118 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE quatre-vingt-dix numéros de la loterie, et qui avait pour objet de faciliter leur mariage. La sortie du numéro auquel le nom d’une fille avait été annexé lui donnait droit à une dot de 200 livres, qui devait lui être payée sur la représentation de l’acte de mariage et du brevet d’annexe qui lui avait été expédié. Il en existe trois cents dont les brevets ont été expédiés, mais dont le payement n’a pas été effectué, les personnes intéressées n’ayant pu justifier de leur mariage. Suivant le décret du 12 prairial dernier, les brevets de la loterie, connus sous le nom d’annexes doivent être payés par la trésorerie, de la même manière qu’ils l’étaient par la caisse de la loterie, c’est à dire à mesure que les filles qui y ont droit justifieraient de leur mariage. Un tel mode de liquidation pourrait durer encore un temps infini, et pourrait suspendre pendant plus de soixante ans la reconnaissance et l’acquittement de cette partie de la dette publique. Il est un moyen d’obvier à cet inconvénient en remplissant le but de l’institution, et l’on peut sans injustice fixer un délai après lequel les propriétaires des brevets d’annexe, qui n’auraient pas justifié de leur mariage, ne seraient plus admises à la gratification attachée à cette condition. Cette mesure satisferait à un devoir que la morale républicaine prescrit, et que les besoins de la patrie rendent plus urgents après les ravages de la guerre. C’est dans ces principes que votre comité des Finances vous propose le décret suivant (88). La Convention nationale, sur le rapport [de Cambon, au nom] de son comité des Finances, décrète, par addition à la loi du 12 prairial dernier, que les filles à qui il a été délivré des brevets d’annexe, qui ne produiront pas, avant le premier nivôse de l’an cinquième de la République, l’acte de leur mariage, seront, par le fait, déchues de l’effet de leur brevet d’annexe, et n’auront droit à aucun paiement après cette époque (89). 55 ESCHASSERIAUX le jeune soumet à l’Assemblée la rédaction des articles adoptés concernant la révision de la loi des émigrés. Il propose de ne pas considérer comme émigrés les Français incarcérés dans les pays avec lesquels nous sommes en guerre. THIBAUDEAU dit que ce seroit favoriser la rentrée en France d’un grand nombre d’émigrés; car les Anglais ou les Espagnols ne (88) Moniteur, XXI, 743; J. Paris, n° 621. (89) P.-V., XLV, 228. C 318, pl. 1285, p. 44. Décret n° 10 856. Rapporteur : Cambon. Ann. Patr., n° 620. Ann. R. F., n° 285; C. Eg., n° 755; M. U., XLIII, 445; J. Perlet, n° 721; J. Paris, n° 621. manqueront pas de les mettre en prison un ou deux mois pour les vomir ensuite sur le territoire de la République. L’exception demandée est écartée par l’ordre du jour. Au retour de ces Français, après la paix on examinera les circonstances de leur départ et la position dans laquelle ils se sont trouvés durant leur absence (90). On reprend la discussion sur la loi des émigrés, et plusieurs articles sont décrétés ainsi qu’il suit : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de Eschasseriaux jeune, au nom] de la commission chargée de la révision des lois sur les émigrés, décrète ce qui suit : TITRE PREMIER De l’émigration et de sa complicité SECTION PREMIÈRE De l’émigration . Article premier. - Sont émigrés, 1°. Tout Français qui, sortis du territoire de la République depuis le premier juillet 1789, n’y étoit pas rentré au 9 mai 1792; 2». Tous Français qui absens de leur domicile ou s’en étant absentés depuis le 9 mai 1792, ne justifieront pas, dans les formes ci après prescrites, qu’ils ont résidé sans interruption sur le territoire de la République depuis cette époque; 3°. Toute personne qui, ayant exercé les droits de citoyen en France, quoique née en pays étranger, ou ayant un double domicile, l’un en France et l’autre en pays étranger, ne constateroit pas également sa résidence depuis le 9 mai 1792; 4». Tout Français convaincu d’avoir, durant l'invasion faite par les armées étrangères, quitté le territoire de la République non envahi, pour résider sur celui occupé par l’ennemi; 5°. Tout agent du gouvernement qui, chargé d’une mission auprès des puissances étrangères, ne seroit pas rentré en France dans trois mois, du jour de son rappel notifié; 6°. Ne pourra être opposé pour excuse la résidence dans les pays réunis à la République, pour le temps antérieur à la réunion proclamée. Art. II. - Sont assimilés aux émigrés les Français absens antérieurement au premier juillet 1789, qui n’étoient pas rentrés au 11 brumaire dernier sur le territoire de la République. Exceptions Art. III. - Ne seront pas réputés émigrés, (90) J. Perlet, n° 720.