[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |gfrIî“emb?e 1793 135 avait de plus robustes soldats. Un volontaire de 16 ans du bataillon du Cher en a désarmé quinze. Nous avons demandé les noms des oraves qui ont sauvé le fort, nous vous les ferons passer, afin que la Convention nationale ré¬ compense une des plus belles défenses que l’on ait vue depuis la guerre. Tous jugez de quelle importance était pour l’ennemi la possession du fort de Bitche, et surtout dans le plan qui s’exécute. « Nous allons nous rendre à Hornback, à l’armée du général Taponier; de là nous irons à Deux-Ponts où. l’armée du général Hoche, di¬ rigée en chef par Pichegru, est entrée hier. La République a la fortune de César et la mérite mieux. Vous voyez qu’elle est victorieuse par¬ tout. Nous espérons que les armées ne se ralen¬ tiront point. Nous ne sommes point restés un demi-jour dans le même endroit depuis le mou¬ vement. La surveillance la plus rapide est exercée, nous vous tiendrons parole, nous t⬠cherons qu’on ne s’arrête point que l’ennemi ne soit exterminé, sa retraite doit être dans le Rhin si tout le monde fait son devoir. « Saint-Just; Lebas. « A Bitche, le 1er frimaire l’an II. » D. Lettre des représentants du peuple commissaires à l’armée de l’Ouest (1). Minute. Les représentants du peuple, délégués par la Convention nationale près l’armée de l’Ouest, à leurs collègues, membres du comité de Salut public. « A Rennes, le 6e jour de la 3e décade du 2e mois de l’an II de la République fran¬ çaise, une et indivisible. « Citoyens collègues, « C’est au moment où nous allions vous ins¬ truire de notre marche et de nos combinaisons* militaires que nous recevons à 7 heures du soir, aujourd’hui 26 brumaire, votre lettre datée du 21 même mois, ainsi que de l’arrêté du comité qui était joint (2). Nous avons vu avec plaisir que presque toutes les dispositions que ren¬ ferme cet arrêté étaient absolument les mêmes que celles que nous avions concertées et dont la majeure partie ont déjà été mises à exécution. « Aussitôt que notre armée a été en état de marcher, nous sommes partis d’Angers pour nous porter à Laval, sur deux colonnes, qui y sont arrivées le même jour. Le lendemain nous devions aller coucher à Vitré pour de là (1) Archives nationales, carton AFn 277, pla¬ quette 2323, pièce 40. (2) Voy. ci-après, p. 136, la pièce justificative E. M. Aulard, dans son Recueil des actes et de la corres¬ pondance du comité de Salut public (t. 8, p. 468) ne donne qu’une analyse de cette lettre. marcher sur Fougères, mais par la négligence des employés dans les vivres, l’armée ayant manqué de pain pendant deux jours, on fut obligé de coucher une nuit de plus à Laval, ce qui ne nous permit d’arriver à Vitré que le 23. Là, par le résultat d’un conseil de guerre tenu entre les généraux des' deux armées des côtes de Brest et de l’Ouest, il fut arrêté que cette dernière, au lieu de marcher sur Fougères se rendrait à Rennes pour de là se porter en masse, et sur deux colonnes, du côté de Dol où nous savions que les brigands étaient réfugiés. Notre marche a été rapide de Vitré à Rennes; les soldats de la liberté ont fait dix lieues sans s’arrêter pendant une pluie continuelle, dans la boue, quoique une très grande quantité fussent sans souliers, et d’autres en sabots, ce qui ne les empêchait pas de chanter le long de la route des airs patriotiques, et de répéter à plusieurs reprises le cri chéri de : Vive la Répu¬ blique ! « Deux heures après notre entrée dans Rennes, un conseil de guerre a été tenu entre les généraux des deux armées. Vous verrez par la copie ci -jointe du plan (1) qui y a été arrêté, combien les vues du comité de Salut public, quoique à de longues distances, s’accordaient avec celles que le conseil de guerre jugea les plus propres à assurer le succès de nos armes contre les rebelles fugitifs, ce qui prouve évi¬ demment que quand on désire le bien public on ne diffère jamais d’opinion sur les vrais moyens de l’établir. Notre jonction s’est donc opérée facilement avec l’armée des Côtes de Brest. L’harmonie qui paraît régner entre les officiers et les soldats de l’une et de l’autre armée est pour nous le présage des succès qui vont cou¬ ronner leurs travaux. Au moment où les co¬ lonnes ainsi mélangées allaient prendre la direc¬ tion que la nouvelle de la prise de Pontorson et d’Avr anches par les rebelles avait déterminé qu’on leur donnât, un courrier qui nous est dépéché par nos collègues Prieur de la Marne et Jean -B on -Saint -André, nous apprend que les rebelles se sont portés sur Granville, qu’ils assiègent cette ville en cet instant et qu’il faut que les deux armées de l’Ouest et des Côtes de Brest réunies viennent promptement au secours de cette place. A l’heure même, nous nous sommes réunis à nos collègues pour requérir de porter toutes nos forces sur Granville, et l’armée tout entière marche en ce moment sur Granville à pas redoublé, dans le meilleur ordre et avec les plus rassurantes dispositions. « Que ne pourrait la liberté sur des hommes qui combattent pour sa défense ! Un très grand nombre de ces généreux soldats sont sans aucune espèce de chaussures; eh bien ! ils vont marcher toute la nuit par de très mauvais che¬ mins, et nous n’avons entendu de leur part aucun murmure. « Dès le premier jour de notre arrivée à Rennes nous avions enjoint à toutes les auto¬ rités constituées de cette commune de requérir de tous les habitants sans distinction les objets nécessaires et indispensables pour l’équipement de la troupe. Cette mesure n’ayant pas produit le résultat que nous devions en attendre, et l’armée ne pouvant marcher faute de chaus¬ sures, alors nous nous sommes nous-mêmes (1) Voy. ci-après, p. 137.1a pièce justificative F 136 [CoôvWHion nationale.] AüClüVES PARLEMENTAIRES. J 4 transportés dans toutes les places publiques, et là, rappelant aux citoyens les devoirs que la liberté leur imposait, nous leur avons déclaré, en présence dé l’armée, que nous regarderions comme suspects et mauvais citoyens tous ceux qui, dans deux heures, n’auraient pas porté à la municipalité, non seulement les souliers qu’ils avaient chez eux, mais encore ceux dont ils étaient chaussés. « Nous leur avons dit, en présence de l’armée, ■qu’il fallait que dans 2 heures ils portassent à la municipalité tous les souliers qu’ils avaient chez eux, même ceux dont ils étaient chaussés, et nous leur avons déclaré que si, ce délai passé, il n’étaient pas tous en sabots, s’il y avait parmi eux d’assez mauvais citoyens pour ne pas donner des chaussures à ceux qui don¬ naient du sang pour les défendre, ils seraient regardés comme suspects, et mis en arrestation et que les soldats seraient autorisés à faire chez eux des visites domiciliaires pour y prendre lestchaussures dont ils avaient besoin. Aussitôt chacun s’est porté en foule à la municipalité pour y déposer les souliers dont ils étaient pourvus et cette opération a eu tout l’effet que nous avions désiré. « C’est une grande vérité, citoyens collègues, qu’il n’y a que les mesures révolutionnaires qui en imposent à nos ennemis et fassent mou¬ voir cette classe d’hommes atteints de torpeur politique. « En résumé, voici le tableau fidèle et exact de notre position et de celle des brigands fugi¬ tifs. En jetant un coup d’œil sur la carte il vous sera facile de voir, citoyens collègues, qu’ils ne tarderont pas à être enveloppés de toutes part s. Ils assiègent Granville, mais on nous assure qu’il y a dans cette place des forces suffisantes pour leur résister si elles veulent se défendre. Ils ne peuvent pénétrer au nord de Granville, la mer les arrête du côté de l’ouest ainsi que les forces que nous avons à Saint-Malo et Dol; au midi, les armées de l’Ouest et de Brest réunies vont tomber sur leurs der¬ rières et leur couper toute retraite, et les troupes du Calvados, rapprochées maintenant de Vire, Villedieu et Mortain, nous assurent à l’est un point respectable de défense. Ainsi notre situa¬ tion militaire ne peut qu’ajouter aux espérances que fait naître la volonté formelle de nos soldats d’achever promptement la destruction de ces brigands. Nous suivrons partout la eolonne républi¬ caine, nous la seconderons de tous nos efforts, nous veillerons nuit et jour pour empêcher la malveillance d’en approcher, pour que toutes les difficultés morales disparaissent, qu’il n’y ait de jalousie dans l’armée que celle de se dis¬ tinguer au combat, pour que les vues du comité de Salut public soient remplies, que la Conven¬ tion nationale soit satisfaite et que la Répu¬ blique triomphe bientôt de eette horde fana¬ tique et rebelle. >» E. Arrêté (1). Extrait des registres du comité de Salut public de la Convention nationale, du vingt-unième (1) Aulard 1 Recueil des actes et de la correspond jour de brumaire, l’an deuxième de la Répu¬ blique française, urne et indivisible. Le comité|de|Salut public arrête ce qui suit : lo. Toutes les forces dirigées contre les rebelles, en deçà de la rive droite de la Loire, seront réunies sous le commandement du général Rossignol. 2°. Ce général rassemblera ses forces, agira en masse, poursuivra les ennemis sans relâche et avec méthode; il ne risquera point d’affaire générale avant le secours qui doit lui arriver, à moins que le succès ne soit presque certain; il entretiendra la correspondance la plus active avec le comité de Salut public. 3°. Le ministre de la guerre donnera les ordres les plus prompts pour renforcer l’armée dirigée contre les rebelles. A cet effet, il y fera passer sans aucun délai quinze mille hommes de l’armée du Nord, sous les ordres du général Duquesnoy. 4°. Le ministre de la guerre donnera de même les ordres nécessaires, tant au général Sepher, qu’au commandant de l’armée de l’Ouest, ainsi qu’à ceux qui sont à la tête des rassemblements armés de l’Orne et de la Sarthe, pour qu’ils fassent marcher sans délai, à la demande du général Rossignol, toutes les forces qui sont à leur disposition. 6°. Le ministre de la guerre fera partir sur-le-champ un officier de confiance, qui se rendra à Alençon et de là à Laval et à Rennes, s’il est possible, et qui dépêchera lui -même des cour¬ riers de ces différents lieux pour instruire le ministre de la position des rebelles et de celle de nos armées. Cet officier continuera lui-même de donner des renseignements sur l’état des choses, en s’approchant de plus en plus des brigands, et oe jusqu’à ce qu’il lui soit donné l’ordre de revenir à Paris. « Signé au registre ; C.-A. Prieur, Carnot, B. Barère, Robespierre, R. Lindet, Billaud - Varenne. Four copie conforme : C.-A. Prieur. dance du comité de Salut public , t. 8, p. 335. Archives nationales, carton AFii 277, plaquette 2323, pièce 39.