[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 février 1790.] 681 seraient rassemblés en rase campagne que pour repousser cette force. M. le comte de Mirabeau. Le préopinant aurait dû, ce me semble, ne pas oublier, en parlant de mon article, l’amendement que mes collègues et lui-mème connaissent bien : « fixer le nombre des attroupés et les trouver en flagrant délit. » Je déclare que je crois que nul officier, nul commandant de soldats ne s’écarterait de son devoir s’il attaquait des brigands, surpris en flagrant délit, et s’il s’opposait à des actes hostiles. Je remarquerai, en passant, que lorsqu’on monte à la tribune pour me faire des reproches, il serait prudent, il serait juste d’avoir donné quelques moments de réflexion à mes idées et à mes expressions. Quand j’ai demaudé une semblable autorisation pour les troupes réglées, j’ai parié d’un moyen provisoire contre un mal provisoire, M. Barnave. Gel article a évidemment besoin d’être amendé de nouveau; il ne porte que sur les flagrants délits, et j’observerai à M. de Mirabeau que tous les citoyens peuvent et doivent même repousser les hostilités. Je ne vois qu’un caractère dans les troupes, celui de l’obéissance; lorsqu’elles font des patrouilles ou qu’elles montent la garde, c’est en vertu d’un ordre qui leur a été donné antérieurement par un officier chargé de la police; dans le cas de flagrant délit, il n’existe entre les troupes réglées et les citoyens que la différence des forces. Sur l’article de M. de Mirabeau, l’Assemblée n’a qu’à examiner si elle doit ou ne doit pas augmenter la rigueur de la loi contre le flagrant délit. Je crois que l’on doit retrancher de l’article le mot résistance à la perception de l’impôt, et y substituer celui de violence contre les propriétés, les personnes et la perception des impôts. M. Pison du Galand. Pour hâter voire décision il faut se renfermer dans la seule question de savoir quel sera le mode et quelles seront les bornes du pouvoir accordé aux municipalités. Je propose de rédiger l’article en ces termes : « Les officiers municipaux emploieront tous les moyens que la confiauce du peuple meta leur disposition pour la protection efficace des personnes, des propriétés publiques et particulières, et pour prévenir et dissiper les obstacles apportés à la perception des impositions; et si la sûreté des personnes, des propriétés, ou la perception des impôts était mise en danger, ils feront publier la loi martiale. » M. Charles de Lameth. Il existe un décret de l’Assemblée nationale qui a causé une grande partie des insurrections: c’est celui qui proroge l’impôt de la gabelle. De tout temps cet impôt a paru odieux au peuple ; promettez de vous en occuper bientôt, et cette promesse donnera la certitude de sa destruction, parce qu’il est impossible qu’il fixe un moment vos regards sans qu’il soit, à l’instant môme, anéanti. La première partie de l’article 3, de M. Bous-sion, est mise aux voix et rejetée; la rédaction de M. Pison du Galand est adoptée. La seconde partie de l’article est lue et décrétée sans discussion. L’ensemble del’article est adoptéainsi qu’il suit : Art. 3. « Les officiers municipaux emploieront tous les moyens que la confiance publique met à leur disposition pour la protection efficace des propriétés publiques, particulières, et des personnes, et pour prévenir et dissiper tous les obstacles qui seraient apportés à la perception des impôts ; et si la sûreté des personnes, des propriétés, et la perception des impôts étaient mises en danger par des attroupements séditieux, il§ feront publier la loi martiale. » On fait lecture de l’article 4. Quelques personnes demandent que la séance soit levée, et la délibération continuée à demain. M. Fréteau. Je pense qu’il vaut mieux continuer la délibération, dût-elle exiger encore quelque temps, plutôt qiîe d’avoir assemblée ce soir. MM. le comte de Virieu et de Cazalès demandent que les articles additionnels à la loi soient ajournés à demain. M. le duc de Croi. J’observe que c’est la quatrième séance qu’on nous fait perdre pour cette malheureuse loi provisoire. La question préalable est mise aux voix sur la motion de MM. de Gazalès et comte de Yirieu. — L’Assemblée décide qu’il n’v a lieu à délibérer. L’avis de M. Fréteau est adopté et la discussion continuée. M. Alexandre de Fameth. L’Assemblée a cru que l’esprit de l’article dont vous êtes occupés était déjà renfermé dans la loi martiale ; je pense dès lors qu’on pourrait réclamer l’exécution de cette loi, si l’article ne passait pas. Je propose, au surplus, une autre rédaction de cet article : « Si les officiers municipaux négligents, pour dissiper une émeute, n’emploient pas les moyens qui leur sont confiés, ils seront responsables des dommages. Dans le cas où leurs biens seraient insuffisants pour payer lesdits dommages, la communauté des habitants sera responsable pour le surplus, sauf son recours sur les biens de ceux qui seraient convaincus d’avoir excité la sédition ou d’y avoir participé. » M. Fa Poule. Il faudrait faire un procès quelconque pour prouver le délit des officiers municipaux. Qui les jugerait ? serait-ce un parlement ? une chambre des vacations? M. Démeunier propose de rédiger ainsi l’article : « Si, par négligence ou par faiblesse, les officiers municipaux refusent de proclamer la loi martiale, et s’il arrive quelque dommage, ils seront responsables du tiers. Toute la commune, dans le cas où ses forces seraient suffisantes pour réprimer les désordres, si elle ne s’y est point opposée, sera responsable des deux autres tiers. » M. Delley-d’Agier. Ne mettons pas les officiers municipaux déjà établis dans le cas de donner leur démission. Quand la confiance publique est réunie sur un citoyen, si cet hommage rendu à sa vertu lui donne la force de supporter le fardeau qui lui est imposé, il faut bien vous garder de porter le découragement dans son cœur; et c’est le décourager que de lui faire craindre de perdre tout à la fois sa fortune et celle de sa famille. S’il s’oublie, s’il vacille, il est perdu ; mais si la communauté n’obéit pas aux ordres des officiers municipaux, elle doit être, en corps, responsable du dommage, sauf son recours sur les biens de ceux qui seront convaincus de l’avoir causé. M. Prieur. Vous n’avez encore eu que des