342 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. viendront sans doute au secours des pauvres mères de familles, et exerceront envers elles des actes de bienfaisance, pour lesquels ils auront la douce satisfaction de conserver des citoyens à l’Etat, et d’enleyer à la mort des victimes qui ne deviennent sa proie que par la misère. . , Art. 27, Si la sage-femme prévoit la nécessité d’administrer quelques drogues, elle s’adressera au \ chirurgien, qui les, portera, pour s’assurer de leur nécessité et quantité, en les administrant toujours gratis pour là .classe indigente. Art. 28. Les , sages-femmes n’entreprendront aucun accouchement laborieux sans demander des secours, que les chirurgiens des districts seront tenus et obligés de donner très-promptement,, dans la crainte que le retard n’augmente les obstacles. , Art. 29- Aucune sage-femme ne pourra quitter le lieu où elle se sera établie, sans en prévenir les Etats provinciaux et sans qu’elle ait été remplacée par une autre bien instruite. Art. 30. Il plaira au Roi et aux Etats provinciaux d’accorder, aux chirurgiens et aux sages-femmes des prérogatives qui les, distinguent de la classe commune, pour encourager et faire naître le désir d’obtenir ces fortes places, qui ne seront accordées qu’au vrai mérite. ,M ; , Art. 31. Le Epi et les Etats, provinciaux voudront bien ordonner, par une loi positive, la suppression de tous les privilèges, brevets et commissions, ordonner et faire .défense à tous les possesseurs de ces titres factices et trompeurs d’exercer aucune partie de là médecine et de la chirurgie, dans toute l’étendue du royaume, et particulièrement dans les grandes villes, la tolérance de ces sortes d’empiriques entraîne des maux à l’infini et sans remède. ; Art. 32., Les princes et seigneurs seront instamment priés, pour le bien général, de supprimer dans leurs maisons les chirurgiens dits abusivement et ignominieusement des valets de chambre qui, en effet, ne sont tels; et ne permettre qu’à des chirurgiens reçus légalement d'approcner de leurs personnes, pour leur administrer les secours de l’art que les circonstances peuvent exiger ; on ne peut être trop instruit pour conserver des têlp§ aussi chères à l’Etat. Ils voudront donc bien aussi renoncer à la facilité qu’ils ont exercée jusqu’à présent, de procurer aux personnes. qu| Iqur s, ont attachées le droit de pratiquer la chirurgie, sans avoir subi préliminairement aucun examen , leur finance étant presque toujours leur unique science, à rpoins qu’on y ajoute l’honneur d’appartenir à de grands seigneurs ; ce qui n’empêche pas qu'ils ne traitent des malades, le plus sQuvent avec autant d’audace que d’ignorance, tant dans la capitale que dans d’autres villes du royaume., f ih Art. 33. Il faudra aussi ordonner la suppréssion de ces privilèges abusifs, que des chirurgiens, sans titre légal, confèrent,, à qiii V à celui qui leur donne le plus d'argent, rGet, abus est d’autant plus révoltant, quepes chirurgiens pay .charge, après viggt années d’exercice,, aèviennënt vétérans ; et par là, ont la faculté de revendre leur charge a un autre, peut-être encore pljis ignorant qu’eux sans perdre lalÿbertéde travailler et de louer leur privilège; ce nQuvei, acquëÿeur , joint dii mèmè droit. 11 en résulte qu’il, s’établi�quatre chirurgiens pour une seule finance; et ainsi de suite, et à 1,’infini. , , „ , .... , , Tels sont les articles süccipctsque nBiis aVüns cru devoir proposer poür Je soulagement de 1’, humanité souffrante ; nous avons exposé nos idées [5 octobre 1789.] ayec candeur, et simplicité; à quoi sert l’éloquence, lorsque le cœur parle? Ce n’est pas la langue qui guérit. Il y a encore bien des choses à faire pour perfectionner la chirurgie en France. Nous le savons ; mais ce n’est pas ici le lieu d’en parler. Il nous suffit d’avoir prouvé à nos concitoyens combien la conservation de leurs santés nous est chère, et par quel moyen nous désirons l’entretenir, ou au moins la réparer lorsqu’elle est altérée ; prolonger leurs jours, et diminuer, s’il est possible, le nombre des victimes de l’ignorance, de la cupidité et du charlatanisme. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. MOUNIER. Séance du lundi 5 octobre 1789, au matin (1). L’un de MM. les secrétaires fait lectdre du procès-verbal des séances d’avant-hier. M. le Président dit que conformément aux ordres de l’Assemblée, il a présenté au Roi les décrets sur le prêt à intérêt, sur l’abolition des droits de franc-fief, sur la perception des impositions, et enfin sur les juifs, et que Sa Majesté lui a remis hier sa réponse conçue en ces termes (?) : « J’qxaminerai le décret de l’Assemblée nationale sur le prêt à intérêt et je lui répondrai incessamment. « J’avais déjà fait connaître mes dispositions sur le droit de franc-fief, et je donne volontiers ma sanction au décret que vous m’avez présenté sur cet objet. « J’accorde pareillement ma sanction au décret concernant la perception des impositions. « J’ai déjà, manifesté mes intentions en faveur des juifs d’Alsace, et je continuerai de les protéger contre les vexations dont ils sont menacés. « J’ai fait garnir de troupes les frontières du royaume pour empêcher l’exportation des grains, et je ne puis, sur la demande de l’Assemblée, que recommander l’exécution de mes ordres. » M. le Président ayant de plus, conformément au décret du premier de ce mois, présenté b l’acceptation du, Roi la déclaration des droits de l’homme en société, et les dix-neuf articles de la Constitution déjà décrétés, il a donné, lecture de la réponse de Sa Majesté, conçue en bes termes : « De nouvelles lois constitutives ne peuvent être bien jugées sque dans leur ensemble .: touf se tient dans un si grand et si important quvrage. Cependant, je trouve naturel que, dans tin moment où nous invitons la natipp à venir au secours de l’Etat, par un acte signalé de .confiance et de patriotisme, nous la rassurions sur le principal objet de son intérêt. « Ainsi, dans ia confiance que les premiers artir clés constitutionnels que vous m’avez fait présenter, unis à la suite de votre travail, rempliront le vœu de mes peuples, et assureront le. bonheur et la prospérité du royaume, j’accorde, selon votre désir, mon accession à ces articles ; mais à (lj Celte séance est .incomplète au Moniteur, ... (2) Les réponses du Ryi.sont inexaclernenj, inséré*?? au Moniteur ; nous lés reproduisons d’après ia version authentique du procès-verbal. 343 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 octobre 1789.] Une condition positive et dont je ne rtfë départi-j rai jamais, c’est que, par le résultat général §e! 1 vos délibérations, le pouvoir exécutif ait son ëtt-;tier effet entre les mains du monarque. Une sftite ;de faits et d’observations, dont le tableau sérn'fliis ' sous vos yeux, vous fera connaître que, dans l’Ordre actuel des choses, je ne puis protéger éffica-cernent, ni le recouvrement des impositions légales, ni la libre circulation des subsistances, ni la sûreté individuelle des citoyens. Je veux cependant remplir ces devoirs essentiels de la royauté : . le bonheur de mes sujets, la tranquillité pubii-' que et le maintien de l’ordre social en dépendent. Ainsi, je demande que nous levions en commun tous les obstacles qui pourraient contrarier une fin si désirable et si nécessaire. ; « Vous aurez sûrement pensé que les institutions et les formes judiciaires actuelles ne pouvaient éprouver de changements qu’au moment où un nouvel ordre de choses leur aurait été substitué ; ainsi je n’ai pas besoin de vous faire aucune observation à cet égard. « Il me reste à vous témoigner avec franchise que si je donne mon accession aux divers arti-clés constitutionnels que vous m’avez fait remettre, ce n’est pas qu’ils me présentent tous indistinctement l’idée de la perfection ; mais je crois qu’il est louable en moi de ne pas différer d’avoir égard au vœu présent des députés de la nation, et aux circonstances alarmantes qui nous invitent si fortement à vouloir, par-dessus tout, le prompt rétablissement de la paix, de l’ordre et de> la confiance. « Je ne m’explique point sur votre déclaration des droits de l’homme et du citoyen : elle contient de très-bonnes maximes, propres à guider vos travaux; mais des principes susceptibles d’applications, et même d’interprétations différentes, ne peuvent être justement appréciés, et n’ont besoin de l’être qu’au moment où leur véritable sens est fixé par les lois auxquelles ils doivent servir de première hase. » Signé : LOUIS. ; L’Assemblée décide que cette réponse sera im-; primée à la suite de tous les décrets et des articles auxquels le Roi promet accession. M. le Président avertit l’Assemblée que la nouvelle composition des bureaux est terminée, mais que, pour ne pas perdre de temps, chaque membre en prendra connaissance au secrétariat. On allait reprendre l’ordre du jour, c’est-à-dire la rédaction du décret sur l’imposition du quart des revenus, lorsque M. Muguet a changé la délibération, en demandant la parole sur la réponse du Roi. M. Aluguet de Nanthou. Rappelez-vous les intentions de vos commettants, lorsqu’ils ont exigé qu’aucun impôt ne fût accordé avant la Constitution. Vous pouvez aujourd’hui en faire l’application aux circonstances. Quelle réponse ambiguë et insidieuse vous venez d’entendre 1 , Ce n’est pas là la réponse que la nation avait ; droit d’attendre : elle fait entrevoir que cette Constitution pourrait être altérée par la suite. Si nous accordons au Roi le droit de la modifier, n’est-ce pas lui donner celui de la refuser? s’il eut la changer j ne pourra-t-il pas la détruire ? ette faculté anéantit la liberté, consacre le despotisme. La déclaration des droits expose ceux de tous les hommes et de toutes les nations : cës principes sont indestructibles ; ils sont inattaquables. Le Roi ne peut que les reconnaître dès qu’ils sont présentés. 11 faut donc lui en demander sur-le-champ une acceptation pure et simple. La contribution extraordinaire doit être le prix de notre liberté ; il faut donc que notre liberté soit assurée sans retard. • ' Je propose de continuer le travail de la Constitution et d’arrêter que le décret proposé par le premier ministre des finances n’aura son exécution, et que la contribution né sera payée qu’après la Constitution acceptée. M. Robespierre. La réponse du Roi est destructive, non-seulement de toute Constitution, mais encore du droit national à avoir une Constitution, On n’adopte les articles constitutionnels qu’à une condition positive : celui qui peut imposer une condition à une Constitution a lé droit d’empêcher cette Constitution ; il met sa volonté au-dessus du droit de la nation. On vous dit que vos articles constitutionnels ne présentent pas tous Vidée de la perfection; on ne s'explique pas sur la déclaration des droits ; est-ce au pouvoir exécutif à critiquer le pouvoir constituant, .de, quiil émane? Il n’appartient à aucune puissance de la terre d’expliquer des principes, de s’élever au-dessus d’une nation, et de censurer ses volontés. Je considère donc la réponse du Roi comme contraire aux principes, aux droits de la nation, et comme opposée à la Constitution. Tout vous fait assez connaître que lés, ministres veulent rivaliser d’autorité avec la nation : on a sanctionné vos arrêtés, les uns par un arrêt du conseil, avec les formes anciennes du despotisme, car tel est notre bon plaisir , etc. ; un autre est transformé en règlement, et le Roi fait des lois sans vous, tandis que vous n’en pouvez faire sans lui. Vous n’avez d’autre moyen d’éviter les obstacles qu’en brisant les obstacles. Quelle espèce de religion y a-t-il donc à couvrir les droits de là nation d’un voile qui ne sert qu’à favoriser les atteintes qu’on voudrait leur porter % Il faut examiner franchement s’il est une puissance humaine qui puisse opposer aucun obstacle à la Constitution qu’un peuple veut se donner : si le veto suspensif doit porter sur les actes d’une Convention nationale, il faut régler la formule de l’ acceptation de ces actes et celle de la sanction pour les actes des législatures ordinaires. M. Bouche, après avoir démontré la différence qui se trouve entre le décret sur les subsistances et le règlement donné à la suite par le pouvoir exécutif, sorte d’usurpation de l’autorité législative, s’écrie : où est le législateur ? Est-ce le monarque? est-ce vous? 11 propose un projet d’arrêté qui est ainsi conçu : « La déclaration des droits de l’homme en société et la Constitution seront acceptées par le monarque avant qu’aucun impôt soit accordé par la nation. La Constitution étant achevée, le mo-marque se rendra dans le sein de l’Assemblée nationale ;là il jurera pour lui et ses successeurs au trône de France, l’observation de la déclaration des droits de l’homme en société et de la Constitution. Le serment prêté, l’Assemblée nationale prêtera le sien pour la nation en présence du monarque, pour former la réciprocité entre deux parties, dont l’une doit jurer de gouverner et l’autre d’obéir conformément aux lois. »