[20 juillet 1790.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 213 à son ordre du jour la suite des rapports du comité des finances. (Cette proposition est adoptée.) Une députation du district de Notre-Dame est admise avec la confrérie des compagnons paveurs du petit pavé, à faire l’offre du don patriotique de l’argenterie de cette confrérie. L’Assemblée leur permet d’assister à sa séance. M. le Président annonce que M. de Monta-lembert fait hommage à l’Assemblée d’un ouvrage intitulé : Observations sur les nouveaux forts qui ont été exécutés à la rade de Cherbourg . M. Huguet lit une adresse de la municipalité de Laps, district de Billom, département du Puy-de-Dôme; une autre adresse de la municipalité d’Ëglise-Neuve-sur-Bouillon, même département; et une troisième de la municipalité de Billom, lesquelles font soumission d’acheter, l’une pour 12,000 livres, l’autre pour 20,000 livres, et la troisième pour 600,000 livres de domaines nationaux situés dans leur territoire. M. Huguet présente enfin une quatrième adresse des électeurs du même district, contenant l’hommage de la plus parfaite adhésion à tous les décrets de l’Assemblée, et de la reconnaissance qu’ils inspirent à tous les bons citoyens. M. le Président annonce que M. Gonevrot, major de la garde nationale de Bellesme, prie l’Assemblée d’agréer un ouvrage en vers, intitulé : Adieux et regrets des frères députés à la fédération du 14 juillet 1790, à leurs frères d'armes de Paris. M. Pezous fait lecture d’une adresse de la municipalité de la ville d’Albi, qui désavoue la démarche d’un très petit nombre de ses concitoyens attachés, dit-elle, à l’ancien gouvernement Fêo-Sacerdotal, et témoigne à l’Assemblée nationale la profonde reconnaissance des habitants d’Albi pour le don précieux de la liberté. A cette adresse est jointe la délibération de la commune, qui charge la municipalité d’exprimer ses sentiments à l’Assemblée nationale. M. Rewbell, secrétaire , donne lecture du procès-verbat de la séance de ce jour au matin. Ce procès-verbal est adopté. M. Ludière, député du district de Tulle , demande qu’il soit fait mention dans le procès-verbal de l’adresse des élèves du collège de Tulle et de celui de Brive, qui a été lue au commencement de la séance, et il prie l’Assemblée de l’autoriser à témoigner à ces jeunes citoyens que l’Assemblée a reçu avec bonté l’hommage de leur zèle patriotique. Cette demande est accordée. M. le Président. Le comité des rapports est prêt à rendre compte de la difficulté qui s'est élevée à Soissons entre la municipalité et le bailliage , relativement h la fixation du prix du pain à raison de celui du blé. Je donne la parole au rapporteur. M. Vieillard (de Coutances ), rapporteur du comité des recherches et des rapports. Messieurs, les officiers municipaux de la ville de Soissons ayant cru devoir diminuer le prix du pain, le nouveau prix convint à tout le monde» excepté à la communauté des boulangers, qui se pourvut au bailliage. Sur les conclusions du ministère public, il intervint une sentence par laquelle ce tribunal annule la taxe faite par les officiers municipaux, et en ordonne une nouvelle. Le mécontentement du peuple éclata; il y eut des attroupements inquiétants, et pour arrêter les désordres, le conseil général de la commune et le directoire du district s’assemblèrent et ordonnèrent le rétablissement de la taxe. Ce bailliage commença une procédure criminelle contre les auteurs des troubles. La municipalité inquiète des suites que pourraient avoir les dispositions du bailliage, a cru devoir s’adresser à l’Assemblée nationale. C’est dans cet état que l’affaire a été portée aux comités des rapports et des recherches. Ces comités ont considéré la conduite du bailliage de Soissons comme une atteinte à vos décrets et à l’autorité des corps administratifs. Vous avez, par vos décrets, accordé aux municipalités et aux administrations la surveillance et l’action pour les intérêts eomrnuns, tandis que les tribunaux ne peuvent régler que les intérêts particuliers ; autrement ces fonctions administratives et le pouvoir judiciaire seraient confondus. En se conformant aux principes de la Constitution, le bailliage de Soissons n’aurait point annulé la taxe des officiers municipaux, qui n’avaient fait qu’user des pouvoirs que vous leur avez confiés. La sentence ne ce tribunal est donc nulle. Vous pensez sans doute de même à l’égard de la procédure criminelle intentée contre les auteurs des troubles. Ce bailliage a occasionné, par sa conduite, les inquiétudes et les agitations du peuple ; il a causé les désordres; il ne peut les poursuivre et les juger. Tels sont les motifs qui déterminent vos deux comités à vous proposer d’annuler cette sentence et cette procédure. M. Brocheton. Ce bailliage ne s’est point écarté de son attribution ; la partie contentieuse de l’administration appartient aux tribunaux; la taxe faite par les officiers municipaux compromettait les intérêts des boulangers, parce qu’elle n’était pas exactement proportionnée avec le prix des farines : celte taxé ne pouvait être réformée que par la voie de l’appel; cet appel devait être porté au bailliage : le bailliage a donc dû rendre la sentence qu’on vous propose d’annuler. Si vous adoptiez ce décret, je vous demanderais pardevant qui les boulangers pourraient se pourvoir? M. Robespierre. La véritable question que présente cette affaire est celle-ci : la taxe du pain est-elle une fonction judiciaire ou une fonction administrative? Les juges doivent appliquer la loi pour juger les différends qui s’élèvent entre les particuliers : hors de l’application de la loi et de la recherche des délits, je ne leur connais plus de fonctions. Tout ce qui tient dans Tordre public à la sûreté des subsistances, au prix des denrées, appartient essentiellement et appartenait même, dans l’ancien régime, aux corps administratifs. Vos décrets n’ont rien changé à cet égard. La municipalité de Soissons, en fixant la taxe du pain, s’est donc renfermée dans ses fonctions, sur lesquelles le pouvoir judiciaire ne devait se permettre aucune entreprise. D’après vos décrets, les tribunaux ne doivent pas troubler les muni-cip alités dans leurs fonctions ; vous avez plusieurs fois fait l’application de ces décrets à des corps judiciaires; la sentence du bailliage de Soissons est donc une atteinte formelle portée à vos décrets. Votre décision; sur la procédure crb>