401 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 août 1790.J fût déclaré responsable à ce qu’assurent les soldats. Il exécuta effectivement ce projet. (Cet exposé est fréquemment interrompu parles murmures du côté droit, qui protestent contre son exactitude.) Le comité, continue le rapporteur, a dû examiner, comme question préjudicielle, si la démission envoyée par M. de Mirabeau le jeune devait changer le jugement de l’Assemblée à son égard. Le comité des rapports a pensé que la démission d’un membre n’était consommée que quand elle était acceptée et que son suppléant était reçu ; que d’ailleurs il ne dépendait pas d’un membre d’éviter, par sa démission, le jugement de l’Assemblée, parce qu’il pourrait toujours être éludé de cette manière. Examinons, maintenant, la question suivante : l’Assemblée prononcera-t-elle ou non qu’il y a lieu à accusation? Le. comité s’est déterminé pour l’affirmative parce que la cause peut se décider indépendamment des allégations contradictoires des parties. Le fait de l’enlèvement des drapeaux n’est point contesté. Ce fait est un outrage sensible fait à des Français, à des soldats, par leur colonel. Oserait-on lui supposer le droit de répandre ainsi l’ignominie sur tout un régiment? y aurait-il un despotisme plus cruel qu’un semblable droit? Ce fait n’a pas été commis dans une vivacité soudaine ; M. de Mirabeau convient en avoir pris la résolution lors de la translation des drapeaux. On ne peut séparer de cette cause l’honneur du soldat français, qui s’est toujours montré si jaloux de la conservation de ses drapeaux et qui a toujours regardé comme la plus terrible catastrophe le malheur de les perdre : M. de Mirabeau, s’il avait à se plaindre de son régiment, ne devait-il pas demander un conseil de guerre? Etait-il pour lui une autre voie? que l’on songe d’ailleurs avec quelle coupable indifférence il expose le vertueux vieillard qui lui avait donné l’hospitalité, au désespoir, à la rage des soldats, qui devaient être si sensibles à cet outrage, et la ville de Perpignan aux troubles que cette nouvelle agitation pouvait produire? Un membre. Vous faites une diatribe et non un rapport. M. Régnier. Je ne conçois pas comment on peut qualifier ainsi une dissertation purement logique. Je demande si j’ai offensé la délicatesse de qui que ce soit? (On applaudit vivement à gauche.) M. de Lachèze. Vous n’offensez que la vérité. M. Régnier. A l’égard du tribunal auquel doit être renvoyée l’accusation, je crois qu’on ne peut contester la compétence d’un conseil de guerre et voici le décret que nous vous proposons de rendre : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités militaire et des rapports, décrète qu’il y a lieu à accusation contre le sieur Riquetti le jeune; renvoie l’instruction et le jugement de l’accusation à un conseil de guerre; décrète, en outre, que le roi sera prié de faire exécuter le présent décret. » M. Riquetti l'ainé , ci-devant de Mirabeau. Je monte à cette tribune, nullement préparé, et je demande la permission d’observer qu’il avait 1™ Série. T. XVIII. paru à plusieurs de mes codè'gues, comme à moi, q ie l’accusé ayant envoyé sa démission, il y avait lieu à délibérer sur l'affaire que l’on présente aujourd’hui. J’avais sommeillé dans cette périlleuse sécurité, et comme il est bien difficile d’improviser sur une pareille matière, surtout lorsqu’il s’agit de la défense d’un frère, si l’Assemblée voulait porter une décision autre que celle que mon frère a anticipée lui-même, je veux dire ce renvoi à un conseil de guerre, je la supplierais d’ajourner cette affaire à jour fixe. Je prendrai aussi la liberté d’observer que si vous ne la regardez que d’un côté, vous la verrez toujours à travers le miroir infidèle des pussions. C’est par une erreur excusable, sans doute, mais bien palpable, qu’on vous a entretenus d’une déchirure de drapeaux, à propos d’enlèvement de cravates. Le régiment de Touraine, connu par ses services distingués, surtout en Amérique, en est revenu avec ses drapeaux si déchirés, qu’il était impossible de les déchirer encore. Si, dans cette affaire, je ne puis porter la parole comme juge, je la porterai du moins comme avocat de mon frère, comme examinateur, à mon tour, de la conduite du régiment de Touraine. Je m’en remets à votre justice et à votre bonté pour fixer le jour que vous croirez convenable. M. d’Estourmel. En appuyant la proposition de M. de Mirabeau, il me paraît très convenable de prononcer sur la division du projet de décret, parce que, pour qu’il puisse y avoir matière à accusation, il faut qu’il y ait un délit. M. de Ronnay. Il me semble que la division du projet de décret réunit assez l’assentiment de l’Assemblée. (Il s'élève des murmures dans la partie gauche.) M. Dubois, ci-devant de Crancé. Je demande à prouver qu’il y a lieu à accusation. M. de Ronnay. Je ne compromettrai pas la défense de M. de Mirabeau le jeune en m’en chargeant, lorsque son frère, dont les talents sont bien supérieurs aux miens et dont l’intérêt est plus grand, n’ose le défendre en improvisant. Je vous prie donc, Monsieur le Président, de mettre aux voix l’ajournement. (L’Assemblée l’ajourne à jeudi prochain.) M. de Clermont-Mont-Saint-Jean, député de la ci-devant province du Bugey, qui avait obtenu le 17 décembre dernier un congé, dont il n’avait fait aucun usage, en demande un second pour aller rétablir sa santé et vaquer à des affaires urgentes dans ses biens situés en Bugey et en Savoie. (L’Assemblée lui accorde sa demande.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion sur le projet de décret relatif au commerce au delà du cap de Bonne-Espérance. M. de Fontenay, rapporteur. L’Assemblée nationale, dans sa séance du 19 juillet dernier, a décidé que les retours de l’Inde auraient lieu provisoirement par les deux ports de Lorient et de Toulon. Ces bases ayant été adoptées, il ne reste plus qu’à les insérer dans un article et voici le texte que nous vous proposons : « Art. 4. Les retours ne pourront avoir lieu provisoirement que dans les ports de Lorient et de Toulon. En cas d’une relâche dans un autre 26