244 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 66 MERLINO, au nom du comité des secours publics : Citoyens, un vieillard qui a acquis de la célébrité dans les lettres et qui est plongé dans la plus extrême indigence, que son grand âge rend plus douloureuse encore, implore aujourd’hui la bienfaisance nationale : ses titres sont ses malheurs, ses nombreuses années et ses travaux littéraires. Il écrivit l’histoire, traduisit et analysa le livre de Mahomet et son histoire de Siam, où l’on crut apercevoir le germe des sublimes principes de notre révolution, le fit expatrier; depuis, de nouveaux ouvrages sont sortis de sa main et le dernier : Des instructions républicaines, où il développe les avantages du gouvernement républicain reste enfoui, parce que l’auteur manque des moyens nécessaires pour le faire publier. Turpin, âgé de 83 ans, vous présenta, il y a quelque temps, une pétition où il vous demandait des secours, en vous observant que les pensions modiques qu’il avait obtenues de l’ancien gouvernement ne lui étaient plus payées, vu qu elles provenaient de privilèges abolis; sa pétition fut renvoyée à votre comité des secours publics qui, après en avoir conféré avec celui d'instruction publique, a pensé qu’il avait un droit aux secours de la patrie, toujours prête à secourir l’indigence, respecter la vieillesse et réparer les crimes de l’ancien régime. Je ne passerai pas sous silence un des incidents des premières années de la vie de Turpin; il l’honore, et vous entendrez avec plaisir prononcer à votre tribune le nom du célèbre Helvétius, ce philosophe hardi, qui fit parler la vérité, la dégagea des erreurs, analysa la morale pour en diriger les principes vers le bien public, et qui put aller trop loin dans des idées hasardées, mais toujours conformes à l’intérêt général. Ajouterai-je que ce fut l’un de ces philosophes encyclopédistes qui fondèrent ce dépôt immense de lumières, qui, quoique peut-être encore informe, n’en est pas moins le plus sublime monument de l’esprit humain. Ce fut Helvétius, dis-je, qui appela Turpin à Paris; le philosophe fut plus grand que les rois et sa générosité bienfaisante fit jouir Turpin d’une honorable médiocrité; ce bienfait honore tout à la fois le philosophe et Turpin. D’après ces considérations, vos comités d’instruction et des secours publics vous proposent de récompenser les travaux utiles d’un littérateur et de secourir un vieillard indigent qui vint à Paris sous les auspices d’un philosophe qui vous est cher. Voici le décret que je suis chargé de vous proposer [ adopté ] (1) : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de MERLINO, au nom] de ses comités d’instruction et des secours publics, sur la pétition du citoyen Turpin, doyen des gens de lettres, plus qu’octogénaire et indigent, ne recevant plus la pension dont il jouissoit (1) Mon., XX, 634. Débats, n° 621, p. 205. ci-devant, les objets privilégiés sur lesquels elle étoit assise ayant été abolis; « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera au citoyen Turpin la somme de 600 liv., à titre de secours, et que la pétition sera envoyée au comité de liquidation, qui reste chargée de présenter un projet de décret pour lui assurer des secours annuels et pendant sa vie. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (1) . 67 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne veuve Thomassin, dont le mari, lieutenant au 25e régiment de cavalerie, a été tué à l’affaire du Mans en combattant les ennemis de la liberté, et qui se trouve dans le plus pressant besoin, décrète : « Que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à la citoyenne Mengot, veuve du citoyen Thomasin, mort lieutenant du 25e régiment de cavalerie, la somme de 300 livres, à titre de secours provisoire, laquelle somme, ainsi que pareille, qu’elle a déjà reçue par l’entremise du ci-devant ministre de la guerre, seront imputables sur la pension à laquelle elle a droit. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (2) . 68 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne Marguerite Falloué, veuve de Jean-Nicolas Vernot, de Besançon, dont le mari, capitaine de la lre compagnie du 3e bataillon du Doubs, est mort à Thionville, à la suite de blessures reçues à l’affaire de Keferlotte, décrète : « Que la trésorerie nationale mettra à la disposition du district de Besançon, département du Doubs, la somme de 500 livres, pour être comptée à la citoyenne Marguerite Falloué, veuve de Jean-Nicolas Vernot, à titre de secours provisoire, imputable sur la pension à laquelle elle a droit, et qui sera déterminée par le comité de liquidation, auquel, à cet effet, les pièces sont renvoyées. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (3) . (1) P.V., XXXV III, 295. Minute de la main de Merlino. Décret n° 9374. Reproduit dans Bin, 14 prair. (suppl4); M.U., XL, 246; mention dans J. Perlet, n° 620; J. Mont., n° 38; J. Fr., n° 618; J. S.- Culottes, n° 474; Ann. R.F., n° 186; Feuille Rép., n° 335. (2) P.V. XXXVIII, 295. Minute de la main de Merlino. Décret n° 9375. Reproduit dans Bin, 14 prair. (suppl4). _ (3) P.V., XXXVm, 296. Minute de la main de Merlino. Décret n° 9376. Reproduit dans Bin, 14 prair. (suppl4). 244 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 66 MERLINO, au nom du comité des secours publics : Citoyens, un vieillard qui a acquis de la célébrité dans les lettres et qui est plongé dans la plus extrême indigence, que son grand âge rend plus douloureuse encore, implore aujourd’hui la bienfaisance nationale : ses titres sont ses malheurs, ses nombreuses années et ses travaux littéraires. Il écrivit l’histoire, traduisit et analysa le livre de Mahomet et son histoire de Siam, où l’on crut apercevoir le germe des sublimes principes de notre révolution, le fit expatrier; depuis, de nouveaux ouvrages sont sortis de sa main et le dernier : Des instructions républicaines, où il développe les avantages du gouvernement républicain reste enfoui, parce que l’auteur manque des moyens nécessaires pour le faire publier. Turpin, âgé de 83 ans, vous présenta, il y a quelque temps, une pétition où il vous demandait des secours, en vous observant que les pensions modiques qu’il avait obtenues de l’ancien gouvernement ne lui étaient plus payées, vu qu elles provenaient de privilèges abolis; sa pétition fut renvoyée à votre comité des secours publics qui, après en avoir conféré avec celui d'instruction publique, a pensé qu’il avait un droit aux secours de la patrie, toujours prête à secourir l’indigence, respecter la vieillesse et réparer les crimes de l’ancien régime. Je ne passerai pas sous silence un des incidents des premières années de la vie de Turpin; il l’honore, et vous entendrez avec plaisir prononcer à votre tribune le nom du célèbre Helvétius, ce philosophe hardi, qui fit parler la vérité, la dégagea des erreurs, analysa la morale pour en diriger les principes vers le bien public, et qui put aller trop loin dans des idées hasardées, mais toujours conformes à l’intérêt général. Ajouterai-je que ce fut l’un de ces philosophes encyclopédistes qui fondèrent ce dépôt immense de lumières, qui, quoique peut-être encore informe, n’en est pas moins le plus sublime monument de l’esprit humain. Ce fut Helvétius, dis-je, qui appela Turpin à Paris; le philosophe fut plus grand que les rois et sa générosité bienfaisante fit jouir Turpin d’une honorable médiocrité; ce bienfait honore tout à la fois le philosophe et Turpin. D’après ces considérations, vos comités d’instruction et des secours publics vous proposent de récompenser les travaux utiles d’un littérateur et de secourir un vieillard indigent qui vint à Paris sous les auspices d’un philosophe qui vous est cher. Voici le décret que je suis chargé de vous proposer [ adopté ] (1) : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de MERLINO, au nom] de ses comités d’instruction et des secours publics, sur la pétition du citoyen Turpin, doyen des gens de lettres, plus qu’octogénaire et indigent, ne recevant plus la pension dont il jouissoit (1) Mon., XX, 634. Débats, n° 621, p. 205. ci-devant, les objets privilégiés sur lesquels elle étoit assise ayant été abolis; « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera au citoyen Turpin la somme de 600 liv., à titre de secours, et que la pétition sera envoyée au comité de liquidation, qui reste chargée de présenter un projet de décret pour lui assurer des secours annuels et pendant sa vie. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (1) . 67 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne veuve Thomassin, dont le mari, lieutenant au 25e régiment de cavalerie, a été tué à l’affaire du Mans en combattant les ennemis de la liberté, et qui se trouve dans le plus pressant besoin, décrète : « Que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à la citoyenne Mengot, veuve du citoyen Thomasin, mort lieutenant du 25e régiment de cavalerie, la somme de 300 livres, à titre de secours provisoire, laquelle somme, ainsi que pareille, qu’elle a déjà reçue par l’entremise du ci-devant ministre de la guerre, seront imputables sur la pension à laquelle elle a droit. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (2) . 68 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne Marguerite Falloué, veuve de Jean-Nicolas Vernot, de Besançon, dont le mari, capitaine de la lre compagnie du 3e bataillon du Doubs, est mort à Thionville, à la suite de blessures reçues à l’affaire de Keferlotte, décrète : « Que la trésorerie nationale mettra à la disposition du district de Besançon, département du Doubs, la somme de 500 livres, pour être comptée à la citoyenne Marguerite Falloué, veuve de Jean-Nicolas Vernot, à titre de secours provisoire, imputable sur la pension à laquelle elle a droit, et qui sera déterminée par le comité de liquidation, auquel, à cet effet, les pièces sont renvoyées. « Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (3) . (1) P.V., XXXV III, 295. Minute de la main de Merlino. Décret n° 9374. Reproduit dans Bin, 14 prair. (suppl4); M.U., XL, 246; mention dans J. Perlet, n° 620; J. Mont., n° 38; J. Fr., n° 618; J. S.- Culottes, n° 474; Ann. R.F., n° 186; Feuille Rép., n° 335. (2) P.V. XXXVIII, 295. Minute de la main de Merlino. Décret n° 9375. Reproduit dans Bin, 14 prair. (suppl4). _ (3) P.V., XXXVm, 296. Minute de la main de Merlino. Décret n° 9376. Reproduit dans Bin, 14 prair. (suppl4).