218 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 42 [Adresse de la commune de Béthune, département du Pas-de-Calais, à la Convention nationale] (151) Une adresse lue à la barre de la Convention nationale, au nom de la société populaire de Béthune, vient de calomnier cette commune de la manière la plus perfide. On la représente en contre-révolution ouverte. On lui attribue des faits qui ne se sont jamais passés dans son sein, et ses habitans y sont traités avec la dernière indécence. Ce n’est pas sans doute la société populaire qui fait ce reproche au peuple. Nous aimons à lui rendre justice. La masse en étoit bonne. Cette insulte aux citoyens de Béthune ne peut être attribuée qu’aux meneurs de cette société qui ont comprimé les autres par la terreur, jusqu’au moment de l’épuration que vient d’en ordonner le représentant du peuple Berlier. Ils se sont plaints d’avoir vu leurs séances troublées par des huées inciviques et séditieuses, parce qu’ils trouvoient extraordinaire qu’on osât contrarier leurs opinions terrifiques et user du droit le plus sacré de l’homme, celui d’élever la voix pour se plaindre de ses dominateurs. Le tems n’est plus où la pensée étoit enchaînée et la liberté une chimère. Ils nous ont reproché d’avoir substitué à cette sainte inscription la république ou la mort, cette sentence contre-révolutionnaire : prends garde à toi, ton règne n’est plus. Jamais notre commune ne s’est souillée d’une semblable horreur. Nous pouvons même assurer que, s’il s’est passé quelque chose d’approchant à l’extrémité d’une des communes de ce district, on a dénaturé ou exagéré le fait dans la méprisable adresse qui vous a été présentée. L’aristocratie et le modérantisme, y dit-on encore, lèvent ici une tète audacieuse. Citoyens représentons, vous savez maintenant apprécier à sa juste valeur cette phrase bannale qu’on a fait tant de fois retentir à vos oreilles. Il vous suffira de vous rappeler que le représentant Berlier, instruit par le porteur même de l’adresse, est venu aussitôt vérifier les faits qu’elle contenoit. Il vous assure, par sa lettre du 4 vendémiaire, qu’on a pris pour le réveil de l’aristocratie, la sérénité universelle ramenée par le règne de la justice, qu’on veut fortement ici le maintien du gouvernement révolutionnaire, qui n’en est pas l’ennemi, mais qu’on abhorre l’arbitraire, qui, dans ce pays surtout, a fait tant de ravages, et qu’enfin, si quelques petits tyrans n’y trouvent pas leur compte, la liberté n’y perd rien, et que la Convention nationale, surtout, est le centre unique autour duquel nous nous rallions. Tels sont, en effet, nos sentimens. Loin que l’aristocratie lève ici une tête audacieuse, elle ne donne nulle part moins signe de vie, et si elle se trouvoit encore concentrée dans le coeur de quelques citoyens aveuglés ou endurcis, il est impossible qu’ils échappent à la surveillance universelle, ni même qu’ils résistent long-tems à l’éloquence douce et insinuante de l’ange de la paix que vous nous avez envoyé, et qui sait faire aimer la révolution, autant que son infâme prédécesseur étoit capable de la faire haïr et détester. Vive le peuple français et ses fidèles repré-sentans ! guerre à mort aux traîtres et aux tyrans de toute espèce. Fait en assemblée générale de commune, le 13 vendémiaire, an 3e de la République une et indivisible. Signé Dupont, Béhin, Muchembled, Dujardin, et plusieurs pages de signatures. (151) C. Eg., n" 789; mention M. U., XLIV, 410.