué le lendemain 8, et Marcou-Bourgeon et son beau-frère furent interrogés. Il résulte de cet acte que Bourgeon est marchand coquetier; qu’il est dans l’usage de faire des tournées dans les départements voisins de celui de Paris, pour y apporter des comestibles; qu’il avait sur sa voiture 500 douzaines d’œufs, 200 livres de beurre, 27 poules, du sucre, et plusieurs autres denrées; qu’il comptait faire sa déclaration, mais cependant qu’il ne savait pas qu’il y fût obligé. (Et en effet, je ne vois pas que les marchands forains, ceux qui apportent des denrées, soient astreints à faire des déclarations dans les lieux où ils vont colporter leurs marchandises). Il résulte encore du procès-verbal qu’il vendait son beurre à des fruitiers; enfin, il paraît que son beau-frère est convenu, dans ses réponses, qu’il recevait habituellement ses marchandises, et que Bourgeon en avait vendu quelquefois chez lui. Sur ce procès-verbal est intervenu, le 18 ventôse, à la police municipale de Paris, un jugement qui a déclaré les comestibles et denrées confisqués, en a ordonné la vente, et a condamné le marchand a 300 liv. d’amende. Il n’est pas difficile de sentir que, si la police municipale avait rendu fréquemment de semblables décisions, elle n’aurait pas tardé à établir la famine la plus affreuse au milieu de l’immense population de Paris. Et n’est-ce pas à de semblables jugements qu’on a dû la disette réelle que nous avons éprouvée des denrées de première nécessité pendant tout le printemps ? Observez combien est injuste ce jugement, et combien la saisie était vexatoire. Marcou-Bourgeon arrive le 7 ventôse, à 8 heures du soir; il est saisi à 11 heures. Il est saisi sous prétexte de n’avoir pas fait de déclaration, et cependant les marchands forains n’en doivent pas. Ce prétexte n’existant plus, on en imagine un autre : on prétend qu’il a vendu ailleurs que sur la place; cependant il n’y a aucune preuve qu’il ait vendu autre part qu’au marché; et on se sert, pour le condamner, de ce qui est dit dans les réponses de son beau-frère, en parlant des marchandises qu’il déposait habituellement dans sa maison, qu’il en avait chez lui. Ce qui ne pouvait s’entendre que de celles qu’il avait amenées précédemment; car il ne pouvait être alors question de celles arrivées à huit heures et saisies à onze heures de la même soirée. D’un autre côté, Bourgeon n’est nullement convenu de ce fait. Ainsi, il avait été saisi pour défaut de déclaration, et il est puni de la confiscation de toutes ses marchandises, et de l’amende de 300 liv., sous le prétexte qu’il avait vendu précédemment d’autres marchandises ailleurs qu’au marché, et ce fait n’est pas prouvé. C’est, il n’en faut pas douter, à de semblables persécutions que nous devons la pénurie qui a eu lieu dans cette grande commune, les inquiétudes et les malheurs du peuple. Une pareille vexation, à l’époque où Chaumette et Hébert étaient encore en place, et où ils cherchaient à agiter les esprits, est évidemment une nouvelle preuve contre eux du projet qu’ils avaient d’affamer Paris. Je suis loin de vouloir inculper les comités révolutionnaires qui ont, par un zèle peu éclairé, favorisé de telles vues; mais il résulte bien clairement des faits que je vous ai cités qu’il est extrêmement facile d’abuser les fonctionnaires peu instruits, et que les ennemis de la chose publique les induisent à faire tourner contre le peuple les lois bienfaisantes que vous faites pour le garantir de la disette, de l’accaparement, et de tous les fléaux par lesquels les contre-révolutionnaires s’attachent à le tourmenter. Enfin, la conséquence qu’en ont tirée vos comités de législation et de sûreté générale est que rien SÉANCE DU 26 MESSIDOR AN II (14 JUILLET 1794) - Nos 52-54 157 n’est plus sage que la disposition de l’article XV de la section III de la loi du 14 frimaire (l), qui défend aux fonctionnaires publics « de faire des actes qui ne sont pas de leur compétence, d’empiéter sur d'autres autorités, et d’outrepasser les fonctions qui leur sont déléguées, ou de s’arroger celles qui ne leur sont pas confiées ». Ici il y a des fonctionnaires préposés par la loi du 12 germinal pour la recherche des marchandises accaparées; il y en avait aussi d’institués par la loi du 26 juillet 1793. Ces commissaires, nommés par les municipalités, sont chargés de faire les visites domiciliaires, de veiller aux déclarations, de dresser des procès-verbaux des contraventions. D’un autre côté, c’est aux municipalités à veiller à l’exécution de la loi du maximum, et aux juges de paix; c’est encore aux municipalités à veiller à ce qu’on ne vende point ailleurs. Ainsi, sous tous les points de vue, les comités de surveillance ne sont pas autorisés à faire les fonctions qu’ils ont exercées dans les deux affaires dont je vous ai rendu compte. Chaque autorité a sa compétence, et il est évident que l’esprit de la loi du 14 frimaire est de prévenir la confusion des pouvoirs et l’extension des fonctions, hors les cas qui sont prescrits par les lois; en un mot, de restreindre les autorités constituées dans les bornes que la Convention leur a prescrites. Dans ces circonstances, les comités de sûreté générale et de législation m’ont chargé de vous proposer le projet de décret suivant : [adopté] (2). « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [OUDOT, au nom de] ses comités de législation et de sûreté générale, sur la question proposée par l’agent national du tribunal d’appel de la police du département de Paris, tendante à savoir si les comités de surveillance et révolutionnaires sont compétens pour faire des saisies de marchandises et de comestibles, sous le prétexte qu’elles n’ont pas été déclarées conformément à la loi du 12 germinal : « Considérant que la surveillance attribuée aux comités révolutionnaires a plutôt pour objet les personnes et les opinions que les choses ; que la loi a chargé les municipalités et les commissaires aux accapare mens de recevoir les déclarations des marchandises, de dresser les procès-verbaux des contraventions faites aux lois contre les accaparemens, de surveiller la police du commerce, qu’enfïn la loi du 14 frimaire ordonne à tout fonctionnaire public de se restreindre, dans l’exercice de leurs fonctions, à celles qui leur sont précisément attribuées par la loi, Déclare qu’il n’y a pas lieu à délibérer (3). (l) Voir Arch. pari T. LXXX, séance du 14 frimaire, p. 629. (2) Mon., XXI, 247. (3) P.V., XLI, 245. Minute de la main de Oudot. Décret n°9927. Reproduit dans Bm, 30 mess (ler suppl1); M.U., XLI, 443-444 ; Débats, n° 662 ; J. Mont., n° 79 ; -J. Matin, n°718; -J. Uniu., n° 1695; F.S.P., n° 375; Mess, soir, n° 695 ; C. Uniu., n° 926 ; J. Fr., n° 658 ; Ann. R.F., n° 226 ; Audit, nat., n°659; -J.S. Culottes, n°515; .J. Perlet, n°660. 52 « La Convention nationale, sur le rapport de son comité de liquidation, décrète : Il sera payé, par la trésorerie nationale, au citoyen Gilbert Brung, qui jouissoit d’une pension de 400 liv. sur la fondation des écoles militaires, la somme de 200 liv., à titre de secours provisoire, pour les 6 premiers mois de l’année 1792, en se conformant aux lois rendues pour tous les pensionnaires de l’état, et en justifiant que, dans les délais prescrits, il a déposé au bureau de la direction générale de la liquidation son certificat de résidence, et les titres justificatifs de sa pension, conformément aux décrets des 26 mars et 13 juin 1793. Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de correspondance (l). ». 53 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [COLLOMBEL, au nom de] son comité des secours publics, sur la pétition de la section de l’Homme-armé, en faveur du père de Nicolas Vacher, garçon tonnelier, qui est tombé dans une chaudière d’eau bouillante, en travaillant au salpêtre, le 7 floréal dernier, et du citoyen Charté, qui, après avoir plongé deux fois ses bras dans la liqueur bouillante, est parvenu à retirer le jeune Vacher, qui est mort trois heures après, décrète : « Art. I. Il sera payé par la trésorerie nationale, sur le vu du présent décret, une somme de 300 liv. à Vacher père, par forme de secours provisoire, et une pareille somme de 300 liv. au citoyen Charté, à titre d’indemnité. « Art. IL Les pièces sur lesquelles est intervenu le présent décret, qui ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance, seront envoyées d’abord au comité d’instruction publique pour recueillir l’action héroïque de Charté, et enfin, au comité de liquidation pour régler la pension qui pourroit être due à l’un et à l’autre, s’il y a lieu » (2). 54 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Pottier, au nom de] ses comi-(l) P.V., XLI, 245. Minute de la main de Pottier. Décret n°9940. Reproduit dans Bm, 28 mess. (ler suppl1); M.U., XLI, 444. (2) P.V., XLI, 246. Minute de la main de Collombel. Décret n°9928. Reproduit dans Bm, 28 mess. (ler suppl1); M.U., XLI, 444 ; J. Mont., n° 79 ; Débats, n° 662 ; J. Sablier, n° 1438; J. Fr., n°658; Mess, soir, n°694; Audit, nat., n° 659 ; C. Uniu., n° 926; Ann. patr., n°DLX; J. Lois, n° 654 ; C. Eg., n° 695 ; Ann. R. F., n° 226 (cette dernière gazette attribue le rapport à Pottier). Voir Arch. pari. T. XCII, séance du 10 mess. n°34. SÉANCE DU 26 MESSIDOR AN II (14 JUILLET 1794) - Nos 52-54 157 n’est plus sage que la disposition de l’article XV de la section III de la loi du 14 frimaire (l), qui défend aux fonctionnaires publics « de faire des actes qui ne sont pas de leur compétence, d’empiéter sur d'autres autorités, et d’outrepasser les fonctions qui leur sont déléguées, ou de s’arroger celles qui ne leur sont pas confiées ». Ici il y a des fonctionnaires préposés par la loi du 12 germinal pour la recherche des marchandises accaparées; il y en avait aussi d’institués par la loi du 26 juillet 1793. Ces commissaires, nommés par les municipalités, sont chargés de faire les visites domiciliaires, de veiller aux déclarations, de dresser des procès-verbaux des contraventions. D’un autre côté, c’est aux municipalités à veiller à l’exécution de la loi du maximum, et aux juges de paix; c’est encore aux municipalités à veiller à ce qu’on ne vende point ailleurs. Ainsi, sous tous les points de vue, les comités de surveillance ne sont pas autorisés à faire les fonctions qu’ils ont exercées dans les deux affaires dont je vous ai rendu compte. Chaque autorité a sa compétence, et il est évident que l’esprit de la loi du 14 frimaire est de prévenir la confusion des pouvoirs et l’extension des fonctions, hors les cas qui sont prescrits par les lois; en un mot, de restreindre les autorités constituées dans les bornes que la Convention leur a prescrites. Dans ces circonstances, les comités de sûreté générale et de législation m’ont chargé de vous proposer le projet de décret suivant : [adopté] (2). « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [OUDOT, au nom de] ses comités de législation et de sûreté générale, sur la question proposée par l’agent national du tribunal d’appel de la police du département de Paris, tendante à savoir si les comités de surveillance et révolutionnaires sont compétens pour faire des saisies de marchandises et de comestibles, sous le prétexte qu’elles n’ont pas été déclarées conformément à la loi du 12 germinal : « Considérant que la surveillance attribuée aux comités révolutionnaires a plutôt pour objet les personnes et les opinions que les choses ; que la loi a chargé les municipalités et les commissaires aux accapare mens de recevoir les déclarations des marchandises, de dresser les procès-verbaux des contraventions faites aux lois contre les accaparemens, de surveiller la police du commerce, qu’enfïn la loi du 14 frimaire ordonne à tout fonctionnaire public de se restreindre, dans l’exercice de leurs fonctions, à celles qui leur sont précisément attribuées par la loi, Déclare qu’il n’y a pas lieu à délibérer (3). (l) Voir Arch. pari T. LXXX, séance du 14 frimaire, p. 629. (2) Mon., XXI, 247. (3) P.V., XLI, 245. Minute de la main de Oudot. Décret n°9927. Reproduit dans Bm, 30 mess (ler suppl1); M.U., XLI, 443-444 ; Débats, n° 662 ; J. Mont., n° 79 ; -J. Matin, n°718; -J. Uniu., n° 1695; F.S.P., n° 375; Mess, soir, n° 695 ; C. Uniu., n° 926 ; J. Fr., n° 658 ; Ann. R.F., n° 226 ; Audit, nat., n°659; -J.S. Culottes, n°515; .J. Perlet, n°660. 52 « La Convention nationale, sur le rapport de son comité de liquidation, décrète : Il sera payé, par la trésorerie nationale, au citoyen Gilbert Brung, qui jouissoit d’une pension de 400 liv. sur la fondation des écoles militaires, la somme de 200 liv., à titre de secours provisoire, pour les 6 premiers mois de l’année 1792, en se conformant aux lois rendues pour tous les pensionnaires de l’état, et en justifiant que, dans les délais prescrits, il a déposé au bureau de la direction générale de la liquidation son certificat de résidence, et les titres justificatifs de sa pension, conformément aux décrets des 26 mars et 13 juin 1793. Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de correspondance (l). ». 53 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [COLLOMBEL, au nom de] son comité des secours publics, sur la pétition de la section de l’Homme-armé, en faveur du père de Nicolas Vacher, garçon tonnelier, qui est tombé dans une chaudière d’eau bouillante, en travaillant au salpêtre, le 7 floréal dernier, et du citoyen Charté, qui, après avoir plongé deux fois ses bras dans la liqueur bouillante, est parvenu à retirer le jeune Vacher, qui est mort trois heures après, décrète : « Art. I. Il sera payé par la trésorerie nationale, sur le vu du présent décret, une somme de 300 liv. à Vacher père, par forme de secours provisoire, et une pareille somme de 300 liv. au citoyen Charté, à titre d’indemnité. « Art. IL Les pièces sur lesquelles est intervenu le présent décret, qui ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance, seront envoyées d’abord au comité d’instruction publique pour recueillir l’action héroïque de Charté, et enfin, au comité de liquidation pour régler la pension qui pourroit être due à l’un et à l’autre, s’il y a lieu » (2). 54 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Pottier, au nom de] ses comi-(l) P.V., XLI, 245. Minute de la main de Pottier. Décret n°9940. Reproduit dans Bm, 28 mess. (ler suppl1); M.U., XLI, 444. (2) P.V., XLI, 246. Minute de la main de Collombel. Décret n°9928. Reproduit dans Bm, 28 mess. (ler suppl1); M.U., XLI, 444 ; J. Mont., n° 79 ; Débats, n° 662 ; J. Sablier, n° 1438; J. Fr., n°658; Mess, soir, n°694; Audit, nat., n° 659 ; C. Uniu., n° 926; Ann. patr., n°DLX; J. Lois, n° 654 ; C. Eg., n° 695 ; Ann. R. F., n° 226 (cette dernière gazette attribue le rapport à Pottier). Voir Arch. pari. T. XCII, séance du 10 mess. n°34.