[Assemblée nalionale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juin 1790.) 531 soient recueillies, qu’ils sont moins propres que les directoires à les rassembler avec promptitude. Que seraient donc en ce moment les membres des corps administratifs réunis pendant un mois ou six semaines en assemblées générales 7 Privés de connaissances personnelles, et des renseignements qui pourraient leur en fournir, manquant tout à la fois et d’objets de délibération, et de règles pour diriger leurs résolutions, ils tomberaient ou dans l’ennui de l’inaction, ou dans l’embarras des difficultés qu’ils ne pourraient pas vaincre, ou dans le désagrément de prendre des arrêtés dont il deviendrait impossible d’autoriser l’exécution. 11 serait très fâcheux de dégoûter ainsi les nouveaux administrateurs ; et lorsque le salut de la chose publique est attaché au succès de leurs travaux, il ne faut pas que leurs premiers essais soient exposés à un discrédit dout les ennemis de la Constitution ne manqueraient pas de se prévaloir. Ajoutons cette circonstance que le plus grand nombre d’entre eux est pris dans la classe des cultivateurs à qui l’approche d’une abondante récolte ne permet pas de rester longtemps assemblés, sans nuire à leur intérêt personnel, intimement lié en cette partie à l’intérêt public. Des motifs si frappants, l’impossibilité certaine, et déjà sentie par plusieurs des administrateurs élus, d’opérer utilement en assemblées générales dans ces premiers moments, les exemples que nous avons eus des méprises dans lesquelles ces assemblées peuvent tomber, et l’importance d’entretenir cependant le mouvement de l’administration générale, qui ne pourrait pas s’arrêter sans les plus fâcheux inconvénients, toutes ces raisons nous ont portés à vous proposer le seul parti qui peut tout concilier. Il consiste à ce que les membres des corps administratifs élus, et ceux qui vont l’être successivement, s’assemblent d’abord pour s’organiser en nommant leur président, leur secrétaire, et les membres des directoires ; qu’ils terminent là cette assemblée, qui ne sera regardée que comme préliminaire ; que leurs directoires entrent aussitôt en activité, et que l’ouverture de la première session des conseils soit fixée au 15 septembre prochain pour la totalité des districts, et au premier octobre suivant pour la totalité des départements. Pendant l’intervalle, les directoires s’occuperont, avec plus d’efficacité que les assemblées générales ne pourraient le faire, du soin de rassembler tous les renseignements sur les intérêts, les besoins et l’état des affaires du département; et ils se mettront en état d’en présenter le tableau aux prochaines assemblées des conseils. Ils se livreront à tous les détails d’exécution pour la continuation du service de 1790, pour l’accélération du recouvrement des impositions, pour la surveillance des travaux publics autorisés et adjugés, pour l’expédition des différents objets de dépenses locales, et pour le jugement des demandes des contribuables en décharge ou modération. Ils veilleront enfin, en se conformant aux instructions qui leur seront envoyées, à l’exécution des différentes parties d’administration qui leur sont confiées par vos décrets, telles que la décision des difficultés survenues dans la formation et l’organisation des municipalités, les opérations prescrites par votre décret du 25 mai dernier, pour constater les inégalités et doubles emplois dans le dernier département des impositions ordinaires entre les communautés, et les opérations relatives tant à l’administration qu’à la vente des biens nationaux. A ce moyen, le temps qui serait perdu par l’infructueuse session des conseils, sera plus avantageusement employé par les directoires à des opérations qu’eux seuls peuvent bien faire ; savoir, d’une part, aux détails de préparation, indispensables pour mettre les conseils en utile activité; et, d’autre part, aux détails d’exécution nécessaires pour que le service de l’année présente n’éprouve aucune suspension. Les administrations de 83 départements viendront ensuite, toutes en même temps, et à une époque plus favorable au succès de leurs travaux, tenir leur première session générale en conseil. Elles trouveront alors tous les renseignements recueillis, toutes les matières disposées ; et elles seront toutes également en état de répondre par un mouvement uniforme à l’impulsion qui leur sera donnée simultanément. Enfin, les membres de ces administrations, la plupart intéressés aux importants travaux de la moisson prête à s’ouvrir, n’auront point été mis à la fâcheuse épreuve, ou d’abandonner leur plus précieux intérêt pour rester attachés sans fruit à des séances prématurées, ou de nuire au service public, s’ils voulaient non seulement s’y livrer sans connaissances suffisantes, mais encore le précipiter pour être plus tôt rendu aux soins de leur récolte. Il s’agit de décider pour longtemps du sort, de l’influence et du crédit des corps administratifs. Tout dépend pour eux et pour l’intérêt public de la manière dont ils vont se montrer; et leur considération, à laquelle est attachée pour beaucoup leur utilité future, tient tout entière à la confiance qu’ils doivent inspirer par leur conduite. Ceux qui ont osé désirer et espérer que les administrations ne se formeraient pas, désirent, espère nt et annoncent maintenant qu’elles ne rempliront pas l’objet de leur institution, qu’elles n’opéreront pas, ou qu’elles opéreront mal. Cet échec , qui serait si funeste au succès de la Constitution, pourrait aisément arriver, si les nouveaux administrateurs n’étaient pas dirigés dans ces commencements difficiles avec la plus grande prudence, et surveillés avec la plus sérieuse attention ; mais que l’intelligence et la circonspection guident leurs premiers travaux, alors ils ne tarderont pas à combler toutes les espérances des bons citoyens. Disons le mot : l’organisation des Corps administratifs n’est, jusqu’à présent, qu’une grande et belle spéculation : mais rien n’est fait si les avantages que la nation en attend ne se réalisent pas ; et, pour les produire, il faut, en ce moment, beaucoup de sagesse et d’esprit de conduite. L’expérience a déjà démontré les bons effets du parti que le comité vous propose. Lors de l’établissement des assemblées provinciales, elles tinrent au mois d’août une séance préliminaire, dans laquelle elles se bornèrent à établir leurs commissions intermédiaires : elles ne se rassemblèrent que trois mois après; et ce fut le travail préparé par les commissaires et par les procureurs syndics, dans cet intervalle, qui mit l’assemblée générale subséquente, en état de délibérer avec facilité et utilité. Yoici le décret que j’ai l’honneur de proposer : PROJET DE DÉCRET. L’Assemblée nationale, après avoir entendu son §32 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (28 juin 179Ô.J comité de Constitution, a décrété et décrète ce qui suit : « Art. 1er. Les membres déjà nommés, et ceux qui vont l’être successivement pour composer les administrations de département et de district, tiendront incessamment une première assemblée dans laquelle ils nommeront leur président, leur secrétaire, et les membres du directoire. « Art. 2. Dans les anciennes provinces qui avaient une administration commune, les membres des nouveaux corps administratifs nommeront aussi les commissaires qui seront chargés de la liquidation des affaires générales, aux termes du dernier article du décret du 22 décembre dernier sur la constitution des assemblées administratives. « Art. 3. Ces nominations étant faites, les membres des administrations de département et de district se sépareront pour se réunirtous en session de conseil , à la même époque, qui sera, pour cette fois, celle du 15 septembre prochain pour toutes les administrations de district, et celle du premier octobre pour toutes les administrations de département. « Art. 4. Les directoires de département s’occuperont, pendant cet intervalle, dese faire remettre les papiers et renseignements relatifs au département, d’en faire l’examen, pour être en état d’en présenter les résultats généraux à la prochaine assemblée du conseil, et de distribuer à chaque directoire de district ceux qui pourront les concerner. « Art. 5. Ils feront former un état ou tableau de toutes les municipalités dont leur département est composé, avec indication, tant du montant de la population active, que de celui des impositions de chaque municipalité. «Art. 6. Ils feront dresser également un tableau des routes de leur département, avec désignation de l’état dans lequel elles se trouvent, et de la situation, tant des ouvrages d'art, que de ceux ci-devant dits de corvée , qui sont autorisés et mis en confection sur des fonds de 1790. « Art. 7. Ils suivront les dispositions faites pour l’emploi, tant de ces fonds, que de ceux destinés aux ateliers de charité et autres secours de bienfaisance, aux frais d’administration, et autres dépenses qui concernent la généralité du département pour l’année 1790. «Art. 8. Ils veilleront, suivant l’instruction qui leur sera envoyée, à ce que tous les rôles, tant des impositions ordinaires, que ceux de supplément sur les ci-devant privilégiés, et ceux de la contribution patriotique, soient incessamment achevés, vérifiés et mis en recouvrement. * Art. 9. Ils exécuteront la disposition du décret de l’Assemblée nationale du 25 mai dernier, pour constater les inégalités, erreurs ou doubles emplois qui peuvent avoir eu lieu dans le dernier département des impositions ordinaires entre les municipalités. « Art. 10. Ils examineront et jugeront les requêtes des contribuables, en décharge, ou réduction , ou remise, ou modération . « Art. 11. Ils s’occuperont aussi des demandes relatives aux reconstructions et réparations d’églises ou de presbytères, et aux autres objets de dépenses locales, soit pour faire exécuter les dépenses déjà autorisées, soit pour vérifier, accorder ou refuser celles sur lesquelles il n’a pas encore été prononcé. « Art. 12. Ils vérifieront et termineront, conformément aux décrets constitutionnels, toutes les demandes relatives à la formation, organisation et réunion des municipalités. « Art. 13. Ils se conformeront aux instructions qui leur seront données sur tout ce qui concerne l’administration et la vente des biens nationaux. « Art. 14. Et généralement les directoires des départements feront, tant par eux-mêmes que par l’entremise des directoires de districts qui leur sont subordonnés, tout ce qui sera nécessaire et pourra leur être prescrit, soit pour la continuation du service de 1790, soit pour l’exécution des décrets déjà rendus et sanctionnés, et de ceux qui pourront l’être dans le cours de la présente session. « Art. 12. Le présent décret sera présenté incessamment à la sanction du roi, qui sera supplié de l’envoyer sans délai à ses commissaires dans les départements, pour être notifié par eux aux membres élus pour composer les corps administratifs. >» Plusieurs membres demandent à aller aux voix sur l’ensemble-du décret. M. Delley-dMgier. Je propose un amendement à l’article 3, et je demande que l’Assemblée générale du conseil ait lieu dans la saison où les cultivateurs sont maîtres de leur temps, et j’indique le 1er novembre comme une époque favorable. M. Thouret. Votre comité a pensé qu’on ne pouvait trop rapprocher le terme des sessions du conseil sans nuire à l’unité du décret, ni trop éloigner ce terme sans nuire à l’instance des travaux qu’auront alors les assemblées du conseil. II vous demande de maintenir les dates du 15 septembre et du 1er octobre. L’amendement de M. de Deiley-d’Agier est rejeté. Le projet de décret est ensuite adopté sans modifications. ( Voy . annexé à la séance de ce jour un Mémoire sur les impressions à ordonner par les corps administratifs et sur l'envoi des décrets aux municipalités ). M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion du décret sur le traitement du clergé actuel. M. Ghasset continue à remplacer M. l’abbé Expilly dans la fonction de rapporteur. M. Chasset, rapporteur. Je dois rappeler à l’Assemblée l’état actuel du travail sur le décret relatif au traitement du clergé actuel. L’article 1er a été adopté dans la séance du 23 juin; les articles 2, 3 et 7 ont été décrétés le lendemain; enfin le 26 juin, l’Assemblée, en remplacement des articles 4, 5, 6 et d’un amendement renvoyés au comité, a adopté de nouveaux articles désignés provisoirement 4 à 9, ce qui porte à dix le total des articles décrétés à cette heure. Le comité me charge de vous proposer encore plusieurs articles additionnels à son projet imprimé (1). Le premier de ces articles qui deviendrait le onzième de ceux décrétés est ainsi conçu : « Art. 11. Dans les chapitres où par les statuts ou l’usage les prébendes des nouveaux chanoines sont, pendant un temps déterminé, partagées en tout ou en partie entre les anciens chanoines, on n’aura aucun égard à cet usage, et le (1) Voy. le rapport de M. l’abbé Expilly, du 20 mai 1790. — Archives parlementaires, t. XV, p . 597,