gg [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 avril 1790.] Ces procès-verbaux sont adoptés. 11 est donné lecture de différentes adresses et dons patriotiques, dont l’extrait suit : Adresse du corps municipal et de la commune de Château-Gontier en Anjou, qui adhère à tous les décrets de l’Assemblée nationale, proteste de sa lidélité à la constitution, de son amour et de son respect inviolable pour la personne sacrée du roi, et demande l’établissement d’un tribunal royal. Adresse des officiers municipaux de la ville de Challonne en Anjou, qui demande l’établissement d’une juridiction royale. Adresse du bataillon de Saint-Louis-en-l’Isle, qui adhère à l’adresse présentée par le bataillon de Saint-Etienne-du-Mont, partage tous les sentiments qui y sont exprimés, et jure de mourir pour le maintien de la liberté et de la constitution. Adresse de la municipalité de Compiègne, qui pour concourir, autant qu’il est en elle, à la renaissance du crédit public et à l’exécution des décrets de l’Assemblée, offre d’acquérir pour A millions de biens ecclésiastiques situés dans l’enceinte et aux environs de son district. Don patriotique d’une somme de 3750 livres, contenue en une lettre de change sur MM. Tourton et Ravel, banquiers, fait par M. Jean Gay-Gautbier, négociant français établi à Barcelonne, qui déclare que, désirant vivement le succès de la Révolution, il a pensé que son absence de sa patrie, et son défaut de possession en France, ne pouvaient le dispenser du devoir de contribuer à la libération des dettes de l’Etat. Don patriotique du sieur Lacassaigne l’aîné, négociant à Cadix, qui consiste en deux billets de loterie en faveur des hôpitaux, qui, au tirage, ont porté une somme de 1,200 livres. Il est aussi fait lecture d’une lettre deM. de Vau-villiers, qui rend compte des motifs quiontdéter-miné Sa Majesté à lui accorder une gratification. L’Assemblée, après avoir entendu la lecture de cette lettre, ordonne qu’elle sera insérée dans son procès-verbal, imprimée et distribuée, et que M. le Président écrira à M. de Vauvilliers, pour lui témoigner la satisfaction de l’Assemblée pour les services qu’il a rendus à la chose publique. Suit la lettre de M. de Vauvilliers : « Messieurs, je suis arrivé hier au soir d’un voyage que j'ai été obligé de faire pour les affaires de mon département, et j’ai été averti que mon nom courait dans les papiers publics ; on m’v traduit, dit-on, comme dénoncé pour avoir reçu une gratification du gouvernement. Quant à la dénonciation, je n’y crois pas ; j’oserais dire que je n’en serais pas susceptible : mais le fait du rapport de cet article de dépense, mis sous vos yeux, et celui de sa publicité par la voie des journaux, existe; et je vous dois, Messieurs, un. éclaircissement qui ne laisse aucun louche sur une pareille affaire. « Au mois d’octobre, la ville de Paris me fit l’honneur de m’appeler à l’administration de ses approvisionnements dans un moment où il lui fallait un homme qui voulût bien mourir pour le salut du peuple, même au hasard de mourir sans succès. J’ai dû accepter, je l’ai fait, malgré la modicité de ma furtune qui me le défendait. Mais, dans le moment du danger passé, j’ai dû pensera d’autres devoirs : on n’est parfaitement juste qu’en les remplissant tous. » Je suis pauvre, Messieurs; je n’en rougis point. La dépense, nécessitée par mes nouvelles fonctions, était au-dessus de mes facultés. J’ai dû vouloir les quitter. Je résolus donc de donner une démission, pour retourner aux travaux littéraires, seule ressource de mon existence : M. Necker, à qui je ne l’ai pas dissimulé, s’y est opposé avec l’ascendant de l’autorité à laquelle je devais obéissance, et celui de l’estime et de la confiance que la voix publique m’avait accoutumé à lui déférer. J’ai insisté; il a persévéré, et m’a obligé d’entrer dans les détails que je vous demande pardon d’être forcé de soumettre à votre justice. » J’ai, Monsieur, lui dis-je vers la fin de décem: bre, mille écus de revenus : 1500 livres comme professeur au collège royal, et 1500 livres pour le travail sur les manuscrits du roi, qui se fait dans le comité de l’Académie. » Le titre d’érection de ce comité porte expressément que les membres qui s’en sont absentés pendant plus d’un mois, pour quelque raison que ce soit, ne jouiront pas de leur traitement, dont le paiement sera affecté à d’autres objets. » Je suis obligé de faire exercer mes fonctions au collège royal, et, suivant l’usage, de donner 600 livres sur cet article : ainsi me voilà réduit à 900 livres de revenu. Et quand recevrai-je les 4000 livres arriérées sur ces deux objets, sans compter le courant? » Le public, attend les deux volumes dé la table de Plutarque , dont il a payé là souscription au libraire; c’est une dette qu’il faut acquitter. II m’en coûtera 1200 livres pour faire achever cet ouvrage, auquel je ne pourrai travailler. » Il m’en coûtera près de 400 livres par mois en voitures, parce que ni ma santé, ni le temps ne me permettent défaire à pied toutes les courses que les affaires exigent. » Je ne puis recevoir tous les matins chez moi le public, sans prendre un domestique, qui, cette année, à cause des premières dépenses, me coûtera cent pistoles. » U me faudra, pour cette espèce d’audience, dix ou douze voies de bois par delà ma consommation ordinaire. » Ajoutons à cela la dépense énorme des ports de lettres, qui a cependant cessé au mois de janvier, quand on m’a accordé le contre-seing. » Ajoutons ce qu’il en coûte de temps eh temps dans les visites de magasins, pour amener doucement à la subordination, et pour animer à un travail forcé des journaliers qu’aucune loi ne peut retenir dans un moment d’anarchie universelle. Ajoutons la multitude de gens honnêtes que ma place invite à me venir demander du pain. » En résumé, Messieurs, il est impossible que cette année ne me jette dans des dépenses excessives. Qui më prêtera? et qui payera quand j’aurai emprunté? J’ai déjà emprunté cent louis. J’ai pour les rembourser là ressource d’une Histoire universelle , entreprise de huit ans de travail, qui me rapportera environ 16 à 18,000 livres, mais à laquelle il faut que je renonce (j’y ai effectivement renoncé), si je continue à me mêler des affaires publiques. Cet objet abandonné, il ne me reste plus de ressource. » Que vous dirai-je, Messieurs, le ministre pensait alors que le salut de Paris tenait au succès de mes opérations. La première crise était passée; mais il s’en fallait beaucoup qu’on pût regarder le calme comme solidement établi :1a convulsion de la famine paraissait le seul moyeu d’ébranler les fondements de la Révolution. Ou se souvenait de la fermeté que j’avais opposée à l’intrigue et à l’audace dans l’affaire du Palais-Royal, lorsque j’avais l’honneur de présider la commune de Pa? [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 avril 1790.] 87 ris. On savait combien de temps j’ai affronté la mort qui assiégeait ma porte jour et nuit. On savait qu’elle ne m’avait pas fait pâlir au faubourg Saint-Antoine. On savait avec quel abandon je m’y étais dévoué, lorsque, le 31 octobre, à neuf heures du soir, seul à l’Hotel-de-Ville, je signais l’ordre de repousser par la force les séditieux qui attaquaient le magasin de Saint-Martin; ordre qui préserva du pillage environ trois mille sacs de farine, et qui conservant l’unique ressource du privilège de la halle pendant les trois jours suivants, sauva Paris d’uhe disette de trois jours, et l’Assemblée nationale et la France des malheurs incalculables de la sédition, suite nécessaire de la famine. On croyait alors à mon courage, à ma probité, et, par une conséquence de faveur, même à mes talents. Le ministre crut devoir me défendre de quitter. Il m’assura qu’il rendrait la décision du roi pour me faire rem-ourser, par la chose publique, ce que je serais forcé de dépenser pour elle. « Je n’ai donc point reçu de gratification, mais le remboursement d’une dette sacrée, que l’honneur m’ordonnait d’accepter. J’aurais cru me rendre coupable en refusant cette bonté du roi. « On m’a réduit à me justifier sur un fait que le plus simple éclaircissement devait ramener à sa juste valeur; je crois y avoir réussi à vos yeux, Messieurs, et j’ose vous prier d’oublier les titres flatteurs dont mes concitoyens m’honoraient il y a quelque temps, mais de vous rappeler que ma réputation est ma seule propriété, et je la mets sous la protection de votre justice. Elle m’est garantie par la générosité des membres de votre auguste Assemblée qui ont bien voulu la défendre. » M. le Président donne connaissance à l’Assemblée, d’un projet pour procurer à la ville de Paris l’eau la plus limpide, présenté par M. de Villiers, auteur de la découverte d’une nouvelle horlogerie ; l’Assemblée renvoi l'examen de ce projet au comité de commerce et d’agriculture. M. le Président dit ensuite qu’il aprésenté hier à Pacceptation et à la sanction du roi différents décrets, et que Sa Majesté l'a assuré qu’elle prendrait ces décrets en considération. DÉCRETS A PRÉSENTER A LA SANCTION DU ROI. Du 3 avril. 1° Décret qui déclare libre, pour tous les Français, le commerce de l’Inde au delà du cap de Bonne-Espérance. Du 14 avril. 2° Décret qui confie aux administrations de département et de district, l’administration des biens déclarés à la disposition de la nation. Déclare, qu’à compter du ltr janvier 1790, le traitement des ecclésiastiques sera payé en argent ; laisse néanmoins aux curés l’administration provisoire des fonds territoriaux attachés à leurs bénéfices. Supprime, à compter du 1er janvier 1791, la perception des dîmes de toute espèce, abolies par un précédent décret, sauf à indemnité, sur le trésor public, pouf les dîmes inféodées; enjoint cependant aux redevables d’acquitter la présente année. Déclare que, dans l’état des dépenses publiques de chaque année, il sera porté une somme suffisante pour fournir aux frais du culte de la religion catholique, apostolique et romaine, à l’entretien des ministres des autels, au soulagement des pauvres et aux pensions des ecclésiastiques. Du 15 avril. 3® Décret qui autorise les électeurs du département de l’Aisne, assemblés à Ghauny, etc., à élire les membres qui composeront le corps administratif du département. Du 16 avril. 4° Déeret qui met de nouveau sous la Sauvegarde de la loi les juifs de tout le royaume. Dudit jour , 5° Décret qui autorise les officiers municipaux de la ville de Verfeil à un emprunt de 2, 000 livres avec intérêts, destinées à des ateliers de charité. Dudit jour. 6° Décret qui autorise la municipalité de Pou-langi à un emprunt de 7,000 livres remboursables sur le prix de portion du quart de réserve des bois; pour ladite somme être employée, moitié, tant au soulagement des pauvres, qu’à terminer un procès, et l’autre moitié, répartie entre tous les habitants. Dudit jour. 7° Décret qui autorise les officiers municipaux de la ville de Saint-Dié, en Lorraine, à percevoir, par provision, 15,500 livres sur le prix de la vente de ses bois communaux; enjoint aux receveurs généraux des domaines de verser ladite somme dans la caisse de la recette de Saint-Dié. Dudit jour. 8° Décret qui déclare les dettes du clergé réputées nationales, et en charge le Trésor public ; Affranchit de toute hypothèque de la dette légale du clergé, les biens ecclésiastiques qui seront vendus; Déclare que les assignats, créés par décrets des 17 et 21 décembre 1789, auront cours de monnaie, entre toutes personnes, partout le royaume. M. "Vernier, membre du comité des finances , présente, au nom de ce comité, un projet de décret sur une demande formée par la ville de Pont-à-Mousson; ce décret est adopté ainsi qu’il suit: « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, et vu la délibération prise en l’Assemblée extraordinaire du conseil général de la commune delà ville et cité de Pont-à-Mous-son, autorise les officiers municipaux de ladite