(Assemblée nationale.] ARGHIVES PARLEMENTAIRES. (15 août 1790.] Tels sont, Messieurs, les motifs du décret que le comité a l’honneur de vous présenter. « L’Assemblée nationale, après avoir entendu sou comité des rapports, a approuvé le zèle du directoire du département du Bas-Rhin et du district de Benfeld, et les efforts qu’ils ont faits pour le rétablissement de l’ordre dans la ville de Schelestadt; elle décrète que le roi sera supplié de faire passer incessamment dans ladite ville, s’il n’y a déjà été pourvu, des troupes de ligne en nombre suffisant pour y maintenir la police et l’exécution des mesures qui seront ci-après ordonnées ; que par-devant le tribunal ordinaire, ayant connaissance des affaires criminelles à Colmar , il sera informé des troubles,, émeutes et violences générales et particulières qui ont eu lieu à Schelestadt, depuis son décretdu 8 juin dernier, et notamment les 31 juillet et jours suivants, pour être, les auteurs, fauteurs et complices desdits troubles, poursuivis et jugés conformément aux ordonnances. L’Assemblée renvoie au directoire du département du Bas-Rhin la connaissance de la validité ou nullité des dernières élections de la municipalité de Schelestadt,pour par lui, sur le vu des informations qu’il aura faites, et d’après l’avis du district de Benfeld, être statué ainsi qu’il appartiendra ; et cependant l’Assemblée lait provisoirement défense à M. Herremberger, et autres se prétendant élus officiers municipaux de ladite ville, d’y exercer aucune fonction publique, jusqu’au jugement des contestations ; autorise, en conséquence, les commissaires déjà nommés, à continuer leurs fonctions aux termes de son décret du 8 juin, et à gérer et administrer par intérim les biens communs ; comme aussi à faire procéder à la reddition des comptes de tous les administrateurs desdits biens qui sont en retard de les rendre, pour être lesaits comptes discutés, clos et arrêtés, s’il y a lieu, en la manière accoutumée. L’Assemblée ordonne que son Président se retirera par-devers le roi, pour le prier de sanctionner le présent décret et d’en ordonner la prompte et entière exécution. » M. Rewbell. J’adopte le projet de décret proposé , j’observe seulement qu’une de ses parties ne me paraît pas claire. Il y a à Colmar deux tribunaux, l’un est de l’ancien régime, et le beau-frère de M. Herremberger en est le greffier. D’ailleurs, ces tribunaux sont étrangers au département du Bas-Rhin. Je demande, et tous les députés d’Alsace le demanderont avec moi, que la municipalité de Strasbourg soit substituée au tribunal de Colmar. Cette municipalité a la justice ; elle a toute la force nécessaire pour l’exécution de ses jugements. M. Henry {ci-devant de Longuève).Le comité ne s’oppose point à l’adoption de l’amendement proposé par M. Rewbell. M. le Président met l’amendement aux voix. Il est adopté. En conséquence, le décret est rendu dans la teneur suivante: « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, a approuvé le zèle du district de Benfeld, et les efforts qu’il a faits pour le rétablissement de l’ordre dans la vilie de Schelestadt, « Décrète que le roi sera suppliéde faire passer incessamment dans ladite ville, s’il n’y a déjà été pourvu, des troupes de ligne suffisantes, pour lro Série. T. XVIII. 81 y maintenir la police, et l’exécution des mesures qui seront ci-après ordonnées. « Décrète, que par-devant la municipalité de Strasbourg, ayant la juridiction criminelle , il sera informé des troubles, émeutes et violences générales et particulières qui ont eu lieu à Schelestadt depuis son décret du huit juin dernier, et notamment les trente-un juillet et jours suivants, pour être les auteurs, fauteurs et complices desdits troubles et violences, poursuivis et jugés conformément aux ordonnances. « L’Assemblée renvoie au directoire du département du Bas-Rhin, la connaissance de la validité ou nullité des dernières élections de la municipalité de Schelestadt, pour par lui, sur l’écrit des instructions qu’il aura faites, et d’après l’avis du district de Benfeld, être statué ainsi qu’il appartiendra. «Et cependant l’Assemblée nationale fait provisoirement défense au sieur Herremberger, et autres se prétendant élus officiers municipaux de ladite ville, d’y exercer aucune fonction publique jusqu’au jugement des contestations ; autorise . eu conséquence les commissaires déjà nommés à continuer leurs fonctions aux termes de son décret du 8 juin, et à gérer et administrer par intérim les biens communs, comme aussi à faire procéder à la reddition des comptes de tous les administrateurs desdits biens qui sont en retard, de les rendre, pour être lesdits comptes discutés, clos et arrêtés, s’il y a lieu, en la manière accoutumée. « L’Assemblée charge son Président de se retirer par-devers le roi, pour le prier de sanctionner le présent décret et d’en ordonner la prompte et entière exécution. » M. Madler de itlontjau. Je demande l’impression du rapport et du décret, afin d’effrayer u s municipalités qui seraient tentées de prévari-quer. (Cette proposition est accueillie.) (La séance est levée à dix heures et demie du soir.) ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. D’ANDRÉ. Séance du dimanche 15 août 1790 (1). La séance est ouverte à onze heures du matin. M. Buzot, secrétaire , donne lecture d’une lettre de M.de La Luzerne, ministre de la marine, qui se plaint de ce que la municipalité de Lorient s’est opposée à l’enlèvement des poudres qui se trouvent au château de Trisaven; il lit ensuite les délibérations prises par la municipalité de Lorient et le directoire du département de Morbihan qui croient devoir s’opposer à l’enlèvement desdites poudres en alléguant, comme motifs, la crise actuelle et la terreur des invasions des puissances étrangères sur le territoire delà France. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 6 [Assemblée nationale.} ARCHIVÉS PAHLEMENTAIRËS. [15 août 1790. j M. Goupil. Il me semble qu’il suffit, pour terminer cette affaire, de charger M. le président d’écrire au directoire du département du Morbihan qu’il ne doit, en aucun cas, apporter d’obstacles à la circulation des poudres lorsqu’elle est ordonnée par le pouvoir exécutif. M. Rewbeü. J’appuie la proposition de M. Goupil et je demande qu’il soit ajouté que les corps administratifs doivent d’autant moins s’opposer à l’exécution des ordres du pouvoir exécutif, que la responsabilité des ministres doit les rassurer. La motion est adoptée. En conséquence, le président est chargé d’écrire au directoire du Morbihan et à lu municipalité de Lorient de ne pas s’opposer à l’enlèvement des poudres. M. Buzot, secrétaire , communique les extraits d’une lettre renvoyée à l’Assemblée par le ministre de la marine, lettre par laquelle M. deGlan-dèves, commandant de la marine à Toulon, se plaint de ce que l’assemblée des électeurs requiert qu’il soit délivré aux citoyens une partie des armes emmagasinées dans les arsenaux de la marine. Il expose que, dans un moment où toutes les puissances maritimes arment avec la plus grande activité, il est impossible de laisser nos vaisseaux dépourvus. M. Bouche. Les armements des puissances voisines ne sont que trop réels et j’ai reçu par le courrier d’hier, une lettre de la municipalité de Yaltauris qui me prévient qu’on a vu sur l’autre rive du Yar un train considérable d’artillerie, de cavalerie, enfin une armée prête à agir. Cette municipalité observe qu’il serait facile à ces troupes de bombarder la ville d’Antibes. Elle demande des armes pour les citoyens qui, connaissant bien les lieux, se promettent de recevoir l’ennemi de pied ferme. M. Malouet. La lettre de M. de Glandèves demande une prompte décision. Yoici le projet de décret que je vous propose : « L’Assemblée nationale décrète que les corps administratifs, lorsqu’il leur sera demandé des armes pour les municipalités, ne pourront eux-mêmes réclamer des commandants ou administrateurs de la marine, les armes destinées à l’armement des vaisseaux de ligne, frégates et autres bâtiments de guerre. » (Ce projet de décret est mis aux voix et adopté.) M. Voldel. Je vous apporte la contre-partie des mauvaises nouvelles que vous donne M. Bouche. Vous verrez par une adresse de la garde nationale de Montpellier que le patriotisme est toujours la garantie la plus puissante contre les menées du dehors ; cette adresse est ainsi conçue : « Messieurs, au bruit de la nouvelle désastreuse qui vient d’éclater, tous les cœurs se soulèvent d’indignation, et ne respirent que vengeance. Il est donc vrai que les ennemis du bien public, désespérés de ne pouvoir troubler la paix intérieure du royaume ont formé le détestable complot de nous livrer aux mains des puissances étrangères-« De vils esclaves de la tyrannie se préparent à porter le feu, la flamme dans le sein de la France ; mais ne savent-ils pas qu'avant d’y pénétrer, il faut qu’ils renversent le mur d’airain que les gardes nationales ne cesseront de leur opposer ? « Un seul cri de la patrie alarmée suffira pour faire voler à son secours des milliers de défenseurs réunis aux braves Parisiens ; animés par leur exemple, ils s’empresseront de prouver que la valeur française n’a point dégénéré depuis qu’elle marche sous les drapeaux de la liberté. « Vous le savez, Messieurs, la garde nationale de Montpellier fut la première à qui le patriotisme inspira le noble dessein de prendre les armes, elle brûle de s’en servir contre les ennemis de la nation ; et c’est aujourd’hui pour satisfaire l’ardeur de son zèle, qu’elle vient solliciter, avec la plus vive impatience, l’honneur d’envoyer un détachement sur les frontières, où les dangers de la patrie appelleront son courage : c’est sur le champ de bataille qu’elle cimentera de son sang le serment qu’elle a fait de vivre libre ou mourir. « Collationné sur l’original par nous, secrétaire de la garde nationale de Montpellier. « Signé : FloüTJER. » (L’Assemblée donne de vifs applaudissements à cette adresse et décide que son président écrira à la garde nationale de Montpellier pour lui exprimer sa satisfaction.) M. Buzot, secrétaire, fait lecture de l’extrait des pièces suivantes : Délibération prise unanimement dans la section des Enfants-Rouges , le 12 de ce mois, portant improbation et désaveu de la démarche faite le 10, à l’Assemblée nationale, par les représentants provisoires de la commune de Paris, comme tendant à égarer le patriotisme du peuple de cette ville. Adresse du district de La Rochefoucauld, contenant l’expression de sa reconnaissance, de son attachement à la Constitution, de son zèle pour l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale et de son amour pour le meilleur des rois. Adresse du district de Douai, qui assure l'Assemblée de son dévouement absolu à l’exécution de tous ses décrets. Adresse du conseil général de la commune de Yallauris, qui demande des armes et des munitions de guerre pour défendre la côte et la rade du golfe Juan. Deux lettres écrites, l’une le 2 du présent mois par le procureur général syndic du département des Pyrénées-Orientales à la municipalité de Cette, et l’autre le 4 par cette dernière municipalité à celle d’Avignon, lesdites lettres contenant avis de quelques mouvements dans la Méditerranée. Ces deux pièces et celles venues de Vailauns ont été renvoyées au comité diplomatique. M. le Président. M. Malouet demande. la parole pour faire une motion sur le décret de prise de corps , lancé par le parlement de Paris, le 25 mai 1781, contre l'abbé Raynal au sujet de son ouvrage intitulé : « Histoire philosophique et politique de l'établissement et du commerce des Européens dans les deux Indes. » L’Assemblée décide qu’elle entendra la motion de M. Malouet. » M. Malouet. Messieurs, lorsqu’on vous a dit, dans cette tribune, Franklin est mort ! vous vous êtes empressés d’honorer sa mémoire. Je viens vous rappeler aujourd’hui que parmi nos conrï-(1) La motion de M. Malouet est incomplète au Moniteur.