[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 janvier 1790.] 207 spectacle d’une famille patriotique dans laquelle l’union des cœurs et l’unanimité des opinions avaient effacé les humiliantes distinctions d’ordre, de condition, derang, avant même que l’Assemblée nationale eût retranché du corps social ces excroissances si contraires à une organisation saine et également avantageuse pour tous les membres qui le composent. Ainsi, Nosseigneurs, le comité a joui de la confiance du peuple, et le peuple a constamment goûté dans ces jours orageux la plus douce, la plus inaltérable paix. Les petits intérêts privés n’ont jamais nui à l’intérêt de la chose publique. Nos regards n’ont cessé de suivre, avec une filiale inquiétude, tous les mouvements de l’Assemblée; de cette assemblée sur la sagesse et le courage de laquelle reposent encore la sûreté de notre bon monarque, les espérances des Français et la prospérité de l’empire : prêts à partager tous les périls, nous ne sommes pas moins ardents à signaler par toutes sortes de sacrifices notre attachement inviolable à ses décrets régénérateurs. Quand, frappée du désordre des finances, et voulant détourner de dessus cet empire la honte d’une banqueroute, le plus grand des malheurs pour une nation juste et loyale, l’Assemblée eut décrété la prompte perception des impôts, le comité de Villeneuve se hâta d’en faire par lui-même la levée, et tous les citoyens se firent un devoir de justifier son attente. Lorsque, peu de jours après, un célèbre décret de l’auguste Assemblée nationale recommanda, pour ainsi dire, l’honneur français au patriotisme de chaque citoyen, nous vîmes tous les habitants de cette ville faire à l’envi l’offrande du quart de leurs revenus ; leurs déclarations sont déjà faites depuis plusieurs jours et loyalement faites. Le peuple, même le plus voué aux ressources incertaines de l’industrie, voulut parer d’un modique, mais précieux tribut, l’hôtel de la patrie. Avant cette époque, les objets de luxe lui avaient été voués en pur don. Nous joignons ici une lettre de change de la somme de 2,549 livres 14 sous, ui est le produit des boucles de nos jeunes gens, e l’argenterie de la chapelle de nos pénitents bleus, et de quelques bijoux de 'madame de Bourran. Tel est, Nosseigneurs, le tableau historique de la cité de Villeneuve, depuis le premier moment de la Révolution. C’est pour nous être pénétrés de vos principes, que nous avons marché sans écart et sans chute dans le sentier de la justice, de l’honneur et du vrai patriotisme. Nous remettrons pure et sans tache, à la nouvelle municipalité, une ville heureuse par la paix dont elle a joui, plus heureuse et plus honorée encore par la parfaite adhésion à toutes les lois émanées de l’auguste Assmbîée nationale. Qu’elle daigne recevoir l’irrévocable dévouement de tous les habitants à la garde de l’honneur français, à la défense de la liberté publique et au maintien de notre sacrée Constitution. Un aperçu rapide sur l’état présent des provinces et sur les troubles que l’intérêt particulier y suscite alarme les bons citoyens; et les prétentions particulières de plusieurs villes heurtent le principe de l’intérêt général. La commune de Villeneuve, qui, jusqu'ici, s’est conduite avec autant de modération que d’équité, s’empresse d’adopter d’avance, avec respect et satisfaction, les divisions de territoire et de pouvoir administratif qui seront décrétées par l’auguste Assemblée nationale. Un membre de l'Assémblée a présenté une adresse du bourg du Châtelet en Brie, qui annonce la ferme adhésion aux décrets de l’Assena-blée nationale, dont elle développe les effets infiniment avantageux pour tous les citoyens, et principalement pour la classe pauvre et souffrante répandue dans les campagnes, si longtemps fatiguée du joug accablant du fisc et de la milice. Ce bourg réclame de la justice de l’Assemblée nationale l’attribution d’un canton et l’établissement d’un juge de paix ; il observe qu’il est situé sur la grande route de Lyon, à 3 ou 4 lieues de Melun, de Montereau et des autres villes susceptibles de devenir centre de département ou de district, et qu’il est environné d’une vingtaine de villages dont il est le point central, et qui n’ont à leur proximité aucun autre bourg important, ni aucune route praticable. Enfin, il annonce que les plus pauvres manou-vriers se sont empressés de contribuer à la prestation du quart patriotique, et que cette contribution s’élève déjà à 1,200 livres. M. Ic comte de Sérent présente un don patriotique de la ville de Nevers consistant en 52 marcs 6 onces, 5 gros d’argenterie et 1,169 livres d’argent comptant. M. Bertrand, député de Saint-Flour, principale ville et capitale de la Haute-Auvergne, présente une adresse de cette ville contenant adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale, et le don patriotique du montant des impositions mises sur les ci-devant privilégiés pendant les six derniers mois de l’année 1789. La municipalité de la paroisse de Crosne a pareillement fait hommage à la patrie d’une somme de 480 livres, dont la restitution lui avait été faite par les agents de l’intendance. La ville de Falaise a présenté en don patriotique 63 marcs cinq onces d’argenterie. L’Assemblée, satisfaite de ces marques de patriotisme, a accordé la séance aux députés de Falaise et de Cosne. M. Gallot, député | du Poitou, annonce que M.de Berge, ancien médecin de l’hôpital de laFère, actuellement médecin eu chef des épidémies de la généralité de Soissons, a fait remise du brevet d’une pension de 200 livres à lui accordée pour 40 années de services ; l’Assemblée nationale n’a pu qu’applaudir au désintéressement et au patriotisme de ce citoyen. Le sieur Deome, relieur de l’Université de Paris, et de la commune de cette ville, désirant contribuer, autant qu’il est en lui, à la conservation des travaux précieux de l’Assemblée, a fait l’offre de relier gratuitement et sans frais les procès-verbaux de la session actuelle, qui sont déposés aux archives nationales, et le recueil des ouvrages qui, pendant la même session, seront imprimés par les ordres de l'Assemblée; sa proposition a été acceptée, et le titre de relieur de l’Assemblée nationale lui a été donné. Le sieur Dijon, relieur de l’Académie des inscriptions, a fait ensuite les mêmes offres; l’Assemblée en a été très-satisfaite, mais elle n’a pas pu les accepter, attendu l’acceptation qu’elle venait de faire des offres du sieur Deome. M. le Président rend compte d’une adresse des députés envoyés des manufactures et du commerce, qui prient l’Asemblée nationale d’indiquer un jour fixe et prochain pour entendre le rapport