SÉANCE DU 2e JOUR DES SANS-CULOTTIDES AN II (JEUDI 18 SEPTEMBRE 1794) - Nos 6-9 251 Une foule d’aristocrates, de fédéralistes n’est plus en arrestation, ces monstres lèvent déjà la tête, ils se réunissent avec leurs semblables, les nobles, les prêtres, pour étouffer la liberté. Hâtez vous Représentans, de donner la plus grande force au gouvernement révolutionnaire, les aristocrates ne méritent aucun ménagement, toujours ils seront les ennemis de la République, toujours ils forment des complots pour l’anéantir ; le royalisme est dans leur cœur, ils ne changeront pas de caractère. Représentans, maintenez dans toute sa force le décret qui exclut les ci-devant nobles, les prêtres de toutes fonctions publiques : dès son enfance, on a dit au noble qu’il devoit être distingué des autres hommes, ces idées cuites dans son cerveau, ne peuvent s’effacer ; le prêtre a professé et professe les principes de la religion romaine, cette religion ne peut en souffrir d’autres; ses prêtres ne seront donc jamais républicains. Armez-vous donc, Représentans, de la plus grande sévérité contre les nobles, les prêtres, les modérés et tous les aristocrates; que les foudres de la Montagne éclatent de toutes parts pour réduire en poudre tous les ennemis de la chose publique. (, Suivent les signatures ) (7) 6 Pétition des citoyens de Beaune [département ?], qui demandent que la réquisition des porcs gras ne puisse pas tomber sur les individus qui n’en ont qu’un, et qui n’ont d’autre bien que leur travail. Renvoyé au comité de Salut public (8). 7 La société populaire de Réome [ci-devant Moutiers-Saint-Jean], département de la Côte-d’Or, applaudit au supplice de Robespierre, remercie la Convention d’avoir rendu à leurs familles nombre de patriotes incarcérés, demande que la presse soit libre comme la pensée, et propose des mesures pour empêcher les abus qui ont lieu dans le commerce des bestiaux. Renvoyé au comité de Commerce et Ap-provisionnemens (9). 8 La société populaire de Montréjeau, département de la Haute-Garonne, rend (7) J. Mont., n° 147. (8) P.-V, XLV, 318. (9) P.-V., XLV, 318. un témoignage honorable à la conduite du représentant Dartigoeyte, et demande avec instance que ses pouvoirs soient prorogés. La Convention décrète l’insertion de l’adresse au bulletin, et passe sur l’objet de la pétition à l’ordre du jour, motivé sur les précédens décrets (10). Une société populaire du département de la Haute-Garonne rend témoignage à la conduite qu’a tenue le représentant du peuple Dartigoeyte dans ces contrées où il était la terreur de l’aristocratie. Elle termine par demander que les pouvoirs de Dartigoeyte soient prorogés. La Convention passe à l’ordre du jour sur cette demande motivé sur ses décrets ainsi que sur une pareille formée par la société de Lons-le-Saunier en faveur du représentant qui est dans ses murs (11). 9 La société populaire de Marat-Fru-vaisne [ci-devant Château-Porcien], département des Ardennes, écrit à la Convention nationale que les citoyennes de tout âge se disputent l’honneur de travailler au soulagement et à l’entretien des soldats républicains. Elle l’invite à demeurer à son poste, à terrasser l’hydre de l’aristocratie, à punir tous les traîtres et les conspirateurs. Elle lui annonce qu’elle a envoyé à l’administration du district de Rethel, pour les défenseurs de la patrie, 71 chemises, une paire de draps, 2 cols de basin, 8 livres de charpie, et en outre 2 paquets de la même matière, 6 paires de souliers, une paire de demi-guêtres, 3 gibernes, 2 casques, 2 sabres, un fusil et un pistolet, 12 livres de balles, 23 pantalons d’étoffe, 20 L en assignats, 2 paires de boucles d’argent à souliers et 3 paires à jarretières ; enfin, qu’elle a fourni un cavalier montagnard tout équipé. Mention honorable, insertion au bulletin (12). [La société populaire de Marat-Fruvaisne, ci-devant Château-Porcien, à la Convention nationale, le 10 fructidor an II\ (13) Citoyens Représentans Tandis que nos frères d’armes poursuivent les tyrans coalisés jusqu’à dans leur sombre repaire ; tandis qu’ils font mordre la poussière à leurs vils satellites, à ces milliers d’esclaves enrégimentés et immolés au caprice de leur (10) P.-V., XLV, 318-319. Décret n° 10 943. Rapporteur : Louchet. (11) J. Fr., n° 724 ; M.U., XLIII, 523 ; Moniteur, XXI, 789. L’adresse de Lons-le-Saunier est mentionnée ci-après, Archiv. Parlement., 2e jour s.-c., n° 19. (12) P.-V., XLV, 319. (13) C 318, pl. 1297, p. 5. 252 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE ambition; tandis que d’une main, ils travaillent à purger la terre de la liberté, des monstres qui la désolent ; de l’autre, la patrie, cette intrépide pourvoyeuse s’occupe sans cesse à rendre plus supportables les fatigues de la guerre, en procurant de tous cotés à ses braves deffenseurs des secours de tout genre. L’humanité est l’appanage des cœurs sensibles ; elle ne peut se trouver que chés des républicains, chés des François libres et régénérés; cette vertu si méconnue et si peu pratiquée du tems de nos tyrans, est rappellée à l’homme d’une manière innéfaçable dans le grand œuvre du développement de ses droits alors inaliénables et imprescriptibles. L’Europe étonnée est éblouie de nos merveilles ; l’Europe éclairée et pour ainsi dire asser|/m de mot illisible] rend hommage à notre générosité, et à notre constance, retentie de nos largesses et de nos sacrifices. C’étoit autrefois (préjugé esclave) auprès de certains une espèce de honte, de respect humain de manier pour d’autres que pour soy, l’aiguille et le cizeau ; aujourd’huy tous à l’en-vy veulent concourrir suivant son art et son talent à sauver la patrie. Desja dans Marat-Fruvaisne ci-devant Château-Porcien, des citoyennes de tous âge se disputent l’honneur de travailler au soulagement et à l’entretien des soldats républicains, toutes demandent de l’ouvrage, toutes veulent être de l’atellier; la manœuvre est insuffisante et ne peut satisfaire à tant d’empressement ; de jeunes filles incertaines à qui tombera le travail de leurs mains, le cœur tendrement émû façonnent la toille en chantant leur amour et le retour glorieux de l’objet désiré. Les mères apprennent à leurs enfans desja grands qu’ils ont des frères sur les frontières occupés à briser les chaines de l’esclavage qui dévoient peser sur leur tête, ils pleurent de joie et voudroient atteindre l’age des combats, celui de voler au champ de Mars, et de Bellonne; ils offrent alors à la patrie le fruit de leur débiles mains, en extrayant d’un linge mûr et sans consistance de petits filemments de la charpie pour resserrer les playes et refermer les honorables cicatrices de nos guerriers, marque glorieuse de leur courage et de leur bravoure. Tant de dévouement, un spectacle si touchant, des scènes si attendrissantes se passent dans la commune de Marat-Fruvaisne et se répètent au milieu des cris mille fois répétés de Vive la République, vivent la Convention nationale et les cœurs sensibles et généreux. C’est dans le sein de la société populaire que chacun vient déposer ses dons, foible marque de sa re-connoissance envers les deffenseurs de la patrie ; empressée de servir au plus vite l’humanité souffrante, la société populaire de Marat prévient donc la Convention nationale qu’elle fait parvenir en ce jour au dépôt du district de Réthel, savoir : 1°. Onze chemises. 2°. Une paire de souliers. 3°. un fusil et un pistolet. 4°. vingt livres en assignats, et huit livres de charpie, qu’elle joint au premier envoy des effets suivants, savoir : 1°. Soixante chemises. 2°. une paire de draps. 3°. deux cols de basin. 4°. deux paquets de charpie. 5°. cinq paires de soulliers. 6° une paire de demie guêtre. 7°. trois gibernes, deux casques et deux sabres. 8°. deux paires de boucles d’argent à souliers et trois paires à jarretière. 9°. douze livres de baies de différens calibres. 10°. vingt trois pantalons d’étoffes envoyés au premier bataillon des Ardennes, plus un cavalier Montagnard tout équippé dans le 10e régiment dragon. Courage, braves représentans, restés fermes à votre poste, continués de terrasser l'Indre de l’aristocratie, de découvrir les conspirateurs, de punir les traitres, et tous les Catilina modernes et que nos intrépides républicains ne posent les armes qu’aprés avoir forcé les nations détrônées à se resaisir de leurs droits, à être souveraines, indépendantes et heureuses. Vive la République. Faubery, président, Dehan, secrétaire. 10 Le citoyen Marie Laugier fait hommage à la Convention nationale d’un ouvrage où il présente le spectacle du triomphe de la vertu républicaine, livrée à elle même, sur le crime royal secondé par les factions qu’il soudoie : la musique est du citoyen Champein. Mention honorable de l’hommage, insertion au bulletin (14). Le citoyen Marie Laugier, rue Dominique, section Fontaine-Grenelle [Paris], fait hommage à la Convention nationale d’un ouvrage qui a pour titre : Les épreuves du républicain, ou l’amour de la patrie, essai patriotique, en trois actes, mêlés de chants (15). 11 Adresse des sans-culottes composant la société de la Liberté et de l’Egalité de Mont-Arrast [ci-devant?], département du Gers : ces citoyens expriment à la Convention nationale leur reconnois-sance pour son intrépidité et la confiance inébranlable contre les ennemis de la patrie. Mention honorable, insertion au bulletin (16). 12 Les citoyens de la commune d’Aire, département du Pas-de-Calais, applaudissent aux grandes mesures prises pour (14) P.-V., XLV, 319. Moniteur, XXI, 793. (15) Bull., 6 vend, (suppl.). (16) P.-V., XLV, 319.