SÉANCE DU 25 BRUMAIRE AN III (SAMEDI 15 NOVEMBRE 1794) - N08 20-21 251 6 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [DU BOIS DU BAIS au nom de] son comité des Secours publics, décrète que la trésorerie nationale paiera, sur le vu du présent décret à la citoyenne Marguerite Philippe, femme Jaboulai, acquittée au Tribunal révolutionnaire, la somme de 400 L, à titre d’indemnité et de secours pour quatre mois de détention, et pour retourner à son domicile. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (56). c La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [DU BOIS DU BAIS au nom de] son comité des Secours publics, décrète que la Trésorerie nationale paiera, sur le vu du présent décret au citoyen Simon Marie Menour dit Lafleur, la somme de 250 L, à titre d’indemnité et de secours pour deux mois et demi de détention, et pour retourner à son domicile. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (57). 21 Le citoyen Despinois, général de brigade de l’armée des Pyrénées orientales, est admis à la barre. Il vient, au nom du général Dugommier, demander pour le brave Labarre, les honneurs que la patrie descerne à ceux de ses défenseurs qui sont morts en combattant généreusement pour elle ; il apprend que ce général, après s’être constamment signalé par son courage et son dévouement à la République, est mort le 19 prairial, entre Rozes et Figuières, en chargeant à la tête de quelques escadrons plusieurs régimens espagnols; ses dernières paroles furent encore un hommage à sa patrie et un appel à la victoire. Le pétitionnaire termine en demandant que le nom du général Labarre soit inscrit sur la colonne du Panthéon à côté de ceux de Dagobert et de Langlois, ses frères d’armes et ses amis ; et il dépose sur le bureau plusieurs pièces qui constatent et les services du général Labarre et ses vertus civiques. La Convention nationale ordonne la mention honorable au procès-verbal et l’insertion au bulletin du discours du pétitionnaire et de la réponse du président et (56) P.-V., XLIX, 214. Bull., 25 brum. (suppl.). Rapporteur Du Bois Du Bais selon C* II, 21. (57) P.-V., XLIX, 214. Bull., 25 brum. (suppl.). Rapporteur Du Bois Du Bais selon C* II, 21. sur la proposition d’un membre, elle décrète que le nom du général Labarre sera inscrit sur la colonne de l’immortalité et renvoie à son comité d’instruction publique l’exécution du présent décret, ainsi que les pièces qui constatent la conduite civique et héroïque du général Labarre (58). Le général Despinois est admis, et dit : Citoyens représentans, Je m’acquitte auprès de vous d’un devoir sacré pour mon coeur, pour celui de mes frères d’armes. Je viens, au nom du général Dugommier, demander pour le brave La Barre les honneurs que la patrie reconnoissante décerne aux services signalés de ses défenseurs morts en combattant pour elle. L’armée d’Italie, les plaines du Boulou, les remparts de Collioure et de Port-Vendre ont vu tour à tour se déployer son courage et son civisme inaltérables. Le premier des généraux de l’armée d’Italie, il marche sur Toulon rebelle ; il commandoit une colonne à l’attaque du fort Faron; il fut proclamé dans cette enceinte l’un des vainqueurs de la nuit mémorable du 27 au 28 brumaire. Aux plaines du Boulou, dans cette journée décisive pour les armes de la République et pour l’affranchissement de son territoire, on le voit, à la tête de la cavalerie française, achever la déroute des Espagnols, tomber sur leurs bagages, et s’emparer d’une partie de cette immense artillerie qui passe en notre pouvoir. Son zèle ardent et infatigable ne se dément point devant Collioure. Le 19 prairial, entre Roses et Figuières, il charge, à la tête de quelques escadrons, plusieurs régimens espagnols : il est blessé ; il tombe sur le champ de bataille. Des grenadiers l’emportent; il les voit pressés par l’ennemi : « Laissez-moi, mes amis, leur dit-il ; rentrez dans vos rangs et combattez pour la République; je suis content, je meurs pour elle : Vive la République! » Citoyens représentans, ces dernières expressions retentiront dans vos coeurs : cet élan d’une âme généreuse et sublime ne sera pas perdu pour la gloire. Vous avez reçu avec transport les trophées dont l’armée des Pyrénées Orientales m’a chargé de vous faire hommage; pourriez-vous refuser à la mémoire d’un homme qui nous aida si puissamment à les recueillir, les honneurs qu’elle réclame aujourd’hui par ma voix? Non sans doute ; les mânes de la Barre seront satisfaits. Vos mains attacheront sur sa tombe le laurier immortel que son sang a fait naître. Je demande donc que son nom soit inscrit sur la colonne du Panthéon, à côté des noms de Dagobert et de Langlois, dont il fut le compagnon d’armes et l’ami. Le souvenir de son dévouement, celui de ses dernières paroles, ainsi consacrées par vous, nourrira, parmi ses frères d’armes, cette ardeur, cet enthousiasme profond qu’excite toujours en eux l’amour de la liberté (58) P.-V., XLIX, 214-215.