580 {Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 août 1790.] jours pour ce travail. Ces deux jours sont écoulés : donnez-en quatre encore; indiquez le jour où le projet si nécessaire dont vous avez ordonné la rédaction, vo'u3 sera proposé. Voilà, Messieurs, les vérités et les idées que j’avais à soumettre à votre considération, pour la partie du décret qui concerne les écrits séditieux. Quant aux actes de violence, aux rébellions effectives, aux gibets élevés contre ceux qui obéiraient à vos décrets, vous avez déjà décidé que ces crimes seraient poursuivis par les juges ordinaires : référez-vous à votre décret; c’est le cours d’une justice que vous avez établie. Mais je reviens à vous dire que celle qui n’est pas encore établie, est, s’il est possible, encore plus importante; et je termine par la motion expresse que vos deux comités soient chargés, conformément à votre décret d’hier, de vous offrir, samedi, les moyens d’exécuter votre décret du 31 juillet. Il faut enfin mettre un terme à ce chaos d’horreurs et d’anarchie : il est temps que le bruit scandaleux et funeste des libelles, qu’on peut regarder comme les tambours du meurtre et de l’incendie, soit couvert par la voix puissante de votre raison et de votre patriotisme. M. de Foucault. Dans le Périgord, ma province, les mai qui avaient été plantés, ces signes d’insurrection dont on voulait faire des potences, existent toujours. M. d’Estourmel. En Lorraine, on brûle de nouveau les châteaux. M. de Macaye, rapporteur du comité des recherches. J’oubliais de vous dire que des hommes courent les campagnes en criant : Voici ce grand décret qui défend de payer les dîmes et champarts. Il faut que 1 s dîmes soient mentionnées dans le décret que vous rendrez. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély). L’intention de l’Assemblée de généraliser la mesure qui lui est proposée par son comité, me semble manifeste. Voici le projet de décret que je lui soumets : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des recherches, décrète que son président se retirera, dans le jour, vers le roi, pour prier Sa Majesté de donner les ordres les plus précis et les plus prompts, pour que, dans toute l'étendue du royaume, et, en particulier, dans ie département du Loiret, les tribunaux poursuivent et punissent, avec toute la sévérité des lois, tous ceux qui, au mépris des décrets de l’Assemblée nationale et des droits sacrés de la propriété, s’opposent, de quelque manière que ce soit, et par violences, voies de fait, menaces ou autrement, au payement des dîmes de cette année, et di s droits de champart ou agriers, et autres droits ci-devant seigneuriaux qui n’ont pas été supprimés sans indemnité, ainsi que des rentes ou censi ves en nature ou en argent jusqu’au rachat; « Que Sa Majesté sera également priée de donner des ordres pour que les municipalités fassent détruire toutes les marques extérieures d’insurrection et de sédition, de quelque nature qu’elles soient. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Dupont (de Nemours ). Dans le cours de la discussion, j’ai fait une motion incidente. Je la reprends et voici le projet de décret que je propose. « L’Assemblée nationale décrète que ses comités réunis de Constitution et de jurisprudence criminelle lui feront, à la séance de samedi soir, et conformément à son décret d’hier, leur rapport sur les moyens d’exécuter son décret du 31 juillet dernier, concernant les délits qui peuvent être commis par la voie de l’impression. » (Ce projet de décret est mis aux voix et adopté.) M. l’abbé Gouttes. M. de Miremont, député du bailliage de Vermandois, a donné sa démission le 26 mai dernier. M. Jean-Victor de Novyon, son suppléant, a produit ses pouvoirs qui ont été vérifiés et trouvés en règle. Le comité de vérification vous propose de l’admettre en remplacement de M. de Miremont. (L’Assemblée prononce l’admission.) M. le Président. L'ordre du jour est la suite de la discussion sur l'organisation judiciaire. Titre IV des juges d'appel'. Je rappelle à l’Assemblée qu’elle a adopté les articles 1 et 2 de ce titre, dans sa séance du 2"/ juillet. M. Chabroud à la parole. M. Chabroud. A la séance du 27 du mois de juillet, on a présenté un article additionnel qui avait pour objet d’autoriser tout intervenant ou appelé en garantie en cause d’appel, à décliner le tribunalchoisi par les parties. Vous avez ajourné cet article. Le comité a pensé que l’adopter ce serait anéantir celui par lequel vous avez laissé aux parties le choix du tribunal d’appel, ce serait donner le moyen d’éloigner lejugement de l’affaire, en faisant intervenir une partie tierce qui n’aurait aucun intéiêtdans la contestation, ou d’enlever la cause de l’appel à un tribunal qui aurait obtenu la confiance des parties intéressées. Autrefois la partie tierce était obligée de suivre le tribunal saisi, pane que la loi avait désigné ce tribunal : quand deux parties, en vertu de la loi, auront choisi un tribunal, la partie tierce sera obligée de suivre le tribunal également indiqué par la loi. Ainsi, dans le nouvel ordre de choses, on ne change rien aux usages concernant les tierces parties. Nous connaissons deux sortes de parties tierces: celles qui interviennent et celles qui sont évoquées ou appelées en garantie. A l’égard des parties qui interviennent, tout dépend d’elles ; leur sort est dans leurs mains. Si elles ne sont pus intervenues en première instance, elles avaient droit de se présenter : si le tribunal en dernier ressort ne leur convient pas, elles sont maîtresses de s'en abstenir. Je dis maîtresses, parce que le jugement, même rendu sans elles, conserve encore leurs droits; car si deux parties se disputaient la propriété d’un tiers, les droits de ce tiers ne seraient pas périmés par ce jugement. Quant aux parties appelé; s en garantie, l’objet est de faire cesser l’éviction ou de dédommager de l’éviction, si elle a eu lieu. Le garanti doit agir dès le principe, et dénoncer au garant la première demande qui tend à l'éviction ; sinon il a pris sur lui tous les événements. Un jugement étant intervenu et ayant prononcé l’éviction, il ne doit plus lui être permis d’appeler au garant. En effet, si en instance d’appel, on peut exercer la garantie, il est certain qu’on prive le garant des deux degrés de juridiction que vous avez institués. D’ailleurs, quand un jugement est intervenu, l’action en garantie n’est pas périmée, elle peut faire l’objet d’une instance particulière. Ainsi, l’utilité de l’article additionnel est absolument nulle; en le rejetant, vous consacrerez d’avance un principe sage, qu’en cause d’appel les garanties doivent être défendues.