530 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 avril 1791.] remplacer. Le dimanche 20, M. Couturier, curé de Salives, a annoncé au prône de la messe paroissiale qu’il n’avait pas prêté le serment prescrit, et qu’il ne le prêterait point, non plus que M. son frère, curé de Léry ; mais que celui qui lui succéderait n’aurait aucun pouvoir; que les absolutions qu’il pourrait donner ne vaudraient rien; qu’il donnerait sa démission... » Plusieurs membres : A Orléans ! à Orléans ! M. le secrétaire, continuant la lecture. « Nous ne ferons aucune réflexion sur les effets que peuvent produire dans les campagnes des propos de ce genre, de la part des membres du Corps législatif. Nous ajouterons seulement que le directoire du district d’Is-sur-Tille, par respect pour le caractère de M. Couturier, s’est contenté de rendre compte du fait au directoire du département; et les mêmes motifs nous déterminent à user de la même circonspection, nous reposant sur l’Assemblée nationale du soin de prévenir le retour de pareils écarts, en rappelant ce député dans son sein. « Signé : Les Administrateurs du département de la Côte-d’Or. » M. Couturier. Messieurs, j’ai l’honneur de de vous avertir que, profitant d’un congé de 3 semaines que j’ai obtenu de l’Assemblée, je n’ai point excédé ce terme; je me suis comporté dans ma paroisse, avec toute la circonspection possible. J’ai invité mes paroissiens à l’obéissance aux décrets de l’Assemblée; j’ai lu avant la messe paroissiale la lettre dont vous pouvez voir copie ici, pour donner de nouvelles marques de la loyauté avec laquelle je leur avais toujours expliqué les vérités de la religion; et même je leur avais expliqué la dernière instruction de l’Assemblée nationale, en leur annonçant le respect qu’ils devaient à la loi. Il est vrai que je leur ai dit que jusqu’à ce que l’autorité ecclésiastique qui m’avait investi de pouvoirs m’eût destitué, je me regarderais comme curé de la paroisse; mais en même temps je leur ai recommandé de ne faire aucune résistance, lorsqu’on enverrait ..... » (Murmures.) M. Gembert. A l’ordre du jour! (L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) Un de MM. les secrétaires fait lecture de la note suivante du ministre de la justice : « Le roi a donné sa sanction, le 25 de ce mois : « 1° Aux décrets de l’Assemblée nationale des 5, 6, 11, 12, 19 juin 1789, 3 et 21 juillet, 7, 13, 14 et 16 août, 4 et 10 septembre 1790, sur la dépense publique; «. 2° Au décret des 7 et 9 mars présent mois, sur le recrutement, les engagements, les rengagements et les congés; « 3° Au décret du 18, sur les droits d’entrée des denrées coloniales; « 4° Au décret du 22, relatif à la vente des domaines nationaux aux municipalités; « 5° Au décret du même jour, concernant les désordres qui ont eu lieu dans la ci-devant province du Maçonnais, aux mois de juillet et août 1789; « 6° Au décret du 23, relatif à une maison à louer par le directoire du district de Beaugency ; « 7° Au décret du même jour, concernant le district de Perpignan, département des Pyrénées-Orientales; « 8° Au décret du même jour, concernant la suppression et réunion de quelques paroisses de la ville de Blois; ». 9Û Et, le 27, au décret du 5 février, relatif aux prédicateurs, compris parmi les fonctionnaires publics tenus de prêter serment; « 10° Au décret du 3 de ce mois, concernant l’envoi, aux hôtels des Monnaies, de l’argenterie des églises, chapitres et communautés religieuses, qui a été ou pourra être jugée inutile au culte; « 11° Au décret du 10, concernant les employés à la régie des droits sur les draperies et soieries; « 12° Au décret du 11, concernant la suppression des places des hôtels de la guerre, et le renvoi à la liste civile du traitement des 3 ingénieurs géographes; « 13° Au décret des 3, 4, 5, 6, 14 et 15 mars, contenant des dispositions relatives à l’organisation des corps administratifs; « 14° Au décret du 15, concernant le payement d’indemnités de différentes charges, brevets de retenue, et autres objets; « 15° Au décret du même jour, concernant la suppression et réunion des paroisses de la ville de Troyes ; « 16° Au décret du même jour, relatif à l’échange du Glermontois ; « 17° Et enfin au décret du 16, concernant le compte que le ministre de la guerre rendra incessamment à l’Assemblée nationale de la formation de la gendarmerie nationale et du recrutement de l’armée auxiliaire. « Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrets, sur chacune desquelles est la sanction du roi. » « Signé : M.-L.-F. DüPORT. « Paris, le 31 mars 1791. » L’ordre du jour est un rapport des comités de Constitution et des monnaies sur V établissement d'une commission chargée de remplacer la cour des monnaies. M. de Cussy, au nom des comités de Constitution et des monnaies. Messieurs, le public attend avec empressement l’effet du décret du 11 janvier dernier, par lequel vous avez ordonné une fabrication de 15 millions de pièces de 30 et de 15 sols; vous partagerez vous-mêmes ce juste sentiment d’impatience par le louable désir de subvenir aux embarras que la pénurie des espèces occasionne journellement dans les échanges et dans les marchés publics. Le rapporteur est prêt à vous faire connaître les soins auxquels votre comité s’est livré pour se mettre à portée de vous présenter des types et des emblèmes dignes de caractériser les monnaies d’une nation qui vient de se régénérer; mais avant de commencer aucun travail nouveau dans vos monnaies, il fallait organiser la commission dont vous avez ordonné l’établissement par votre décret du 6 septembre, portant suppression de la cour et des juridictions des monnaies; il fallait rechercher et vous dénoncer les abus qui se sont glissés dans cette partie. Il n’est aucun de vous, Messieurs, qui ne soit convaincu combien l’établissement de cett� commission est urgent. De son organisation dépend la rentrée immédiate au Trésor public d’une quantité assez considérable d’espèces fabriquées pour que, dans ces moments de détresse, elle ne doive point être négligée. [Assemblée nationale.] Les espèces d’or restées sous les scellés de la cour des Monnaies, par les essais tendant aux jugements des monnaies d’or fabriquées dans les années 1786, 1787, 1788 et 1789, ensemble quelques lingots et louis de l’ancienne et de la nouvelle fabrication, forment un capital de 89,276 1. 3 s. 10 d. Les deniers d’or et d’argent, réservés pour le jugement de la fabrication de l’année 1790, montent à près de 160,000 livres. Les fonds appartenant à la nation, qui se trouvent dispersés entre les mains des directeurs des 17 Monnaies du royaume, tant en matières qu’en espèces, forment un capital de plus de 1,600,000 livres. Les restitutions ordonnées et les condamnations prononcées anciennement contre les directeurs des Monnaies montent à plus de 1,300,000 livres. Si la rentrée de ce dernier article a été négligée, c’est que les lois, d’après lesquelles les amendes ont été prononcées, sont évidemment trop rigoureuses; mais au moins peut-on compter sur la rentrée de la moitié de cet article. Voilà donc une somme de 2,500,000 livres en espèces fabriquées ou en matières prêtes à être fabriquées, dont l’organisation de la commission des monnaies doit procurer la rentrée prompte et certaine au Trésor public. Mais ce secours, tout important qu’il puisse être dans des moments de pénurie, ne sera pas le seul que vous trouverez, Messieurs, dans l’organisation de la commission des monnaies. Le travail d’une fabrication de plus de 700 millions en or n’est point jugé. Lorsque l’exploitation de cette mine féconde d’abus sera confiée à la commission, vous en tirerez de nouveaux et utiles secours. Il me suffit dans ce moment de vous annoncer que ce demi trente-deuxième dont un arrêt du conseil, que l’on a si amèrement et si impolitiquement critiqué, a obligé les directeurs des Monnaies de compter au fisc, opérera seul une restitution de 400,000 livres sur la totalité de la fabrication des louis. Que sera-ce si, lors du jugement, il se trouve que les directeurs se soient indûment approprié un trente-deuxième et deux trente-deuxièmes entiers ? Je dois ajouter que le faiblage sur le poids des louis deviendra pour le Trésor public une ressource non moins intéressante, mais je me borne en ce moment, Messieurs, à soulever le voile qui dérobe aux yeux de la multitude de ténébreuses et lucratives malversations. Un jour viendra sans doute où des mains plus accréditées le déchireront tout entier. La nation verra jusqu’à quel point on a abusé de sa confiance, de sa crédulité, de sa patience, en lui présentant des bénéfices chimériques et illusoires, au moment où la refonte de ses espèces d’or, affaiblies dans leur poids, a opéré la baisse de ses échanges et préparé la destruction et l’anéantissement de ses monnaies d’argent dont nous ressentons aujourd’hui les funestes et déplorables effets. Voici le projet de décret que je vous présente, au nom des comités réunis de Constitution et des Monnaies : « Art. 1er. La commission qui sera chargée, conformément à l’article 9 du titre IV du décret sur l’ordre judiciaire, de surveiller la fabrication des espèces et de pourvoir à la décharge définitive des directeurs des Monnaies, sera composée du ministre des finances, de 8 commissaires, d’un secrétaire général et d’un garde des dépôts, qui sera comptable et qui fournira caution. « Art. 2. Les commissaires, le secrétaire géné-531 ral et le garde des dépôts seront nommés par le roi, conformément aux dispositions du décret ci-devant énoncé. « Art. 3. Le garde des dépôts de la commission sera chargé des registres et papiers qui le concerneront ainsi qne des procès-verbaux, décisions et jugements relatifs à la fabrication et à la comptabilité, desquels il délivrera, gratis , toutes expéditions requises et nécessaires ; il sera pareillement chargé du dépôt des espèces et peuilles servant au jugement de la fabrication; de la recette des poinçons et matrices fournis par le graveur général, et de leur livraison ou envoi aux commissaires du roi dans les hôtels des Monnaies, et de tous les détails relatifs tant à l’approvisionnement du dépôt des réactifs et subsistances, qui sera établi en exécution de l’article 12, que de leur distribution. « Art. 4. Le roi sera prié de nommer, au nombre des officiers qui composeront cette commission : 1° Deux citoyens reconnus habiles dans l’art de fondre, allier et manipuler les métaux, qui seront choisis indistinctement, soit parmi les anciens directeurs des monnaies qui auront rempli leurs fonctions avec fidélité et n’auront point encouru de condamnations lors du jugement de leurs fabrications, soit parmi les orfèvres qui auront exercé leur profession pendant 20 ans avec honneur et loyauté; 2° un citoyen qui aura exercé avec distinction l’office d’essayeur, ou toute autre personne reconnue capable et instruite dans la science théorique et pratique des essais ; 3° enfin un citoyen instruit dans le calcul et la connaissance des changes, et de la valeur intrinsèque et comparative des monnaies étrangères. « Art. 5. La commission tiendra ses séances à l’hôtel des Monnaies aux jours et heures qui seront indiqués. « Art. 6. Elle sera chargée de la rédaction des tarifs qui détermineront le titre et le poids, d’après lesquels les espèces et matières d’or et d’argent seront reçues au change; elle fera procéder en conséquence, toutes les fois qu’elle le jugera convenable, à la vérification du titre des espèces étrangères nouvellement fabriquées, afin d’observer les variations qu’il pourrait éprouver; elle rendra publics les résultats de ces vérifications lorsqu’il lui paraîtra nécessaire que le commerce en ait connaissance ; mais elle ne pourra, dans aucun cas, changer les dispositions des tarifs actuels, ni en publier de nouveaux sans y avoir été autorisée par un décret du Corps législatif, sanctionné par le roi. « Art. 7. Elle fera parvenir aux changeurs les tarifs et règlements qui leur seront nécessaires; elle statuera sur les difficultés qui pourraient s’élever entre eux et les directeurs des monnaies, relativement à la recette des produits du change. Elle pourra les révoquer s’ils se rendent coupables de quelque malversation dans l’exercice de leurs fonctions. « Art. 8. Elle connaîtra des contraventions que pourraient commettre les fonctionnaires préposés soit à la fabrication des espèces, soit à la surveillance du travail de cette fabrication dans les hôtels des Monnaies, relativement à l’exercice de leurs fonctions seulement; elle pourra les révoquer dans les cas qui seront déterminés par la loi; et, lorsqu’il y aura lieu à des restitutions et amendes, ou à quelque peine autre que la révocation, elle fera remettre au commissaire du roi, établi près le tribunal du district, dans l’arrondissement dnquel l’hôtel de la Monnaie se trou-ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 avril 1791.J