SÉANCE DU 9 MESSIDOR AN H (27 JUIN 1794) N° 55 229 mouvement des armées, pour qu’elle ait à pourvoir sans délai aux besoins de ce corps » (1). 55 Un membre [Barère] annonce, au nom du comité de salut public, la prise importante de Charleroy par les troupes de la République; caissons, canons, munitions de tout genre sont tombés au pouvoir des Français : 6,000 hommes, au commencement du siège, avoient déjà mordu la poussière; la garnison, au nombre de 3,000, a été faite prisonnière; les républicains n’ont pas voulu entendre parler de capitulation, les esclaves se sont rendus à discrétion, ils s’en sont rapportés à la générosité française (2) . Barère entre dans l’Assemblée; les applaudissements qui l’accompagnent à la tribune sont le présage des victoires nouvelles qu’il vient annoncer. Plusieurs drapeaux paraissent à la barre, [portés par des militaires de l’armée du Nord]. Les applaudissements recommencent. Barère : Vous voyez à la barre les signes d’une nouvelle victoire. Les drapeaux de la garnison autrichienne, suspendus à la voûte du péristyle, vont marquer la prise de Charleroi par les troupes de la République. (Les plus vifs applaudissements éclatent dans toutes les parties de la salle). 2 fois le siège de cette place a été commencé depuis le 28 prairial; d’abord un avantage remarquable avait été remporté sur les esclaves impériaux; 6.000 d’entre eux avaient mordu la poussière, et des canons avaient été pris; la 2onde fois a été terrible : ce sont les canonniers qui ont agi, et la foudre républicaine a converti en cendres la ville autrichienne. (Les applaudissements recommencent). Une garnison de 3.000 hommes est prisonnière, et les républicains n’ont pas même voulu s’abaisser jusqu’à la capitulation. Entendez comment des esclaves capitulent; en tombant aux genoux des républicains, ils font l’éloge de leur générosité. [ Charleroi , 25 juin 1794. Au général commandant de VA. française de la Sambre ]. « Nous nous en rapporterons à la générosité française, espérant que la garnison, qui doit avoir mérité l’estime des armées françaises, aura un sort tel que l’honneur le demande. Reygnac, général major». (On applaudit). Barère : Cet éloge ne peut être suspect. Comme il dément les calomnies vomies par les journaux de Bruxelles et de Londres ! Il y a 8 jours, je rapportais à la Convention la capitulation d’y près; aujourd’hui je viens vous dire qu’avec de l’artillerie formidable et des hommes libres la diplomatie guerrière s’est vigoureusement simplifiée; les Autrichiens ' se sont rendus à discrétion. (1) P.V., XL, 237. Minute de la main de Turreau. Décret n° 9696. (2) P.V., XL, 237. Le soir de la prise de Charleroi, 1.500 hommes de cavalerie autrichienne sont venus attaquer la division de gauche; la cavalerie républicaine et l’artillerie légère les ont tournés, ils leur ont tué 150 hommes et pris environ 200 chevaux. (On applaudit). Voilà une addition aux faits que je vais lire, et dont la nouvelle officielle a été portée au général Jourdan, au moment du départ du citoyen Lebas, adjudant général, et du citoyen Charbonnier, adjoint aux adjudants généraux. Ainsi l’armée du Nord, fidèle dans toutes ses parties à la destinée glorieuse que la république lui a imposée, repousse les hordes étrangères avec un égal succès d’un bout de la frontière à l’autre; de l’Océan à la haute Sambre les soldats se renvoient la victoire : hier c’était Ypres, aujourd’hui c’est Charleroi; c’est maintenant le tour de la partie gauche de l’armée, au sommet de la West-Flandre. Représentants du peuple, voilà donc les fruits de vos efforts, voilà les résultats précieux de votre union, voilà les garants de la belle république que vous avez fondée sur les cadavres des Capets et des fédéralistes. Cependant, au milieu des cris de la victoire, des bruits sourds se font entendre, des calomnies obscures circulent, des poisons subtils sont infusés dans les journaux, des complots funestes s’ourdissent, des mécontentements factices se préparent, et le gouvernement est sans cesse vexé, entravé dans ses opérations, tourmenté dans ses mouvements, calomnié dans ses pensées et menacé dans ceux qui le composent. Aux convulsions de l’athéïsme impuissant ou puni ont succédé les astuces du fanatisme, qui se réveille et qu’on cherche à aigrir plus fortement; pour le rendre plus actif on cherche à rouvrir des temples, en subtilisant sur les expressions d’un décret. Ce ne sont pas ici des terreurs mensongères; il faut le dire, la victoire n’est pas même une caution suffisante pour le gouvernement : dans ce moment même, au milieu des succès de cette campagne, les contre-révolutionnaires, frappés par vos décrets et mis hors la loi, étaient en correspondance avec les gouvernements anglais et espagnol et avec toute [s] les factions que vous avez punies; ce sont les relations de Bordeaux; jugez de ce que doivent faire les contre-révolutionnaires secrets, ceux qui espèrent couvrir leurs complots de quelque apparence civique ou d’un vernis de patriotisme. Que serait-ce donc si la fortune des combats ne secondait pas le courage des républicains ? Que serait-ce si des intrigants et les ennemis implacables de tout ce qui est bien public pouvaient enter leurs crimes sur une défaite, et placer leur conjuration sur des revers militaires ? Héritiers sacrilèges des Brissot, des Hébert, des Chaumette et des Danton, c’est à vous qu’il faut attribuer cette tourmente de l’opinion publique et les menaces éternelles d’assassinat et de subversion dans le gouvernement. Mais c’est en vain que les ombres criminelles de ces contre-révolutionnaires semblent investir le temple des lois. Les représentants du peuple, éclairés sur les intérêts du peuple et sur leur propre sûreté, sauront tirer parti de la victoire au dehors pour anéantir au dedans toutes les coalitions impies ou les complots parricides de SÉANCE DU 9 MESSIDOR AN H (27 JUIN 1794) N° 55 229 mouvement des armées, pour qu’elle ait à pourvoir sans délai aux besoins de ce corps » (1). 55 Un membre [Barère] annonce, au nom du comité de salut public, la prise importante de Charleroy par les troupes de la République; caissons, canons, munitions de tout genre sont tombés au pouvoir des Français : 6,000 hommes, au commencement du siège, avoient déjà mordu la poussière; la garnison, au nombre de 3,000, a été faite prisonnière; les républicains n’ont pas voulu entendre parler de capitulation, les esclaves se sont rendus à discrétion, ils s’en sont rapportés à la générosité française (2) . Barère entre dans l’Assemblée; les applaudissements qui l’accompagnent à la tribune sont le présage des victoires nouvelles qu’il vient annoncer. Plusieurs drapeaux paraissent à la barre, [portés par des militaires de l’armée du Nord]. Les applaudissements recommencent. Barère : Vous voyez à la barre les signes d’une nouvelle victoire. Les drapeaux de la garnison autrichienne, suspendus à la voûte du péristyle, vont marquer la prise de Charleroi par les troupes de la République. (Les plus vifs applaudissements éclatent dans toutes les parties de la salle). 2 fois le siège de cette place a été commencé depuis le 28 prairial; d’abord un avantage remarquable avait été remporté sur les esclaves impériaux; 6.000 d’entre eux avaient mordu la poussière, et des canons avaient été pris; la 2onde fois a été terrible : ce sont les canonniers qui ont agi, et la foudre républicaine a converti en cendres la ville autrichienne. (Les applaudissements recommencent). Une garnison de 3.000 hommes est prisonnière, et les républicains n’ont pas même voulu s’abaisser jusqu’à la capitulation. Entendez comment des esclaves capitulent; en tombant aux genoux des républicains, ils font l’éloge de leur générosité. [ Charleroi , 25 juin 1794. Au général commandant de VA. française de la Sambre ]. « Nous nous en rapporterons à la générosité française, espérant que la garnison, qui doit avoir mérité l’estime des armées françaises, aura un sort tel que l’honneur le demande. Reygnac, général major». (On applaudit). Barère : Cet éloge ne peut être suspect. Comme il dément les calomnies vomies par les journaux de Bruxelles et de Londres ! Il y a 8 jours, je rapportais à la Convention la capitulation d’y près; aujourd’hui je viens vous dire qu’avec de l’artillerie formidable et des hommes libres la diplomatie guerrière s’est vigoureusement simplifiée; les Autrichiens ' se sont rendus à discrétion. (1) P.V., XL, 237. Minute de la main de Turreau. Décret n° 9696. (2) P.V., XL, 237. Le soir de la prise de Charleroi, 1.500 hommes de cavalerie autrichienne sont venus attaquer la division de gauche; la cavalerie républicaine et l’artillerie légère les ont tournés, ils leur ont tué 150 hommes et pris environ 200 chevaux. (On applaudit). Voilà une addition aux faits que je vais lire, et dont la nouvelle officielle a été portée au général Jourdan, au moment du départ du citoyen Lebas, adjudant général, et du citoyen Charbonnier, adjoint aux adjudants généraux. Ainsi l’armée du Nord, fidèle dans toutes ses parties à la destinée glorieuse que la république lui a imposée, repousse les hordes étrangères avec un égal succès d’un bout de la frontière à l’autre; de l’Océan à la haute Sambre les soldats se renvoient la victoire : hier c’était Ypres, aujourd’hui c’est Charleroi; c’est maintenant le tour de la partie gauche de l’armée, au sommet de la West-Flandre. Représentants du peuple, voilà donc les fruits de vos efforts, voilà les résultats précieux de votre union, voilà les garants de la belle république que vous avez fondée sur les cadavres des Capets et des fédéralistes. Cependant, au milieu des cris de la victoire, des bruits sourds se font entendre, des calomnies obscures circulent, des poisons subtils sont infusés dans les journaux, des complots funestes s’ourdissent, des mécontentements factices se préparent, et le gouvernement est sans cesse vexé, entravé dans ses opérations, tourmenté dans ses mouvements, calomnié dans ses pensées et menacé dans ceux qui le composent. Aux convulsions de l’athéïsme impuissant ou puni ont succédé les astuces du fanatisme, qui se réveille et qu’on cherche à aigrir plus fortement; pour le rendre plus actif on cherche à rouvrir des temples, en subtilisant sur les expressions d’un décret. Ce ne sont pas ici des terreurs mensongères; il faut le dire, la victoire n’est pas même une caution suffisante pour le gouvernement : dans ce moment même, au milieu des succès de cette campagne, les contre-révolutionnaires, frappés par vos décrets et mis hors la loi, étaient en correspondance avec les gouvernements anglais et espagnol et avec toute [s] les factions que vous avez punies; ce sont les relations de Bordeaux; jugez de ce que doivent faire les contre-révolutionnaires secrets, ceux qui espèrent couvrir leurs complots de quelque apparence civique ou d’un vernis de patriotisme. Que serait-ce donc si la fortune des combats ne secondait pas le courage des républicains ? Que serait-ce si des intrigants et les ennemis implacables de tout ce qui est bien public pouvaient enter leurs crimes sur une défaite, et placer leur conjuration sur des revers militaires ? Héritiers sacrilèges des Brissot, des Hébert, des Chaumette et des Danton, c’est à vous qu’il faut attribuer cette tourmente de l’opinion publique et les menaces éternelles d’assassinat et de subversion dans le gouvernement. Mais c’est en vain que les ombres criminelles de ces contre-révolutionnaires semblent investir le temple des lois. Les représentants du peuple, éclairés sur les intérêts du peuple et sur leur propre sûreté, sauront tirer parti de la victoire au dehors pour anéantir au dedans toutes les coalitions impies ou les complots parricides de 230 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE quelques hommes qui prennent leur fatigue individuelle pour la fatigue du peuple, et leur conscience troublée pour la conscience publique. Est-il aucun de nous qui n’ait déjà plusieurs fois comparé notre état brillant pendant cette campagne avec notre état désastreux pendant la campagne dernière ? Quel spectacle offraient donc à la république et à ses représentants tous les crimes coalisés l’an passé ? Toulon vendu, Marseille agité, l’Ardèche en révolte, la Lozère fanatisée, la Vendée grossie, la Sarthe occupée par les brigands, les Pyrénées envahies, les Alpes menacées, l’héber-tisme triomphant, l’athéisme levant une tête insolente et altière; le crime audacieux et la trahison impunie étaient à l’ordre du jour; Danton correspondant avec l’Angleterre, Fabre d’Eglantine corrompant la législation par les finances, Chaumette conduisant la commune à la contre-révolution; la marine désorganisée et livrée à quelques chefs perfides, n’ayant montré qu’une inertie funeste et des croisières désertes; les frontières du Rhin occupées par le Prussien, et des villes vénales prêchant la contre-révolution; les places fortes du Nord prises, les départements de l’intérieur ravagés, les patriotes purs persécutés, les Sociétés populaires divisées; le gouvernement attaqué par des projets de division, d’assassinat et de dénonciation publique; un système de famine couvrant la France de ses terreurs et de ses besoins. Que sommes-nous au contraire, et quelle attitude avons-nous prise devant cette Europe courbée sous les rois, les nobles, les prêtres et les banquiers ? Toutes nos armées sont sur le territoire ennemi. Toulon a vomi ses usurpateurs cruels et ses marchands infâmes; Marseille est remise au pas de la révolution; les Pyrénées-Orientales ont repris leur territoire et les signes de leur gloire; les Alpes sont le théâtre du triomphe de nos armées, et le Piémont est menacé. Les Alpes maritimes et la république de Gênes voient l’armée d’Italie couverte de lauriers. Les désastres de la Vendée ne remplissent plus les feuilles des journaux complaisants, et la Sarthe ne donne plus d’espérance aux contre-révolutionnaires de l’intérieur. Le Rhin a vu fuir les hordes prussiennes; la Moselle a été témoin de l’emparement du Pala-tinat. Les Ardennes sont le théâtre de succès, et la Sambre rejettera bientôt ses exécrables voisins. La marine régénérée, se mesurant avec intrépidité avec les escadres coalisées, se dispose à détrôner les tyrans de la mer, après avoir ruiné leur commerce par des croisières nombreuses. Sur les bords de l’Océan, Menin, Fumes, Courtray, Ypres, marquent le pas de la république. Les Sociétés populaires s’unissent et s’épurent tous les jours; les factions expirent sur l’échafaud, la représentation nationale s’élève et domine toutes les passions malfaisantes; la vertu, la justice sont mises à l’ordre du jour. Une récolte abondante couvre nos sillons, et une récolte américaine vient à travers les mers doubler la fertilité du territoire français. (Vifs applaudissements) . - Voilà cependant le résultat bien doux de votre constance, de vos travaux, de votre union. Voilà les fruits mûris par les orages de la révolution et par les veilles du gouvernement que vous avez organisé et fécondé par votre confiance. Mais si jamais il annonçait des revers, si jamais la victoire se laissait entraîner à une inconstance dont elle n’est pas toujours exempte, à qui faudrait-il les attribuer, à qui faudrait-il imputer les maux publics ? Est-ce à ceux qui veillent sans cesse pour la prospérité de la république, pour l’amélioration du sort du peuple, ou bien serait-on assez juste, assez courageux pour n’accuser que ces hommes qui vont sans cesse corrompant l’opinion publique, affaiblissant les espérances des bons citoyens, atténuant les victoires de nos braves armées, personnalisant les travaux révolutionnaires, attaquant le gouvernement, affectant d’en atténuer la confiance, ou d’en décrier les moyens, ou d’en décourager les membres, quand on ne peut les détruire ? Représentants du peuple, c’est à l’école du malheur qu’on s’instruit ordinairement : c’est aussi à l’école de la victoire qu’il faut se former aux revers, à la justice et à la fraternité. (On applaudit). Voici les nouvelles officielles. [Jourdan, comm* en chef de VA. de la Moselle, au C. de S. P. Au quartier gal à Marchiennes-au-Pont, 7 mess. II]. «Citoyens représentants, la place de Charle-roi s’est rendue ce soir à discrétion; voilà la seule capitulation que nous avons voulu adopter. Je ne puis dans ce moment vous donner de plus amples détails; je sais seulement que la garnison est de 3 000 hommes et qu’il y a 50 pièces de canon. Cette reddition est venue d’autant plus à propos que je pense que demain nous serons attaqués. L’ennemi s’est réuni en très-grandes forces dans les environs de Nivelle; il a tiré ses troupes du Cateau et des environs de Cambrai, où, d’après les rapports, il ne reste plus personne. Dans tous les cas l’affaire sera des plus vives, parce que nous sommes tous disposés à nous battre en républicains. Je désire être assez heureux pour vous apprendre la nouvelle d’une victoire qui peut être assez décisive pour la conquête des Pays Bas, en même temps que je vous apprends la prise d’une place. Demain au soir je vous donnerai de mes nouvelles. S. et F.». JOURDAN [Les repr. près VA. du Nord, de la Moselle et des Ardennes, réunies sur la Sambre, au C. de S. P. Charleroi , 7 mess. II]. « Citoyens collègues, nous avons attendu la prise de Charleroi pour vous donner les détails qui l’ont précédée. «Le 28 du mois dernier, l’armée marcha à 1 heure du matin au-devant de l’ennemi; l’ennemi, à la même heure, marchait sur nous. On le rencontra. Le brouillard était épais; le combat fut terrible jusqu’à 3 heures de l’après-midi. La gauche, commandée par le brave général Kléber, fit des merveilles; le général de brigade Duhem s’y distingua. Le centre se battit de même : le général Dubois chargea à 230 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE quelques hommes qui prennent leur fatigue individuelle pour la fatigue du peuple, et leur conscience troublée pour la conscience publique. Est-il aucun de nous qui n’ait déjà plusieurs fois comparé notre état brillant pendant cette campagne avec notre état désastreux pendant la campagne dernière ? Quel spectacle offraient donc à la république et à ses représentants tous les crimes coalisés l’an passé ? Toulon vendu, Marseille agité, l’Ardèche en révolte, la Lozère fanatisée, la Vendée grossie, la Sarthe occupée par les brigands, les Pyrénées envahies, les Alpes menacées, l’héber-tisme triomphant, l’athéisme levant une tête insolente et altière; le crime audacieux et la trahison impunie étaient à l’ordre du jour; Danton correspondant avec l’Angleterre, Fabre d’Eglantine corrompant la législation par les finances, Chaumette conduisant la commune à la contre-révolution; la marine désorganisée et livrée à quelques chefs perfides, n’ayant montré qu’une inertie funeste et des croisières désertes; les frontières du Rhin occupées par le Prussien, et des villes vénales prêchant la contre-révolution; les places fortes du Nord prises, les départements de l’intérieur ravagés, les patriotes purs persécutés, les Sociétés populaires divisées; le gouvernement attaqué par des projets de division, d’assassinat et de dénonciation publique; un système de famine couvrant la France de ses terreurs et de ses besoins. Que sommes-nous au contraire, et quelle attitude avons-nous prise devant cette Europe courbée sous les rois, les nobles, les prêtres et les banquiers ? Toutes nos armées sont sur le territoire ennemi. Toulon a vomi ses usurpateurs cruels et ses marchands infâmes; Marseille est remise au pas de la révolution; les Pyrénées-Orientales ont repris leur territoire et les signes de leur gloire; les Alpes sont le théâtre du triomphe de nos armées, et le Piémont est menacé. Les Alpes maritimes et la république de Gênes voient l’armée d’Italie couverte de lauriers. Les désastres de la Vendée ne remplissent plus les feuilles des journaux complaisants, et la Sarthe ne donne plus d’espérance aux contre-révolutionnaires de l’intérieur. Le Rhin a vu fuir les hordes prussiennes; la Moselle a été témoin de l’emparement du Pala-tinat. Les Ardennes sont le théâtre de succès, et la Sambre rejettera bientôt ses exécrables voisins. La marine régénérée, se mesurant avec intrépidité avec les escadres coalisées, se dispose à détrôner les tyrans de la mer, après avoir ruiné leur commerce par des croisières nombreuses. Sur les bords de l’Océan, Menin, Fumes, Courtray, Ypres, marquent le pas de la république. Les Sociétés populaires s’unissent et s’épurent tous les jours; les factions expirent sur l’échafaud, la représentation nationale s’élève et domine toutes les passions malfaisantes; la vertu, la justice sont mises à l’ordre du jour. Une récolte abondante couvre nos sillons, et une récolte américaine vient à travers les mers doubler la fertilité du territoire français. (Vifs applaudissements) . - Voilà cependant le résultat bien doux de votre constance, de vos travaux, de votre union. Voilà les fruits mûris par les orages de la révolution et par les veilles du gouvernement que vous avez organisé et fécondé par votre confiance. Mais si jamais il annonçait des revers, si jamais la victoire se laissait entraîner à une inconstance dont elle n’est pas toujours exempte, à qui faudrait-il les attribuer, à qui faudrait-il imputer les maux publics ? Est-ce à ceux qui veillent sans cesse pour la prospérité de la république, pour l’amélioration du sort du peuple, ou bien serait-on assez juste, assez courageux pour n’accuser que ces hommes qui vont sans cesse corrompant l’opinion publique, affaiblissant les espérances des bons citoyens, atténuant les victoires de nos braves armées, personnalisant les travaux révolutionnaires, attaquant le gouvernement, affectant d’en atténuer la confiance, ou d’en décrier les moyens, ou d’en décourager les membres, quand on ne peut les détruire ? Représentants du peuple, c’est à l’école du malheur qu’on s’instruit ordinairement : c’est aussi à l’école de la victoire qu’il faut se former aux revers, à la justice et à la fraternité. (On applaudit). Voici les nouvelles officielles. [Jourdan, comm* en chef de VA. de la Moselle, au C. de S. P. Au quartier gal à Marchiennes-au-Pont, 7 mess. II]. «Citoyens représentants, la place de Charle-roi s’est rendue ce soir à discrétion; voilà la seule capitulation que nous avons voulu adopter. Je ne puis dans ce moment vous donner de plus amples détails; je sais seulement que la garnison est de 3 000 hommes et qu’il y a 50 pièces de canon. Cette reddition est venue d’autant plus à propos que je pense que demain nous serons attaqués. L’ennemi s’est réuni en très-grandes forces dans les environs de Nivelle; il a tiré ses troupes du Cateau et des environs de Cambrai, où, d’après les rapports, il ne reste plus personne. Dans tous les cas l’affaire sera des plus vives, parce que nous sommes tous disposés à nous battre en républicains. Je désire être assez heureux pour vous apprendre la nouvelle d’une victoire qui peut être assez décisive pour la conquête des Pays Bas, en même temps que je vous apprends la prise d’une place. Demain au soir je vous donnerai de mes nouvelles. S. et F.». JOURDAN [Les repr. près VA. du Nord, de la Moselle et des Ardennes, réunies sur la Sambre, au C. de S. P. Charleroi , 7 mess. II]. « Citoyens collègues, nous avons attendu la prise de Charleroi pour vous donner les détails qui l’ont précédée. «Le 28 du mois dernier, l’armée marcha à 1 heure du matin au-devant de l’ennemi; l’ennemi, à la même heure, marchait sur nous. On le rencontra. Le brouillard était épais; le combat fut terrible jusqu’à 3 heures de l’après-midi. La gauche, commandée par le brave général Kléber, fit des merveilles; le général de brigade Duhem s’y distingua. Le centre se battit de même : le général Dubois chargea à 231 SÉANCE DU 9 MESSIDOR AN II (27 JUIN 1794) - N08 56-57 la tête de la cavalerie, fit 500 prisonniers, prit 7 pièces de canon, et massacra 7 à 800 hommes. L’avant-garde, commandée par le général Lefebvre, eut un égal succès et montra le même courage. Nos canonniers chargèrent en hussards, et reprirent leurs canons, qui leur avaient été enlevés pendant le brouillard. L’ennemi perdit 6 000 hommes, au lieu de 3 que nous vous avions annoncés. «Le soir, faute de munitions, on se replia, et l’ennemi se replia lui-même. Nous perdîmes 1500 hommes tués ou blessés. «Le 30, le siège de Charleroi fut repris avec plus d’acharnement que jamais. L’officier de génie Marescot s’est fait beaucoup d’honneur par l’activité avec laquelle il a poussé les travaux. L’artillerie a mis la ville en cendres. «Après 6 jours de tranchée ouverte l’ennemi a été sommé; il a refusé de se rendre. Le 5 le feu a redoublé; le 7 il a demandé à capituler. On lui a donné un quart d’heure pour se rendre, après lequel l’assaut serait commandé et la garnison passée au fil de l’épée. H nous â envoyé un parlementaire; nous avons renvoyé la lettre sans l’ouvrir. Le général Reygnac, commandant la place de Charleroi, s’est rendu à discrétion, se remettant à la générosité de la république. Jourdan doit vous adresser les articles honorables par lesquels vous verrez que l’orgueil de la maison d’Autriche a passé sous le joug. La garnison prisonnière est de 3 000 hommes. Nous avons trouvé 50 pièces de canon. La place est en poudre et n’est plus qu’un poste. «Nous regrettons de ne pouvoir vous faire part aujourd’hui d’une infinité de traits d’intrépidité; nous les rechercherons, et nous les ferons connaître au peuple français. «Ce point de Sambre-et-Meuse est devenu le plus intéressant; l’ennemi y porte ses forces. Nous présageons la victoire. Nous envoyons les drapeaux. Gillet, Guyton, Saint-Just » (1) . La Convention décrète l’insertion au bulletin, l’envoi aux départemens de ces heureuses nouvelles, aux sociétés populaires, aux autres armées. Le rapport et les pièces officielles seront pareillement imprimés, envoyés et distribués au nombre de 6 exemplaires à chaque membre de la Convention (2) . (1) Mon., XXI, 78. (2) P.V., XL, 237. Ann. patr., n°DXXXXni; J. Sablier, n° 1403; Audit, nat., n° 642; F.S.P., n° 358; Débats, nos 645, 646; J. Perlet, nos 643, 644; C. Eg., nos 678, 679; Rép., n° 190; M.U., XU, 152; C. univ., n° 909; J. Fr., n° 641; J. Paris, nos 544, 545; Ann. R.F., n08 209, 210; J. univ., n08 1677, 1678; J. Mont., n° 62; J. Lois, n° 637; Mess. Soir, n° 677. Mentionné par J. -S. Culottes, n°498. 56 ETAT DES DONS (suite) (1) a Elie Lacoste a déposé une décoration militaire. b Le citoyen Maldant, receveur de la régie nationale de Décize, a envoyé 25 liv. en assignats pour les frais de la guerre. La séance est levée à 4 heures (2) . Signé, ELIE LACOSTE, Président; TUR-REAU, MICHAUD, CAMBACERES, BRIEZ, BORDAS, J. B. LACOMBE - SAINT - MICHEL, Secrétaires. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 57 Le président fait lecture de la lettre que la Convention l’a chargé d’écrire à l’épouse et aux enfants du vertueux Vincent Malignon; elle est ainsi conçue : «Vincent Malignon, martyr de la liberté, est mort pour son pays; mais il vivra éternellement dans la mémoire des hommes. La Convention nationale, en décernant au courageux magistrat du peuple les palmes immortelles des vertus civiques, s’est empressée de placer sous le glaive de la loi les meurtriers de ce généreux républicain. Le décret qui décerne les honneurs publics à Vincent Malignon, et qui ordonne la prompte punition des auteurs de l’attentat commis sur sa personne, a consacré en même temps et le droit que chacun de vous avait à la bienfaisance nationale, et la satisfaction que je suis chargé d’exprimer au jeune Malignon pour la conduite héroïque qu’il a tenue au siège de Toulon. Vous trouverez les uns et les autres, dans le souvenir des actions vertueuses du père et dans le généreux dévouement d’un fils digne de lui une consolation réelle, et cette idée touchante et sublime que Vincent Mali-(1) P.V., XL, 237. (2) P.V., XL, 238. 231 SÉANCE DU 9 MESSIDOR AN II (27 JUIN 1794) - N08 56-57 la tête de la cavalerie, fit 500 prisonniers, prit 7 pièces de canon, et massacra 7 à 800 hommes. L’avant-garde, commandée par le général Lefebvre, eut un égal succès et montra le même courage. Nos canonniers chargèrent en hussards, et reprirent leurs canons, qui leur avaient été enlevés pendant le brouillard. L’ennemi perdit 6 000 hommes, au lieu de 3 que nous vous avions annoncés. «Le soir, faute de munitions, on se replia, et l’ennemi se replia lui-même. Nous perdîmes 1500 hommes tués ou blessés. «Le 30, le siège de Charleroi fut repris avec plus d’acharnement que jamais. L’officier de génie Marescot s’est fait beaucoup d’honneur par l’activité avec laquelle il a poussé les travaux. L’artillerie a mis la ville en cendres. «Après 6 jours de tranchée ouverte l’ennemi a été sommé; il a refusé de se rendre. Le 5 le feu a redoublé; le 7 il a demandé à capituler. On lui a donné un quart d’heure pour se rendre, après lequel l’assaut serait commandé et la garnison passée au fil de l’épée. H nous â envoyé un parlementaire; nous avons renvoyé la lettre sans l’ouvrir. Le général Reygnac, commandant la place de Charleroi, s’est rendu à discrétion, se remettant à la générosité de la république. Jourdan doit vous adresser les articles honorables par lesquels vous verrez que l’orgueil de la maison d’Autriche a passé sous le joug. La garnison prisonnière est de 3 000 hommes. Nous avons trouvé 50 pièces de canon. La place est en poudre et n’est plus qu’un poste. «Nous regrettons de ne pouvoir vous faire part aujourd’hui d’une infinité de traits d’intrépidité; nous les rechercherons, et nous les ferons connaître au peuple français. «Ce point de Sambre-et-Meuse est devenu le plus intéressant; l’ennemi y porte ses forces. Nous présageons la victoire. Nous envoyons les drapeaux. Gillet, Guyton, Saint-Just » (1) . La Convention décrète l’insertion au bulletin, l’envoi aux départemens de ces heureuses nouvelles, aux sociétés populaires, aux autres armées. Le rapport et les pièces officielles seront pareillement imprimés, envoyés et distribués au nombre de 6 exemplaires à chaque membre de la Convention (2) . (1) Mon., XXI, 78. (2) P.V., XL, 237. Ann. patr., n°DXXXXni; J. Sablier, n° 1403; Audit, nat., n° 642; F.S.P., n° 358; Débats, nos 645, 646; J. Perlet, nos 643, 644; C. Eg., nos 678, 679; Rép., n° 190; M.U., XU, 152; C. univ., n° 909; J. Fr., n° 641; J. Paris, nos 544, 545; Ann. R.F., n08 209, 210; J. univ., n08 1677, 1678; J. Mont., n° 62; J. Lois, n° 637; Mess. Soir, n° 677. Mentionné par J. -S. Culottes, n°498. 56 ETAT DES DONS (suite) (1) a Elie Lacoste a déposé une décoration militaire. b Le citoyen Maldant, receveur de la régie nationale de Décize, a envoyé 25 liv. en assignats pour les frais de la guerre. La séance est levée à 4 heures (2) . Signé, ELIE LACOSTE, Président; TUR-REAU, MICHAUD, CAMBACERES, BRIEZ, BORDAS, J. B. LACOMBE - SAINT - MICHEL, Secrétaires. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 57 Le président fait lecture de la lettre que la Convention l’a chargé d’écrire à l’épouse et aux enfants du vertueux Vincent Malignon; elle est ainsi conçue : «Vincent Malignon, martyr de la liberté, est mort pour son pays; mais il vivra éternellement dans la mémoire des hommes. La Convention nationale, en décernant au courageux magistrat du peuple les palmes immortelles des vertus civiques, s’est empressée de placer sous le glaive de la loi les meurtriers de ce généreux républicain. Le décret qui décerne les honneurs publics à Vincent Malignon, et qui ordonne la prompte punition des auteurs de l’attentat commis sur sa personne, a consacré en même temps et le droit que chacun de vous avait à la bienfaisance nationale, et la satisfaction que je suis chargé d’exprimer au jeune Malignon pour la conduite héroïque qu’il a tenue au siège de Toulon. Vous trouverez les uns et les autres, dans le souvenir des actions vertueuses du père et dans le généreux dévouement d’un fils digne de lui une consolation réelle, et cette idée touchante et sublime que Vincent Mali-(1) P.V., XL, 237. (2) P.V., XL, 238.