529 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLE MENTAIRES. (.3 avril 1791.] M. Camus. Je demande l’impression de ce rapport et de l’état annexé. (L’impression est décrétée.) M. de Curt, au nom du comité central de liquidation. Messieurs, les quittances de remboursement d’offices de judicature supprimés ont été exemptées du contrôle par le décret du 28 novembre et du droit d’enregistrement par le décret du 18 février. Les quittances des jurandes l’ont été par le décret même qui concerne les jurandes. Il paraît juste de traiter aussi favorablement es créanciers arriérés pour gages, salaires et raitements. L’usage vous y invite. C’est d’ail-eurs préjuger vos sentiments que de déclarer que l’arriéré ne peut être soumis au droit d’enregistrement, puisque ce droit vient d’être établi, et qu’il n’est pas possible de grever un créancier, parce qu’on a retardé 3on remboursement. Votre comité pense aussi que les créanciers arriérés pour gages, salaires et traitements, doivent être dispensés de rapporter des certificats de non-opposition. La nature de leurs créances, et l’usage constant du Trésor public, se réunissent pour motiver cette opinion . Voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter: « L’Assemblée nationale, ouï le rapport du comité central de liquidation, décrète que les quittances qui seront données par les créanciers ne l’Etat pour appointements, gages, salaires, traitements et autres parties de la dette arriérée, ne seront point sujettes aux droits d’enregistrement. « Les quittances qui seront fournies par lesdits créanciers pourront être sous signature privée, ainsi qu’il en était précédemment usé au Trésor public. « Les créanciers pour appointements, gages, salaires et traitemenls, ne seront pas tenus de rapporter des certificats de non-opposition pour les sommes qui leur seront allouées. « Le présent décret aura lieu même pour les payements qui seront faits en vertu de décrets de liquidation précédemment rendus. » (Ce décret est adopté.) M. de Curt. Messieurs, à la suite du décret qui a réglé les primes -accordées à la pêche nationale, vous avez ordonné qu’un des députés des îles du Vent serait admis au comité d’agriculture et de commerce. Les députations se sont réunies pour faire un choix; mais, considérant qu’il existe, entre la Guadeloupe et la Martinique, une opposition d’intérêts sur les rapports commerciaux, dont la discussion est nécessaire, elles ont arrêté de vous soumettre cette difficulté. S’il parait juste d’accorder à chacune de ces deux colonies les moyens de défendre leurs besoins et leurs droits, dans le comité chargé de préparer les matières qui intéressent l’industrie nationale, vous vous porterez d’autant plus volontiers à cette décision que l’assemblée générale de la Guadeloupe, toujours secondée dans ses vues par le gouverneur de cette île, vient de donner un grand exemple de désintéressement et de patriotisme. Elle a fermé les ports et les rades à tous les bâtiments proscrits par les lois de l’Etat et a déclaré qu'elle veut cimenter plus que jamais les liaisons avec le commerce de la métropole. Voici le décret que je propose : « L’Assemblée nationale décrète que le comité d’agriculture et de commerce sera augmenté de 1" Série. T. XXIV 2 membres choisis dans les députations de la Guadeloupe et de la Martinique ; en conséquence approuve la nomination faite par lesdites députations respectives, de MM. de La Charrière et Moreau de Saint-Mery. » (Ce décret est adopté.) M. le Président. J’ai reçu de M. Brunei, curé d’Aubers-en-Flandre, district de Lille, une lettre dans laquelle il témoigne le regret qu’il a d’avoir mis une restriction dans son premier serment. Voici ce qu’il a dit à cet égard : « J’ai ouvert les yeux sur les pièges que j’ai cru m’être tendus jusqu’à ce jour. L’aveu que Messieurs les représentants des Français font, dans l’instruction sur la constitution civile du clergé, de leur attachement à la religion de leurs pères et à l’Eglise catholique; le respect qu’ils vouent à ses dogmes; l’assurance de la perpétuité de son enseignement; l’aveu qu’ils font qu’il n’e-t pas en leur pouvoir de porter la main ni d’attenter à ce qui regarde l’autorité spirituelle; la preuve que la démarcation des diocèses est l’ouvrage des hommes $t que le droit ne peut eu appartenir qu’au peuple, toutes ces considérations me persuadent qu’on imputerait en vain à l’Assemblée nationale de méconnaître les lois de l’Eglise et me décident absolument à me soumettre à la loi, quoique après les délais fixés par elle. « En conséquence je déclare nulle en pleine assemblée la restriction que j’ai apportée dans le serment que j’ai prêté sur la fin du mois de février, et je jure de veiller avec soiu sur les fidèles de la paroisse qui m’est confiée et d’être, etc. « Je prie M. le Président de notifier sans délai ma rétractation au district de Lille, pour qu’on ne fasse point procéder à mon remplacement. Je le prie en outre de me dispenser de l’émission d’un nouveau serment dans l’église de ma paroisse, pour des raisons que la prudence me fait taire. » (Murmures.) Plusieurs membres : A l’ordre du jour! M. le Président, continuant la lecture. « Je le prie de me faire une prompte réponse sur l’acceptation ou le refus de ma rétractation par l’Assemblée, pour que je puisse prendre des arrangements en conséquence. « Dans l’espérance de cette obtention, j’ai l’honneur d’être, etc. » M. l’abbé Bourdon. Vous avez rendu un décret aux termes duquel les ecclésiastiques fonctionnaires publics qui n’ont pas encore été remplacés sont admis à se rétracter jusqu’à la convocation de l’assemblée électorale qui doit les remplacer. M. Brunei n’a d’autre parti à prendre qu’à se conformer à ce décret. (L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre des membres composant le directoire du département de la Côte-d’Or, ainsi conçue : « Monsieur le Président, les congés demandés ,jar les membres de l’Assemblée nationale, fonctionnaires publics, ecclésiastiques qui n’ont pas prêté le serment civique, précisément à l’époque où l’on s’occupait de f ur remplacement, ont dû exciter la vigilance des corps administratifs. L’assemblée électorale de ce district était convoquée au 27 de ce mois, pour l’élection des curés à 34 530 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 avril 1791.] remplacer. Le dimanche 20, M. Couturier, curé de Salives, a annoncé au prône de la messe paroissiale qu’il n’avait pas prêté le serment prescrit, et qu’il ne le prêterait point, non plus que M. son frère, curé de Léry ; mais que celui qui lui succéderait n’aurait aucun pouvoir; que les absolutions qu’il pourrait donner ne vaudraient rien; qu’il donnerait sa démission... » Plusieurs membres : A Orléans ! à Orléans ! M. le secrétaire, continuant la lecture. « Nous ne ferons aucune réflexion sur les effets que peuvent produire dans les campagnes des propos de ce genre, de la part des membres du Corps législatif. Nous ajouterons seulement que le directoire du district d’Is-sur-Tille, par respect pour le caractère de M. Couturier, s’est contenté de rendre compte du fait au directoire du département; et les mêmes motifs nous déterminent à user de la même circonspection, nous reposant sur l’Assemblée nationale du soin de prévenir le retour de pareils écarts, en rappelant ce député dans son sein. « Signé : Les Administrateurs du département de la Côte-d’Or. » M. Couturier. Messieurs, j’ai l’honneur de de vous avertir que, profitant d’un congé de 3 semaines que j’ai obtenu de l’Assemblée, je n’ai point excédé ce terme; je me suis comporté dans ma paroisse, avec toute la circonspection possible. J’ai invité mes paroissiens à l’obéissance aux décrets de l’Assemblée; j’ai lu avant la messe paroissiale la lettre dont vous pouvez voir copie ici, pour donner de nouvelles marques de la loyauté avec laquelle je leur avais toujours expliqué les vérités de la religion; et même je leur avais expliqué la dernière instruction de l’Assemblée nationale, en leur annonçant le respect qu’ils devaient à la loi. Il est vrai que je leur ai dit que jusqu’à ce que l’autorité ecclésiastique qui m’avait investi de pouvoirs m’eût destitué, je me regarderais comme curé de la paroisse; mais en même temps je leur ai recommandé de ne faire aucune résistance, lorsqu’on enverrait ..... » (Murmures.) M. Gembert. A l’ordre du jour! (L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) Un de MM. les secrétaires fait lecture de la note suivante du ministre de la justice : « Le roi a donné sa sanction, le 25 de ce mois : « 1° Aux décrets de l’Assemblée nationale des 5, 6, 11, 12, 19 juin 1789, 3 et 21 juillet, 7, 13, 14 et 16 août, 4 et 10 septembre 1790, sur la dépense publique; «. 2° Au décret des 7 et 9 mars présent mois, sur le recrutement, les engagements, les rengagements et les congés; « 3° Au décret du 18, sur les droits d’entrée des denrées coloniales; « 4° Au décret du 22, relatif à la vente des domaines nationaux aux municipalités; « 5° Au décret du même jour, concernant les désordres qui ont eu lieu dans la ci-devant province du Maçonnais, aux mois de juillet et août 1789; « 6° Au décret du 23, relatif à une maison à louer par le directoire du district de Beaugency ; « 7° Au décret du même jour, concernant le district de Perpignan, département des Pyrénées-Orientales; « 8° Au décret du même jour, concernant la suppression et réunion de quelques paroisses de la ville de Blois; ». 9Û Et, le 27, au décret du 5 février, relatif aux prédicateurs, compris parmi les fonctionnaires publics tenus de prêter serment; « 10° Au décret du 3 de ce mois, concernant l’envoi, aux hôtels des Monnaies, de l’argenterie des églises, chapitres et communautés religieuses, qui a été ou pourra être jugée inutile au culte; « 11° Au décret du 10, concernant les employés à la régie des droits sur les draperies et soieries; « 12° Au décret du 11, concernant la suppression des places des hôtels de la guerre, et le renvoi à la liste civile du traitement des 3 ingénieurs géographes; « 13° Au décret des 3, 4, 5, 6, 14 et 15 mars, contenant des dispositions relatives à l’organisation des corps administratifs; « 14° Au décret du 15, concernant le payement d’indemnités de différentes charges, brevets de retenue, et autres objets; « 15° Au décret du même jour, concernant la suppression et réunion des paroisses de la ville de Troyes ; « 16° Au décret du même jour, relatif à l’échange du Glermontois ; « 17° Et enfin au décret du 16, concernant le compte que le ministre de la guerre rendra incessamment à l’Assemblée nationale de la formation de la gendarmerie nationale et du recrutement de l’armée auxiliaire. « Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrets, sur chacune desquelles est la sanction du roi. » « Signé : M.-L.-F. DüPORT. « Paris, le 31 mars 1791. » L’ordre du jour est un rapport des comités de Constitution et des monnaies sur V établissement d'une commission chargée de remplacer la cour des monnaies. M. de Cussy, au nom des comités de Constitution et des monnaies. Messieurs, le public attend avec empressement l’effet du décret du 11 janvier dernier, par lequel vous avez ordonné une fabrication de 15 millions de pièces de 30 et de 15 sols; vous partagerez vous-mêmes ce juste sentiment d’impatience par le louable désir de subvenir aux embarras que la pénurie des espèces occasionne journellement dans les échanges et dans les marchés publics. Le rapporteur est prêt à vous faire connaître les soins auxquels votre comité s’est livré pour se mettre à portée de vous présenter des types et des emblèmes dignes de caractériser les monnaies d’une nation qui vient de se régénérer; mais avant de commencer aucun travail nouveau dans vos monnaies, il fallait organiser la commission dont vous avez ordonné l’établissement par votre décret du 6 septembre, portant suppression de la cour et des juridictions des monnaies; il fallait rechercher et vous dénoncer les abus qui se sont glissés dans cette partie. Il n’est aucun de vous, Messieurs, qui ne soit convaincu combien l’établissement de cett� commission est urgent. De son organisation dépend la rentrée immédiate au Trésor public d’une quantité assez considérable d’espèces fabriquées pour que, dans ces moments de détresse, elle ne doive point être négligée.