[Assemblée nationale.] 373 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. lativement aux individus juifs, qui prêteront Je Ber ment civique. (Ce décret est adopté.) M. de La Rochefoucauld Liancourt, au nom du comité de mendicité. Messieurs, 1rs principes qui ont servi de base au travail de votre comité de mendicité sont consignés dans le plan de travail qu’il vous soumit, if y a 18 mois, et que vous avez approuvé : ils sont développés dans les 6 rapports qu’il vous a présentés : enfin, ils sont sommairement rappelés dans un rapport dont vous avez ordonné l’impression. Qu’il nous soit permis seulement de vous rappeler que vous avez reconnu les droits sacrés et imprescriptibles dn malheur, de l’infirmité indigente et de l’enfance abandonnée ; que vous avez reconnu que la nécessité de les soulager n’était pas seul ment un besoin de l’humanité, mais encore un devoir strict d’une politique juste et éclairée; que vous avez reconnu que les secours ordonnés par vos lois devaient s’étendre sur toutes les parties de l'Empire, et qu’ils devaient être dirigés par les principes de votre Constitution ; que vous avez reconnu que la bienfaisance publique, éclairée dans ses vues, devait êlre, dans ses dons, aussi éloignée de la prodigalité peu réfléchie, qui encourage la fainéantise et crée des pauvres, que de la parcimonie qui refuse au malheur véritable et à l’indigence laborieuse; que les secours, donnés par elle, doivent avoir pour objet de diminuer successivement les causes de la pauvreté qui sont presque toujours les torts des gouvernements, et de donner, par leur suffisance, la force d’opinion nécessaire pour réprimer la mendicité, ce fléau le plus destructeur de toute richesse et de toute prospérité publique. Tels sont les principes que vous avez approuvés dans cette matière importante et difficile. Votre comité n’a rien négligé pour s’y conformer. Je dois vous ajouter un mot sur l’état actuel des secours dans le royaume. Ils se bornent aux hôpitaux dans les villes et à quelques distributions fondées de pain et de bouillie. L’administration d’un grand nombre de ces hôpitaux est nulle parce qu’elle était composée de personnes revêtues de placer et d’emplois supprimés et administrant en vertu de ces places, et parce que vos décrets n’ont rien prononcé de positif à cet égard. Cet état excite des réclamations de toutes parts. Les revenus des hôpitaux sont aussi diminués d’à peu près un tiers par vos différents décrets. Voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter : « Art. 1er. L’Assemblée nationale déclare qu’elle met au rang des devoirs les plus sacrés de la nation, l’assistance des pauvres, dans tous les âges et dans toutes les circonstances de la vie, qu’elle en fait une charge nationale, et qu’il y sera pourvu, ainsi qu’aux dépenses pour l’extinction de la mendicité, sur les revenus publics, dans l’étendue qui sera nécessaire. « Art. 2. Il sera accordé à chaque département, la somme nécessaire pour les objets indiqués dans le pi écédent article. « Art. 3. Les bases générales de répartition des secours à accorder aux départements, districts et municipalités, seront : 1° la proportion des citoyens actifs avec le nombre de ceux qui ne le sont pas ; 2° les 3 bases combinées de la représentation nationale, population, contribution, étendue, de manière que cette proportion plus ou moins grande de citoyens actifs, étant toujours la base principale, celui de 2 départements égaux [27 septembre 1791.] en territoire et en population, qui payera moins de contribution, aura une part proportionnellement plus forte, qu’à égalité de contribution; celui-là aura une part plus grande, dont le territoire et la population seront plus considérables; qu’à égalité de co itribution et de territoire, la plus grande population aura droit à une plus grande proportion de secours. « Art. 4. Les sommes à répartir dans chaque département, en conséquence de la proportion résultant des éléments énoncés dans l’article précédent, seront fixées sur le prix commun des journées de travail dans chaque département. « Art. 5. Cette fixation sera faite en estimant le plus haut prix des journées à 20 sols, et mettant dans cette classe, toutes celles payées au-dessus de 16 sols, et en estimant le prix le plus bas à 16 sols, et comprenant dans cette seconde classe, toutes celles payées au-dessous de cette valeur. « Art. 6. Ces fonds auront pour objet les secours à donner aux enfants abandonnés, aux malades, aux vieillards, aux infirmes, les ateliers de secours, les maisons de correction, et autres dépenses relatives aux secours des pauvres et à l’extinction de la mendicité. « Art. 7. La répartition de ces fonds, qui aura lieu à chaque législature, sera faite de la manière suivante. Une partie qui aura pour objet l’entretien des établissements permanents, c’est-à dire les secours à donner en maladie, vieillesse, infirmités, aux enfants abandonnés, aux maisons de correction, sera donnée aux départements sans que ceux-ci payent à cet effet aucune contribution particulière; l’autre, qui aura pour objet les ateliers de secours, sera augmentée d’une contribution payée par les départements, en proportion des sommes qu’ils recevront. « Art. 8. La distribution de ces fonds sera faite entre les divers départements par la législature. La répartition inlérieure se fera des départements aux districts, et de ceux-ci aux municipalités, aux mêmes titres et conditions. « Art. 9. Pour subvenir aux dépenses indiquées dam les articles précédents, il sera affecté dans la distribution des dépenses nationales, un fonds de 50 millions. « Art. 10. Dans cette somme seront compris les biens dont les revenus sont aujourd’hui destinés à l'entretien des hôpitaux, maisons de charité, les biens régis par les ordres hospitaliers, les fonds originairement affectés aux maladreries et autres établissements du même genre, sous quelque dénomination que ce puisse être. Ces biens sont déclarés nationaux. * Art. 11. Les hôpitaux, maisons ou établissements de charité, possédant des biens ou revenus particuliers, continueront d’en jouir dais l’état où ils se trouvent actuellement, d’après les décrets-ci-devant rendus, portant suppression d’octrois, de dîmes, de péages, de biens ecclésiastiques, etc. « Art. 12. Ces revenus seront comptés aux villes ou villages où seront placés ces établissements de charité, dans la part qui devrait leur revenir d’après les bases générales de répartition des secours indiqués en l’article 3, de manière qu’ils recevront du Trésor public une augmentation, si leurs revenus sont au-dessous de la proportion que le calcul général leur assigne, et qu’ils jouiront en entier de leurs revenus, s’ils excèdent la proportion qui leur était destinée. « Dans ce dernier cas, néanmoins, l’excédent 374 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ' [27 septembre 1791. de cette proportion serait employé à payer les dettes de ces maisons si elles en avaient. « Art. 13. L’Assemblée met au rang des dettes nationales, celles des hôpitaux dont les revenus aujourd’hui existants n’excèdent pas la part proportionnelle qu’assigne aux lieux où ils sont placés, le calcul général des résultats des bases de répartition. « Art. 14. En conséquence de ces dispositions, sur la somme de 50 millions mentionnée en l’article 9, celle de 40 millions sera distribuée dans les départements et districts conformément aux articles 6 et 7, et subviendra aux dépenses des secours habituels, secours aux enfants, aux malades, aux vieillards et aux infirmes, et fonds des maisons de répression. « Art. 15. La somme de 5 millions, délivrée aux ateliers de secours, sera également répartie dans les départements, aux conditions prescrites dans les articles 6 et 7. « Art. 16. Il sera réservé une somme de 5 millions, pour faire face aux dépenses générales, telles que traitemen's des commissaires indiqués ci-après, frais de transportation et secours extraordinaires à verser dans les départements dans les moments calamiteux, comme aussi à rétablir la disproportion contraire au vœu de la loi, qui pourrait naître de la dotation, aujourd’hui existante, de certains hôpitaux dont l’Assemblée nationale ordonne provisoirement le maintien. « Art. 17. Les fonds de réserve seront accordés par l’Assemblée nationale avec la sanction du roi, sur la pétition des départements, pour les objets qui ne sont pas communs à tous, et par le décret seul de l’Assemblée nationale, revêtu de la sanction du roi, pour les dépenses générales. « Art. 18. La somme de 50 millions, décrétée dans l’article 9, n’aura lieu que pour l’année 1792 : chaque législature nouvelle devant, sur le compte qui lui sera rendu de la situation des divers départements, de leurs besoins, voter la somme qu’elle jugera nécessaire pour la dépense des secours et de la mendicité. « Art. 19. Nul individu ne pourra être admis à l’assistance publique, qu’il ne soit inscrit sur les rôles des secours. Les conditions, pour y être inscrit, seront : 1° d’être domicilié dans le canton ; 2° de ne payer qu’une journée de travail ; 3° de n’être ni domestique aux gages de qui que ce soit ; 4° de faire constater son besoin réel des secours publics par le serment de deux citoyens éligibles, domiciliés dans le canton, pris dans le nombre des citoyens indiqués à cet effet par chaque municipalité. « Art. 20. Les rôles de secours seront formés tous les ans dans les campagnes, par municipalités, et arrêtés par canton en présence du maire et procureur de la commune de chacune des municipalités réunies pour les discuter contradictoirement. Dans les villes divisées en sections, les rôles seront faits par section, et discutés contradictoirement, en présence de la municipalité, par les commissaires de sections, les rôles seront ensuite adressés aux directoires de district et de département, pour recevoir leur approbation. « Art. 21. Il sera fait un second rôle, où seront inscrits ceux qui ne payent que 2 ou 3 journées d’ouvriers : ceux-ci, dans cfes cas particuliers et accidentels, pourront avoir droit aux secours publies, en remplissant les autres conditions énoncées en l’article 19. « Art. 22. Dans le cas où une famille ou un individu, prétendant avoir droit d’être inscrit sur le rôle des pauvres, n’y serait pas compris par la municipalité, ils pourront présenter leur réclamation au directoire du district, qui statuera, sauf le recours au directoire de département. •< Art. 23. L’administration des fonds de secours et établissements qui en dépendent appartiendra aux départements. « Il sera formé dans chaque département, une agence ou conseil de secours, composé de 4 citoyens non membres du département. Cette agence, nommée par le directoire de département, sera chargée par lui, et sous ses ordres, des soins et détails de l’administration générale. « Art. 24. Indépendamment de cette agence, il est formé un comité de surveillance pour le régime et la police intérieure de chaque maison de correction ou hospice. Ces agences, composées de 4 citoyens nommés par le directoire du département, seront multipliées autant qu’il sera jugé convenable. « Les membres des comités de surveillance ne recevront aucun traitement. « Art. 25. Le directoire du département nommera, en outre, par canton pour les campagnes, et par municipalité pour les villes, un trésorier chargé de recevoir et distribuer les fonds de charité : ce receveur sera comptable; il lui sera alloué des appointements proportionnés à sa recette, si ses facultés et son désintéressement ne lui permettent pas de s’en passer. « Art. 26. Les administrateurs de département pourront déléguer aux municipalités l’administration et ia surveillance des établissements compris dans leur ressort. « Art. 27. Les fondations charitables continueront d’être administrées d’après le vœu expressément énoncé des fondations, mais toujours sous la surveillance des départements. « Les places d’administrateurs des fondations charitables, attribuées à des offices ou emplois supprimés par la Constitution, seront remplies par des citoyens nommés par le directoire. « Art. 28. Il ne pourra être établi par département , qu’une maison d’hospice pour les enfants, infirmes et vieillards, et une seule maison de répression. « Art. 29. Il ne sera, à l’avenir, établi aucun hôpital ou hospice de malades dans les villes au-dessous de 50,000 âmes, les secours habituels devront être donnés à domicile. « Art. 30. A cet effet, il sera établi, par canton, dans les campagnes, et par section dans les villes, un chirurgien ou médecin, aux appointements de 500 livres, chargé de donner des soins gratuits à tous les individus compris dans le rôle de secours. « L’Assemblée renvoie d’ailleurs, à la prochaine législature, le soin de faire les lois de détail nécessaires à l’exécution des principes fondamentaux contenus dans le présent décret. » Art. 31. Les directoires des départements adresseront dans les 10 premiers jours de chaque mois, au ministre de l’intérieur, un bref état de la dépense des secours publics, et de celle relative à ia mendicité. « Art. 32. Le roi nommera 4 commissaires chargés de parcourir annuellement tous les départements, de visiter tous les établissements de charité, d’examiner si les lois sont scrupuleusement observées pour la distribution des secours. Ces 4 commissaires réunis auprès du ministre de l’intérieur, du mois de novembre à [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 septembre 1791.] 375 celui de mai, composeront sous ses ordres l’administration centrale des secours. < Art. 33. Le roi fera connaître à chaque législature, et dans les premiers jours de ses séances, le compte des différents directoires, les observations des commissaires ; il l’instruira des travaux opérés par les ateliers de secours, de l’état des hôpitaux, hospices, maisons de répression, et de tout ce qui a rapport aux dépenses de la mendicité; ce compte sera rendu public par la voie de l’impression. « Art. 34. La différence de la somme de 50 millions décrétée par l’article 9, à celle des biens dont jouissent aujourd’hui les hôpitaux, sera prise, pour l’année 1792, sur la caisse de l’extraordinaire : l’Assemblée chargeant les directoires des départements de lui faire connaître dans les 6 premiers mois de l’année prochaine, l’état au vrai de leurs hôpitaux, et le montant des biens d’aumôneries, hospitaleries, et autres originairement affectés aux fonds de charité, existant dans leur ressort. » M. Andrieux. Il n’y a aucun de nous qui ne désire, comme le comité, secourir les pauvres : nous le voulons tous. Les pauvres seront secourus; et s’ils ne pouvaient l’être qu’en vertu du décret proposé, il faudrait s’en occuper, de préférence à toute autre affaire; mais ce serait une bien mauvaise preuve de l’intérêt que nous prenons à cette classe malheureuse de la société, que de décréter de confiance un projet très compliqué et qui se lie intimement à l’extinction de la mendicité. Et remarquez que quand vous l’auriez décrété, vous n’auriez rien fait en faveur des pauvres, et vous les condamneriez à n’être pas secourus, jusqu’à ce que ce projet put être exécuté. En effet, le comité veut affecter annuellement 50 millions à cette dépense, y compris les revenus des hôpitaux, maisons de charité, etc.; mais il nous a dit lui-même dans un précédent rapport que le montant de ces biens ne lui ôtait pas connu, qu’il n’avait reçu qu’une partie des renseignements nécessaires. Il faudrait donc, malgré le décret que vous rendriez, attendre longtemps ces instructions. Je conclus à l’ajournement. M. de La Rochefoucauld-Liancourt, rapporteur. Si l’Assemblée croit ne pouvoir pas s’occuper de ce travail avant sa séparation, il faut au moins motiver l’ajournement, et je propose le décret suivant : « L’Assemblée nationale, considérant avec peine que l’immensité de ses travaux l’empêche dans cette session de s’occuper de l’organisation des secours dont elle a, dans la Constitution, ordonné rétablissement, laisse à la législature suivante l’honorable soin de remplir cet important devoir ». (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Defermon, au nom des comités militaire et de la marine , propose un projet de décret sur la régie des poudres et salpêtres , aiusi conçu : TITRE Ier. Delà fabrication et vente des poudres et salpêtres. « Art. 1er. La fabrication et la vente des poudres et salpêtres continueront d’être exploitées et régies pour le compte de la nation. « Art. 2. Les règlements faits sur la fabrication des poudres et salpêtres continueront d’être exécutés; et cependant il ne pourra être fait aucune fouille dans les lieux d’habitation sans la permission des citoyens. « Art. 3. Le ministre des contributions proposera incessamment ses vues sur le mode de payement et sur la fixation du prix du salpêtre fourni par les salpêtriers. - Art. 4. Les départements de la guerre et de la marine recevront les poudres de guerre qui leur seront nécessaires, sur les ordres donnés par les ministres de ces départements. « Art.’5. Les fournitures qui leur seront faites seront passées pour comptant, à mesure des livraisons dans les fabriques, au prix de 15 sols la livre, barillage compris, d’après les récépissés fournis par l’artillerie et la marine. <« Art. 6. Les poudres ne seront recevables qu’autant qu’à l’épreuve faite au mortier, elles donneront des portées moyennes de 100 toises au lieu de 90 précédemment prescrites par les ordonnances. « Art. 7. Les départements de la guerre et de la marine remettront à la régie les poudres avariées, ellesleur seront remplacées en poudre neuve de bonne qualité ; les remises seront faites d’après procès-verbaux de vérification, et le remplacement ne sera dû que dans la proportion du salpêtre qu’elles coniiendront. « Art. 8. Les ministres des départements de la guerre et de la marine feront vérifier et essayer les poudres anciennes qui sont dans les dépôts de leurs départements, et remettront successivement comme poudres avariées celles qui ne supporteront pas l’épreuve de 100 toises, portées moyennes, en commençant par cellesdela moindre qualité. « Art. 9. Les poudres de guerre nécessaires au service des gardes nationales, seront demandées par les municipalités; leurs demandes, visées et autorisées par le district et le département, seront adressées au ministre de l’intérieur, qui donnera ordre de faire les fournitures qu’il jugera nécessaires. : elles seront payées comptant par les municipalités 15 sols la livre. « Art. 10. Il ne pourra au surplus être vendu de la poudre de guerre qu'après les approvisionnements complets des départements de la guerre et de la marine, et seulement aux négociants pour le commerce extérieur, au prix de 20 sols la livre. « Art. 11. Le salpêtre nécessaire aux fabricants d’acides minéraux dans les divers départements, leur sera vendu, à la charge à eux de rapporter des certificats de leurs municipalités, visés par leurs directoires de districts, qui constatent leurs qualités et l’activité de leurs fabriques ; le salpêtre brut sera payé par lesdits fabricants le même prix qui aura été réglé pour celui fourni par les salpêtriers. « Art. 12. Les bâtiments destinés au service des poudres et salpêtres, les fabriques, magasins, ateliers, raffineries et dépendances, acquis ou construits aux dépens de la nation, resteront affectés à cette destination tant qu’il n’en sera pas autrement ordonné par le Corps législatif. Ils seront cependant portés aux tableaux des domaines nationaux, et les titres de propriété déposés avec ceux desdits domaines. « Art. 13. Les poudres et salpêtres des différentes qualités, vendues aux citoyens, seront payéps comme suit, la livre poids de marc : « 1° Salpêtre brut, 14 sols la livre.