378 [États gén. 1789. Cahiers.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Forcalquier.j fet; outre l’augmentation des frais, on y trouve encore l’inconvénient du défaut absolu de toute justice pendant plus de la moitié de l’année, et cependant l’intérêt de la justice exige que cette procédure soit faite dans l’instant. Il importe, d’un autre côté, que l’attentat soit réparé le plus tôt possible, les retards de la justice sur les objets de cette espèce pouvant souvent causer les plus grands désordres. C’est notamment sur les objets qu’on vient de parcourir que la communauté d’Allos désirerait que le pouvoir et que le ministère de ses consuls, dans l’ordre delà juridiction qui leur est confiée, fussent remplis ; elle réclame à cet effet les bontés et lq justice du souverain. Ces motifs n’ont en vue que l’intérêt de l’babitation; elle sent bien que les causes à l’égard desquelles le ministère des consuls serait ampli é aurait un tribunal de plus à subir, parce que l’appel en serait porté des consuls au préfet, mais elle en serait bien dédommagée parla possession d’un tribunal local qui serait toujours prêt à opérer à moindre frais et qui laisserait les habitants d’Allos sans crainte sur l’interruption de la justice, dans le cas où le secours des tribunaux est tout à la fois le plus urgent et le plus nécessaire. L’inconvénient d’avoir un tribunal de plus à franchir ne peut frapper que contre ces plaideurs obstinés. L’avantage d’avoir la justice à moindre frais et d’être assuré au besoin de sa protection l’emporte sur tous les autres objets qui peuvent être mis en considération dans les cas de cette espèce, s’il est possible surtout que cette justice s’administre sans le ministère des procureurs. Les habitants de la communauté d’Allos pourraient-ils ne pas espérer ce qu’ils demandent? Un Roi qui s’occupe du bonheur public ne sera pas insensible à leurs réclamations; leurs espérances sont dans son cœur; pourraient-ils les former sous de meilleures auspices que dans le moment où il ne veut s’entourer de son peuple que pour le rendre heureux? Signé Honorât, député; Jaubert, député. Paraphé, ne varietur , l’assemblée tenant... Signé Curault. DOLEANCES De la communauté de Chatelard, vallée de Barcelonnette. Nos doléances sont, en abrégé, qu’étant dans un pays des plus âpres, des plus froids et des plus affreux du monde, pays horrible, hérissé de montagnes à perte de vue et de rochers escarpés qui rendent nos avenues presque inaccessibles, pays où les rivières, les ravins et les gaves occupent presque tout ce qu’il y a de bon pour la culture, où nous sommes assiégés par la neige, jusqu’à six mois de l’année, lesquels nous sommes réduits à passer dans de méchantes écuries, avec les animaux pour être gardés de la gelée par la chaleur de leur haleine, pays où ces neiges sont si fréquentes et si abondantes, qu’elles ont ordinairement demi-toise de -hauteur ou même plus, lesquelles se mettant en coulées affreuses, désolent, dévastent, occupent et engravent les campagnes capables du peu de récolte que la terre promet à une très-pénible culture, récolte qui consiste strictement en grains, seigles, orges, avoines, bien peu de froment, point de fruits d’aucune espèce, point de vin, point de bière, n’étant notre nourriture ordinaire, pour la plupart, que de la soupe d’orge etd’avome, avec des herbes en potage avec un peu de pain bis, notre soûl au moins de l’eau fraîche et cristalline, tout le reste ne venant qu’à grands frais de l’étranger, ce qui force une grande partie de nos habitants à s’isoler, à se répandre de part et d’autre dans le pays étranger, pour vivre et pour trouver moyen de gagner avec d’inconcevables peines de quoi payer les surcharges dont ils se trouvent oppressés, fatigués par les dîmes, les tailles, les taux de capitations, contrôles et les entretiens personnels en tout genre, pays où les pauvres habitants sont sans cesse harcelés de pétitions et répétitions des droits des individus, des famillesj régis par une justice longue, attachée superstitieusement aux formes de procédures pour raison et chicane desquelles le fond est souvent perdu de vue parmi des labyrinthes où les parties sont dévorées en frais jusqu’aux os avant de recevoir justice. C’est pourquoi nous supplions très-humblement Sa Majesté d’avoir égard a nos misères, au moins en ne tes augmentant pas en tant qu’il lui sera ossifile par un surcroît d’impôt, mais bien pren-re l’argent où il est, c’est-à-dire dans les coffres de tant de nobles et de riches magistrats, lesquels à leur aise ont tout en abondance, et qui font de votre pauvre peuple leurs vassaux à leur plaisir. Mais, sur toute chose, nous supplions très-in-stammeüt Sa Majesté qu’il lui plaise et daigne ordonner que tout le sol de la France, pays exactement et justement taillé, ait sa juste quote-part de toutes les impositions communes et utiles à l’État, nous soumettant néanmoins très-humblement à tout ce que sa bonté paternelle trouvera bon d’ordonner. Ce n’est pas, au reste, que nous souhaitassions pouvoir faire passer en détail toutes les dimensions de nos misères sous vos yeux; néanmoins nous nous contenterons de dire avec respect : Ah ! si le Roi dont nous admirons l’insigne bonté, dont l’excès a prévenu nos doléances, pouvait le savoir, mais une juste pudeur, et l’intime respect dont nos cœurs sont remplis pour sa personne sacrée ne nous permet pas de les amplifier davantage, de peur d’être indiscrets, ou d’attrister, de plaire ou louer le cœur si noblement paternel d’un souverain si juste, si prévenant et si bon, auquel nous devons craindre avec raison de donner le moindre déplaisir, car nous souhaiterions bien plutôt être capables de pouvoir contribuer à sa satisfaction et sa réjouissance par les protestations les plus sincères de notre dévouement à son service, et c’est ce que nous souhaitons faire maintenant pleins de joie de lui rendre à cette heure nos hommages, et de ce que l’occasion nous procure le bonheur inouï de lui témoigner pour toujours nos respects et nos reraercî-ments sur les présents effets d’une bonté inouïe et si grande enfin qu’elle surpasse toutes nos atteintes; aussi souhaitons-nous de tout notre cœur la conservation de sa personne auguste et sacrée de même que de son illustre famille, sous la domination de laquelle nous souhaitons, désirons et atten-f dons in eternum manere, lui laissant maintenant le soin de pourvoir paternellement à tous nos besoins. Nous dirons sans cesse en action de Vive le Roi ! Vive le Roi ! Vivat Rex ! Vivat Rex ! Signé Jean Caire, Pierre Chapenel, Joseph Reynauld, Jean Jean, Joseph Plesant, Joseph Arnaùld , Jacques Jean, André Desdiers, Pierre Cottier, Pierre Renaud, Pierre Plesant, Jean-Baptiste Chapenel, ierre-Jacques Cottier, Pierre Renaud, Pierre Plesant, Jean-Baptiste Chapenel, Sébastien Langier, Pierre Cottier, Antoine Plesant, consul ; Joseph Jean, consul ; Pierre Cottier, défenseur ; de Val- (États gé£ 1789. Cahiars.l ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Forcalqnier. 379 lancau, greffier ; Joseph Plesant, député; Joseph Chapenel, député. Paraphé, e varietur, l’assemblée tenant. DOLÉ4NCES particulières De la communauté du Lauzet. La communauté du Lauzet est la plus petite, la plus pauvre et la moins favorisée, par sa situation, de toutes celles de la vallée de Barcelonnette; son terroir, partout escarpé et précipiteux, occupé par les torrents et la rocaille , est traversé dans la longueur de deux lieues par le chemin royal, d’où dépend toute la communication avec le reste du royaume. Il n’est point d’années où les eaux pluviales et la fonte des neiges ne causent les plus grands ravages et rendent l’entretien de ces chemins d’autant plus onéreux qu’il en est plus fréquent. Souvent on a vu le commerce intercepté et le reste de la vallée affamé de tous les comestibles de première nécessité que son sol ingrat lui refuse ; aussi regarde -t-on avec raison cet entretien comme une des causes qui retiennent cette communauté dans l’état de misère et d’appauvrissement qui la distingue; Dans tous les temps elle a réclamé un secours, ou tout au moins le concours des autres communautés de la vallée, pour l’aider à supporter cette charge. L’utilité générale et l’absolue nécessité de ces chemins et l’excessive disproportion de ses dépenses annuelles pour cet objet, et ses forces combinées avec les dépenses que sont en cas de faire plusieurs communautés, qui, quoique la moitié plus considérables, n’ont, par leurposition, pas la dixième partie des chemins à entretenir, à son impuissance généralement reconnue, sont les titres de sa réclamation. Enfin, déjà soumise à l’entretien de trois ponts en pierre, ou en bois jetés sur la rivière d’Hubaye pour son utilité particulière, lui continuer le fardeau entier de ses chemins, c’est lui rendre sa ruine inévitable, c’est l’anticiper • enfin, c’est inviter ses habitants à l’abandon d’un sol sur lequel on est déjà étonné qu’ils aient pu s’arrêter silongtemps. Signé Régnier, député; Vigne, député. Paraphé, ne varietur, rassemblée tenant. Signé Cu-rault. DOLÉANCES PARTICULIÈRES De Revel. Les députés de Revel, chargés de dresser les réclamations de leur communauté, Disent que d’après la connaissance qu’ils ont eue des doléances dressées par les commissaires de la municipalité de Barcelonnette, qui portent sur tous les objets qui intéressent en général la vallée, ils bornent leurs réclamations à un objet qui leur est particulier et prennent la liberté de le mettre sous les yeux de Sa Majesté dont ils implorent la justice. La communauté de Revel remontre qu’il a été accordé par Sa Majesté à la vallée de Barcelonnette la somme de 180,000 livres en dédommagement des fournitures faites aux dernières guerres, et comme il fut ordonné que cette somme fût employée aux réparations des chemins et autre utilité publique à l’avantage du pays, la communauté de Revel avait lieu d’espérer d’être traitée comme le reste de la vallée dans les réparations ordinaires aux chemins publics ; elle a été frustrée dans ses attentes et a eu la douleur de se voir privée d’une propriété commune entre elle et la communauté de Méolans qui serait devenue très-considérable. Un particulier a fait offre de réparer le chemin de l’étroit de Revel, en lui accordant la concession du gravier qu’il gagnerait sur la rivière d’Habaye en y établissant les digues nécessaires pour contenir la rivière et le chemin, La demande de ce particulier a été accueillie par M. l’intendant, sous le droit de préférence pour les communautés de Méolans et de Revel qui, après avoir bien examiné la dépense à faire et Davantage qu’elles pourraient en retirer, se sont déterminées à abandonner leur terrain dans le temps qu’elles avaient lieu d’espérer que les dépenses occasionnées par cette répartition se raient prises sur les 180,000 livres accordées, comme l’ont été celles faites aux communautés du Lauzet, Méolans, Barcelonnette et Chatelard, La communauté de Revel observe qu’elle est obligée, avec la communauté de Méolans, à l’entretien de leur pont, qui traverse )a rivière d’Habaye le long de la grande route, que le pont a besoin d’être refait à neuf, que les communautés qui sont obligées à son entretien sont dans l’impuis-r sance de fournir à la dépense qu’exige sa réfection, qui ne pourra être faite qu’en pierre, attendu qu’on ne trouvera qu’avec peine et à une distance très-considérable le bois qui y serait nécessaire, ce qui rendrait la dépense presque aussi considérable d’une façon que d’autre. La communauté de Revel espère des bontés de Sa Majesté qu’attendu le droit qu’elle a sur les 18(>,000 livres accordées à la vallée dont elle n’a encore ressenti aucun bienfait, elle voudra bien ordonner la réfection de ce pont sur cette somme, qui, par sa chute et l’impuissance des communautés a le rétablir, intercepterait le chemin royal et toute communication dans la vallée. Signe Maurin, Anticq, consuls et députés. Paraphé, ne varietur , Rassemblée tenant. DOLÉANCES PARTICULIÈRES De Tournoux et Gleisolles, La communauté de Sain t-Pauly divisée en quatre paroisses, aune municipalité composée de quatre consuls et de deux défenseurs auxquels est attribuée la juridiction de lapoliceetde Pobserva-tion des statuts municipaux. La paroisse de Tournoux et Gleisolles, éloignée d’une lieue de Saint-Paul , forme Une partie considérable de cette communauté ; elle ma que ses communaux particuliers , que leur position sépare de ceux de la communauté, et qui néanmoins se trouvent soumis à la même loi municipale dont l’observance est le thermomètre de leur existence. L’éloignement en été, et la grande quantité de neige qui couvre le terroir en hiver, en interceptent souvent la communication, dérobent toujours à la connaissance des consuls, seuls chargés d’y veiller, les contraventions qui se commettent dans les quartiers les plus précieux à conserver, et la licence targuée de l’impunité, en produisant la destruction des bois qui dominent les maisons et les fonds , ne laisse entrevoir que leur ruine la plus prochaine par les coulées de neige pendant l’hiver et l’irruption des eaux pluviales pendant l’été. L’attention journalière d’un consul pris chaque année dans leur sein, dont sa conscience et son