264 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE bres ces parties seront attribuées aux comités de commerce et d’agriculture. Art. VIII. Le comité de législation a la surveillance des administrations civiles et des tribunaux. Il est chargé des détails relatifs au recensement et à la classification des loix, et de la continuation des travaux commencés en exécution des décrets des 3 floréal et 11 prairial dernier (1). 7 Sur le rapport de [SALLENGROS, au nom de] son comité des secours publics, la Convention nationale rend le décret suivant : La Convention nationale après avoir entendu son comité des secours publics sur la pétition du citoyen Pierre-Louis Décosse, volontaire du 81e régiment d’infanterie, 4 e compagnie, qui se trouve perdu de ses membres et dans la plus grande détresse, ainsi que son père qui lui sert d’infirmier déjà depuis longtemps, décrète que la trésorerie nationale payera sur le vu du présent décret, au citoyen Pierre-Louis Décosse, volontaire au 81e régiment d’infanterie, la somme de 400 livres de secours provisoire; renvoie la pétition du citoyen Décosse au comité de liquidation pour déterminer les secours et pensions auxquels il peut avoir droit (2). 8 Des députés extraordinaires de l’administration du district et de la société populaire de Nîmes (3), admis à la barre, se plaignent des persécutions atroces, exercées contre leurs concitoyens patriotes, par les agens de Robespierre et complices, ainsi que par la commission populaire. La Convention les invite à sa séance, et adopte, sur la motion d’un membre, le décret suivant : La Convention nationale admet à sa barre des députés extraordinaires de l’administration du district et de la société populaire de Nîmes; ils la félicitent sur le courage qu’elle a déployé dans la nuit du 9 au 10 thermidor; ils peignent l’état d’oppression dans lequel cette commune gémit, et rendent compte des événements qui s’y sont passés à la nouvelle du supplice des derniers conspirateurs (4). L’orateur de la députation : Une nouvelle révolution vient de sauver encore une fois la patrie. C’est dans votre sein qu’elle s’est opérée; c’est votre courage qui l’a provoquée, c’est votre (1) J. Fr., nos 693-694; Ann. R.F., nos 259, 260; J. Mont., n° 111; C. Eg., n° 730; M.U., XLIII, 31; J. Perlet, n° 695; Ann. patr., n° DXCV; J. Lois, n° 693; Rép. n° 242. Mentionné par Débats, n° 697, 3; J.S. -Culottes, n° 550. (2) P.V., XLIV, 3. Décret n° 10 450. Rapport de Sallen-gros. (3) Gard. (4) P.V., XLIV, 3. sagesse et votre fermeté qui en ont assuré le succès. La liberté allait disparaître, et vous l’avez rappelée; les Français, retombés sous l’oppression des nouveaux tyrans, n’avaient bientôt plus qu’à choisir entre la mort et la servitude, et vous les avez rendus à leur élément. Vous vous êtes placés entre le peuple et ses oppresseurs; votre énergie et la force de la vérité ont écrasé les scélérats; le peuple a tout à coup recouvré ses droits; il a respiré, et son premier mouvement a été celui de la reconnaissance, son premier cri est celui de la liberté. Représentants, la société populaire de Nîmes nous députe vers vous pour vous témoigner sa satisfaction sur les événements mémorables des 9 et 10 thermidor; pour vous renouveler dans votre sein le serment de servir jusqu’à la mort la cause de la liberté, de poursuivre tous les tyrans sous quelque forme qu’ils se présentent, et pour vous inviter à rester à vos postes jusqu’à ce que tous les ennemis de la République soient terrassés, et que le gouvernement populaire, assis sur des bases inébranlables, aît assuré au peuple français la liberté, le repos et le bonheur. La société populaire de Nîmes, trop longtemps asservie par des intrigants, a aussi fait sa révolution. A l’exemple de la Convention nationale, elle a attaqué en face, et dans son sein même, les conspirateurs. Le crime était aussi à l’ordre du jour dans le département du Gard. L’oppression la plus tyrannique atteignait déjà les patriotes les plus durs. Ils étaient désignés comme des contre-révolutionnaires; leurs noms étaient couchés sur des listes de proscription. Plusieurs étaient incarcérés, et la hache des lois, destinée à punir le crime, allait tomber sur leurs têtes innocentes, quand un courrier extraordinaire, dépêché par le comité de salut public, annonça la suspension du tribunal. Une partie de la députation que vous voyez ici était alors dans les fers; nous allions périr, et les scélérats, croyant réparer leur faute, s’empressèrent aussitôt de nous élargir. La première nouvelle de la chute de Robespierre ne leur avait pas ravi tout espoir; ils firent encore des tentatives; ils essayèrent d’allumer la guerre civile en excitant le peuple, en le trompant sur les événements. Les conspirateurs ! Ils osaient dire encore que Robespierre avait été assassiné, que la vertu avait monté sur l’échafaud, que la Convention nationale faisait la contre-révolution. L’un d’eux, l’infâme Bourdon, juge au tribunal révolutionnaire, après avoir tenu ce langage à la tribune de la société, qui l’accablait de son indignation, se brûla la cervelle d’un coup de pistolet et tomba aux pieds de Courbis son complice. Ils proposèrent d’envoyer des commissaires dans les départements voisins pour y sonder l’opinion publique. Ils avaient préparé adroitement les gardes nationales des campagnes à servir leurs projets, en leur écrivant de se tenir prêtes à marcher au premier signal contre les ennemis intérieurs et extérieurs de la révolution. L’infâme Courbis, maire de Nîmes, agissait dans cette commune comme Robespierre dans celle de Paris. C’est lui qui dressait les listes de SÉANCE DU 1er FRUCTIDOR AN II (18 AOÛT 1794) - N° 9 265 proscription; c’est lui qui dictait les jugements du tribunal révolutionnaire; c’est lui qui, tous les décadis, insultait au malheur public par des fêtes et des bals où il présidait, et qui conduisait les farandoles que des prostituées et d’autres êtres immoraux faisaient autour de la guillotine qu’on avait mise en permanence. C’est lui enfin qui, par des épurations réitérées, tant dans les corps administratifs que dans les société populaire et la garde nationale, était parvenu à écarter tous les hommes fermes et clairvoyants, à désarmer beaucoup de patriotes, et à n’être entouré que de scélérats, d’hommes tarés, ou de quelques patriotes faibles qu’il tournait à son gré, et dont il se servait encore pour opprimer ceux qui avaient su lui résister. Les aristocrates seuls trouvaient faveur, tant auprès de Courbis qu’auprès du tribunal. Le comité révolutionnaire, qui était dans les bons principes, fut mandé à la barre du tribunal, où il fut traité de contre-révolutionnaire, et deux de ses membres mis en arrestation pour avoir décerné des mandats d’arrêt contre des aristocrates, refusé d’en lancer contre des patriotes et dénoncé le scélérat Moulin, complice des conjurés. Enfin l’horreur était à son comble; il serait trop long de rapporter ici tous les crimes dont les complices de Robespierre se sont rendus coupables; mille pièces, mille faits, mille actes d’oppression déposent contre les scélérats. La société populaire de Nîmes espère qu’une prompte justice purgera bientôt la terre de la liberté de ces êtres odieux, de ces monstres altérés de sang et de domination. Vous verrez, citoyens représentants, par le procès-verbal de la séance de la nuit du 19 thermidor, que nous déposons sur le bureau avec deux adresses et le procès-verbal qui porte notre nomination, que la société populaire de Nîmes a toujours été attachée aux vrais principes, et que l’influence que ces conspirateurs avaient coutume d’exercer sur elle a été nulle quand elle a tendu à lui faire méconnaître la représentation nationale. La société populaire a elle-même saisi les coupables dans son sein; aucun n’a échappé, et l’administration du district s’est empressée de la seconder en décernant provisoirement des mandats d’arrêt qui ont été confirmés par ceux de votre comité de sûreté générale. La scène qui s’est passée ici a été répétée à Nîmes 10 jours après. On trouve dans ces deux événements des ressemblances frappantes; mais dans cette comparaison il y a une grande différence à faire entre les chefs de la force armée. A Paris, il y avait un Hanriot, un conspirateur; à Nîmes c’est le brave patriote Cher qui a déployé le caractère d’un vrai républicain et qui n’a pas peu contribué au succès. L’agent national du district a aussi donné des preuves de la plus grande fermeté et d’un dévouement sans bornes; il a acquis de nouveaux droits à la confiance publique. Représentants, vous avez donné l’exemple du courage et du patriotisme; votre énergie a sauvé la liberté; soyez assurés que cet exemple ne restera pas sans être suivi. Le danger que la patrie a couru a redoublé le zèle des patriotes; plus ils combattent, plus ils acquièrent de courage et de force. On veut les anéantir, on les multiplie; on veut les épuiser, on les rend invincibles; chaque effort de leurs ennemis leur assure un triomphe. Ils ont juré l’unité et l’indivisibilité de la République; ils resteront fidèles à leur serment; ils affermiront les bases du gouvernement par la pratique des vertus, et ils sauront prouver à l’univers que ce n’est pas en vain que la Convention nationale a mis la justice et la probité à l’ordre du jour. (On applaudit). ( Suivent les signatures). (1) On a décrété l’impression de cette adresse au bulletin et GUFFROY a pris la parole : il a prié la Convention de réparer une injustice en rendant à ses fonctions le citoyen Sosset, dit Saint-Ange, adjudant-général, chef de bataillon, que Vincent a destitué, parce que, disoit-il, il avoit l’air d’un noble (2). SERGENT propose de rétablir également dans leurs fonctions tous les citoyens injustement destitués et mis en liberté par le comité de sûreté générale. BASSAL observe que la proposition de SERGENT ne peut être adoptée sans danger, qu’il n’y a aucun fonctionnaire public qui ne présente (sic) avoir été injustement destitué, qu’il faut renvoyer la proposition de SERGENT au comité de sûreté générale et le charger de présenter le projet de décret à la Convention pour faire rétablir dans leurs fonctions les patriotes qui en ont été injustement dépouillés et privés de leur liberté (3). La Convention décrète la mention honorable, l’insertion au bulletin et le renvoi de l’adresse au comité de sûreté générale pour lui en faire un prompt rapport. Elle charge ce comité d’entendre aujourd’hui les pétitionnaires sur les circonstances des faits qu’ils ont dénoncés, afin qu’ils puissent retourner de suite dans leurs foyers. Elle renvoie au même comité la proposition d’un membre de décréter que tous les fonctionnaires publics mis en liberté sont de plein droit rendus à leurs fonctions (4). [Applaudissements ] . 9 Les deux frères Renaud paroissent à la barre pour remercier la Convention sur leur mise en liberté; ils demandent la révision du procès de leur infortuné père (5). BOURDON (de l’Oise) : Les deux frères Renaud viennent remercier la Convention du (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 527; Débats , n° 697, 3; J. Fr., n° 693; M.U., XLIII, 31; J. Mont., n° 111; Ann. R.F., n° 260; Rép. , n° 242; F. de la Républ, n° 410; J.S. -Culottes , n° 550; C. Eg., n° 730; J. Perlet, n° 695; Ann. patr., n° DXCV. (2) Gazette fr(se , n° 698. Après l’adoption du décret, ce journal place le rapport de GOUPILLEAU (de Fontenay). Voir, ci-dessous, n° 12. (3) J. Paris, n° 596. (4) P.V., XLIV, 4. Décret signé J. -P. Chazal, n° 10 452. Rapporteur anonyme selon C* II 20, p. 258. Reproduit au B‘n , 1 er fruct. (5) P.V., XLIV, 4.