[10 février 1791.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. gg [Assemblée nationale.] les aperçus présentés : cela est d’autant plus important que la détermination que vous allez prendre sur les dépenses publiques, sera la base de la législation nouvelle del’impôt. Àtténuerla somme nécessaire aux dépenses publiques ce serait vous mener à établir un ordre de choses qui produirait, dans la recette de l’année, un déficit de 30 à 40 millions, malheur passager qu’il serait peut-être possible de remplacer, mais qui détruirait, dans les années suivantes, les ressources que vous pourriez avoir pour suppléer à ce déficit. Au surplus, je ne puis m’empêcher d’admirer la facilité avec laquelle le comité des finances et le comité d’imposition s’appuient constamment sur la caisse de l’extraordinaire, c’est-à-dire la facilité avec laquelle ils vous proposent de manger vos capitaux, au lieu d’établir vos revenus. C’est par cette méthode que les administrateurs des finances ont creusé le précipice où a failli être engloutie la fortune publique ; c’est ainsi que les derniers ministres des finances ont accumulé une dette de 2 milliards par une coupable indulgence pour les peuples. Un membre à gauche : Dites : pour les grands ! M. de Cazalès. Ainsi, je ne puis trop vous dire combien il est important que vous ne cherchiez à vous abuser vous-mêmes sur la portion d’impositions que vous devez décréter. Vous devez vous armer de sévérité à cet égard, parce que, si vous êtes trop indulgents dans ce moment-ci, les générations suivantes vous le reprocheront amèrement ; et elles auront payé bien cher le petit triomphe que vous vous serez donné d’établir 20 ou 40millions de moins sur l’impôt. Je conclus donc à ce que la quotité de l’impôt à répartir sur la nation ne soit déterminée qu’a-près la distribution des tableaux promis par le comité des finances, et à ce que les comités militaire et de marine soient invités à donner au plus tôt l’état de leurs dépenses. M. de La Rochefoucauld. Votre comité des contributions publiques ne vous entraînera pas à une indulgence coupable; mais il a senti, et vous sentirez aussi, que vous devez fixer les contributions au taux seulement nécessaire pour pourvoir à vos besoins; et que, s’il y avait quelque incertitude, il vaudrait bien mieux que les impositions restassent plutôt au-dessous pour cette année, que de s’élever au-dessus... {Murmures à droite; applaudissements à gauche.) Nous serons très loin de vous proposer d’absorber des capitaux considérables par vos dépenses courantes, mais nous avons pensé, et nous pensons encore, qu’il sera de votre prudence de faire faire par la caisse de l’extraordinaire, s'il y a lieu, quelques avances qui seront ensuite recouvrées par le meilleur ordre des finances que vous allez établir. Votre comité des contributions désire que vous lui disiez, le plus tôt possible, quelle somme vous est nécessaire; il vous présentera des moyens de vous la procurer. Je demande donc qu’on passe à l’ordre du jour. M. de FoilevIHe. Je demande que l’on présente incessamment à l’Assemblée le rapport concernant les dettes particulières des anciennes provinces, afin qu’il soit possible de déterminer la portion de ces dettes qui restera à la charge de la nation. (L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) L’ordre du jour est un rapport du comité de l'imposition sur les taxes , vulgairement nommées droits , à Ventrée des productions et des marchandises dans les villes. M. ©upont {de Nemours ), rapporteur (1). Messieurs, votre� comité de l’imposition, en poursuivant sa pénible carrière, est obligé de vous parler aujourd’hui des taxes à l’entrée dans les villes sur les objets destinés à la consommation de leurs habitants. Ces taxes sont aussi, et comme toutes les autres, des impôts déguisés sur les campagnes. Les habitants des villes vivent, en général, de revenus déterminés. Les uns dépensent le fermage de leurs terres, l’intérêt de leurs capitaux, les honoraires de leurs emplois, et n’ont pas autre chose à dépenser; les autres reçoivent des salaires ou font des gains ; et ces gains, ces salaires des commerçants détailleurs, des artisans, des ouvriers, des domestiques qui viennent participer dans les villes, pour prix de leurs utiles travaux, à la distribution de richesses que les propriétaires de revenus y exercent , ne peuvent être pris que sur la dépense de ces propriétaires. Il y a quelques commerçants qui se livrent aux spéculations et à l’entrepôt, dont les profits s’étendent sur la dépense des propriétaires de plusieurs villes; et, quand ils se portent jusqu’au commerce étranger, ils sont balancés du plus au moins par les profits que les commerçants étrangers font sur les marchandises qu’ils donnent en retour. Il y a des manufacturiers et des fabricants ; mais un homme qui fait des étoffes vit de son gain, précisément comme un homme qui, de ces étoffés, fait des habits; comme un nomme qui les use à des jeux frivoles, pour amuser des spectateurs; comme un maçon qui construit un mur ; et ce gain, que les agents de tous les services utiles ou agréables font les uns sur les autres, ne peut, en dernière analyse, être payé que par les gens à qui la terre, les mines, les carrières où la pêche donnent un revenu, et dont ceux qui préfèrent la variété des jouissances à leur douce intensité , se réunissent dans les villes avec les principaux fonctionnaires publics. Il faut bien remarquer ce principe fondamental et d’une incontestable vérité, qu’aucun de ces propriétaires, ni de ces fonctionnaires, ne peut dépenser plus qu’il n’a; et que les artisans qu’ils font travailler, les commerçants qui les approvisionnent, ne peuvent gagner, ni par conséquent dépenser à leur tour, qu’en raison de ce que les propriétaires de revenus dépensent. La consommation des villes, estimée en argent, est donc inviolablement bornée au revenu que les propriétaires qui s’y rassemblent tirent de leurs capitaux, de leurs terres, de leurs rentes, ou de leurs emplois. Lorsque l’on met des taxes sur les denrées qu’eux et leurs salariés consomment, qu’est-ce à dire? Que l’on fera i enchérir leur subsistance et augmenter le prix de leurs consommations? Non ; car , sur leurs moyens bornés , ils ne peuvent pas payer plus de consommations, ni des consommations plus chères. Quelle est donc la chose que l’on fait ? Ün prend une partie du prix de leur consom-(1) Le Moniteur ne donne que des extraits de ce rapport. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791] 89' mation, et on la retranche aux vendeurs de productions et de marchandises, qui les apportent ou les envoient débiter à la ville. L’effet de cette opération ne se borne point là. C’est dans les marchés que se règlent les prix des productions , par la concurrence qui s'y établit , tant entre les vendeurs qu’entre les acheteurs; et les marchés se tiennent dans les villes où sont les besoins les plus multiplias, et où un plus grand rassemblement d’hommes et de richesses fait affluer les vendeurs qui viennent y chercher un débit meilleur et plus assuré. Les prix des villes, et surtout ceux des grandes villes où sont les principaux marchés, règlent et fixent donc les prix des productions de tout le royaume ; car on ne peut pas vendre, dans les campagnes, plus cher qu’à la ville; sans quoi on n’irait point à la ville : il faut même que l’on vende,, dans les campagnes, à plus bas prix qu’à la ville, au moins de toute la valeur des frais de voitures. Il en résulte que la perte éprouvée par les vendeurs de productions et de marchandises, en raison des taxes mises à l’entrée de leurs marchandises et de leurs productions dans les villes, s’étend sur la totalité des productions et des marchandises du royaume ; ce qui diminue la valeur totale des récoltes d’une somme autant au-dessus de l’impôt perçu à l’entrée des villes, que la consommation du royaume est au-dessus de la consommation des vilïes. La perte qu’essuient l’agriculture et les manufactures par ces fortes taxes, est donc infiniment supérieure au produit que les villes ou le fisc en peuvent retirer. Tels sont, Messieurs, les principes très certains cjui militent contre l’établissement des taxes à l’entrée des productions et des marchandises dans les villes, qui en amèneront un jour la ces.-ation absolue, qui devraient l’amener dès aujourd'hui, si la répugnance pour l’imposition foncière était moins puissante; mais qui doivent du moins porter à les modérer beaucoup, lorsque les dispositions que les circonstances prescrivent à la majorité des représentants de la nation, et l’opinion publique, obligent de chercher, dans une perception de ce genre, une des sources des revenus de l’Etat. Votre comité doit vous exposer aussi les raisonnements plus ou moins spécieux qu’on allègue en faveur de cette sorte de taxes, et dont quelques-uns ne sont pas destitués de fondement. Les villes, dit-on, en cela même qu’elles offrent un débouché pour les productions des campagnes, et qu’un plus grand nombre de propriétaires de revenus y fixent leur domicile et y établissent pour l’achat des productions et des marchandises une concurrence plus animée, les villes sont un avantage considérable pour les campagnes qui peuvent y débiter leurs productions. Ces campagnes sont plus riches que les autres campagnes, parce que la concurrence des riches acheteurs y élève nécessairement davantage le prix de leurs productions. Et s’il est juste en général que les impositions soient exactement proportionnelles aux revenus, il n’est pas contraire à la raison, que, selon le principe que Solon avait établi dans Athènes, il y avait quelques contributions spéciales sur les citoyens les plus riches, sur les campagnes les plus productives. Ce principe solonique qui aurait beaucoup d’inconvénients, s’il servait de base à des taxes arbitraires, paraît en avoir moins lorsqu’il s’applique à des taxes sur la consommation, qui n’exigent ni contrainte personnelle, ni inquisition domiciliaire, et qui se perçoivent aux entrées des villes par une forme peu vexatoire. Les villes, ajoute-t-on, sont le séjour des capitalistes que l’Assemblée nationale et que le public, dont l’opinion a tant d’influence sur les lois, désirent que l’on puisse soumettre à l’impôt, auquel une partie de leur fortune échappe toujours, auquel leurs consommations paraissent ne pouvoir échapper, môme lorsque les sommes qu’il en retire sont prises sur les vendeurs des choses consommées. C’est encore dans les villes, continue-t-on, qu’abondent les étrangers, qui s’y rassemblent en proportion de ce que ces villes plus grandes, et réunissant plus de perfection dans les arts et dans l’industrie, plus de variété, plus de recherche dans les plaisirs de la société, leur promettent et leur procurent plus de jouissances. L’attrait qu’inspirent ainsi les villes, comme séjour des sciences, des arts et des amusements de toute espèce, appelle dans le royaume et dans l’enceinte de ces villes, des capitaux et des revenus étrangers qui viennent concourir par leur dépense à donner de la valeur aux productions et aux marchandises qui s’y consomment. La plus forte partie de cette dépense des étrangers tourne au profit des producteurs et des fabricants qui fournissent les denrées ou les autres marchandises nationales, et la moindre partie au profit de l’impôt mis sur le débit ou la consommation de ces productions plus ou moins ouvrées. On en conclut qu’il n’y a pas d’injustice, lorsque tant de causes amènent dans les villes des revenus, et sur les campagnes qui peuvent contribuer à leur approvisionnement, la dépense de ces revenus, de leur demander une contribution spéciale et proportionnelle à la quantité, à la nature, à la qualité des productions et des marchandises, dont cet approvisionnement est composé. En raison de ce que les villes sont plus considérables et tirent leur approvisionnement de plus loin, l’impôt mis sur les marchandises, destinées à leur consommation, s’étend plus loin. En raison de ce que ces marchandises sont en général plus précieuses, cet impôt peut et doit s'élever plus haut, relativement à leur quantité, pour approcher davantage de la proportion, avec leur valeur, qui paraît réclamée par la raison. Ainsi, le royaume entier, et même l’étranger, concourant à la population de Paris, et à fournir les revenus qui s’y dépensent, et le royaume entier, contribuant aussi à fournir à Paris des approvisionnements en toute espèce de productions et de marchandises, les taxes à l’entrée de Paris sont véritablement une imposition générale sur tout le royaume, peut-être, à quelques égards, sur l’étranger. Celles qui se payent à l’entrée de Rouen font un impôt particulier, tant sur la Normandie, que sur les autres ci-devant provinces qui contribuent à l’approvisionnement de Rouen. Celles qui ont lieu à Bourges, au contraire, ne doivent être, à très peu près, qu’un impôt sur le département du Cher. Et celles qui se perçoivent dans un simple chef-lieu de district ne sont guère qu’un impôt sur ce district. C’est dans ce petit nombre d’observations et de maximes inutiles à développer davantage au milieu de l’Assemblée de législateurs qui a porté 90 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (10 février 1791.] jusqu’à ce jour le plus de philosophie dans son travail, que se trouve toute la théorie des taxes sur les productions et les marchandises à l’entrée des villes, et de leur graduation nécessaire, juste et naturelle, en raison de l’importance de ces villes, de la richesse de leurs habitants reg-nicoles ou étrangers, du plus grand territoire qui les alimente, et de la plus haute valeur des productions et des marchandises consommées dans leurs murs. Cette théorie cependant éprouve quelques objections que votre comité est loin de vouloir dissimuler, ni à vous, Messieurs, ni au public ; car on ne peut fonder solidement aucune loi que sur la démonstration qu’ePe est raisonnable, ou aussi rapprochée de la raison que les circonstances puissen t le permettre. Quelques i ersonnes pensent que le tarif des droits d’entrée des villes devrait être uniforme dans tout le royaume, exactement le même pour les plus grandes et pour les plus petites villes, et que le revenu plus considérable, qu’on tirerait de ce tarif dans les villes de premier ordre, devrait résulter seulement de ce que 100,000 hommes font naturellement dix fois plus de consommations que 10,000. Votre comité, après avoir longtemps et profondément discuté cette opinion, n’a pas cru pouvoir l’adopter. Un seul motif peut conduire 100,000 hommes à se rassembler dans un lieu plutôt que 10,000 ; c’est que ce lieu où ils affluent leur présente plus de moyens de subsister, d’acquérir, de jouir, d’être heureux. De cela seul donc qu’il y a dans une ville 100,000 hommes ou 500,000, et non pas 20,000, et non pas 2 ou 3,000, on peut conclure avec sûreté que chacun de ces hommes a proportionnellement, et l’un compensant l’autre, beaucoup plus de richesses dans la grande ville que dans la moyenne, et dans la moyenne que dans la petite ; que non seulement ils font des consommations plus abondantes, mais aussi des consommations plus délicaies, plus précieuses, ou au moins plus chères. On peut conclure avec sûreté, que, dans !e partage entre les individus qu’opèrent les dépenses et les salaires de toute espèce, les dernieis des salariés auront meilleure solde dans la plus grande ville. L’examen des faits confirme ce premier aperçu. Lorsque l’on compare la valeur des consommations de Paris avec sa population, on trouve que chaque individu y a, l’un dans l’autre, quatre cents livres par an à dépenser; tandis que dans plusieurs autres parties du royaume, chaque individu n’a pas cent francs. On voit qu’à Paris les journées de simple manœuvre valent trente à quarante sous, et dans la plupart des autres départements, de quinze à vingt sous-, dans plusieurs d’entre eux, de dix à douze. On trouve qu’à Lyon, la dépense moyenne des habitants est d’un peu moins de trois cents livres par tête, et les journées de vingt à trente sous. Quant à la valeur des consommations, on remarque qu’à Périgueux, à Gahors, à Sarlat, on a du vin, même bon, qui, déduction faite du droit d’octroi, vaut à peine un sou la bouteille; tandis qu’à Paris , le plus mauvais vin qu’on y boive, on peut dire même du vin réellement mauvais vaut au moins 4 ou 5 sous la bouteille avant d’avoir payé la taxe d’entrée, et détermine, en raison de cette valeur, le revenu de la vigne qui le produit, quoique déjà restreint par le droit ou taxe d’entrée que ce vin rencontre dans son débouché principal. Qui ne sait de plus que s’il y a une belle pièce de bétail, une volaille parfaite, un gibier excellent, un poisson rare, on l’envoie, autant qu’on le peut, à la grande ville, parce qu’on espère l’y mieux vendre, et que réellement on l’y vend mieux? Ce petit nombre de vérités suffit pour faire abandonner l’idée de n’avoir qu’un même tarif applicable à toutes les villes, sans considérer leur importance, leur richesse, leur population, et pour convaincre qu’il faut, au contraire, examiner et peser toutes ces choses, si on veut agir avec équité, comme législateurs, avec sagesse, comme législateurs en linance, relativement aux perceptions à établir aux entrées des villes. Il est évident qu’on ne pourrait, sans injustice, traiter sur le même pied les consommations de Paris et celles de Bazas, lorsqu’il est évident que ces deux villes sont dans une position très dissemblable; que les ressources et les moyens n’y sont pas les mêmes ; que le territoire qui les alimente n’a ni la même étendue, ni la même richesse ; que les consommations y sont dans un degré d« fortune tout autre, et ont une autre nature de fortune. Si vous eussiez cru, Messieurs, que toutes les consommations dussent être soumises à un tarif égal, et se réduire ainsi à une sorte de capitation presque uniforme sur tous les contribuables, vous auriez fondu tous les impôts dans une simple capitation, et vous n’auriez pris d’autre base de répartition, ni d’autre élément de la représentation nationale, que la population ; mais vous avez vu que, selon les localités, la population était ou riche, ou pauvre, ou dans un état mitoyen, et qu’il fallait y avoir égard dans la distribution des impôts et des taxes. Vous avez en conséquence décrété que la représentation nationale serait, en raison, composée du territoire, de la population et des contributions. Vous avez donc décrété qu’il y aurait de l’inégalité dans les contributions, relativement à la population, parce qu’il fallait y apporter toute l’égalité à laquelle vous pourriez atteindre, relativement aux facultés de ceux qui contribueraient à l’impôt ; et vous n’avez rien décrété de plus sage. Ce n’est donc pas sans raison que votre comité croit devoir vous proposer de proportionner à la population et à la richesse des villes les taxes qui devront être établies à leurs entrées. Cette disposition, au reste, ne sera que l’adoucissement de ce qui existait, de ce qui existence ne sera qu’un plus grand degré de perfection dans les mesures auxquelles la nécessité avait obligé de se soumettre. 11 y a dans la nature des choses une certaine puissance qui force l’ignorance même, qui contraint même le despotisme, à ne pas s’écarter entièrement des lumières de la raison; et, sans cela, il est trop certain qu’avec le pouvoir qu’ont eu la stupidité et la méchanceté, le genre humain aurait été anéanti depuis un grand nombre de siècles. La fiscalité voulait obtenir un revenu considérable des taxes, qu’elle appelait insolemment droits à l’entrée des villes. Elle avait bien vu qu’à prendre pour règle de la contribution des grandes villes le tarif que les petites pourraient supporter, il n’y aurait pas de revenu, et l’on tir rait à peine les frais. Elle avait bien vu qu’à soumettre les petites villes au même tarif que les grandes, [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791.] 91 il y aurait injustice trop révoltante, attendu que les moyens de payer n’existaient pas dans les petites villes ; et que, de plus, il y aurait impossibilité de percevoir, attendu que dans les petites villes les moyens de coaction manquent également, que les clôtures y sont mauvaises, que les postes, les rondes et les patrouilles nécessaires pour percevoir un tarif un peu élevé en absorberaient le produit quand il ne porterait que sur la consommation d’un petit nombre d’individus. On avait reconnu vaguement qu’il n’y avait en ce cas que la faiblesse de la taxe qui pût diminuer la contrebande; et l’on avait modéré les tarifs des villes dans une proportion graduelle en raison de ce qu’eiles avaient moins la possibilité de payer, de ce que l’on avait moins la possibilité de les y contraindre. On avait en général poussé sur chacune d’elles la perception jusqu’où elle avait pu aller. On avait été rarement arrêté par aucune autre cause que par l’impuissance de demander plus; et la plupart des villes s’étaient trouvées imposées à leurs entrées avec excès, mais par des tarifs gradués avec assez de régularité. Paris payait trente-quatre millions de taxes à l’entrée, sans compter les frais de régie; c’était sur le pied de cinquante livres quinze sols par tête de tout âge, depuis les enfants à la mamelle. De cette énorme perception vingt-huit millions ou quarante livres dix sols par tête, même d’enfant, étaient pour le Trésor public, le surplus pour les besoins de la municipalité et des hôpitaux. Lyon, dont la population n’est, selon M. de la Michodière, qui la connaît bien, que de cent trente-huit mille huit cent quarante âmes, payait à ses entrées quatre millions trois cent quatre-vingt mille six cent vingt-six livres , ou trente et une livre onze sols par tête d’habitant. Orléans acquittait neuf cent soixante et un mille huit cent dix-huit livres, qui partagées entre trente-huit mille quatre cent vingt têtes, coûtaient à chacune vingt-cinq livres par année, sur lesquelles dix-neuf livres dix sous appartenaient à l’Etat ou à la maison d’Orléans, comme apana-giste, et, en cette qualité, aux droits de l’Etat : le surplus servait aux besoins de la ville et de ses hôpitaux. Et dans les petites villes, la Flèche, où vivent quatre mille quatre cent soixante-douze habitants, payait vingt mille trois cent cinquante-cinq livres , ou un peu plus de quatre livres onze sous par tête. Rocroi, qui n’a que deux mille deux cent quatre-vingt-huit habitants, payait, de cette manière, sept mille quatre cent trente-quatre livres, ou environ trois livres par tête de tout âge. Ces petites villes ont besoin d’être soulagées; et cependant leur tarif, s’il était appliqué aux grandes villes, n’y produirait pas les Irais que leur garde exige. Or, ce ne serait pas la peine d’établir des taxes aux entrées des villes, et de nuire ainsi au commerce qui fournit leurs consommateurs, pour n’en retirer aucun revenu public. Ceux qui demandent que l’on n’établisse aux entrées des grandes villes que les mêmes tarifs qui peuvent être perçus dans les petites, que les mêmes taxes dont ces petites villes peuvent faire l’avance, feraient mieux de demander la suppression de toute taxe aux entrées ou sur les consommations; car que serait-ce qu’un impôt dont il n’existerait que le fardeau et le tourment, et qui ne produirait rien au Trésor national? Mais si l’on supprimait cette manière, certainement peu favorable, d’imposer sur les citoyens un revenu pour la nation, il ne faudrait pas avoir deux poids et deux mesures; il ne faudrait pas permettre aux villes d’employer pour elles-mêmes la forme qu’on aurait rejetée; il faudrait exiger qu’elles pourvussent à leurs besoins privés, sans arrêter les voitures, sans ralentir les approvisionnements, sans priver les producteurs et les fabricants du bénéfice que peut leur procurer la dépense des consommateurs. Les villes ne désirent point cette manière d’être; elles préfèrent leurs taxes d’entrée à l’impôt sur les fenêtres, et à celui sur les cheminées que vous avez déjà établi, avec plus de sens et de sagesse, en décrétant que la contribution mobilière aurait, pour base, le prix des loyers, toujours déterminé par la beauté, la clarté, la commodité des appartements; elles le préfèrent à ces deux impôts, qui spécialement tournés vers ces grands besoins de la vie, la lumière et la chaleur, rendent les maisons tristes et malsaines, et ne peuvent être en juste proportion avec le revenu; elles le préfèrent même aux sous pour livre qui seraient nécessaires sur la contribution foncière et mobilière pour donner le même produit que les taxes d’entrée, quoique l’impôt dût alors être réparti, comme ces contributions fondamentales, avec une entière équité. Quelques philosophes croient que les habitants des villes sont plus avancés dans la théorie de l’impôt, et qu’ils solliciteront la permission de fournir à la nation, par des sous pour livre additionnels à la contribution mobilière, les vingt-quatre millions pour lesquels les taxes à leurs entrées ont été comprises dans votre projet de finance, et de pourvoir, en outre, sous la même forme d’addition à la contribution mobilière, à toutes leurs dépenses municipales qui vraisemblablement seront moindres, mais qui peuvent aussi monter à vingt quatre autres millions. Votre comité de l’imposition serait loin d’y voir de l’inconvénient; il se trouverait heureux que cette pétition pût avoir lieu, plus encore qu’elle fût générale, ou qu’elle eût au moins pour elle la majorité des villes. Il pense qu’il faudrait l’accueillir, même isolément, de la part des villes qui s’y porteraient; et il vous proposera de favoriser, sous le titre d’abonnement, une mesure du même genre, lorsqu’elle sera nécessaire ou réclamée. Il voudrait pouvoir assurer les revenus publics, en respectant partout l’entière liberté du commerce, gage des succès de l’agriculture, et principe fécond de la prospérité sociale. Mais les vives objections que la contribution mobilière et les règles de sa répartition ont éprouvées, principalement dans la capitale; les grands éloges qui furent alors donnés à la perception, qu’on appelait insensible, sous la forme de droits d’entrée et de consommation, montrent assez, peut-être trop, combien il y a peu d’apparence qu’on aime mieux augmenter des quatre cinquièmes la contribution mobilière dans tout le royaume, et la tripler peut-être à Paris, plutôt que d’avoir des taxes d’entrée. Plût au ciel que votre comité se trompât, et que l’on pût douter à ce sujet de la véritable opinion publique dont le poids irrésistible vous fait la loi 1 Car, Messieurs, telle est l’obligation qu’une impérieuse nécessité vous prescrit, surtout dans un temps de commotion et de régénération universelle : c’est d’avoir à la fois l’argent qu’exigent les besoins publics, et l’affection du peuple; c’est de préférer, autant qu’il est possible, les impôts qui plaisent le plus à ceux qui les payent, ou 92 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [10 février 1791.] même à ceux qui n’en font que l’avance, mais qui croient les payer. Toutes les villes crient contre les octrois ou les taxes à leurs entrées et sur leurs consommations; mais toutes les villes veulent des octrois au moins pour leurs besoins municipaux, et toutes sont accoutumées à en payer aussi pour le Trésor national; elles répugneraient à une autre manière de fournir à l’Etat le même revenu, ou même un moindre revenu. De quoi s’agit-il donc pour toutes ces villes? De diminuer, autant qu’on le pourra, leur contribution : c’est ce que propose votre comité. Les villes ont payé jusqu’à ce jour soixante-dix millions en taxes d’entrée, dont quarante-six pour le gouvernement. Le comité demande qu’au lieu de quarante-six millions la nation n’en perçoive plus que vingt-quatre. Les détracteurs de vos projets appellent „cela mettre des taxes sur les villes ; non pas, Messieurs, c’est en ôier. De quoi s’agit-il encore? De faire en sorte que les taxes, qui seront laissées sur la consommation de leurs habitants, ne soient réellement que des taxes de consommation, et ne deviennent pas des impôts sur la circulation et sur le commerce. Vous avez cru devoir détruire les péages; mais les taxes à l’entrée des villes, quoique diminuées conformément à vos intentions et au projet de votre comité, seraient encore des péages, si elles portaient sur les marchandises destinées au commerce. Elles ne peuvent être regardées comme justes et proportionnelles que sur les denrées et marchandises destinées à la consommation directe des habitants de la ville où on les perçoit. Votre comité vous proposera donc, premièrement, de permettre le passage de bout de toutes les marchandises dans toutes les villes autour desquelles on ne peut pas tourner pour suivre 6a route. Il vous proposera, secondement, d’exempter de la taxe de consommation, les marchandises qui sont les plus connues pour être l’objet d’un commerce d’entrepôt. Il ne vous proposera pas la restitution de la taxe d’entrée, lors de la sortie des marchandises qui l’auraient acquittée; cette forme est trop compliquée, elle est nécessairement coûteuse;mais vous devez la repousser, surtout parce qu'elle invite à la fraude, et qu’elle appelle ensuite la vexation qui détruit la liberté. En deux mots: réserver à chaque ville, selon sa localité, la liberté du commerce de spéculation, d’importation et de réexportation, imposer la consommation de chaque ville par des taxes à l’entrée, dont le tarif soit proportionné à la richesse et à la population de la ville, comme aussi à l’étendue et à la richesse du pays qui concourt à son approvisionnement, et sur la culture et les manufactures duquel la taxe d'entrée retombe inévitablementen définitive : tels sont les flambeaux dont votre comité a toujours tâché d’éclairer sa marche; il avoue que, malgré eux, elle a été embarrassée et ralentie par des difficultés de toute espèce. Les affaires des villes et les taxes qu’elles supportent présentent actuellement une étonnante diversité. Les unes, indépendamment de ce qu’elles fournissaient directement au Trésor public, acquittaient comme charges municipales et locales des dépenses de fournitures aux troupes ou aux états-majors; et ces dépenses de quelques villes étaient une seconde espèce d’impôt à la décharge ou du département de la guerre ou du service des pensions. Ces villes, qui avaient plus de charges, étaient obligées de se soumettre à des tarifs plus hauts, plus nuisibles à leur commerce, plus onéreux à leurs habitants. Cette apparence de revenus municipaux, liés à des charges qui les absorbaient, et qui auraient dù être ou supprimées, ou prises au compte généra] de la nation, mettait obstacle à ce qu’on pût soumettre à aucun ordre raisonnable et justement gradué, à aucune proportion régulière, les taxes à l’entrée des villes. D’autres avaient acheté du gouvernement, par des sommes effectives qu’elles lui avaient fournies, ou par des emprunts faits à son profit, le droit d’établir certains octrois ou l’engagement de certaines branches de revenu, dont il y en a même qui sont de nature à ne pouvoir subsister. Tel est le droit sur les soies étrangères, matière première très importante pour les manufactures nationales. On avait assujetti ces soies, pour payer ce droit anticommercial, à passer par la douane de Lyon, de quelque côté qu’elles entrassent dans le royaume. Le droit et la servitude étaient visiblement très injustes et très onéreux pour les manufactures de Tours, de Nîmes, de Saint-Ghamont et de Paris. Vos comités de commerce et d’im position vous ont proposé de supprimer l’assujettissement, de diminuer considérablement la taxe d’entrée dans le royaume, et d’en appliquer le produit au Trésor public. Rien n’est plus juste; mais vous ne le pouvez, sans indemniser la ville de Lyon des sommes qu’elle a fournies pour acheter ce monopole et ce revenu, ou sans prendre au compte de l’Etat les dettes qu’elle a contractées pour se procurer ces sommes que l’Etat n’aurait pas dû recevoir. Quelques autres villes se sont endettées pour bâtir des casernes, ou pour des fortifications qui devaient être une dépense générale de la nation, et on a exagéré leurs tarifs pour solder ces dépenses. Il est juste et nécessaire de régler ces vieux comptes, de prendre à la charge commune ce qui ne doit pas être une charge particulière, de rétablir ainsi toutes les villes dans leur état naturel, de faire cesser les motifs d’exception qu’elles pourraient alléguer, afin de pouvoir ensuite les classer avec équité et avec bon sens, et ne leur demander ni rlus ni moins qu’elles ne doivent à la contribution générale, dans un système régulier et raisonnable de taxes d’entrée. Votre comité croit utile, conforme à votre justice et à votre sagesse, de nettoyer, par cette mesure équitable et préparatoire, le champ sur lequel vous devez travailler et recueillir. Arrivé à ce terme, et au moment de classer enfin les villes par leurs distinctions naturelles, votre comité a trouvé devant lui deux obstacles en apparence insurmontables : Le premier est la nécessité de réunir dans la même classe des villes dont la population présente des différences plus grandes que celle qu’on trouve entre la populatiun des autres villes qui occupent le terme le plus bas et le terme le plus élevé de deux classes qui se touchent. Le second est le danger de regarder comme pareilles et de soumettre aux mêmes taxes des villes d’une population égale et d’un degré de richesse très disproportionné. Le premier inconvénient semble d’abord être inséparable des classifications sur lesquelles se repose la faiblesse de l’esprit humain; mais il [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791.] ne serait réel que pour la paresse, la prévention, l’insensibilité qui regarderaient les classifications comme des barrières inflexible - , exclusives de toui adoucissement, de toute facilité, de tout rapprochement dans le passage d’une classe à l’autre. 11 est nul, dans le lait, pour les philosophes laborieux qui ont le bon sms de concevoir que toute classification n’est qu’une nomenclature laite pour donner du repos à la pensée, qui n’empêche point ia nature de procéder toujours par nuances insensibles. Or, c’est ia nature dont votre comité voudrait vous proposer d’imiter la marche; U voudrait que votre travail lût en tout digne de votre équité. Cette équité, qui esi à la fois votre devoir et votre puissance, ne serait pas satisfaite, si vous ne trouviez pas les moyens de suivre pour le tarif des taxes d’entrée la progression croissante et décroissante, que présente la population des villes dans le passage d’une classe à l’autre. Elle ne serait pas satisfaite, si, pour élément de vos classes, vous n’aviez égard qu’à la population. Elle ne serait pas satisfaite encore si, dans les modifications que vous devrez apporter à la classification des villes, vous vous exposiez à vous déterminer par des considérations arbitraires ; car l'arbitraire, même lorsqu’il s’applique à rencontrer la justice, ne peut jamais démontrer qu’il l’ait véritablement trouvée, et il n’y a point d’injustice qu’il ne puisse rendre plus ou moins plausible. Il faut donc s’imposer des lois invariables appuyées sur la nature des choses et sur des faits publics, par rapport auxquels il ne soit pas possible de se tromper. Il faut enchaîner par elles, et l’ingéniosité scrupuleuse de la veitu qui, voulant trop bien faire, pourrait s’induire elle-même en erreur, et la faiblesse qui pourrait se laisser émouvoir par l’éloquence des allégations et des sollicitations, et les efforts de ce patriotisme privé qui, dans le balancement des intérêts de sa ville et de ceux de l’Etat, entraîne quelquefois des citoyens d’ailleurs recommandables à préférer la partie au tout, et à ne s’estimer que davantage pour avoir commis ce délit sérieux. Votie comité a tourné tous ses soins et toute son intelligence à saisir ainsi quelques règles simples et claires, qui puissent diriger, vous, lui, et les exécuteurs de vos décrets dans une route obscure, où la plus grande équité de détail peut seule compenser le malheur d’être obligé, par l’opinion générale, de s’écarter des vrais principes de l’imposition. II espère avoir réussi autant qu’il était possible. Il espère même avoir trouvé des moyens de balancer, de compenser, de borner, de réparer les erreurs qui diraient pu, ou pourraient échapper à son zèle et à celui de ses coopérateurs. Il vous proposera de ranger les villes sous huit classes ; mais de ne regarder ces classes que comme des lignes générales de démarcation qui permettront, dans chaque classe, toutes les modifications, toutes les subdivisions que la justice pourra réclamer. La première classe comprendra Paris, ville sans pair. La deuxième, les villes moindres que Paris, qui ont plus de quatre-vingt mille habitants. La troisième, celles qui eu ont uepuis cinquante mille jusqu’à quatre-vingt mille. 93 La quatrième, depuis trente mille jusqu’à cinquante mille. La cinquième, de dix-huit mille à trente mille. La sixième, de dix mille à dix-huit mille. La septième, de six mille à dix mille. La huitième, au-dessous de six mille, mais non pas au-dessous de deux mille cinq cents. Il croit à désirer que les rassemblements de population qui présentent moins de deux mille cinq cents individus, ne soient pas soumis à ces suppléments d’impositions, si nuisibles à l’impôt même, qu’on appelait improprement droits, et qu’il faudra désormais nommer taxes à l’entrée ou sur ia consommation. Dans le cas cependant où des villes moins considérables voudraient et solliciteraient des taxes sur leurs consommations pour leurs dépenses municipales, votre comité a songé aux moyens d’avertir leurs habitants de leur véritable intérêt, en liant dans ces villes mêmes, comme dans celles qui sont d’une plus grande importance, le revenu privé de la ville avec un revenu national; car il lui paraît que le meilleur moyen de prévenir les abus dans toute perception, est de n’en laisser faire aucune sur le peuple sans que l’Etat y ait part, sans que le gouvernement et le pouvoir législatif aient droit, devoir et intérêt, d’y apporter une utile et vigilante surveillance. Ainsi huit classes de villes qui auront nécessairement des taxes à leurs entrées ou sur leur consommation, et une neuvième classe, eu quelque façon surnuméraire, de plus petites villes qui ne pourront être assujetties à cette sorte de taxes que sur la demande même de leurs habitants. Vous avez reconnu, Messieurs, la justice et la nécessité de graduer les taxes d’entrée entre ces différentes villes selon leur importance et leur opulence, pour en tirer un revenu de quelque valeur, et pour le proportionner à la fois aux moyens de payer et aux moyens de percevoir. Votre comité doit vous indiquer pour cette graduation une échelle fondamentale, et les soins, les règles, les précautions qui seront nécessaires pour adoucir chaque pas qu’on fera en suivant cette échelle, et pour arriver dans chaque ville au point le plus exact d’équité relative auquel il soit possible d’atteindre. D’abord dans Paris, où les taxes d’entrée produisaient à l’Etat quarante livres dix sols par tête de tout âge, et avec les frais de régie, coûtaient au peuple plus de quarante-trois livres par tète, sans compter dix livres cinq sols de plus qui étaient perçus au profit de la ville et des hôpitaux; le comité croit que les taxes d’entrée doivent être à l’avenir réduites et combinées, de manière à ne plus rendre à la nation quo dix-huit livres par tête d’habitant de Paris. C’est une grande diminution ; mais Paris a fait de grandes pertes. Paris de plus était relativement à la taille ce qu’on appelle une ville tarifée, dans laquelle les taxes d’entrée tenaient lieu de cette imposition qui se trouvera généralement supprimée, et dont le remplacement sera confondu. avec celui des vingtièmes et de la capitation, dans les deux contributions foncière et mobilière. Paris, sur le tout, éprouvera un soulagement de plusieurs millions; mais Je royaume entier en recevra de semblables, et n’enviera point à Paris, dont la contribution foncière et mobilière sera beaucoup plus considérable que n’étaient ses vingtièmes et sa capitation , la diminution de ses taxes d’entrée de quarante-trois livres à dix-huit livres par tête. 94 [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791.J Les dépenses de Paris d’ailleurs sont notablement augmentées ; et quoique la nation doive reprendre à sa charge, dans la capitale comme dans les autres villes, les frais qui intéressent l’Etat entier, il est à craindre qu’on ne soit forcé d’établir pour la commune de Paris, à ses entrées, des taxes égales à celles qui seront levées pour le Trésor public. Les dépenses municipales d’aucune autre ville ne peuvent s’élever dans une proportion aussi forte avec les taxes d’entrées qu’elles auront à payer au Trésor publie. Le principe qui détermine la graduation décroissante de ces taxes, oblige de mettre une grande distance entre les contributions aux entrées des villes de la seconde classe et celles de Paris. Votre comité estime que la différence ne doit pas être moindre d’un tiers ; car, en comparant la valeur des consommations de ces villes avec leur population, on trouve que les individus y dépensent environ un quart de moins qu’à Paris. Or, les impôts de supplément qui ne doivent porter que sur l’aisance demandent une graduation plus forte que celle des facultés prises en masse ; et c’est cette vérité qui vous décide à baisser le taux des tarifs sur chaque production, à raison de ce que les villes sont moindres en population et en richesse. Celles-ci décroissent dans une progression assez régulière, depuis les villes de la seconde classe jusqu’aux plus petites villes. Les tarifs y peuvent être gradués ue manière à produire, frais de régie compris, une perception sur le pied moyen de douze livres par tête dans les villes de la secoude classe ; De dix livres dans celles de la troisième ; De huit livres dans celles de la quatrième ; De six livres dans celles de la cinquième ; De quatre livres dans celles de la sixième ; De quarante sols dans celles de la septième ; De vingt sols seulement dans celles de la dernière. De moins encore dans les villes de la classe surnuméraire, qui pourraient croire utile de solliciter des taxes sur leurs propres consommations. Le comité annexe à ce rapport 8 projets de tarifs calculés avec soin pour les 8 classes de villes, à l’effet de donner ce produit, et qui ne peuvent s’en éloigner que de très peu de chose. Ces tarifs portent pour les villes des premières classes sur les boissons, les bestiaux ou la viande, quelques autres comestibles, les fourrages, les principaux combustibles, un très petit nombre de marchandises, et les matériaux à bâtir. Toutes les étoffes, les toiles, la draperie, la soierie, la mercerie, la quincaillerie, la droguerie, et presque la totalité de l’épicerie en .sont exemptes. On a réservé la même exemption à plusieurs espèces de comestibles, au charbon de terre et à la tourbe ; de sorte que le pauvre puisse vivre dans toutes les villes du royaume sans payer aucune taxe d’entrée. La maxime de l’ancien gouvernement et de l’ancienne finance , maxime odieuse qui avait enfanté la gabelle et les droits de détail sur les boissons, était que les taxes de consommation devaient 'porter sur la dépense des pauvres qui les rendait plus productives, parce que les pauvres sont nombreux. La maxime de votre comité, la vôtre, celle de la Constitution, est que les taxes de consommation ne doivent pas demander au pauvre l’avance d’un argent qu’il n’a pas, et que le riche pourrait ne lui restituer que tard. Cette maxime de la raison et de la philosophie est qu’il faut soulager le pauvre, parce qu’il est sacré : Sacerrima res homo miser. L’histoire vous rendra témoignage que vous êtes les premiers législateurs fiscaux qui n’ayez jamais perdu cet axiome de vue. C’est en suivant son esprit que, dans les villes des quatre dernières classes, on a joint aux exemptions qui auront lieu dans les classes supérieures celle de toute taxe sur le poisson, de quelque espèce qu’il soit. Dans celle des trois dernières, on a ajouté l’exemption de taxe sur la volaille et le gibier. Daus celle des deux dernières, on a étendu l’exemption aux bestiaux, à la viande et au petit nombre de marchandises d’épin ries qui peuvent payer des taxes modérées dans les grandes villes. Ces villes ces deux dernières classes , dans plusieurs desquelles les habitants nourrissent des bestiaux, seront débarrassées, par cette exemption, des formes gênantes établies aujourd’hui sur la sortie et la rentrée du bétail de la ville. Enfin, dans la dernière classe, les fourrages et les bois de construction ont aussi été compris au nombre des marchandises exemptes. Les bois de construction et le poisson le seront dans tous les ports de mer; on arrivera au produit qu’ils doivent rendre en y baissant un peu moins la taxe sur les autres comestibles ou tes autres matériaux à bâtir. Mais le comité vous répète, Messieurs, qu’il ne vous propose ces tarifs que comme des bases générales qui pourront se prêter aux variétés qu’exigera le commerce particulier de chaque ville. S’il en est une pour laquelle la taxe sur une certaine marchandise paraît trop onéreuse, on diminuera cette taxe, on la modifiera, on la supprimera même, et on en remplacera le produit en soutenant un peu plus haut le tarif sur une autre marchandise. On aura le soin général de baisser le taux de quelques articles du tarif ou d’en supprimer quelques-uns en entier dans les dernières villes de chaque classe, afin qu’elles ne payent que très peu plus que les premières de la classe suivante. Il faudra, par la même raison, hausser le taux de quelques articles dans les premières villes de chaque classe, pour rapprocher leur contribution de celles des dernières de la classe qui lui est immédiatement supérieure; en telle sorte néanmoins que chaque classe produise la somme totale indiquée par son taux moyen. H faudra enfin déterminer le taux du tarif dans chaque ville, non seulement par l’importance que donne à la ville sa population, mais encore par le degré d’aisance dont cette population jouit. Là, on se trouvera entouré de pétitions et de prétentions d’un genre précisément inverse de celles dont votre comité de Constitution et de division du royaume a été assiégé lorsqu’il a fallu désigner les chefs-lieux des départements et des districts et l’emplacement des tribunaux. Il n’y avait pas une ville alors dont les députés n’exagérassent les ressources, la commodité, les facultés; où ils ne montrassent un grand nombre de citoyens vivant dans l’aisance et propres, par leur fortune comme par leurs études, à se livrer à tous les travaux de l’administration et de la judi-cature. Lorsqu’il s’agira de taxes d’entrée, il semblera qu’en moins d’un an la population de ces villes soit diminuée de moitié, que l’aisance ait [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791.) totalement disparu, qu’il D’y ait plus de moyens d’aucune espèce. Le dernier tableau sera inexact en moins, comme le premier l’était en plus; mais de combien? Voilà ce que la raison et ce que les observations même les plus scrupuleuses ne pourraient jamais dire, si elles portaient sur des faits vagues. Voilà ce que l’arithmétique dira, avec un degré d’approximation très suffisant, si on l’applique à des faits positifs, de manière à prévenir au moins les injustices de l’homme ; carie peuple pardonne, et avec raison, les erreurs involontaires, quand il voit que l’on a fait tout ce qu’on a pu pour les prévenir: il ne pardonne pas, même la justice, si elle peut avoir la moindre apparence de la faveur. Bannissons donc la possibilité de la faveur; appuyons-nous sur des faits incontestables; rap-procnons-les, éclairons-les l’un par l’autre, tellement que leur combinaison ne puisse laisser place qu’à peu d’erreur. D’abord, quant à la population, les dénombrements nominatifs seraient très longs; et, faits dans des vues fiscales, ils ne mériteraient que peu de confiance; car, de toutes les peurs qui peuvent faire cacher et mentir les hommes, la plus active en France, et peut-être la seule, est la peur de l'impôt. Il n’en sera pas toujours ainsi; le patriotisme à cet égard inspirera, dans lasuite, une juste honte. Mais notre chose publique est encore bien neuve; le véritable esprit qui la maintiendra n’est pas encore généralement formé. Il faut donc juger de la population d’après un élément que toutes les familles ont le plus grand intérêt de rendre exact, d’après les registres des naissances, qui, depuis trois ans, comprennent les non-catholiques, et qui, de jour en jour seront plus fidèles sur ce point. Le nombre des naissances, multiplié par trente, donne, avec assez de ’ustesse, l’état de la population dans les villes. 1 faut, dans les campagnes, employer un multiplicateur plus faible, parce que les campagnes recrutent les villes d’un grand nombre d’ouvriers et de serviteurs. Le différent degré de richesse et de pauvreté de chaque ville estbien plus difficile à connaître; cependant on peut en acquérir encore une assez juste idée, en partant d’un fait connu et certain: c’est la valeur des maisons. Dana les villes riches ou aisées, ce sont des gens aisés ou riches qui rentrent en concurrence pour se loger. Ils poussent donc plus haut l’estimation de ce besoin de la vie, et les maisons se louent, elles se vendent plus cher, elles sont risées plus haut dans les partages de famille. ’est à raison de cette valeur qu’elles ont été imposées aux vingtièmes, et qu’elles le seront désormais à la contribution foncière. Dans les villes pauvres, la concurrence pour les logements est entre des familles pauvres, qui n’enchérissent qu’à proportion de leurs moyens. Les loyers, les maisons, les vingtièmes, la contribution foncière sont moindres, même pour une égale population. Dans les villes manufacturières, où un grand nombre d’ouvriers se contentent d’un très petit logement, chaque maison en particulier se loue cher; mais le nombre des maisons est petit, relativement à la population, et la valeur des maisons, prise en masse, conserve un certaiu rapport avec la somme de richesses, de salaires et de jouissances de cette population. Ainsi, ne voulant rien donner à l’arbitraire, et cherchant opiniâtrement l’équité dans la nature des choses, on pourra fixer la graduation des tarifs 95 entre les villes, en raison composée de leur population et de leurs vingtièmes. Une ville de 20,000 âmes, dont la valeur des maisons sera telle, qu’elle ait été soumise à deux cent mille francs pour les deux vingtièmes, sera justement assujettie au môme degré de tarif qu’une ville de 25,000 âmes, qui, moins opulente, aura des maisons d’une moindre valeur, et n’aura été imposée, pour les deux vingtièmes, qu’à cent soixante mille francs . Si l’une des deux villes indiquait, par la valeur de ses maisons, une plus grande aisance, on soutiendrait son tarif à un taux un peu plus élevé. Si cette valeur était moindre, on baisserait son tarif en totalité ou en partie, ou l’on en retrancherait quelques articles. Les villes des provinces abonnées ne seront comparées qu’entre elles. Le taux de leurs impositions foncières était différent; mais, dans l’intérieur de chacune de ces provinces, il suivait de ville à ville les mêmes proportions, avec la valeur des immeubles. Vous avez envisagé presque toutes ces patentes, lorsque vous avez décrété les bases de la représentation nationale; et c’est aux conceptions de ce genre qu’on reconnaît les hommes dignes de donner des lois à leurs commettants et à leurs égaux; car chacun voudrait être juste. Dans le silence des passions, c’est le désir de tous les cœurs, même des méchants; mais savoir l’être ne fut donné en partage qu’aux âmes fortes, aux esprits profonds, aux caractères laborieux. Sans doute, Messieurs, l’application de ces règles à toutes les villes sera un grand et fatigant travail. Il sera utile et nécessaire; il n’effrayera donc ni vous, ni votre comité des contributions publiques. Qu’est-ce que le travail, au prix de l’équité, au prix de la confiance qu’elle inspire, au prix de la soumission qu’elle assure, au prix de la paix qu’elle enfante et qu’elle entretient? Votre comité en a préparé les bases. Si elles vous paraissent justes, elles seront prescrites par vos décrets. Quelques administrateurs en chef et un nombre suffisant de coopérateurs concourront ensuite à les appliquer aux localités. Votre comité tiendra la main à la fidélité de cette application, tant que se prolongeront vos devoirs, et que vous perpétuerez les siens. Il vous proposera les décrets nécessaires pour chaque ville; et votre esprit pourra encore animer la fin de ce travail, même quand il ne serait pas terminé pendant votre session. Mais un puissant motif la rendra plus rapide qu’on ne pourrait le croire, en pensant qu’il doit s’appliquer à cinq cent vingt-neuf villes; ce sera l’intérêt de la plupart de ces villes, qui, aspirant après le soulagement, après la simplification de régime qui naîtront pour elles de votre nouveau système, et ne pouvant en jouir, ne pouvant changer la forme ni le taux de leurs perceptions et contributions actuelles qu’après que le décre-particulier à leur nouveau tarif sera rendu, cont courront naturellement, de tous leurs efforts, de toutes leurs lumières et de tout leur zèle, à la perfection de ce nouveau tarif. Il ne faut point, à cet égard, Messieurs, se laisser entraîner à une dangereuse et particulière indulgence que l’intérêt général de la patrie nous interdit; jusqu’au moment où chaque ville recevra, par vos décrets, son nouveau tarif, les anciens doivent être suivis. Il n’y aura point, il ne peut pas y avoir d’intervalle dans les contributions; il ne doit point y avoir de suspension dans les revenus auxquels tient l’existence de la chose publique. Nulle société, nulle portion de la société 96 (Assemblée natienale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791.] ne doit être un moment sans loi. Il faut exécuter religieusement l’ancienne, jusqu'au soir du jour où elle doit finir; et commencer l’exécution de la nouvelle, au lever du soleil, le lendemain. Or, la nouvelle élant meilleure que l’ancienne, chacun aura intérêt à faire cesser, le plus promptement possible, le régime de celle-ci. Cependant, Messieurs, il ne faut pas croire qu’aucun travail humain soit, ni puisse être parlait; il ne faut pas même y prétendre en administration, où le péril de ne rien faire et de laisser la chose publique en souffrance est plus grand que celui de taire médiocrement. Quelque attention, quelques lumières et quelque concours d’efforts que l’on puisse apporter dans la fixation des tarifs des taxes d’entrée dans les villes, ils pourront, en chaque lieu, produire un peu plus ou un peu moins qu’on ne l’aura présumé; et néanmoins ce n’est pas une charge inconnue que vous voulez mettre sur les villes; ce n’est pas pour des besoins imaginaires que vous songez à l’établir. Il y faut donc un régulateur qui en balance la casualitê, qui en rectifie les erreurs, qui en perfectionne la manutention. Votre comité a imaginé ce régulateur, et il est d’une nature très simple. Il consiste dans une mesure qui ne permette pas à l’impôt, sous la forme de taxes à l’entrée des villes, de laisser dans les revenus publics un déficit imprévu ; qui ne lui permette pas de passer la borne que voois lui aurez fixée, et d’aggraver le fardeau que vous aurez cru que chaque ville pourra et devra supporter. Vous aurez décidé, par le décret qui établira chaque taiif, qu’il a pour objet de lever, sous la forme de taxes d’entrée, une contribution qui revienne, dans chaque ville, sur le pied de tant par tête de la population, calculée, pour éviter l’arbitraire, dans une certaine proportion, avec les naissances. Lorsque le produit aura excédé la somme qu’une telle contribution devait fournir au Trésor public, vous accorderez, pour l’année suivante, sur la contribution mobilière de la ville dans laquelle il aura été levé, remise d’une somme égale à ce que cette ville aura payé en taxes d’entrée, au delà de ce que vous aviez trouvé juste de lui imposer. La législature pourra même ordonner l’affaiblissement du tarif, la diminution de quelques articles, la suppression entière de quelques autres, si l’expérience indique qu’il ait été établi sur un pied trop haut. Si, au contraire, le tarif ne produit pas, dans quelques villes, la recette que le Trésor public en devait attendre, vous pouvez décréter qu’il sera pourvu au déficit par une addition de sous ou de deniers pour livre aux contributions foncières et personnelles de cette ville. Ainsi l’intérêt de tous les habitants des villes sera que les taxes d’entrée soient perçues avec exactitude et fidelité; que la contrebande y soit autant restreinte qu’il sera possible, puisque la négligence y serait punie par une augmentation de contribution foncière et mobilière ; puisque la vigilance, au contraire, y peut être récompensée par une diminution de la contribution mobilière de tous les citoyens, et par un baissement de tarif qui leur sera pareillement avantageux à tous. Ainsi le revenu public serait partout assuré ; la perception tendrait sans cesse à se perfectionner par l’impulsion de l’intérêt général ; et néanmoins aucune ville ne pourrait être soumise, en masse, à une contribution plus forte que celle qui aurait été tixée parla loi ; puisque tout excès dans la perception variable des taxes d’entrée serait nécessairement versé, en soulagement pro-prolionnel, sur tous les citoyens soumis à la contribution mobilière. C’est une vue convenable à votre sagesse de lier, sur tous ces points et de toutes les manières possibles, l’intérêt particulier des villes à l’intérêt général de la nation. Toutes les villes ont des besoins auxquels il faut pourvoir par desdépenses communes ; toutes sont accoutumées à faii e face à ces besoins par des octrois. Leurs anciens tarifs ne peuvent pas subsister, lorsque vous changez tous les vôtres, lorsque \ous diminuez les charges locales delà plupart d’entre elles, lorsque vous relirez les droitsqui leuravaient été imprudemment engagés, lorsque vous réduisez leurs besoins communs à ceux de� leur administration, de leur police et de leurs hôpitaux ; mais enfin il faudra pourvoir à ces dépenses communes, et vous pouvez, vous devez peut-être les autorisera lever à cet effet des sous pour livre additionnels aux tarifs des taxes d’entrée qui se percevront au profit de la nation. Ce sera encore un moyen d’engager les municipalités à surveiller la fraude que l’on pourrait faire contre les taxes nationales, et qui tournerait, en deux manières, à la perte de la ville. La faculté d’ajouter au profit des villes des sous pour livre à la perception faite à leurs entrées au profit de l’Etat doit cependant avoir une limite. Vos tarifs seront calculés d’après la possibilité locale de la perception; si l’on pouvait les augmenter indéfiniment sur un article ou sur l’autre, au profit des villes, leurs pétitions inconsidérées, ou l’ambition mal combinée de leurs officiers municipaux, pourraient conduire à forcer le taux de quelques articles, de manière à exciter la contrebande toujours corruptrice, et qui porterait dans les finances au moins un déficit passager qu’on ne pourrait couvrir ensuite que par une augmentation d’impositions directes. 11 faut donc prévenir cette tentation, en déclarant qu’il ne pourra être mis au profit des villes, sur les taxes nationales d’entrée, de sous pour livre additionnels sur aucune denrée ni sur aucune marchandise que jusqu’à concurrence au plus d’une somme égale à celle dont la perception sera ordonnée par le tarif, sur cette même production ou cette même marchandise. S’il se trouvait quelques villes dont les besoins excédassent ce qu’elles pourraient retirer ainsi du doublement à leur pofit des taxes nationales imposé s à leurs entrées, ce qui n’est aucunement vraisemblable, pas même à Paris, il y faudrait pourvoir d’une autre manière qui ne mît en danger ni la morale des habitants, ni le revenu de l’Etat. Il ne faut pas souffrir qu’il soit fait dans aucune ville aucune perception municipale, qui ne soit liée à une perception nationale. Il faut que partout soient la liberté et la propriété ; mais que partout aussi l’on trouve et l’on voie la patrie associée, mère, maîtresse, garante d’une bonne administration. Vous trouverez dans celte utile et perpétuelle société un des principaux moyens d’exécution de vos taxes d’entrée ou de consommation sur les villes, et l’unique voie peut-être qu’il y ait pour vaincre une d< s plus grandes difficultés que ce système d’imposition présente, comme aus.-i pour préparer la route qui doU conduire, au bout d’un certain temps, à n’avoir plus que des impositions 1 10 février 1791.J [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. qui puissent, sous tous les aspects, soutenir les regards de la raison et de la philosophie. Il y a un grand nombre de villes closes dans lesquelles la perception des taxes d’entrée ne présente presque aucun embarras ; mais il y en a un grand nombre d’autres qui n’ont aucune clôture, ou bien dont font réellement partie des faubourgs considérables, qui sont entièrement ouverts. Ces villes néanmoins ont aujourd’hui des octrois , et attachent une très juste importance aux revenus qu’elles en tirent. Si les circonstances particulières où se trouvent les villes de cette dernière classe rendent impossible d'y établir complètement aujourd’hui le même régime qui aura lieu pour les villes closes ou faciles à clore, on pourra du moins y appuyer la perception nationale sur celle à laquelle elles sont déjà familiarisées pour leurs propres besoins : on pourra du moins en accepter des abonnements, pour fournir les sommes auxquelles devra se monter leur contribution ; et ces abonnements, nécessaires en ce cas, faute d’une autre manière d’exécuter la loi, ne pouvant manquer d’avoir beaucoup de succès, instruiront les villes elles-mêmes, et les législatures qui nous succéderont, sur la possibilité de simplifier les formes de toutes les perceptions, et de les rendre plus constitutionnelles. Vous êtes trop éclairés, Messieurs, pour ne pas voir les défauts qui existent encore dans plusieurs branches du système d’impositions que la nécessité publique vous contraint d’adopter ; vous êtes trop honnêtes pour les dissimuler : mais en rasant l’écueil, il est digne de vous d’y mettre un fanal à l’usage de vos successeurs; il est de voire devoir envers vos commettants de leur montrer que vous avez manœuvré, avec le plus de sagesse qu’il vous a été possible, le vaisseau de l’Etat. Ainsi votre comité doit terminer aujourd’hui son travail, en vous observant qu’il n'a pas dépendu de lui de faire que les taxes à l’entrée des villes fussent une bonne imposition; et qu’il ne dépend ni de lui ni de vous d’empêcher qu’à l’époque actuelle, l’opinion publique ne décide l'établissement, ou plutôt la conservation de ces espèces de taxes que l’on croit propres à diminuer la contribution foncière, quoiqu’elles en soient une véritable et nuisible augmentation. Ce qui dépendait de lui était d’en rechercher les principes; de soumettre à des règ'es de justice, de prudence, de convenance, celte institution qui ne peut encore être anéantie; d’y réunir la fiscalité qu’exigent les besoins publics, avec la proportion, la modération, la commercialité, l’humanité qui sont conformes à vos maximes. Ce qui dépend de vous est de faire en sorte que les intérêts du commerce soient ménagés, que la contribution soit proportionnée, en chaque ville, et aux moyens que les habitants ont d’en faire l’avance, et aux facilités ou difficultés locales de la perception ; d’empêcher qu’aucune ville puisse, même sous cette forme obscure, être imposée au delà de ce que la nation aura jugé qu’elle doit l’être; de faire sortir avec une exacte précision le soulagement des contribuables de tout excès imprévu dans la recette ; d’intéresser tout le monde à l’exécution de la loi ; enfin de conduire nécessairement l’opinion générale à flétrir et à repousser la contrebande, que les anciennes institutions induisaient au contraire à favoriser. Ce que pouvait votre comité de l’imposition, il 1M Série. T. XXIII. 97 a tâché de le faire. Fondé sur l’esprit patriotique que vous avez déployé dans vos décrets précédents, il espère que ce que vous pouvez de votre côté sera fait; et il résume, dans le projet de décret qu’il a l’honneur de vous présenter, les dispositions fondamentales nécessaires à l’etablissement de la branche de revenu public que vous l’avez chargé de vous proposer dans ce rapport. De la Rochefoucauld , Dauchy , d’Allarde , Roederer, Defermon, Dupont {de Nemours). PROJET DE DÉCRET. L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des contributions publiques, relativement aux taxes à l’entrée des villes, décrète ce qui suit : TITRE PREMIER. Articles fondamentaux. Art. 1er. Il sera établi, au profit de l’Etat, à l’entrée des villes dont la population n’est pas au-dessous de 2,500 âmes, et sur quelques-unes des productions et des marchandises que leurs habitants aisés ou riches consomment le plus généralement, des taxes, combinées de manière que les pauvres puissent vivre sans être assujettis à presque aucune d’entre elles, et que le commerce de transit, ainsi que les principales branches du commerce d’entrepôt, ne puissent en souffrir. Art. 2. La nation prendra à sa charge les dépenses dont les villes étaient grevées pour fournitures militaires, ainsi que celles relatives aux états-majors qui ne seront pas supprimés. Art. 3. Les droits, taxes ou octrois aliénés ou engagés à quelques villes seront supprimés. La nation indemnisera les villes engagistes ou concessionnaires des fonds qu’efesjus i fieront avoir versés dans le Trérnr public, pour prix desdits engagements ou concessions, ou prendra à sa charge les dettes contractées à cet effet. Art. 4. Les villes débarrassées, conformément aux deux articles précédents, des charges particulières qui mettaient entre elles de l’inégalité, relativement aux taxes sur leur consommation, ne seront plus imposées sous cette forme, qu’à proportion de leur importance et de leurs facultés. Elles seront à cet effet divisées en 8 classes, savoir : Première classe : Paris. Deuxième classe : Les villes moindres que Paris, qui ont quatre-vinqt mille habitants et au-dessus. Troisième niasse : Celles qui ont cinquante mille habitants et au-dessus, jusques et non compris quatre-vingt mille. Quatrième cla-se : Les villes dont la population monte depuis trente mille, jusqu’à moins de cinquante mille habitants. Cinquième classe : Les villes qui renferment depuis dix-huit mille , jusqu’à trente mille individus exclusivement. Sixième classe : Celles dont la population n’est pas au-dessous de dix mille âmes, et n’arrive pas à dix-huit mille. Septième classe : Les villes qui n’ont que depuis six mille habitants, jusqu’au-dessous de dix mille. 7 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 'Ht 1 | 98 Huitième et dernière classe : Celles qui n’ont que moins de six mille, et pas moins 4e deux mille cinq cents habitants. Art. 5- La contribution qui, sous la forme de taxes à l’entrée, était, chaque aimée, dans Paris, -de quarante livres dix sens par tête au profit de l’Etat, non compris les frais de régie, sera réduite, pour le Trésor public, à dix-huit livres par tète, frais de régie compris. Dans les autres villes, la réduction et la combinaison des taxes scmblalb'es sera telle, que la contribution, frais de régie pareillement compris, n’excède pas pour le taux moyen : De ce les de la deuxième classe, douze livres ; De celles de la troisième, dix livres ; De celles de la quatrième, huit livres; De celles de la cinquième, six livres ; De celles de la sixième, quatre livres ; De celles de la septième, quarante sous ; De telles de la huitième, vingt sous par tête chaque année. Art. 6. Les villes qui ont moins de 2,500 habitants ne seront soumises à aucune taxe d’entrée ni de consommation au prolit de l’Etat, que sur leur propre pétition, et dans le cas où elles voudrait nt lever, sous cette forme, les deniers nécessaires à leurs dépenses communes ; auquel cas l’Assemblée nationale, après avoir pris, -sur leur demande, l’opinion du directoire de district et l’avis dru directoire de département, fixera le tarif qui dtvra être perçu, et reniera, d’après le taux moyen adoptié pour les villes immédiatement supérieures, quelle quo'ité de ladite perception devra tourner au profit du Trésor national. Art. 7. Pour éviter l’arbitraire ou les négligences dans le calcul de la population, elle sera eriimée sur le pied de trente fois le nombre dis naissances, constaté par les registres publics. Art. 8. Les tarifs annexés ,au présent décret servirent de base pour les taxes à imposer sur la consommation des villes dans chaque classe ; il sera néanmoins apporté, dans les sept dernières classes, par la diminution ou suppression de quelques articles, et l’augmentation de quelques autres, les modifications qui, d’après les circonstances locales, seraient reconnues utiles, tant pour faciliter le commerce spécial de chaque ville, que pour rapprocher, par nuances insmsi-bles, la contribution des dernières villes de chaque classe supérieure, cl des premières de la classe qui la suit immédiatement, dont les tarifs seront,, de leur côté, portés au-dessus de la proportion moyenne, pour concourir à ce rapprochement. Art. 9. La gradation entre les villes de chaque classe, comme aussi entre, les dernières villes des classes supérieures et les premières des classes inférieures, ainsi que les modifications relatives à cette gradation, seront déterminées par la raison composée de leur population et de la valeur de leurs maisons, connue au moyen des vingtièmes ou de la contribution foncière. Art. 10. Lorsque lesdites modifications auront été arrêtées et fixée s par l’Assemblée nationale, ,les tarifs seront mis à exécution aux entrées des villes et faubourgs clos ou faciles à clore. Le ministre des finances sera autorisé à concerter, avec les municipalités des villes ou faubourgs ouverts, les mesures les plus propres à faciliter et assurer la perception, jusqu’à ce que leur clôture ait pu être effectuée; même à accepter di s abonnements égaux en produit à la perception qui aurait dû être faite dans les villes où cette perception présenterait, à raison des circonstances locales, trop de difficultés. Art. IL Jusqu’à l’établissement desdits nou-v aux tarifs, nouvelles perceptions ou nouveaux abonnements, les tarifs actuels et perceptions en usage continueront d’avoir lieu. Art. 12. Dans le cas où le produit des nouveaux tarifs qui seront arrêtés se trouverait avoir excédé le terme qui sera réglé pour chaque ville, conformément aux articles 5, 6 et 7, il sera fait, dans .l’année suivante, sur la contribution mobilière de la ville où cet excédent aura été peiçu, diminution d’une somme égale à l’excédent procuré par la taxe d’entrée*, et s’il y a lieu de présumer que l’excédent doive être durable, le tarif pourra être diminué par la législature, sur la demande de la ville, l’opinion du directoire de district, et l’avis du directoire de département. Dans le cas, au contraire, où le produit en aurait été inférii ur à la contribution déterminée, il y -sera pourvu, dans la ville où le déficit aura été éprouvé, par l’addition, à la contribution foncière et mobilière de l’année suivante, d’une somme égale à celle de ce déficit. A:rt. 13. Les villes, pour faire face à leurs dépenses municipales et à celles de leui s hôpitaux, ainsi qu’aux dettes qui leur seraient personnelles, pourront proposer à l’Assemblée nationale d’ajouter aux taxes d’entrée, perçues au profit général de la nation, des sous pour livre municipaux, à la charge que ces sous , our livre n’excéderont jamais, ni en totalité, ni dans aucun article du tarif, la somme levée pour lrEtat; et sur la demande desdites villes, l’opinion du directoire de district et l’avis du directoiie de département, vérification faite par lesdits directoires de la réalité des besoins, l’Assemblée nationale permettra la levée des sous pour livre additionnels qui lui seront demandés, et leur -application aux besoins particuliers des villes. Art. 14. Dans le cas où les sous pour livre additionnels aux taxes d’entrée, poussés jusqu’à l’égalité même avec ces taxes, ne pourraient suffire aux dépenses particulières d’une ville, elle pourra proposer à l’Assemblée nationale d’y pourvoir par des sous pour livre additionnels sur lis contributions foncière et mobilière; et l’Assemblée nationale, après s’être fait rendre compte de l’opinion du directoire de district et de l’avis du directoire de déparlement, prendra lesdits avis et opinion des directoires et la demande desdites villes en considération. TITRE III. Articles réglementaires. Art. 1er. Les taxes à l’entrée seront acquittées par toutes personnes indistinctement, sans exception ni privilège, et même pour ce qui sera destiné pour le service personnel, et la consommation du roi et de sa famille. Les voitures où seront personnellement le roi, la reine et les ambassadeurs des puissances étrangères, chiz lesquelles la France jouit, à cet égard, du droit de réciprocité, seront seules exemples de visites. Art. 2. Les laxes à l’entiée des villes seront régies, quant aux déclarations, aux visites et aux formes de l’acquittement et de l’enregistrement, d’après les règlements intervenus et à intervenir pour la régie et perception des droits des douanes nationales. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» ,[10 lévrier 1791.] 99 Art. 3. En cas de refus de visite, de violence et de rébellion, les employés seront autorisés à conduire ou faire conduire les refusants ou rébellionnaires par-devant le commissaire de police ou tel autre officier public qu’il. appartiendra, lequel jugera s’il y a lieu d’ordonner l’emprisonnement. Pourront les employés requérir la force publique, toutes les fois qu’ils le jugeront nécessaire, et elle ne pourra leur être refusée, à peine contre les refusants de tous dommages et intérêts. Art. 4. Le comité de l’imposition est chargé de proposer à l’Assemblée un règlement général, pour l’admission et la promotion aux emplois vacants; de manière à fermer tout accès à la faveur, et à assurer la récompense due au travail, à l’activité et à la bonne conduite. Tableau. 100 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 110 février 1791.] TABLEAU des denrées et marchandises qui jouiront de l'exemption totale des taxes assujetties am DENRÉES ET MARCHANDISES EXEMPTES DE TAXES. Denrées Combustibles Boissellerie et raclerie, Marchandises. le sac. / Blé ...................................................................... Seigle .................................................................... Farine ................................................................... Pain ..................................................................... Légumes verts de toute espèce ............................................. Poids et haricots verts; le sac ............................................ 1 Fruits de toute espèce, à l’exception du raisin par quantité de 10 livres et au-dessus .............................................................. Châtaignes ..... \ Marrons. .... J Noix ....... \ Noisettes ...... ) ' Bière fabriquée dans la ville, le muid .................. 24 1. 2 s. 4 d. 1/2 I Poisson de mer sec et salé, la voie ........................................ f Œufs, le cent ............ ................................... ............ | Fromages de Brie, Pont-l’Évêque, Livarot, etc.; l’un dans l’autre, la douzaine J environ ................................................................ Fromages cuits faisant partie du commerce de l’épicerie .................... I Fèves sèches... 1 : Haricots secs... [ le muid ....................................... ......... ! Pois secs ...... ) 1 Riz, le quintal ............................ ............................... j Charbon de terre, la voie ................................................. Attèles, pelles .à four, manches à balais, etc., le cent de bottes ............ Seilles, poulies, cuillers à pots, soufflets, croissants de bats, courbes, battoirs, écuclles, sébilles, lanternes, salières, égrugeoirs, bois de brosses et de bottes, fourreaux d’épées, bringes de bouleau, osier, galoches, sandales, etc., la Jattes, arçons, rondeaux, pelles et sabots, la voie. Soie, le quiulal .................................. Fil, le quintal ................................... Coton, le quintal ................. .............. ecrue. filée.. en laine. filé ...... écrue. . . . filée ..... S Laine, le quintal ...................................... | Bois de marqueterie, d’ébénisterie, le quintal ......... ..... ............... i Toiles, toileries et toiles cirées; l’aulne, non compris les droits de contrôle, de J halle et de gare ......................................................... \ Draperies et étoffes de laine; le quintal, non compris les droits qui se payent à la halle aux draps .................................................... Quincaillerie... [ .............................................. Etoffes de soie ..................... ........................ ............. Dentelles de fil et de soie ................................................. Drogueries, le quintal .................................... j communes'. Épiceries, le quintal ........................... .......... communes!!!!.’ Chevaux et mulets neufs; par chacun ................... Cheval et mulet de messagerie .......................... Chaise de messagerie .................................. Carosse, charrette et fourgon de messagerie ............. Plans d’arbres et sarments ; la voie de 2,000 livres pesant Lie pour les chapeliers, le quintal ............... ....... Terre à pots et poterie; la voie de 2,000 livres pesant.... Porcelaine, le quintal ......... ........................ Pierres à aiguiser et à briquet ......................... ; Spart œuvré et non œuvré, le quintal .................. Cordes à puits, la voie ................................. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791.] {Ql Ventrées dans toutes les villes du royaume , et tarif des droits auxquels elles étaient entrées de Paris. DROITS AUXQUELS ELLES ÉTAIENT ASSUJETTIES A PARIS. OBSERVATIONS. Les villes de la cinquième classe, ou depuis 30,000 âmes jusqu’à 18,000, joindront aux exemptions ci-contre, qui auront lieu dans les villes des quatre premières classes, et seront communes à toutes les villes, celle de toute taxe sur le poisson frais, tant de mer que d’eau douce. Les villes de la sixième classe, ou depuis 18,000 âmes jusqu’à 10,000, jouiront do toutes les mêmes exemptions que celles des cinq premières, et auront de plus celle de toute taxe sur la volaille et le gibier. Les villes des deux dernières classes, ou au-dessus de 10,000 âmes, auront toutes les mêmes exemptions que celles des six premières, et de plus celle de toute taxe sur les bestiaux, la viande et le petit nombre de marchandises d’épicerie qu’on a cru susceptibles d’être soumises à des taxes dans les grandes villes. Ces mêmes marchandises d’épicerie pourront être exemptées dans toutes les villes qui le désireront, et qui en font commerce d’entrepôt, à la charge de payer un peu plus sur quelques autres articles du tarif, et seulement ce qui sera nécessaire pour compenser la valeur de l’exemption qu’elles réclameront. Les villes de la dernière classe ou de moins de 6,000 âmes, outre les mêmes exemptions assurées à celles des sept premières, auront de plus celle de toute taxe sur les fourrages et les bois de construction. Tous les ports de mer, outre les exemptions particulières aux villes de leur classe, auront de plus celle de toute taxe sur le poisson et sur le bois de construction : elle y sera compensée par létaux un peu plus élevé de quelques autres articles du tarit. Toutes les villes qui, pour l’intérêt particulier de leur commerce, désireront diminution ou même exemption de taxe sur quelque denrée ou marchandise mentionnée dans les projets de tarifs généraux, l’obtiendront, à la charge de compensation, par l’augmentation de la taxe proposée sur quelque autre denrée ou marchandise. AUTRE OBSERVATION. L’état ci-contre n'est pas assez détaillé ni entièrement complet; il sera donné avec un plus grand développement dans le travail relatif aux entrées de Paris. m [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES; [10 février 1791.1 TABLEAU du produit des taxes [Assemblée nationale�) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 179-1. J wagosées aux entrées-des villes. FRAIS DE PERCEPTION par estimation. PRODUIT OBSERVATIONS. Il sera, dans chaquo classe, accordé aux villes, qui sont au-dessous du terme moyen de leur classe, modération sur quelques articles du tarif,, ou exemption de quelques-uns de ces articles, afin de rapprocher la. contribution des plus petites villes de chaque classe supérieure* de celle des plu® grandes de la classe qui la suit immédiatement. Par la même raison, quelques artictes du tarif seront soutenus à un taux plus élevé que le taux moyen dans les plus grandes villes de chaque classe* pour concourir à ce rapprochement. Ce soin n’aura lieu qu’à partir de la seconde classe, pour suivre la gradation qui existe depuis cette classe jusqu’aux dernières villes contribuables-aux taxes d’entrée; et les haussements comme les modérations, pour les villes. qui s’éloignent du terme moyen, suivront une proportion régulière : chaque, classe demeurant, en masse, soumise à la somme de contribution qui sera, décrétée par l’Assemblée nationale, sans qu’il y ait plus de distance, d’une. classe à l’autre, qu’entre les villes de la même classe, qui diffèrent également en richesse et en population. Le rang entre les villes de chaque classe ne sera pas fixe uniquement. par leur population, mais en raison composée de leur population et de leur contribution foncière ou d-e leurs vingtièmes, qui était leur ancienne contribution foncière ; car il est sensible que de deux villes d’une population égale,, celle où les. loyers sont plus chers, et où les maisons valent davantage, est évidemment la plus riche ; que ce sont des gens plus riches dont la concurrence fixe dans celte ville le prix des loyers et la valeur des immeubles, et que par conséquent scs habitants peuvent faire l’avance d’une plus forte taxe sur leurs consommations. Les villes devant être autorisées à lever, pour leurs dépenses communes,, des sols pour livre additionnels aux taxes nationales établies à leurs entrées,, chacune d’elles peut, en raison dé ses dépenses municipales,, juger à quoi. devra se monter son tarif, tant au profit de la nation qu’à celui de là villfe. elle-même. Il y a lieu de penser qu’à Paris les dépenses communes contraindront de doubler le tarif national: Dans les villes qui ont d