456 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 février 1790.] le demande que la liberté soit rendue aux magistrats, et la municipalité blâmée. M. Ee Chapelier. La municipalité de Rennes s’est conduite aussi bien qu’on pouvait le désirer. Quand des magistrats réfractaires à vos décrets refusaient la justice au peuple, une partie de la garde nationale venait de quitter ses foyers pour aller défendre les foyers des nobles et des magistrats. Il y avait alors une grande fermentation, l’insurrection paraissait difficile à retenir sans de grandes précautions ; la municipalité a placé les magistrats sous la sauvegarde de la loi ; des sentinelles ont été mises, non dans les appartements, mais dans quelques parties de leurs maisons; et l’on vous propose de blâmer des citoyens qui, ayant tant à se plaindre, ont été si généreux! La question préalable est demandée et rejetée. Le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale délibérant sur la conduite des juges désignés pour composer la chambre des vacations dernièrement nommée parmi les membres du parlement de Bretagne, déclare que dans le moment où le Roi est venu se réunir si intimement aux représentants de la nation, elle ne veut se rappeler que les sentiments patriotiques qui ont animé tous les Français; mais, attendu que ceux qui ont résisté à la souveraineté de la nation et aux ordres du Roi ne peuvent exercer les droits de citoyen actif, jusqu’à ce que, sur leur requête, le Corps législatif les ait relevés de l’incapacité qu’ils ont encourue; « Décrète que les ci-devant juges, appelés pour composer la chambre des vacations dernièrement nommée en Bretagne, ne seront admis à exercer les droits de citoyen actif, que lorsque, sur leur requête présentée au Corps législatif, ils en auront obtenu la permission. » M. le marquis de Bonnay, président du comité d’agriculture et de commerce, a demandé l’impression d’une mémoire sur l’uniformité des poids et mesures , rédigé par la Société royale d’agriculture, sur la demande du comilé. (Feu/. ce document annexé à la séance.) M. meunier Dubreuil, membre du comité des rapports, fait un rapport sur la double nomination d’officiers municipaux faite à Ris. 11 propose un projet de décret qui est adopté par l’Assemblée dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale a décrété et décrète que, sans avoir égard à aucune des deux municipalités formées à Ris le 11 de ce mois, elle renvoie au pouvoir exécutif, pour, sur une nouvelle convocation et assemblée générale, qui se tiendra, au jour indiqué par tous les citoyens, à l'église à défaut d’Hôtel-de-Ville, être procédé au choix de nouveaux officiers municipaux, et statué entre eux sur toutes les contestations qui pourraient s’élever relativement au titre de citoyen actif. » M. Faydel rend compte des troubles du Quercy, et se dispose, après de longs détails, à présenter des projets de décrets. 11 est interrompu. M. Emmery. Si chacun de nous entretient l’Assemblée des mouvements de sa province et de ses correspondances journalières, on emploiera inutilement un temps bien précieux. Le comité des rapports est établi pour examiner tous ces objets; il faut y renvoyer les détails que présente M. Faydel. Cette proposition est contestée avec quelque violence. L’Assemblée l’adopte et ajourne le rapport du comité à ce sujet à lundi, deux heures. La séance est levée à dix heures et demie. lre ANNEXE à la séance de l’Assemblée nationale du 6 février 1790. Lettre de M. Le Carpentier de Chailloué, député d’Alençon , relative au serment individuel, adressée à M. le Président de l'Assemblée nationale (1). c Monsieur le Président, profondément pénétré de la sainteté du serment individuel, et de la rigueur des obligations qu’il impose, j’ai cru me devoir à moi-même de descendre dans ma conscience, pour mesurer l’étendue de celles qui résulteraient du serment, que l’Assemblée nationale a cru devoir proposer à chacun de ses membres. Permettez-moi de soumettre à l’Assemblée, le résultat de mes réflexions. c Si la formule du serment proposé m’est bien présente, ce serment renferme deux parties bien distinctes. Il consiste à jurer d’être fidèle à la nation, à la loi et au Roi ; à promettre de maintenir, de tout son pouvoir, la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par le Roi. « La première partie de ce serment est gravée dans mon cœur, depuis l’instant où j’ai commencé à connaître mes rapports et mes devoirs ; et jamais ma bouche ne se refusera à en consacrer, à en renouveler l’engagement. « Quant à la Constitution faite et à faire par l’Assemblée, quelle que soit mon opinion particulière sur les principes qu’elle aura consacrés, je lui obéirai, parce qu’il est du devoir de tout citoyen d’être soumis aux lois de son pays ; et si c’est là que doit se borner le maintien, dont il est question, je suis prêt, Monsieur le Président, de jurer devant la nation, l’obéissance et la soumission à la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale, et acceptée par le Roi. « L’Assemblée a sans doute ledroit incontestable d’exiger l’une et l’autre, mais son autorité ne peut s’étendre jusqu’à commander à l’opinion. Elle ne peut pas commander à chacun de trouver ses décrets également bons et justes, également sages ; elle ne peut donc pas exiger que chacun s’engage à les maintenir de tout son pouvoir ; car enfin, un engagement de cette nature ne peut jamais être contracté qu’en faveur de la vérité, de lajustice. « Je dirai plus, c’est aux vœux du peuple à consacrer les décrets de la Constitution, c’est à lui, c’est à la nation toute entière, qu’il appartient éminemment de décider si elle est propre à faire son bonheur. S’engager à la maintenir de tout son pouvoir, serait promettre d’opposer tous les moyens de résistance qui seraient en son pouvoir, aux vœux, aux demandes de ce même peuple, s’il venait à réclamer contre quelques-uns de nos décrets, à solliciter la réforme ou la modification de quelques-uns d’eux. C’est ainsi, (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur.